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Lorsqu'à la tribune, quelques députés, occupés des finances, et bien instruits peut-être de l'intelligence de Hoche avec les triumvirs, accusèrent son administration, il se répandit en imprécations contre le club de Clichy, et tous les corps de son armée furent fidèles à servir la colère du général. L'armée vit pleuvoir des ordres du jour où le sabre usurpait tous les droits de la toge : le style de ces proclamations était excessivement militaire, et abject à force d'emportement; les menaces ne tardèrent pas à se réaliser. De concert avec le triumvirat, Hoche fit marcher vers Paris un corps de douze mille hommes (artillerie, infanterie et cavalerie) qu'il prétendait destiné à une nouvelle expédition sur l'Irlande. Le bruit de cette marche vint bientôt aux oreilles des députés; la constitution interdisait tout mouvement de troupes sur Paris dans un rayon déterminé, et elle punissait de dix années de géne le général qui se permettrait un tel attentat sur-l'indépendance du Corps-Législatif. Déjà le corps détaché de l'armée de Sambre-et-Meuse avait dépassé de plusieurs lieues le cercle constitutionnel : les orateurs s'exprimèrent avec un courage qui fit impression sur le Directoire.

1797.

1797.

On demanda et on obtint des ordres pour changer la direction de ce corps de troupes; mais le Directoire se vengea d'un retard que lui-même avait jugé nécessaire, par un message dont l'insolence annonçait la résolution d'engager le combat, et la certitude de vaincre. Il ne craignait pas de montrer les formidables appuis auxquels son imprévoyante et stupide colère allait recourir. Il jetait sur le bureau des Cinq-Cents un paquet de proclamations, d'adresses et d'ordres du jour envoyés des deux armées d'Italie et de Sambre-et-Meuse. La seule armée du Rhin, conduite par le général Moreau, s'était abstenue, par un honorable scrupule, de dicter ainsi ses lois à la puissance législative. « Voyez, disait la majorité << directoriale, voyez à quoi vous exposent << tant de discours violens, tant de proposi<«<tions infames où le royalisme exhale ses «< espérances et ses fureurs voyez jusqu'à quel point ils ont excité l'indignation des généraux défenseurs de la République. Il « nous a fallu des efforts inouïs pour empê«< cher des éclats plus directs et plus effectifs « de cette indignation; mais conserverons<< nous long-temps le pouvoir d'arrêter le <<< mouvement si noble et si unanime de nos

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triomphantes armées? Ne pourraient-elles 1797. << pas nous reprocher comme un crime, de « voir avec indifférence ou avec pusillani«<mité la contre-révolution qui s'approche? << Montrez enfin par des actes vigoureux que << les contre- révolutionnaires ont en vain placé sur vous leur espoir; sachez vous dé<< tacher des traîtres qui vous sollicitent à la « plus infâme défection, ou ne vous étonnez << pas d'événemens qu'il n'aura pas été en <<< notre pouvoir de détourner. >>

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Tel était l'esprit de ce message ou plutôt de ce manifeste de guerre.

Si le Directoire avait suspendu le mouvement du général Hoche, c'était surtout parce qu'il craignait la susceptibilité jalouse de Bonaparte, qui n'aurait pas souffert un autre arbitre des destinées de la République. Depuis long-temps le triumvirat conspirateur se traînait aux pieds du vainqueur de l'Italie, pourimplorer et le secours de son bras, et celui de trois millions jugés nécessaires au mouvement prémédité. Il se rendait auprès de lui le délateur des deux Conseils, envenimait des paroles qui déjà avaient été insupportables à son orgueil ou même importunes pour sa conscience, faisait un long commentaire sur un

1977.

discours du député Dumolard, qui s'était indigné à la tribune du partage des États venitiens enfin, il irritait la jalousie de Bonaparte contre le général Pichegru, devenu l'espoir et l'idole des royalistes.

Bonaparte, qui méditait la destruction complète de Venise, pour racheter Mantoue, s'était vivement offensé, comme je l'ai déjà dit, du soulèvement de l'opinion royaliste contre les préliminaires de Léoben; mais il était rare que chez lui la colère fit taire la politique. Si ce soldat ambitieux détestait la légitimité, il aimait la monarchie, même sous la forme la plus absolue. Il savait que plusieurs députés, plus gouvernés par la prudence que par un profond sentiment de justice, avaient blâmé la sortie de Dumolard qui les brouillait avec le moins républicain des généraux. Il entretenait une correspondance intime avec Carnot, et souriait de pitié quand les autres Directeurs donnaient à un homme chargé de tels souvenirs, le titre de royaliste.

Recommencer, après une carrière si remplie de merveilles, le rôle fàcheux qu'il avait joué à Paris à la journée du 13 vendémiaire; rappeler sur lui les malédictions de la capi

tale; s'éloigner pour jamais des royalistes 1797dont il aurait un jour besoin; enfin, rendre au Directoire qu'il n'aimait pas, et qu'il avait lieu de craindre, une puissance que le mépris public abrogeait tous les jours: c'était reculer dans tous ses plans, c'était manquer le moment où il pourrait agir en dictateur pour se montrer ensuite en roi. Dans cette perplexité, Bonaparte, l'homme du monde qui aimait le moins les termes moyens, en choisit un fort peu sûr pour sa politique, et peu honorable pour son caractère. Il refusa de marcher en personne sur Paris; et, sous divers prétextes, il éluda la demande de trois millions qui lui était faite par le Directoire. Mais il envoya à sa place à Paris le général Augereau, celui qui convenait le plus aux desseins du Directoire par son incapacité politique, par sa violence soldatesque et son républicanisme ignorant: de plus, Bonaparte commit la faute d'armer le Directoire conspirateur et son lieutenant Augereau d'une proclamation qui leur assurait la victoire. Il choisit l'anniversaire du 14 juillet pour donner l'essor à sa colère contre les royalistes. Voici les propos qu'il faisait répandre dans les rangs par ses affidés, et que j'extrais de ses Mé

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