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Berne. Le sénateur ne l'estima qu'à 10 mil- 1798. lions, sans doute afin de ne pas trop exciter la cupidité des républicains français. Peutêtre aussi Bonaparte avait-il été irrité de ne recevoir dans ce pays que des hommages peu empressés; on l'accuse d'avoir encouragé le Directoire à une guerre odieuse : il s'en justifie dans ses Mémoires; mais en blåmant les procédés atroces auquel le gouvernement eut recours, il prétend qu'il eût fallu se borner à protéger par les armes l'indépendance du pays de Vaud; c'était déjà beaucoup.

du pays de

Cependant les armées françaises bordent de Insurrection toutes parts le territoire helvétique; l'agres- Vaud. sion commencera pendant l'hiver, parce que la cupidité ne peut attendre jusqu'au printemps. L'envoyé du Directoire, Menjaud, porte à la diète tous les griefs dérisoires et absurdes. fabriqués dans le cabinet du Luxembourg; il exige d'un État neutre le renvoi de l'ambassadeur d'Angleterre; c'était M. Wickam, souvent nommé dans les correspondances des royalistes, et que le Directoire affectait de craindre comme un appui de tous les ennemis de la révolution. Une par

1798. tie du tie du pays de Vaud s'enflamme à l'aspect des défenseurs qui vont appuyer ses prétentions, ou plutôt sa révolte. Cependant le sénat de Berne se regarde encore comme sûr de la fidélité de ses sujets; il ne craint pas de la soumettre à une épreuve solennelle. Les habitans sont invités à renouveler leurs sermens au sénat; la rébellion n'était dans le cœur que de quelques citadins jaloux; le serment est prêté à une majorité assez imposante jusque dans la ville de Lausanne qui paraissait la plus portée à l'indépendance. Les rebelles ne sont pas découragés ; n'auront-ils pas pour eux les baïonnettes françaises? Le général Brune ne leur a-t-il pas déjà promis du secours? le moment leur paraît beau pour frapper un coup d'audace. Ils brûlent surtout de parodier le premier acte de la révolution française, et trouvent dans le château de Chillon une Bastille à conquérir. Le sénat de Berne avait eu la faiblesse d'envoyer dans un pays ainsi disposé à l'insurrection celui de ses membres qui s'était le plus signalé par un enthousiasme réel ou affecté pour la république française; c'était ce colonel de Weiss qui avait poussé l'oubli de toute pudeur jusqu'à

cultiver l'amitié de Roberspierre; il se montrait pourtant inflexible sur la souveraineté absolue du sénat, et s'était flatté de convertir par son éloquence les principaux rebelles. Écrivain infatigable, il célébrait dans d'éternelles brochures les bienfaits du gouvernement paternel de Berne avec la même plume qui lui avait servi trop souvent à justifier les atrocités révolutionnaires de nos décemvirs. Un tel soin semblait lui avoir fait oublier complétement l'usage des armes. Dès qu'il vit les insurgés vaudois s'avancer avec la cocarde verte, leur nouveau ralliement, il ne douta point que les soldats français ne dussent bientôt marcher derrière eux, et ne put se résoudre à combattre une nation d'abord l'objet de son enthousiasme et maintenant l'objet de sa terreur; il fuit et va se réfugier à Yverdun. Pendant ce temps, les insurgés s'emparent avec une merveilleuse facilité, mais non sans beaucoup d'orgueil, du château de Chillon gardé par quatorze invalides; encore avaientils pris la précaution d'apporter avec eux un faux ordre du bailli de Vevay pour s'en faire ouvrir les portes. Dès-lors les insurgés s'égalèrent aux vainqueurs de la Bas

1798.

1798. tille, qui, beaucoup plus nombreux, n'avaient pas eu beaucoup plus de périls à courir.

Pendant que Berne apprenait le lâche abandon d'un pays si florissant, le canton de Bâle échappait à la Confédération helvétique, et se plaçait avec une confiance insensée sous la protection française; deux hommes doués d'une activité et même d'une éloquence funeste à leur patrie, le sénateur Legrand et le grand tribun Ochs, avaient dirigé ce mouvement, et n'avaient pas manqué d'orner leur insurrection de quelques accessoires empruntés de la révolution française ; on força, on abattit des donjons où peut-être n'avait pas logé depuis un siècle un seul prisonnier d'état; on exigea l'abdication de magistrats dont l'imprévoyance ou la faiblesse avaient encore surpassé celles du sénat de Berne; on planta des arbres de la liberté, comme si la liberté ne datait en Suisse que d'un jour. Les Français, dans le pays de Vaud, saisirent pour prétexte une prétendue insulte faite à un de leurs postes; dans le canton de Bâle, ils se passèrent de tout prétexte, pour entrer sur le territoire suisse; et sans ménager beaucoup les insurgés qui leur livraient honteusement

le passage, ils s'annoncèrent par leur protec- 1798. tion superbe et onéreuse plutôt en maîtres qu'en amis.

Cependant la diète était rassemblée dans la ville d'Arau. Les députés de Zurich et des petits cantons virent toute l'étendue des malheurs qui allaient fondre sur eux, et résolurent de les affronter. L'enthousiasme devint bientôt universel; tous se représentaient l'exemple des héros de leur histoire; tous se montraient animés des mêmes sentimens ; on eut le scrupule de ne rien changer à la formule du serment prêté par les trois héros de Schwitz, d'Ury et d'Unterwalden au premier jour de la liberté. A une époque où la révolution française répandait partout l'épidémie des sermens et des parjures, c'était un grand spectacle que celui d'un serment vraiment religieux et vraiment héroïque; nous verrons comment les descendans des Guillaume Tell, des Stauffacher, des Furst, des Melchtal, le remplirent dans les mêmes lieux d'où ces fondateurs de la liberté helvétique lancèrent des quartiers de roche sur leurs oppresseurs.

Faiblesse

du sénat de

Les Français marchaient déjà sur Berne, et les conseils du sénat étaient plus que jamais af- Berne.

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