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cause de son prince était déjà perdue qu'il n'avait encore pu se faire entendre. '

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Au surplus le public n'avait pas tardé à être mis dans la confidence; déjà M. de Nesselrode avait écrit au préfet de police de mettre en liberté tous les individus détenus pour attachement à leur légitime souverain, et bientôt après les murs de Paris avaient été placardés d'une

blée, allait et venait. Ce prince, du ton de voix le plus prononcé, débuta par nous dire qu'il ne faisait pas la guerre à la France et que ses alliés et lui ne connaissaient que deux ennemis, l'empereur Napoléon et tout ennemi de la liberté des Français... que les Français étaient parfaitement libres; que nous n'avions qu'à faire connaître ce qui nous paraissait certain dans les dispositions de la nation, et que son vœu serait soutenu par les forces des alliés... J'éclatai par la déclaration que nous étions tous royalistes et que la France l'était comme nous... « Eh bien, dit alors l'empereur Alexan« dre, je déclare que je ne traiterai plus avec l'empereur

Napoléon... » On obtint de ce monarque que cette déclaration fût rendue publique : deux heures après elle couvrait les murs de la capitale, par les soins de MM. Michaud, qui se trouvaient dans les appartemens voisins de la salle du conseil. » (Voy. p. 62 et suiv.)

1 A la fin du conseil nous mîmes tous nos soins à empêcher l'effet des représentations que les négociateurs de Napoléon pouvaient chercher à produire; si nous ne pûmes les empêcher d'arriver, on parvint du moins à abréger leur séjour et à en atténuer l'effet. >> (Voy. pag. 62 des révélations de l'abbé de Pradt.)

déclaration de l'empereur Alexandre, faite tant en son nom qu'en celui des alliés, portant qu'on ne voulait plus traiter des intérêts de la France avec Napoléon ni avec aucun membre de sa famille.

Les vainqueurs ont parlé : l'esclavage en silence
Obéit à leur voix dans cette ville immense.

VOLTAIRE, Orphelin de la Chine.

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CHAPITRE II.

suite des nouvelles qu'on reçoit de paris.

(Du 1 au 2 avril.)

CEPENDANT les alliés voulaient avant tout assurer la vie de leurs soldats. Depuis deux mois, quinze à vingt mille étaient tombés sous les coups des paysans français; il était urgent de désarmer

cette animosité.

On desirait le rétablissement des Bourbons; mais on ne voulait pas que cette révolution parût être commandée par la force des armes; il fallait aller doucement, ménager l'opinion, faire parler des voix françaises et ne paraître accéder qu'au vou national. Tel était le plan des alliés ; leur langage était devenu celui de la générosité, les partisans des Bourbons faisaient le reste. Au dehors ils provoquaient le retour de leurs princes avec tout l'essor d'un zèle long-temps com

primé; on ne voyait qu'eux allant, venant à travers les bagages et les bivouacs ennemis, qui encombraient nos ponts, nos quais et nos boulevards. Ils s'agitaient dans tous les sens, frappaient à toutes les portes; tout ce qui les écoutait leur était bon. Ils trouvaient d'utiles auxiliaires. dans cette foule de gens en place qui ne pensent qu'à conserver leur emploi; ils recrutaient surtout des prosélytes actifs parmi tous ces ambitieux que les honneurs et les grâces n'avaient pu encore atteindre depuis quinze ans qu'ils les sollicitaient. Déjà tout ce qui était mécontent du sort avait battu des mains à la nouvelle d'un revirement dans les fortunes; déjà toutes les familles qui avaient perdu à la révolution avaient calculé tout ce qu'une contre-révolution pouvait leur rendre. L'oreille des vieillards se prêtait volontiers à d'anciens noms, à d'anciens droits qui réveillaient les souvenirs de leur jeunesse ; l'imagination des femmes se laissait séduire par l'intérêt romanesque de quelques grandes infortunes; la population des boutiques, inquiète au bruit du sabre étranger qui battait le pavé, s'empressait de renier le souverain qu'elle admirait hier en un mot, les passions jalouses, le ressentiment des ambitions trompées, des vanités blessées, des torts justement punis; les lâchetés de l'ingratitude et même celles de la peur,

tout concourait à seconder les ennemis de Napoléon.'

En général l'idée de la conquête était insupportable aux Parisiens; on voulait à tout prix échapper à cette situation, et l'on courait se réfugier dans l'idée plus tolérable d'une restauration. Les chefs de parti avaient saisi habilement ce retour de l'amour-propre national sur luimême. La volonté des alliés n'était présentée que comme l'appui de la nôtre, et l'oppression que six cent mille étrangers exerçaient sur notre malheureux pays commençait à s'appeler la délivrance de la France."

Mais il fallait un organe à cette opinion publique qu'on voulait faire parler, et l'on n'avait pas

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<< La plupart des conjurés avaient été comblés de bienfaits par l'empereur; ils avaient trouvé de grands avantages dans ses victoires; mais plus leur fortune était devenue brillante, plus ils s'occupaient d'échapper au malheur commun... Comblez un homme de bienfaits, la première idée que vous lui inspirez, c'est de chercher les moyens de les conserver.» (Montesquieu, Grandeur et décadence des Romains, chap. 11 et 13.)

2 « Je dois sans doute au sang français qui coule dans mes veines, cette impatience que j'éprouve quand on me parle d'opinions placées hors de ma patrie; et si l'Europe civilisée voulait m'imposer la Charte, j'irais vivre à Constantinople,» (Châteaubriand, pag. 118, De la monarchie selon la Charte.)

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