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l'État deviennent les partisans les plus zélés 1798. de ce gouvernement populaire; mais les formes de l'adininistration civile ne paraissaient pas suffisantes pour contenir une telle population : Championnet maintint le régime militaire. Le Directoire de France lui en fit un crime: mais ce qu'il reprochait le plus à ce général, c'était de ménager dans leur fortune les malheureux Napolitains. Il ne mit aucune pudeur dans son ingratitude envers le conquérant de Naples; il le destitua, et bientôt même il le fit arrêter.

FIN DU LIVRE SIXIÈME.

1798.

LIVRE SEPTIÈME.

CE livre, qui sera consacré à l'expédition de Bonaparte en Égypte, va nous distraire un moment de ces guerres partielles et désastreuses où la conquête n'emprunte le masque du génie révolutionnaire que pour ajouter aux malheurs et à l'opprobre des vaincus. Tandis que la République française, abusant du courage prodigieux de ses soldats, courbe sous un même joug des peuples fiers de leur liberté ou des peuples amoureux de leur esclavage, et ne multiplie au-dehors l'oppression que pour être encore plus déchirée au-dedans par l'anarchie, c'est un spectacle curieux et même consolant que de voir la civilisation reportée par les armes dans une contrée qui fut son antique berceau : ce tableau, qui ne manque ni d'intérêt ni de grandeur, fixe nos regards sur l'homme qui porte avec lui nos destinées.

J'ai déjà parlé du singulier empressement

avec lequel une élite de généraux, de marins, 1798. de savans et d'artistes s'engageait, sous Bonaparte, dans une expédition dont le secret n'était encore que faiblement deviné. Au moment même où il excitait les embrages jaloux du Directoire, il avait reçu tout pouvoir pour préparer la plus magnifique expédition qui fût jamais sortie des ports de France. Comme il s'agissait de tenir l'Angleterre indécise sur le but d'un tel armement, Bonaparte volait des côtes de l'Océan à celles de la Méditerranée. Notre marine tout entière passait sous ses lois. Le Directoire lui avait cédé une partie des opulentes dépouilles de Berne. Deux ou trois millions de livres tournois, provenant du trésor de cette république, étaient embarqués à bord de la flotte rassemblée à Toulon, et devaient bientôt, comme par un châtiment du ciel, être engloutis dans les flots au combat d'Aboukir. Les savans, les artistes et même les gens de lettres qui s'embarquaient avec Bonaparte, étaient tout radieux de confiance, et semblaient plaindre les parens, les amis qu'ils laissaient dans leur patrie. Un discours que M. de Talleyrand, ministre des affaires étrangères, avait lu dans une séance générale de l'Institut, et dans

1798. lequel il s'était étendu sur les merveilleux avantages de l'Égypte si elle devenait une colonie française, avait paru indiquer le but de l'expédition. Mais n'était-ce point une ruse diplomatique faite pour détourner l'attention des Anglais d'une destination encore plus alarmante pour eux. Dans l'état de confusion où tant d'événemens, et surtout la révolution de Suisse, avaient plongé le droit des gens, on regardait comme la question la plus oiseuse de rechercher quels droits on pouvait avoir sur l'Égypte, quels griefs on pouvait alléguer, soit contre la Turquie, soit contre les Mamelucks. On voyait dans l'Égypte une magnifique compensation de la perte de Saint-Domingue, et une grande source de désolation pour le commerce et pour la marine de l'Angleterre. Déjà les esprits s'exerçaient tantôt sur les moyens de reprendre le vieux passage des Indes, de communiquer avec Tippo-Saëb, cet intrépide adversaire des Anglais, et de ruiner leur empire du Bengale; tantôt sur la conquête prochaine de l'Arabie Heureuse, de cette Palestine si chère et si funeste aux croisés, de la Syrie, et peut-être de Constantinople. Ceux même des savans qui, fidèles aux oracles philosophiques,

avaient insulté au délire des croisades, montraient le plus vif enthousiasme pour une croisade scientifique.

1798.

de Malte par

Le 19 mai l'escadre française appareilla de Prise de l'île Toulon; elle était composée de treize vais- Bonaparte. seaux de ligne, parmi lesquels étaient le magnifique vaisseau l'Orient, de cent vingt canons; le Guillaume Tell et le Généreux, de quatre-vingts; tous les autres vaisseaux, de soixante-quatorze. Quatre-vingt-dix autres bâtimens de guerre, frégates, cutters, chaloupes canonnières, ou galiotes à bombes, et plus de trois cents bâtimens de transport. L'armée qui la montait était de vingt-huit mille hommes, presque tous vieux soldats de l'armée d'Italie. Le 8 juin une partie de cet immense armement parut devant Malte. L'ordre célèbre qui régnait dans cette île était misérablement dispersé et affaibli depuis la révolution française. La plupart des chevaliers français, émus des périls de leur roi, avaient regardé comme leur premier devoir de se rallier aux drapeaux des princes; d'autres combattaient dans la Vendée, dans la Bretagne; plusieurs avaient péri dans les journées de Quiberon. Une funeste sécurité s'était emparée de la plupart de ceux qui

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