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tout sur lui, osant tout, imaginant tout, prévoyant à tout, démontant ses capitaines au besoin, nommant ses officiers, équipant et faisant combattre des vaisseaux condamnés depuis long-temps; trouvant un hivernage sur les lieux mêmes, dans l'Inde, quand la routine voulait qu'on fût les chercher à 12 ou 15 cents lieues de là, à l'île de France; enfin on le vit, devançant la manière de nos jours, s'approcher de la côte, embarquer des soldats qui avaient combattu la veille l'ennemi, aller battre avec eux l'escadre anglaise, et les reporter le lendemain à leur camp pour qu'ils puissent combattre de nouveau. Aussi notre pavillon prit-il tout-à-coup une supériorité qui dérouta l'ennemi. « Oh! » pourquoi cet homme, s'est écrié l'Empereur, » n'a-t-il pas vécu jusqu'à moi, ou pourquoi » n'en ai-je pas trouvé un de sa trempe, j'en » eusse fait notre Nelson, et les affaires eussent » pris une autre tournure! Mais j'ai passé tout » mon temps à chercher l'homme de la marine, sans avoir jamais rien pu rencontrer. Il y a >> » dans ce métier une spécialité, une technicité » qui arrêtaient toutes mes conceptions. Pro» posais-je une idée nouvelle, aussitôt j'avais » Ganthaume sur les épaules et la section de >> marine, Sire, cela ne se peut pas. » pourquoi?

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Et

Sire, les vents ne le permettent

» pas, et puis les calmes, les courans; et j'étais » arrêté tout court. Comment continuer la dis>>cussion avec ceux dont on ne parle pas le >> langage. Combien de fois, au Conseil d'État, >> leur ai-je reproché d'abuser de cette circons>>tance. A les entendre, il eût fallu naître dans >> la marine pour y connaître quelque chose. Et >> je leur ai dit souvent qu'ils abusaient encore, » que je n'eusse demandé que de faire la traver»sée de l'Inde avec eux, et qu'au retour je me » serais fait fort d'être aussi familier avec leur » métier qu'avec mes champs de bataille. Ils » n'en croyaient rien, et revenaient toujours à » ce qu'on ne pouvait être bon marin si on ne » s'y prenait dès le berceau; et ils me firent >> faire quelque chose à cet égard qui m'a long>> temps pesé, ce fut l'enrôlement de plusieurs » milliers d'enfans de six à huit ans.

J'eus beau me débattre, il me fallut céder » à leur unanimité, en les prévenant toutefois » que j'en chargeais leur conscience. Qu'en ré>> sulta-t-il? que le public murmura, déclama » beaucoup et nous couvrit de ridicule; quali>> fiant l'opération de massacre des innocens. » Voilà que, plus tard, de Winter, Verhuel, >> tous les marins du Nord et d'autres encore >> sont venus me dire et ont soutenu que 18, 20 » ans, l'âge de la conscription, n'était pas trop

>> tard pour commencer à être matelot; les Da» nois, les Suédois y emploient leurs soldats; >> chez les Russes, la flotte n'est qu'une portion » de l'armée principale, ce qui donne l'avan>> tage inappréciable de l'avoir en permanence, >> et à deux fins.

» J'avais imaginé moi-même, a-t-il ajouté, >> quelque chose de la sorte en créant mes équi>> pages de haut-bord; mais que d'obstacles ne >> rencontrai-je pas, que de préjugés j'eus à » vaincre, quelle force de volonté je dus employer pour parvenir à donner un uniforme >> à ces pauvres matelots, à les enrégimenter, à >> leur faire faire l'exercice; je- gâtais tout, di» sait-on, et pourtant de quelle utilité n'ont-ils » pas été! Quelle plus heureuse idée que d'a>> voir deux services pour une seule paye. Ils » n'ont pas été moins bons matelots, et se sont >> montrés les meilleurs des soldats. On les a >> trouvés, au besoin, matelots, soldats, artil» leurs, pontonniers, tout. Si, dans la marine, » au lieu d'avoir des obstacles à combattre, j'a» vais rencontré quelqu'un qui eût abondé dans » mon sens et devancé mes idées, quel résultat >> n'eussions-nous pas obtenu; mais, sous mon » règne, il n'a jamais pu s'élever dans la marine quelqu'un qui s'écartât de la routine, et sût » créer. J'aimais particulièrement les marins,

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j'estimais leur courage, j'estimais leur patrio>> tisme; mais je n'ai jamais pu trouver entre » eux et moi d'intermédiaire qui sût les faire >> agir et les faire mériter, etc., etc. »>

Jeudi 7.

Organisation impériale; préfets, auditeurs au Conseil d'État; motifs des gros appointemens; intentions futures, etc., etc.

Napoléon, parlant de son organisation impériale, disait qu'il en avait fait le gouvernement le plus compact, de la circulation la plus rapide, et des efforts les plus nerveux, qui eût jamais existé : « Et il ne fallait rien moins que >> tout cela, remarquait-il, pour pouvoir triom>>pher des immenses difficultés dont nous étions » entourés, et produire toutes les merveilles » que nous avons accomplies; l'organisation des préfectures, leur action, les résultats étaient » admirables et prodigieux. La même impulsion >> se trouvait donnée au même instant à plus de » 40 millions d'hommes; et, à l'aide de ces cen>> tres d'activité locale, le mouvement était aussi » rapide à toutes les extrémités qu'au cœur même.

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» Les étrangers qui nous visitaient, et qui >> savaient voir et juger, en étaient émerveillés. » Et c'est à cette uniformité d'action, sur un » aussi grand terrain, qu'ils attribuaient surtout >> ces prodigieux efforts, ces immenses résul

>> tats, qu'ils avouaient n'avoir pas pu compren>> dre jusque-là.'

» Les préfets, avec toute l'autorité et les res>> sources locales dont ils se trouvaient investis, ajoutait l'Empereur, étaient eux-mêmes des » Empereurs au petit pied; et comme ils n'avaient » de force que par l'impulsion première, dont ils » n'étaient que les organes, que toute leur influen>> ce ne dérivait que de leur emploi du moment,

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qu'ils n'en avaient point de personnelle, qu'ils >> ne tenaient nullement au sol qu'ils régissaient, >> ils avaient tous les avantages des anciens grands >> agens absolus, sans aucun de leurs inconvé>> niens. Il avait bien fallu leur créer toute cette puissance, disait l'Empereur, je me trouvais » dictateur, la force des circonstances le vou» lait ainsi, il fallait donc que tous les filamens, » issus de moi, se trouvassent en harmonie avec » la cause première, sous peine de manquer » résultat. Le réseau gouvernant dont je couvris >> le sol requérait une furieuse tension, une » prodigieuse force d'élasticité, si l'on voulait >> pouvoir faire rebondir au loin les terribles >> coups dont on nous ajustait sans cesse. Aussi » la plupart de ces ressorts n'étaient-ils, dans » ma pensée, que des institutions de dictature, » des armes de guerre. Quand le temps fût venu » pour moi de relâcher les rênes, tous mes fila

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