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qui ont joué de grands rôles dans cette terrible période de notre histoire; ils veulent savoir ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont dit; ils compulsent des biographies rédigées ou avec trop de brièveté, ou avec mauvaise foi. Je crois que l'on ne peut avoir un aperçu exact de ce qui s'est passé depuis trente ans, que par les actes émanés du pouvoir, les discours et opinions émises à la tribune, les déclarations des puissances européennes, et généralement par toutes les pièces qui se rattachent à notre histoire; ces monumens historiques peuvent seuls guider l'homme avide de connaître la vérite, et jaloux de paraître bien instruit de ce qui a influé sur les destinées de notre patrie. J'ai cru que la réunion de quelques-uns de ces monumens serait une chose curieuse, utile et instructive. On pourra s'assurer de leur authenticité et de mon exactitude, puisque je donnerai les dates précises et la source ou j'aurai puisé.

Ne cherchant pas à faire des volumes, je n'ai voulu rappeler au souvenir de mes concitoyens que les faits les plus saillans, depuis 1789 jus qu'à nos jours.

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Une révolution se prépare dans les principes du gouvernement; elle est amenée par la fermentation des esprits; des institutions réputées sacrées, et par lesquelles cette monarchie a prospéré pendant tant de siècles, sont converties en questions problématiques, ou même décriées comme des injustices.

Les écrits qui ont paru pendant l'Assemblée des Notables, les mémoires qui ont été remis aux princes soussignés, les demandes formées par des provinces, villes ou corps; l'objet et le style de ces demandes et de ces mémoires, tout annonce, tout prouve un système d'insubordination raisonné, et le mépris des lois de l'Etat. Tout auteur s'érige en législateur; l'éloquence ou l'art d'écrire, même dépourvu d'études, de connaissances et d'expérience, semblent des titres suffisans pour régler la Constitution des empires: quiconque avance une proposition hardie, quiconque propose de changer les lois, est sûr d'avoir des lecteurs et des sectateurs.

Tel est le malheureux progrès de cette effervescence, que les opinions qui auraient paru il y a quelque temps les plus repréhensibles, paraissent aujourd'hui raisonnables et justes; et ce dont s'indignent aujourd'hui les gens de bien, passera dans quelque temps peut-être, pour régulier et légitime. Qui peut dire où s'arrêtera la témérité des opinions? Les droits du trône ont été mis en question; les droits des deux ordres de l'Etat divisent les opinions; bientôt les droits de la propriété seront attaqués; l'inégalité des fortunes sera présentée comme un objet de réforme; déjà on a proposé la suppression des droits féodaux, comme l'abolition d'un système d'oppression, reste de la barbarie.

C'est de ces nouveaux systèmes, c'est du projet de changer les droits et les lois, qu'est sortie la pré

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tention qu'ont annoncée quelques corps du TiersEtat d'obtenir pour cet Ordre deux suffrages auxEtats-Généraux, tandis que chacun des deux premiers Ordres continuerait à n'en avoir qu'un seul.'

Les princes soussignés ne répéteront pas ce qu'ont exposé plusieurs bureaux, l'injustice et le danger d'une innovation dans la composition des Etats-Généraux, ou dans la forme de les convoquer; la foule des prétentions qui en résulteraient; la facilité, si les voix étaient comptées par tête et sans distinction d'Ordres, de compromettre par la séduction de quelques membres du Tiers-Etat, les intérêts de cet Ordre mieux défendus dans la Constitution actuelle; la destruction de l'équilibre si sagement établi entre les trois Ordres, et de leur indépendance respective.

Il a été exposé à Votre Majesté combien il est important de conserver la seule forme des EtatsGénéraux qui soit constitutionnelle, la forme consacrée par les lois et les usages, la distinction des ordres, le droit de délibérer séparément, l'égalité des voix, ces bases inaltérables de la monarchie française.

On n'a point dissimulé à Votre Majesté que changer la forme des lettres de convocation pour le Tiers-Etat seul, et appeler aux Etats-Généraux deux députés de cet Ordre, même en ne leur donnant qu'une voix comme par le passé, serait un moyen médiat et détourné d'accueillir la prétention du Tiers

Etat, qui, averti par ce premier succès, ne serait pas disposé à se contenter d'une concession sans objet et sans intérêt réel, tant que le nombre des députés serait augmenté, sans que le nombre des suffrages fût changé.

Votre Majesté a aussi pu reconnaître que la réunion de deux députés pour former un suffrage, peut, par la diversité de leurs opinions, opérer la caducité de leurs voix, et que si la voix caduque est réputée négative, suivant l'usage admis dans les délibérations de divers corps, c'est augmenter les moyens de résistance contre les demandes du gouvernement.

Ces principes ont été développés, et leur démonstration semble portée au dernier degré d'évidence. Il ne reste aux princes soussignés qu'à y joindre l'expression des sentimens que leur inspire leur attachement à l'Etat et à Votre Majesté.

Ils ne peuvent dissimuler l'effroi que leur inspirerait pour l'Etat le succès des prétentions du TiersEtat, et les funestes conséquences de la révolution proposée dans la Constitution des Etats: ils y découvrent un triste avenir; ils y voient chaque roi changeant, suivant ses vues ou ses affections, le droit de la nation; un roi superstitieux donnant au clergé plusieurs suffrages, les prodiguant à la noblesse qui l'aura suivi dans les combats; le TiersEtat qui, dans ce moment, aurait obtenu une supériorité de suffrages, puni de ses succès par ces

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