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par des canons, mèche allumée, qui couvraient 1797. toutes les places. Les soldats amenaient des prisonniers, tels que Barbé-Marbois, Tronçon-Ducoudray, Lafond-Ladebat, dont le maintien ferme et serein paraissait leur inspirer un respect involontaire. Des généraux et des officiers, pour la plupart inconnus dans l'armée, mais signalés dans les journées révolutionnaires, couraient partout le sabre levé, et faisant montre de leur vaillance devant un peuple désarmé. Ils se livraient à leur plaisir favori de briser des presses de journaux, et se croyaient lavés par un tel exploit du ridicule ou de l'horreur que les presses avaient attaché à leurs noms.

Cependant les salles de l'Amphithéâtre de chirurgie et du théâtre de l'Odéon recevaient un assez petit nombre des députés qui avaient formé la minorité des deux Conseils. Les uns erraient, sombres et encore indécis, à travers les squelettes humains, et les autres à travers les machines théâtrales. Ils étaient confus et presque épouvantés de leur petit nombre. Plusieurs députés neutres ne s'étaient pas crus assez sûrs de n'être pas proscrits, pour venir jouer le rôle de proscripteurs. D'anciens membres

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du club des Jacobins, et même des officiers militaires, vinrent remplir le vide et s'asseoir sur les banquettes pour prendre part à la délibération. Mais, dans cette première journée, le Directoire ne put rien obtenir des deux Conseils mutilés, sinon une permission de faire entrer les troupes dans Paris, lorsqu'elles en avaient déjà pris possession depuis douze ou quinze heures. Le soir, les hommes de la terreur se réunirent dans les faubourgs, et vinrent offrir leur secours au Directoire. On jugea à propos d'éconduire des auxiliaires qui avaient à venger Babœuf et Roberspierre lui-même. Ils murmurèrent, et une journée de proscription les laissait mécontens. Les soldats, qu'on enivrait, osaient à peine célébrer une victoire qui ressemblait si peu à celles dont ils tiraient un légitime orgueil. Le Directoire avait passé la nuit à se concerter avec plusieurs membres de la minorité des deux Conseils. Le lendemain" 19, il leur adressa le message suivant :

Le Directoire au Conseil des Cinq-Cents.

« Le 18 fructidor a dû sauver la République et vous le peuple s'y attend. Avezvous vu hier sa tranquillité et sa joie. C'est

aujourd'hui le 19 fructidor, le peuple demande où en est la République, et ce que le CorpsLégislatif a fait pour la consolider.

« L'œil de la patrie est ouvert sur vous, citoyens représentans; le moment est décisif; si vous le laissez échapper, si vous hésitez sur les mesures à prendre, si vous tardez une minute à vous prononcer, c'en est fait, vous vous perdez avec la République.

« Les conspirateurs ont veillé, votre silence leur a rendu le courage et l'audace; ils renouent leurs intrigues, ils égarent l'opinion par d'infames libelles, les journalistes de Blankenbourg et de Londres continuent à distribuer leurs poisons. Tous ces conjurés ne dissimulent pas qu'ils comptent sur leurs intelligences jusque dans le sein du Corps-Législatif; ils parlent déjà de punir les républicains du commencement de triomphe qu'ils ont obtenu et l'on peut hésiter encore de purger la France du très petit nombre de chefs connus et signalés de ces conspirateurs royaux qui n'attendent que le moment de déchirer la République, et de vous dévorer vous-mêmes! Vous êtes au bord du volcan, il va vous engloutir, vous pouvez le fermer, et vous délibérez! demain il ne sera plus temps,

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la moindre incertitude est la mort de la République.

«< On vous parlera de principes, on cherchera les formes, on inventera des excuses, on voudra des délais, on gagnera du temps, on assassinera la constitution en ayant l'air de l'invoquer. Cette commisération qu'on implore pour certains hommes, à quoi va-t-elle vous conduire? à voir ces mêmes hommes reprendre de vos propres mains le fil de leurs trames coupables, et ramasser dans votre sein les horribles brandons de la guerre civile pour incendier la patrie. Quelle pitié mal entendue, quel sentiment funeste, quelles vues rétrécies concentreraient l'attention du CorpsLégislatif sur les individus, et pourraient balancer le sort de quelques hommes avec celui de la République ?

« Le Directoire exécutif s'est dévoué pour vous donner les moyens de sauver la France, mais il a dû compter que vous les saisiriez. Le Directoire exécutif a cru que vous vouliez sincèrement la liberté, la République, et que les conséquences de ce premier principe ne devaient pas vous effrayer. Il vous les remet sous les yeux : il est obligé de vous dire que vous êtes placés dans une circonstance unique,

et qu'on ne saurait appliquer les règles ordinaires, à moins que de vouloir se livrer à ses ennemis.

« Si les amis des rois trouvent des amis parmi vous, si les esclaves peuvent y trouver des protecteurs, si vous attendez un instant, il faut désespérer du salut de la France, fermer la constitution, et dire aux patriotes que l'heure de la royauté est sonnée dans la République. Mais si, comme n'en doute pas le Directoire exécutif, cette idée affreuse vous contriste et vous frappe, connaissez le prix du moment, soyez les libérateurs de votre pays, et fondez à jamais son bonheur et sa gloire. »

Les projets du Directoire sont renvoyés à une commission de cinq membres nommée pour arrêter des mesures de salut public, et dont Syeyès et Boulai de la Meurthe font partie. Le dernier est chargé du rapport. Après l'avoir entendu, on casse arbitrairement les élections de quarante - huit départemens, ce qui formait la majorité des élections; puis on procède à former la liste de ceux qui doivent être déportés à la Guiane. Boulai de la Meurthe et quelques autres députés parvien- . nent à faire réduire celle qu'a proposée le Di

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