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de moralité de tont individu qui voulait acheter le métier de grand poissonnier. Les femmes ne pouvaient pas exercer cet état, à moins qu'elles ne fussent veuves d'un poissonnier; le poisson non conforme aux conditions requises était confisqué: on ne pouvait en mettre en vente qu'à la porte du Grand-Pont, aux Pierres du roi et aux Pierres des poissonniers. Il était néanmoins permis d'en colporter dans les rues. Les marchands absents pouvaient être remplacés par leurs femmes, leurs enfants ou toute autre personne désignée. Ils étaient exempts de tous droits, mais soumis à la taille et au service du guet. Le maître des cuisines du roi choisissait les prud'hommes chargés de visiter, trois fois par semaine, les lieux où se vendait le poisson, et de faire jeter dans la Seine celui qu'ils jugeaient mauvais (1).

Le commerce des fruits, des légumes, des œufs, du beurre, du fromage, etc., etc., était exercé par la corporation des regratliers, qui cumulaient les attributions des fruitiers et des épiciers de nos jours. Ces diverses denrées étaient déposées, à leur arrivée, sur un marché particulier, entre Notre-Dame et Saint-Christophe, et soumises à l'inspection des agents de l'administration. Il était défendu aux regrattiers, sous peine d'amende, de traiter hors Paris avec le conducteur d'une voiture chargée de comestibles à la destination de cette ville. Les statuts spécifiaient que les achats devaient être mis à la portée du pauvre comme du riche, résultat qu'on ne pouvait obtenir que par l'abondance des denrées et une vente publique accessible à tout le monde. Les couvents de Paris avaient le privilége de vendre sur place les fruits et légumes de leurs jardins aux regrattiers et aux habitants, sans que les acheteurs eussent aucun droit

à payer.

Les regrattiers ou revendeurs de pain pouvaient aussi vendre du sel à mine et à boisseau, de la viande cuite, du poisson de mer, des légumes, des fruits, du poivre, du cumin, de la canelle, de la réglisse et de la cire en pain. Ils débitaient aussi du vinaigre en gros et en détail.

Les cervoisiers ou brasseurs de Paris étaient beaucoup plus anciens que les taverniers, puisqu'il est constaté par tous les historiens que l'usage de la cervoise ou bière précéda de plusieurs siècles celui du vin. Du temps de saint Louis, la cervoise était encore la boisson ordinaire de la ma

(4) Registres des Métiers, page 34.

jeure partie des Parisiens, surtout des artisans et du menu peuple. Les cervoisiers avaient le droit de prendre les compagnons ou apprentis qui leur étaient nécessaires pour leur commerce; ils devaient fabriquer leur bière d'après les indications consignées dans leurs statuts, et s'ils employaient des substances prohibées pour la rendre plus forte, ils étaient passibles d'une forte amende : il leur était défendu de vendre de la bière hors de la brasserie. Celle qui était fabriquée par les regrattiers passait pour insalubre; ils la faisaient colporter et vendre par des apprentis dans des tavernes et dans les lieux hantés par les folles filles. Les prud'hommes cervoisiers avaient mission de saisir cette bière lorsqu'ils trouvaient les apprentis regratliers pendant leur visite. Ils étaient nommés par le prévôt de Paris, qui pouvait les révoquer à volonté (1).

Les cervoisiers étaient les limonadiers du moyen âge; leurs brasseries servaient de lieu de rendez-vous aux jeunes gens et aux colporteurs de nouvelles. Mais ce genre de commerce se trouva insensiblement restreint à d'étroites limites. Le vin devint la boisson dominante, et les tavernes se peuplèrent d'habitués au détriment des brasseries; on y vendait le vin au détail, ou, comme on disait alors, le vin à broche: mais le peuple ne connaissait guère que le vin vermeil, dont le prix était aussi stable que celui du pain. Les statuts des tavernes leur permettaient de le diminuer, mais non de l'augmenter.

Au onzième siècle, le vin était, comme aujourd'hui, la boisson commune de la population parisienne et d'après les registres du Parloir-aux-Bourgeois, il s'en faisait une consommation considérable : c'était principalement par le transport régulier des vins que la hanse ou la corporation des marchands de l'eau tirait parti de ses priviléges. Beaucoup de bourgeois avaient aux environs de la ville des vignes dont ils pouvaient transporter la vendange chez eux sans être soumis aux droits. de péage. L'Yonne, la haute Seine et l'Orléanais fournissaient l'approvisionnement de Paris; c'était au port de la Grève que les taverniers et les bourgeois faisaient leurs achats.

Les tavernes étaient fréquentées principalement par les classes inférieures; elles jouissaient d'une si mauvaise renommée que Louis IX en

(4) Voir les statuts des Cervoisiers, dans le Livre des Métiers d'Étienne Boileau, pag. 28 et 29,

défendit l'entrée sous des peines très-sévères, et pourtant les taverniers formaient une corporation légalement établie, qui avait ses statuts et payait des taxes considérables. Mais la rigueur du saint roi resta sans effet et toutes les classes affluèrent comme auparavant dans les cabarets, qui étaient très-nombreux.

Pour chaque pièce de vin que les taverniers entamaient, ils étaient assujettis à un impôt que percevait le corps des marchands ou le Parloiraux-Bourgeois. Ils furent, dit-on, les premiers, à se servir de crieurs pour annoncer au public qu'ils allaient entamer une pièce nouvelle. L'autorité municipale trouva dans cette institution des criages de Paris, un excellent moyen de constater la perce des tonneaux de vin, afin d'en prélever les droits d'usage. Elle obligea tous les taverniers à prendre un crieur et à lui payer un salaire fixe par jour.

Les crieurs de Paris furent, en quelque sorte, des employés de la prẻvôté, obligés, par le devoir de leur charge, à aller chez les taverniers et à constater la quantité de vin débité par jour. Les cabaretiers trouvèrent cela fort désagréable et surtout fort onéreux; ils se plaignirent au roi, mais le droit de criage fut non-seulement maintenu, mais encore cédé, en 1220, par Philippe-Auguste, aux marchands de l'eau, avec le droit de nommer et de révoquer les crieurs, de tenir les étalons des mesures et d'exercer la basse justice et la police à l'égard des contraventions (1).

Les règlements des crieurs de vin ne furent enregistrés que sous le règne de Louis IX.

On aurait pu les appeler crieurs détaillants, dit M. Depping, dans son introduction aux Règlements des arts et métiers de Paris, car non-seulement ils allaient dans les rues criant le vin de la taverne à laquelle ils étaient attachés pour le jour ou la semaine, mais ils en offraient aussi aux passants dans un hanap ou vase de bois que le tavernier leur fournissait. Les vieilles éditions des ordonnances de la ville ont une gravure en bois qui représente un de ces crieurs ayant la bouche ouverte pour crier le vin, tenant d'une main un broc et offrant de l'autre un hanap ou écuelle pleine de vin à un bon bourgeois qui passe dans la rue. La taverne paraît être située derrière le crieur. Ainsi le vin allait trouver alors le consom

(4) On lit dans la charte de Philippe-Auguste, 1220: « Mercatoribus hansatis aquæ « paris, concedimus crierias paris, in perpetuum tenendas, etc. »>

mateur, et le bourgeois parisien pouvait s'enivrer sans craindre d'enfreindre l'ordonnance de Louis IX contre les tavernes. Les crieurs, faisaient donc les affaires des taverniers, même malgré ceux-ci, qui souvent se seraient bien passés de ces employés imposés par les marchands de l'eau. Ils allaient criant le vin toute la matinée, et la veille des grandes fêtes ils criaient jusqu'au soir les vins composés, tels que clairet, ou vin épicé et miellé, vin de sauge, vin de romarin et autres dont les Parisiens se régalaient alors (1).

En automne, après les vendanges, le roi se réservait la faculté de faire débiter le vin provenant des vignobles de ses domaines. Les tavernes cessaient alors d'en débiter, et les crieurs, précédés du chef de leur corps, allaient presque solennellement par les rues pour crier le vin du roi (2). Cela leur valait quatre deniers par jour, c'est-à-dire à peu près autant qu'ils gagnaient à crier le vin d'une taverne.

Cinquante ans après le règne de Louis IX, il arrivait quelquefois au port de la Grève des vins singulièrement estimés des gourmets parisiens, on les nommait vins de Garache, de Malvoisie, de Lieppe, d'Osaie, vin bastart, vin rosette, vin de muscadet. C'était un événement pour les bons Parisiens, disent les chroniques du temps, que l'arrivée d'une naulée de ces boissons rares et fines; aussi procédait-on au débit avec de grandes formalités. Aussitôt que le prix en avait été déclaré et inscrit, le prévôt et les échevins se transportaient à bord du bateau pour sceller la bonde afin d'empêcher et de prévenir les mélanges de vins de qualité inférieure. Venaient ensuite les crieurs; ils allaient, précédés de leur chef, portant un hanap doré, annoncer par la ville la grande nouvelle de l'arrivée d'une naulée de vins fins, pour engager les riches à profiter de l'occasion. Une classe particulière de tonneliers, savoir les barilliers, dont le nom est resté à une des rues de Paris, fabriquaient pour les riches hommes, comme on disait alors, des tonneaux soigneusement travaillés suivant l'ordonnance, pour enfermer les vins, et telle était l'importance attachée à leurs fonctions, qu'on leur permettait de travailler les jours fériés, lors même que les boulangers et autres artisans qui pourvoyaient aux premiers besoins de la vie, étaient forcés de chômer (3).

(4) Depping, Introduction aux règlements des arts et métiers, page 42. (2) Registres des Métiers, première partie, titre v.

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La profession de marchand de vins est une des plus anciennes corporations de Paris, et ses statuts datent du commencement du treizième siècle. La France était alors comme aujourd'hui riche en vignobles et ses vins alimentaient un commerce considérable; les vins artificiels, connus sous le nom de piments, étaient déjà connus en 1170; on les fabriquait avec du miel, des épiceries, des aromates d'Asie; les plus estimés étaient le clairet et l'hypocras, dont l'usage s'est maintenu jusqu'à la fin du dixseptième siècle. Le miel, quoique le sucre fût déjà connu, était un des ingrédients employés dans la composition de toutes les liqueurs. On fabriquait aussi du vin de liqueur avec du jus de cerise, de groscille et de frambroise. On ne trouvait d'eau-de-vie que chez les apothicaires.

La profession des taverniers était libre; ils pouvaient vendre toutes sortes de vins, mais ce métier paraît avoir été considéré par les anciens statuts comme incompatible avec celui de courtier : cependant, si le marchand de vins tenait un hôtel garni, il lui était permis d'acheter deux tonneaux pour l'usage de ses hôtes il ne pouvait, dans aucun cas, vendre du vin au dehors, et toute infraction aux statuts entraînait la perte du métier.

Les vins amenés à Paris par terre étaient déposés à l'Étape aux vins, située alors aux halles, et ceux qui arrivaient par eau étaient vendus, comme nous l'avons déjà dit, au port de la Grève, à l'endroit qui a été depuis compris dans le port Saint-Paul. Les bourgeois et les taverniers faisaient leurs achats à ces deux marchés.

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Les statuts avaient établi, pour présider à la vente, des jaugeurs qui formaient une corporation comme les mesureurs de grains, et tenaient aussi leurs pouvoirs de la prévôté des marchands. Si l'un des intéressés se croyait frustré par le jaugeage, il avait le droit de requérir l'arbitrage d'un troisième jaugeur et même d'un tiers s'il y avait encore discussion, et dans ce cas le vendeur et l'acheteur devaient s'en rapporter à l'opinion de la majorité. Les jaugeurs étaient tenus d'exercer leurs fonctions dans toute l'étendue de la prévôté de Paris, pourvu que les bourgeois qui réclamaient leur concours leur fournissent leur cheval, s'il y avait lieu (1). Nous avons déjà parlé des crieurs imposés aux taverniers et des statuts de leur corporation : voici quelques détails complémentaires :

(1) Voir Statuts des jaugeurs, Registres des Métiers, pag. 27 et 28,

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