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DE LA PREMIÈRE ÉDITION.

ENFIN le temps de la justice est arrivé; le grand coupable est tombé sous le poids de l'indignation publique : nous respirons.

Nous attendions ce moment pour dire la vérité. Le moyen de parler, sous un gouvernement qui nous avait tous bâillonnés !

Dans le déluge de maux qui nous a inondés depuis vingt-cinq ans, nous n'avons pas toujours été assez résignés pour bénir la main de la Providence; mais nous n'avons jamais été assez endurcis pour désespérer de sa bonté.

Froissés par toutes les secousses de la révolution, criblés des blessures qu'elle nous a faites, nous avions bien quelquefois le murmure à la bouche; mais nous sentions toujours l'espérance au fond du cœur.

Et comment n'eussions-nous pas espéré un, meilleur sort, quand nous sommes convaincus, par l'expérience de tous les siècles, que tout ce qui est violent ne dure pas; et quand nous avons vu par nousmêmes que les auteurs de nos maux se dévoraient les uns les autres.

Quelle que usurpateurs, quoi qu'ils fassent par leurs promesses mensongères, ou par leurs menaçantes déclarations, qu'ils brisent les presses, qu'ils salarient des flatteurs, qu'ils soient hérissés de baïonnettes, ou resplendissants d'or et de rubans, en sont-ils moins des usurpateurs? Ont-ils cru, avec Domitien, qu'ils nous feraient perdre la mémoire, en nous fermant la bouche? L'usage affreux qu'ils faisaient de leur puissance, n'était pas plus propre à l'éterniser qu'à la sanctifier.

soit l'adresse ou l'audace des

Mais sur quels motifs avaient-ils donc

fondé l'espoir d'en prolonger la durée ? Sur l'attachement de leurs amis, et sur la soumission de leurs victimes.

Grossière illusion! les scélérats ont des complices et point d'amis; et leurs victimes ne leur doivent que haine et vengeance.

C'est en vain qu'à force de crimes et d'impostures ils espéraient échapper à leur inévitable punition. Une main inexorable, une main de fer avait écrit sur leurs fronts décolorés, ces mots: Ils ont tué l'innocent; et au fond de leur cœur une voix importune criait sans cesse : l'assassin périra !

La pourpre et le diadême n'étouffent point les remords, et cent mille baïonnettes ne sont pas des arguments sans réplique.

Tout ce qui n'est fondé que sur la force, doit périr par la force. C'est la loi de la nature, c'est l'action et la réaction.

Un soldat, transfuge de son armée, arrive en France du fond de l'Égypte, trompe

tous les partis qui se partageaient les dépouilles de notre malheureux pays, renverse tous les pouvoirs qui le gouvernaient constitutionnellement, se met à leur place, et s'empare du trône. Et de quel droit? De celui de l'épée. Mais le droit de l'é

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pée est toujours contestable par l'épée. Tous les généraux avaient les mêmes titres que lui; tous pouvaient avoir la même ambition. Qui réglera tous ces droits? Où s'arrêteront toutes ces prétentions?

Devant la constitution, dit-on; faible barrière ! Il n'y a pas un écolier en politique qui ne sache aujourd'hui qu'une constitution dénuée du prestige du temps, ou des secours de la force, est le jouet de tous les partis, le manteau des usurpateurs, et le piége où ne tombent que les sots.

Nous avons vu quatre constitutions tom

ber successivement l'une sur l'autre pendant les huit premières années de la révolution. Les auteurs de chacune prétendaient bien avoir fait un chef-d'œuvre de législation, lorsque chacun de leur successeur a prouvé qu'ils n'avaient fait qu'un chefd'œuvre de sottise.

La constitution que Buonaparte nous offrit à son avénement, n'avait sur celles de ses prédécesseurs, d'autre avantage que d'apporter un changement à notre situation; et, malades comme nous étions, tout changement de situation devait nous paraître un soulagement.

Ce soulagement fut de courte durée, et nous ne tardames pas à nous apercevoir que le despotisme avait remplacé l'anarchie, et qu'au lieu de cinq faibles gouvernants, nous avions un tyran plus sombre que Tibère et plus féroce que Néron.

L'histoire du 18 brumaire, c'est-à-dire

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