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proclamer, du haut de la chaire de plusieurs églises de Paris, la LIBERTÉ RELIGIEUSE. A ce moment du règne de messieurs de Montrouge et de la grande-aumônerie, où la congrégation jésuitique avait jeté son immense réseau sur la France, c'était de sa part un acte de courage. Aussi le scandale fut grand.

Toutefois, M. Chatel n'avait pas encore ouvertement rompu avec l'Eglise de Rome; et ce ne fut qu'après la révolution de Juillet, lorsqu'au milieu de l'agitation des partis, il crut entrevoir un instinct de religiosité dessinant le sentiment hostile que le peuple portait au clergé, qu'il jugea l'occasion favorable pour annoncer les projets de réforme qu'il méditait depuis plusieurs années, et dont il avait jeté les premiers aperçus dans le Réformateur, journal de la religion et du siècle.

Pour faire entendre la parole nouvelle aux hommes qu'éloignait du temple le rigorisme catholique, et qui éprouvaient le besoin de se prosterner aux pieds du sanctuaire, il en réunit quelques-uns dans ses appartements, rue des Sept-Voies, 18, et leur prêcha l'Evangile. Le nombre de ses prosélytes s'accrut, et, au mois de janvier 1831, il transféra le siége de son église rue de la Sourdière. Ce nouveau local devint bientôt insuffisant, et, au mois de juin suivant, l'abbé Chatel fut s'établir rue de Cléry, salle Lebrun. Au mois de novembre, il fut obligé de le quitter encore pour un local plus spacieux, et une maison no 59 du Faubourg-Saint-Martin devint le siége de l'Eglise catholique française primatiale.

L'abbé Chatel, qui prit le titre de primat des Gaules, eut bientôt l'appui de quelques prêtres dissidents: ce furent l'abbé Auzou, l'abbé Blachère, l'abbé Normant, l'abbé Robert, l'abbé Bonnet et d'autres.

Les principes des nouveaux réformateurs n'avaient encore rien de précis ils annonçaient bien l'intention de secouer le joug despotique des évêques; mais c'était tout, et cela ne pouvait constituer une règle fixe.

Un assez grand nombre de prêtres de l'Eglise romaine se joignirent bientôt à ce petit noyau dissident. L'abbé Chatel voulut établir une secte d'ordre hiérarchique dans la petite société. Il s'adressa à Bernard-Raymond, le grand-maître des templiers ou johannistes,

dont nous avons parlé plus haut. Il feignit d'entrer dans ses vues, et lui promit de l'aider à rétablir la splendeur du culte chevaleresque qu'il professait, sous le titre d'Eglise chrétienne, s'il voulait le sacrer évêque selon le rite de saint Jean. Bernard-Raymond, enchanté de l'occasion, ne fit aucune difficulté, et l'abbé Chatel, une fois sacré évèque par le successeur in partibus de Jacques Molay, sacra des prêtres à son tour à discrétion.

Dès ce moment aussi, il crut devoir formuler ses croyances, et pu blier le symbole de la réforme, dont il se faisait le prédicateur.

Il établit d'abord le dogme et la discipline de l'Eglise française; puis, réuni aux prêtres, ses frères, il proclama la constitution hiérarchique du clergé : le primat, les évêques et les chefs d'églises devaient être élus par le peuple et le clergé. Le primat et les évêques devaient recevoir leur consécration des prêtres de l'Eglise primatiale ou épiscopale: c'était se conformer à la discipline établie par les apôtres. Dès ce moment aussi, on cessa d'officier en latin.

La réforme prit racine non-seulement dans le peuple, mais encore dans la bourgeoisie: plusieurs succursales furent fondées; un clergé nombreux les desservit, et, peu de mois après, l'Eglise française se trouva représentée dans les localités suivantes :

A Paris, rue du Faubourg-Saint-Martin, 59, église primatiale : MM. Chatel, fondateur de l'Eglise française, évêque primat; Normant, vicaire primatial; Robert, prêtre; Bonnet, lévite.

A Nantes (Loire-Inférieure), MM. Lerousseau, vicaire général; Sandron, prêtre.

A Roches-sur-Rognon et Bettaincourt (Haute-Marne), M. Marche, vicaire général.

A Lannecorbin, Sinzos et Lhez (Hautes-Pyrénées), MM. Trecazes, vicaire général; Rousselin, prêtre.

A Pouillé (Vendée), pour vingt-deux communes, M. Guicheteau, vicaire général.

A Villefavar et Lastours, près Limoges (Haute-Vienne), M. Papon, vicaire général.

L'évêque primat eut en outre une succursale dans le faubourg Saint-Jacques, à Paris, et une église à Boulogne, près Paris.

Bientôt l'Eglise française eut son jour de persécution, et par suite

son jour de grand lustre. Les habitants de Clichy, près Paris, n'ayant plus voulu recevoir dans leur commune leur curé, qui avait pris part à la manifestation légitimiste de Saint-Germain - l'Auxerrois, se voyant privés de l'exercice du culte, par suite du refus de l'archevêque de Paris de lui donner un successeur, s'adressèrent à l'abbé Chatel, et, pour mettre un terme à cette sorte d'interdit religie, lui demandèrent un prêtre de son Eglise.

Pendant quelque temps, il n'y eut pas de titulaire proprement dit. Tantôt l'un, tantôt l'autre, des prêtres de l'Eglise française allaient desservir Clichy les habitants semblaient vouloir prendre leur curé à l'essai, et enfin leur choix se fixa sur l'abbé Auzou, l'un des premiers prosélytes du nouveau culte.

L'abbé Auzou éclipsa bientôt le primat. Le choléra fut d'abord pour lui l'occasion de prédications remarquables. Pendant que les évêques de France, suivant les vieux errements du clergé romain, attribuaient le fléau dévastateur à la colère divine, et effrayaient leurs ouailles, au lieu de leur donner de bons conseils, l'abbé 'Auzou réfuta ces mandements, parla au cœur de ses paroissiens, releva leur courage, et, par ses exhortations et son exemple, sut les amener à se secourir les uns les autres.

Peu après, une circonstance mémorable appela avec éclat l'attention publique sur l'abbé Auzou. Lors de la mort du roi de Rome, des vieux compagnons de gloire de l'empereur voulurent honorer la mémoire du père par un service funèbre public au fils. N'ayant pu obtenir du clergé romain des prières publiques pour l'Astyanax des temps modernes, ils s'adressèrent à l'abbé Auzou, et la petite église de Clichy vit accourir de partout une foule immense de vieux soldats qui vinrent pleurer aux pieds de la chaire, où l'abbé improvisa la touchante oraison de Napoléon II.

Installé depuis le 9 janvier 1833, dans la petite cure de Clichy, l'abbé Auzou y officia tranquillement jusqu'au mois de juin 1834. A cette époque, aux sollicitations du clergé romain, l'autorité se réveilla de son assoupissement, et l'Eglise française eut sa petite persécution. Elle commença même d'une manière assez singulière. Le ministre de l'intérieur et des cultes, le préfet de police commencèrent par reconnaître, par un arrêté du 3 mai 1833, que diffé

rentes sectes s'étaient établies dans plusieurs communes du département de la Seine; il était dit, en outre, dans l'article 1er de cet arrêté: «qu'à l'avenir toutes cérémonies religieuses hors des édifices qui leur sont destinés, ainsi que l'exercice extérieur d'un culte ou d'une secte quelconque, sont expressément interdits dans les communes, etc. » Puis, dans l'article second: « que le présent arrêté sera notifié, en la forme de droit, aux différents chefs des sectes religieuses établies dans les communes du département de la Seine.... »

On aurait cru, d'après cet arrêté, que l'existence du nouveau culte serait tolérée, sauf son exercice extérieur: ce fut le contraire qui arriva. Au mois de juin 1834, le sous-préfet de Saint-Denis se présenta, accompagné d'hommes de police et de gendarmes, pour mettre à exécution un mandat signé du préfet de police, intimant à M. l'abbé Auzou l'ordre d'évacuer le presbytère. Les scellés furent apposés sur les portes de l'église.

Le bruit de cette expédition s'étant répandu dans Clichy, chacun exprime la vive indignation qu'il' ressent: on reproche à l'abbé Auzou de s'être laissé trop facilement enlever du presbytère; on lui jure un dévouement sans bornes. L'effervescence est bientôt à son comble; on rédige à la hâte une protestation énergique, que des milliers de signatures couvrent bientôt la nuit arrive; le mécontentement est général; les fidèles se portent en foule au presbytère, brisent les scellés apposés par le sous-préfet, et s'installent militairement dans le presbytère évacué.

Après cette prise de possession de l'église, les habitants sonnent à toute volée les cloches que l'on ne sonne jamais après l'heure de l'angelus qu'en cas d'alarme. La foule accourt des extrémités de la commune l'air retentit de vivats, et l'on danse gaiement au son des cloches, autour des feux de joie allumés sur la place.

L'autorité ne voulut pas avoir le démenti dans cette affaire. Le lendemain, le sous-préfet revint à Chichy, pour rétablir les scellés brisés; mais les huées, les pierres de la multitude ne lui permirent pas d'arriver jusqu'à l'église. Il se réfugia à la mairie, y assembla les notables de la commune; mais l'exaspération des esprits ne lui permit même pas d'expliquer ses ordres on refusa de l'écouter; il ne

put que se retirer, avec accompagnement d'imprécations et de sifflets.

Il revint une troisième fois en compagnie de M. Desmortiers, procu reur du roi, d'un fort détachement de gendarmerie à pied et à cheval, et d'un fort détachement de ligne. Le tocsin sonna : les habitants voulurent protester jusqu'au bout, mais ils n'avaient pas d'armes, et ils furent bientôt dispersés.

L'arrestation d'une vingtaine de citoyens qui, après cinq mois de captivité préventive, furent acquittés par le jury, termina cette échauffourée. L'abbé Auzou reprit l'exercice de son culte, qui eut lieu simultanément à Clichy, à Sèvres, à Boulogne, près Paris, à Senneville et Plague, près de Mantes, à Paris, dans une chapelle située, depuis le commencement de l'année 1834, boulevard SaintDenis, 10. Mais, tout à coup, aux instances plus pressantes du clergé, l'autorité se réveilla, ces divers temples furent fermés, et ce qu'il resta de plus évident de toute cette affaire, c'est que les populations françaises pourraient bien échapper au clergé romain le jour où apparaîtrait un véritable réformateur.

CITÉ OUVRIERE.-Le 18 novembre 1851, eut lieu l'inauguration de la première Cité ouvrière, à Paris, rue Rochechouart. La salle d'asile, celle des crèches, avaient été décorées de guirlandes et de draperies. La façade extérieure du bâtiment avait été pavoisée; des corps de musiciens jouaient des fanfares; toute la population du quartier était en émoi pour cette fête.

La Cité portait le nom de Cité Napoléon.

Elle était située à mi-côte de la rue Rochechouart, quartier élevé, en bon air. Sa façade, d'une grande simplicité, était en harmonie avec la destination de l'édifice.

Dès le mois d'avril 1851, la partie donnant sur la rue avait été habitée; cette partie comprenait, outre les boutiques, 80 logements variant de 60 à 180 fr. par an. Pour cette dernière somme, l'ouvrier avait deux pièces et un couloir avec fourneau.

Un escalier large et bien éclairé desservait le bâtiment. En novembre 1851, il y avait 250 locataires d'une bonne conduite et d'une excellente tenue. Le but proposé était complétement atteint.

Les lavoirs, les salles de bains, les salles d'asile, disposés pour re

T. VIII.

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