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cipaux et administratifs Réal et beaucoup d'autres fiers républicains, très résignés à supporter un maître qui les comblerait de biens et d'honneurs.

Tel était l'esprit des hommes qui occupaient alors les plus hauts emplois de la République. Examinons maintenant l'esprit des deux Conseils. Celui des Cinq-Cents était vivement agité des passions et surtout des terreurs révolutionnaires. Cependant les membres de la Convention n'y figuraient plus qu'en petit nombre. Les principaux orateurs, dont la France apprenait les noms, n'avaient pas figuré dans les scènes sanglantes, ou n'y avaient joué qu'un rôle obscur et secondaire. Parmi les plus fougueux, on citait MM. Briot, Destrem, Grandmaison; ils n'eurent pas le temps d'acquérir de la célébrité, et ne durent pas le regretter. Leurs propositions étaient assez violentes pour que Chénier eût passé du parti des modérés. Lucien Bonaparte, après avoir montré un peu d'emportement, s'était rallié à ce dernier parti, et il avait aidé puissamment à cette journée qui avait renversé deux des Directeurs, auxquels il reprochait le brillant exil de son frère en Égypte. Le nom qu'il portait ajoutait un grand effet à

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ses discours; sans être encore un orateur consommé, il s'exprimait avec feu, grâce et facilité. MM. Daunou, Cabanis, Émile Gaudin et Boulay de la Meurthe, figuraient aussi parmi cette nouvelle espèce de modérés ; ils étaient dans une minorité à peu près constante. Le Conseil des Anciens cherchait même après avoir fait des concessions fàcheuses, à former une digue au torrent révolutionnaire qui allait recommencer son cours.` L'orateur le plus puissant dans ce Conseil était M. Régnier, qui, membre de l'Assemblée constituante, avait d'abord suivi avec plus de courage que d'éclat la ligne honorable tracée par MM. Mounier et Malouet. Rentré dans les assemblées délibérantes après un assez long intervalle, il n'y avait montré d'abord qu'une circonspection timide; mais il sut, comme je l'ai dit, s'en écarter au 19 fructidor, pour s'élever avec force contre la proscription de ses collègues. Son nom était devenu odieux aux Jacobins; ses périls l'avertissaient de prendre une marche hardie et décidée. Voué à l'étude des lois, dans laquelle il était profondément versé, il sut, aux approches du 18 brumaire, se faire homme d'état et jouer un rôle actif dans une conspiration salutaire :

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il entraînait avec lui MM. Fargues, Cornet,
Lemercier, Cornudet, etc., tous membres du
Conseil des Anciens.

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Lois des

otages et de

cé.

J'ai déjà parlé de la loi des otages et de celle de l'emprunt forcé; il importe de faire l'emprunt forconnaître leurs effroyables et absurdes dispositions. La loi des otages déclarait les parens d'émigrés et les ci-devant nobles, à l'exception de ceux qui avaient rempli des fonctions à la nomination du peuple, en état de guerre intestine avec le gouvernement: elle les rendait, sous le nom d'otages, personnellement responsables de tous les attentats contrerévolutionnaires. Ils devaient être arrêtés partout où éclaterait un trouble civil, et déportés s'il se commettait un meurtre sur la personne des républicains, soit soldats, soit fonctionnaires publics. Chacun d'eux était condamné à une amende de cinq cents francs pour toute espèce de délit contre-révolutionnaire. On voit que cette loi des otages n'était autre chose que la loi des suspects développée et rendue plus odieuse encore; il était impossible qu'elle n'appelât point, au bout d'un certain intervalle, le règne des échafauds. Ainsi la terreur reparaissait avec tout ce qu'elle avait eu de plus sinistre. Les nouveaux représentans du

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peuple n'avaient su que copier leurs devanciers d'exécrable mémoire; la révolution semblait condamnée à rouler dans le cercle monotone de ses vieilles et désastreuses inepties. L'imprudence de cette loi égalait son atrocité; elle forçait tous les royalistes, tous les nobles même les plus timides, même les plus enclins aux calculs de la peur et de l'égoïsme, à venir se ranger sous l'étendard des lys relevé dans la Bretagne, constamment arboré dans l'Anjou et le Poitou, et qui déjà flottait dans la Normandie, la Touraine et même l'Orléanais. Dans les provinces du midi les royalistes ne pouvaient non plus manquer ni de refuge ni de ralliement; il est constant aujourd'hui que sans la journée du 18 brumaire la guerre civile, sous la forme redoutable de la chouanerie, allait couvrir tout le midi, et que bientôt elle eût étendu ses ramifications jusque dans l'ouest et le nord, plus soumis ou plus résignés à la révolution; cette guerre était une voie ouverte, mais une horrible voie, pour le retour à la légitimité. Un tel dénoûment n'aurait pu s'opérer que par des commotions épouvantables. Deux millions d'hommes déjà moissonnés dans les troubles de l'ouest, annon

çaient ce qu'aurait coûté cette horrible lutte si elle se fût prolongée quelques années en

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La loi de l'emprunt forcé se peignait par son nom même. Un emprunt forcé! cette alliar.ce de mots ne s'était jamais offerte qu'à l'esprit de quelques brigands qui voulaient pallier ou plutôt égayer leurs vols. Un emprunt! et l'on sortait d'une banqueroute, et l'État confessait un déficit qui, après avoir été de 55,000,000 trois mois auparavant, était maintenant déclaré de 120,000,000 par le gouvernement lui-même. A ce titre d'emprunt forcé il fallait joindre encore le titre d'emprunt progressif; les proportions en étaient énormes pour toutes les fortunes qu'on supposait élevées : on ne les estimait d'après aucun renseignement positif; tout était laissé à l'arbitraire des administrations, et celles-ci n'avaient que la voie des délations pour établir leurs taxes. Les nouvelles fortunes, celles qui naissaient de la révolution même, étaient atteintes avec une rigueur aussi impitoyable que les fortunes anciennes, possédées en général par les ennemis de cette révolution. Le gouvernement faisait ainsi la guerre à ses propres partisans l'effet d'une telle loi n'avait point

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