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nous nous bornerons à fixer l'attention de nos lecteurs sur une des époques les plus remarquables de ce siècle, où l'on a vu une portion des colonies anglaises s'élever tout à coup au rang des puissances les plus respectables, révolution dont les principes et les conséquences n'ont pas été sans influence sur les évènemens extraordinaires qui se sont depuis passés sous nos yeux.

Une multitude de circonstances, qu'il seroit trop long d'énumérer, et qui, d'ailleurs, n'appartiennent pas à l'histoire particulière de la guerre présente, ayant amené cette grande crise qui a changé, sous tous les rapports, l'état politique de la France; le gouvernement britannique, qui n'étoit pas consolé de la perte de ses colonies de l'Amérique septentrionale, qui ne pouvoit pardonner à la France l'assistance qu'elle leur avoit donnée, et qui avoit si efficacement contribué à leur indépendance, a dû espérer que les troubles inséparables d'une révolution lui présenteroient des occasions favorables pour user de représailles, et accroître sa puissance aux dépens d'une nation rivale.

En effet, l'imprudence avec laquelle quelques membres de la législature française firent déclarer la guerre, d'abord à l'Autriche, et successivement à l'Europe entière, favorisa les vues que l'Angleterre avoit formées sur les Colonies des Indes occidentales.

Les deux plus considérables, la Marținique et St. Domingue, furent attaquées; la première succomba, et la seconde fut livrée à des désordres qui privèrent la France des immenses ressources qu'elle en tiroit annuellement.

Les victoires inattendues des armées françaises ne tardèrent pas à dissoudre une coalition, dont les élémens étoient trop hétérogènes pour qu'elle pût être de longue durée; mais les dépositaires du pouvoir en France commirent alors une grande faute en exigeant, pour gage de la paix, que des puissances, naturellement amies, prissent une part offensive dans la querelle de la République avec la Grande-Bretagne.

L'Espagne et la Hollandé, en déclarant la guerre à l'Angleterre, lui ont offert, de toutes parts, des possessions à envahir, qui

serviront, plus tard, de compensations pour les conquêtes faites sur le Continent, ou de dédommagemens pour les frais de la guerre qu'elle a supportés presque exclu sivement.

Cette faute du gouvernement français, qui, en affoiblissant ses nouveaux alliés, a détruit son commerce et a livré celui de l'Europe entière à ses ennemis, ne fut pas plutôt commise qu'une partie des trésors ét des vaisseaux hollandais fut séquestrée, que l'important mouillage de Ceylan, que la riche colonie du Cap de Bonne-Espérance, devinrent la proie des escadres britanniques.

Tel étoit l'état des choses, lorsque le Directoire mit à exécution le projet de l'expédition d'Egypte. La réputation des généraux, celle des troupes qui y étoient employées, la prise de Malte, le débarquement sur les bords du Nil, les succès contre les Mamelucs fixèrent l'attention publique réveillée d'ailleurs, par le

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souvenir de l'antique splendeur de Thèbes et de Memphis, et plus encore peutêtre par l'idée que l'ancienne route du

commerce de l'Inde pouvoit se r'ouvrir et que des hommes entreprenans, dont le courage, les talens, la patience même avoient été mis à l'épreuve, n'étoient peut-être pas incapables de réaliser en Asie une nouvelle révolution.

Le ministère anglais sentit toute l'importance d'un danger qui pouvoit n'être que chimérique, mais qui, s'il se réalisoit, menaçoit d'attaquer dans sa base la prospérité du commerce, et la source de la richesse nationale. On ne peut douter que dès ce moment, il n'ait formé le projet non-seulement de s'opposer à l'arrivée des Français aux grandes Indes, mais qu'il n'ait pensé dès lors à y assurer sa puissance par la destruction de celle qui ne cessoit de s'opposer à son aggrandissement et qui se montroit, dans toutes les occasions, disposée à servir d'auxiliaire à ses ennemis.

L'importance qu'on avoit attachée dans le tems, à l'ambassade envoyée par Tippo Sayb; les projets qui avoient pu être concertés avec l'ancien gouvernement de France, la certitude que des officiers avoient été envoyés pour exercer les troupes de

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Tippo à la manière des Européens; enfin les propositions faites par le sultan de Mysore au commandant des îles de France et de Bourbon, tout avertissoit les Anglais, que c'étoit dans l'Inde que les coups les plus décisifs pouvoient leur être portés.

Aussi voyons-nous que malgré la sécurité que devoit inspirer au gouvernement l'accroissement de sa puissance dans la presque-île de l'Inde, et la foiblesse des moyens que les Français y pouvoient employer, il saisit cette occasion d'y faire des apprêts de guerre considérables. On y mit autant d'activité, soit en Asie soit en Europe, que si l'Égypte eût été déjà soumise, et que Buonaparte ayant déjà créé une marine sur la mer Rouge, eût franchi les obstacles de cette périlleuse navigation de Suez à Cossir et de Cossir au détroit de Babelmandel, ou qu'après avoir conquis la Syrie, il se fût ouvert par les déserts la route de Bassora. Les premiers ordres donnés par le ministère anglais eurent pour objet de s'assurer de la communication entre la mer Rouge et la mer de l'Inde; une première escadre, partie de Bombay avec des troupes

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