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mand recueillit ainsi la meilleure part de la croisade. Toutefois il ne put se dispenser de suivre l'armée, et de l'aider à prendre Jérusalem. Cette prodigieuse armée, était, dit-on, réduite alors à vingt-cinq mille hommes. Mais c'étaient les chevaliers et leurs hommes. Le peuple avait trouvé son tombeau dans l'Asie mineure et dans Antioche.

Les fatemites d'Egypte qui, comme les Grecs, avaient appelé les Francs contre les Turcs, se repentirent de même (1). Ils étaient parvenus à enlever aux Turcs Jérusalem, et c'étaient eux qui la défendaient. On prétend qu'ils y avaient réuni jusqu'à quarante mille hommes. Les croisés qui, dans le premier enthousiasme où les jeta la vue de la cité sainte, avaient cru pouvoir l'emporter d'assaut, furent repoussés par les assiégés. Il leur fallut se résigner aux lenteurs d'un siège, s'établir dans cette campagne désolée, sans arbres et sans

geaient d'une grèle de coups de poings; le plus fort emportait la proie. » C. 98, 99, p. 316. -Ensuite Raymond et les siens soutirrent l'authenticité de la sainte Lance; « parce que les autres nations, dans leur simplicité, y apportaient des offrandes; ce qui enflait la bourse de Raymond. Mais le rusé Bohémond (non imprudens, multividus. Rad. Cad., p. 317; Robert Mon., ap. Bongars, p. 40) découvrit tout le mensonge. Cela envenima la querelle. » C. 101,

102.

(1) Willelm. Tyr., I. VII, c. 19: ..... Undè factum est, ut hoste quos priùs quasi fortiores horruerant, nunc per nostrorum operam dejectos, et confractis viribus, in imo videntes constitutus, nostrorum auxilium, quod priùs instanter nimis expetierant, contemnebant.

eau. Il semblait que le démon eût tout brûlé de son souffle, à l'approche de l'armée du Christ. Sur les murailles paraissaient des sorcières qui lançaient des paroles funestes sur les assiégeans. Ce ne fut point par des paroles qu'on leur répondit. Des pierres lancées par les machines des chrétiens, frappèrent une des magiciennes pendant qu'elle faisait ses conjurations (1). Le seul bois qui se trouvât dans le voisinage avait été coupé par les Génois et les Gascons qui en firent des machines, sous la direction du vicomte de Béarn. Deux tours roulantes furent construites pour le comte de Saint-Gille et pour le duc de Lorraine. Enfin les croisés ayant fait, pieds nus, pendant huit jours, le tour de Jérusalem (2), toute l'armée attaqua; la tour de Godefroi fut approchée des murs, et le vendredi 15 juillet 1199, à trois heures, à l'heure et au jour même de la passion, Godefroi de Bouillon descendit de sa tour sur les murailles de Jérusalem. La ville prise, le massacre fut effroyable (3). Les croisés dans eur aveugle ferveur, ne tenant aucun compte des temps, croyaient en cha

(1) Willelm. Tyr., L. VIII, c. 15.

(2, Guibert, L. VII. c. 16: Memores Jhericontini quondam casûs,..... cum multâ spirituum et corporum contritione processiones agendo, Sanctorum nomina flebiliter iuclamando, nudipedalia exercendo Jherusalem circumeunt. Alberic., ap. Leibnitzii accession. histor., I, 175.

(3) Les chrétiens indigènes avaient éprouvé, pendant le siége, les plus cruels traitemens de la part des infidèles. Voy. Guillaume de Tyr., I. VIII, c. 8.

que infidèle qu'ils rencontraient à Jérusalem, frapper un des bourreaux de Jésus-Christ (1).

Quand il leur sembla que le Sauveur était assez vengé, c'es-à-dire quand il ne resta presque personne dans la ville, ils allèrent avec larmes et gé

(1) Après la prise de Jérusalem le poète musulman Abivardi composa des vers dont voici le sens ( Bibliothèque des Croisades, extraits des auteurs arabes, par M. Reinaud):

«Nous avons mélé le sang à l'abondance de nos larmes. Il ne nous reste pas d'abri contre les malheurs qui nous menacent. -Les tristes armes, pour un homme, de répandre des pleurs, lorsque la guerre embrasse tout de ses épées étincelantes! - O enfans de l'Islamisme, bien des combats vous restent à soutenir, dans lesquels vos têtes rouleront à vos pieds! Comment dormir et fermer les pauires, lorsqu'on est atteint par des commotions qui réveilleraient l'homme le plus profondément endormi ?— Vos frères, dans la Syrie, n'ont pour se reposer que le dos de leurs chameaux, ou les entrailles des vautours.- Les Romains les couvrent d'opprobre; et vous, vous laissez traîner votre robe dans la mollesse, comme quel qu'un qui n'a rien à craindre ! Que de sang a été répandu ! Que de femmes à qui on n'a laissé pour couvrir leur beauté que leurs mains ! Entre les coups de lance et l'épée le choc est si épouvantable, que la tête des enfans en blanchirait de frayeur. Telle est cette guerre, que ceux même qui s'éloignent de ses fureurs dans l'espoir de s'en préserver, grincent bientôt les dents de regret. semble voir celui qui repose à Médine (Mahomet), se lever pour crier de toute sa force: O cufans de Haschem! Quoi ! mon peuple ne vole pas à l'ennemi la lance à la main, lorsque la religion croûle par ses fondemens! Il n'ose pas approcher du feu, par crainte de la mort, et il ne voit pas que le déshonneur est une blessure qui reste !

Il me

Est-ce donc que les chefs des Arabes se résigneront à de tels, maux, et que les guerriers de la Perse se soumettront à un tel avilissement? - Plût à Dieu, puisqu'ils ne se battent plus par zèle pour la religion, qu'ils résistassent pour le salut de leurs proches! renoncent aux récompenses célestes, lorsque le danger les appelle, ne seront-ils pas du moins attirés par l'espoir du butin ? »

S'ils

missemens, en se battant la poitrine, adorer le saint tombeau. Il s'agit ensuite de savoir quel serait le roi de la conquête, qui aurait le triste honneur de défendre Jérusalem. On institua une enquête sur chacun des princes, afin d'élire le plus digne; on interrogea leurs serviteurs, pour découvrir leurs vices cachés. Le comte de SaintGille, le plus riche des croisés, eût été élu probablement, mais ses serviteurs, craignant de rester avec lui à Jérusalem, n'hésitèrent pas à noircir leur maître, et lui épargnèrent la rouyaté. Ceux du duc de Lorraine, interrogés à leur tour, après avoir bien cherché, ne trouvèrent rien à dire contre lui, sinon qu'il restait trop long-temps dans les églises, au-delà même des offices, qu'il allait toujours s'enquérant aux prêtres des histoires représentées dans les images et les peintures sacrées, au grand mécontentement de ses amis, qui l'attendaient pour le repas (1). Godefroi se résigna, mais il ne voulut mais prendre la couronne royale dans un lieu où le Sauveur en avait porté une d'épines (2). Il n'accepta d'autre titre que celui d'avoué et baron du Saint-Sépulcre. Le patriarche réclamant Jérusalem et tout le

(1) Willelm. Tyr., L. IX, c. 2 : ..... Sed de singulis imaginibus et picturis rationem exigebat à sacerdotibus, et iis qui horum videbantur habere peritiam; ita quod sociis suis, affectis alitar, in tædium verteretur.... et prandia.... minùs tempestivè magisque insipida sumerentur. Alberic., p. 179.

(2) Guibert, L. VII. Alberic., p. 183.

royaume, le conquérant ne fit point d'objection, il céda tout devant le peuple, se réservant la jouissance seulement, c'est-à-dire la défense (1). Dès la première année, il lui fallut battre une armée innombrable d'Egyptiens, qui vinrent attaquer les croisés à Ascalon. C'était une guerre éternelle, une misère irrémédiable, un long martyre que Godefroi se trouvait avoir conquis. Dès le commencement, le royaume se trouvait infesté par les arabes jusqu'aux portes de la capitale; l'on osait à peine cultiver les campagnes. Tancrède fut le seul des chefs, qui voulut bien rester avec Godefroi. Celui-ci put à peine garder en tout trois cents chevaliers (2).

C'était cependant une grande chose pour la chrétienté d'occuper ainsi, au milieu des infidėles, le berceau de sa religion. Une petite Europe asiatique y fut faite à l'image de la grande. La féodalité s'y organisa dans une forme plus sévère même que dans aucun pays de l'Occident. L'ordre hiérarchique, et tout le détail de la justice féodale

y

fut réglé dans les fameuses Assises de Jérusalem par Godefroi et ses barons. Il y eut un prince de Galilée, un marquis de Jaffa, un baron de

(1) Willelm, Tyr., I, IX, c. 16,

(2) Id. ibid., c. 19: Dux solus, et dominus Tancredus.... à domino duce erat detentus ;... ut vix invenirentur equites trecenti et peditum duo millia. A Antioche, Tancrède avait juré qu'il n'abandonnerait pas la place tant qu'il lui resterait quarante chevaliers, Guibert, LV, c. 18.

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