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premières expéditions. Le tableau historique 1799qu'il a donné n'est encore que commencé, et ne peut nous mener jusqu'à l'époque où les événemens m'ont conduit. Il me fournit seulement l'occasion de rectifier une erreur longtemps accréditée, et que j'ai moi-même consignée dans cette Histoire. Le nom de Chouans, si généralement donné aux royalistes bretons, ne vient pas, comme on l'a cru, du mot de chat-huant, par allusion à leurs entreprises nocturnes. Trois frères du nom de Chouan, paysans pleins de valeur, donnèrent leur nom à cette formidable confédération du royalisme armé; ils furent les auxiliaires des Vendéens après que ceux-ci eurent passé la Loire. Des nobles et surtout des émigrés ne tardèrent pas à se réunir à des paysans intrépides et surtout furieux, qui rendaient trop fidèlement massacre pour massacre. Un fait remarquable, c'est que les grands désastres des royalistes, soit après la déroute du Mans et de Savenay, soit après les fatales journées de Quiberon, soit après la mort de Stofflet et de Charette, furent l'époque des plus grands et des plus terribles efforts de la chouanerie. Le général Hoche, malgré des mesures pleines de vigueur et de

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dextérité, n'avait pu calmer qu'un moment des troubles plus inquiétans à eux seuls que tous les apprêts de la ligue des rois. C'était à l'argent du fisc que les chouans faisaient partout la guerre; ils l'interceptaient sur toutes les routes, n'entraient dans aucune bourgade ou dans aucune ville, sans se rendre maîtres des caisses publiques. Les acquéreurs des domaines nationaux, les magistrats républicains et surtout les anciens membres des Comités révolutionnaires avaient toujours à craindre leurs visites féroces ou vindicatives. Parmi ces paysans, cependant, plusieurs, et c'étaient les plus braves (c'étaient surtout les frères Chouan), surent toujours s'abstenir de ces actes de cruauté; les nobles chefs vendéens que ces paysans avaient recueillis après leurs désastres, s'étudièrent là, comme dans leur patrie, à diminuer les horreurs d'une guerre civile si ardente et si prolongée. Les Chouans avaient leurs signaux, leur correspondance. Toutes les paroisses étaient formées militairement. Le paysan ne conduisait pas sa charrue sans avoir son fusil à son côté, et souvent le sillon qu'il traçait était arrosé du sang de quelque malheureux républicain qui s'était imprudemment engagé dans des cam

pagnes si dangereuses. Un fait bien singulier 1799. c'est que le généralissime de la chouanerie, M. de Puisaye, n'obtint jamais aucune considération dans une armée qui reçut toujours ses lois; il n'était considéré que pour l'argent qu'à chacun de ses voyages il apportait de l'Angleterre. Les autres chefs le regardaient plutôt comme l'agent de cette puissance, que comme un Français dévoué à son roi. Les nouveaux progrès de la chouanerie durent surtout être imputés à la nouvelle persécution que La Réveillère-Lépeaux suscita contre les prêtres. Dans le mois de mars 1799 la chouanerie, outre son premier théâtre, qui comprenait déjà sept ou huit départemens, sut rouvrir ses communications avec la Vendée, et la République vit avec étonnement que ce volcan n'était pas encore éteint. MM. d'Autichamp, Sapinaud, Suzannet rendirent de la gloire à ces noms si fameux de Cholet, de Montaigu, des Herbiers; bientôt, dans le Poitou et dans l'Anjou, l'orage s'étendit jusque sur des campagnes que les grandes victoires des Vendéens avaient laissées immobiles; il menaçait la Touraine. Scépeaux, d'Andigné, Bourmont, Frotté, Lemercier, Georges-Cadoudal, qui venaient de prendre

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leurs instructions en Angleterre auprès du comte d'Artois, passaient perpétuellement de la Bretagne dans le Maine et dans la BasseNormandie. Chacun de ces chefs avait souvent sous ses ordres jusqu'à deux ou trois mille hommes, et les excellens tireurs rangés sous leurs lois ne craignaient plus de se mesurer en combat réglé avec les troupes républicaines; les avantages restaient balancés, mais les royalistes savaient mieux profiter de ceux qu'ils obtenaient. Godet de Châtillon fut le plus heureux de ces généraux; après avoir remporté, à la tête de deux mille Chouans, un avantage sur un corps républicain, il en obtint un prix inespéré. Il put entrer dans cette ville de Nantes qui, cinq ans auparavant, avait résisté à l'armée la plus nombreuse et la plus brillante de la Vendée et aux héroïques efforts de Cathelineau et de Charette; il est vrai qu'il put seulement traverser cette ville, et que les Nantais y revinrent avant la nuit; mais un succès de ce genre avait eu un puissant effet sur l'imagination des royalistes, et avait causé une grande consternation parmi les républicains. Un autre chef des Chouans, Bourmont, vengeait de son côté, dans cette ville du Mans,

le désastre le plus horrible qu'eût éprouvé 1799. l'armée royale et catholique.

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Saint-Brieux, la Roche-Sauveur tombaient au pouvoir des deux chefs de Chouans Le Mercier et Saint-Régent. Frotté obtenait aussi des avantages considérables dans la BasseNormandie. Il est à remarquer que la République apprenait coup sur coup des nouvelles aussi humiliantes dans le moment même où les victoires du général Masséna et du général Brune venaient d'arrêter la nouvelle coalition dans ses triomphes, comme si sa destinée eût été de ne point périr par la guerre, mais par l'anarchie.

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Novi.

Août.

Je reviens aux faits inilitaires. La bataille Bataille de de Cassano et celle de la Trébia avaient décidé pour les Français la perte de toute l'Italie, à l'exception du seul territoire de Gênes. Le général Joubert, militaire plein de bravoure et de loyauté, maître de toutes ses passions, excepté de son courage dans un jour de combat, avait été nommé pour remplacer le général Moreau dans le commandement de l'armée d'Italie. Dans le court intervalle où le Directoire l'avait laissé sans emploi, il avait préparé et dirigé la journée du 30 prairial, la moins fameuse et la moins décisive de

II.

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