Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

de Castiglione, électrisé par l'importance du rôle qu'il est appelé à jouer, retrouvera son ancienne audace, et fera quelque exploit digne de son âge héroïque. Napoléon ne veut négliger aucun moyen de stimuler l'énergie de son ancien compagnon; il charge l'impératrice elle-même d'aller voir la jeune duchesse de Castiglione, et de l'engager à concourir au salut public par toute l'influence qu'elle a sur le cœur de son mari.

Pendant les vingt-quatre heures qu'on a passées ou château de Surville, on n'a cessé de rassurer Paris, où le canon de Montereau avait retenti. D'abord des estafettes ont porté les premières nouvelles de nos succès; aux estafettes a succédé le départ d'un bulletin; ce dernier envoi est suivi de près par M. de Mortemart, l'un des officiers d'ordonnance les plus distingués, qui va porter à l'impératrice les drapeaux de Nangis et de Montereau.

Dans la journée du 20, Napoléon, avec le gros de ses troupes, remonte la rive gauche de la Seine par la route de Montereau à Nogent; il déjeune à Bray, dans la maison que l'empereur de Russie à quittée la veille; et le 20 au soir il se retrouve à Nogent, avec le corps d'armée du duc de Reggio, qui arrive par la route de Provins. Nogent avait cruellement souffert. Le général Bourmont et les braves troupes qu'il comman

dait y avaient disputé, pendant les journées du 10, du 11 et du 12, le passage de la Seine à toute l'armée du prince de Schwartzenberg; ils n'avaient cédé qu'à la dernière extrémité. Aussi la ville n'offre-t-elle plus que des débris d'incendie, des murs percés par des créneaux et des boulets, et çà et là quelques habitans qui n'ont plus que la vie à perdre! Au milieu de ce désastre, les sœurs de la charité de Nogent étaient restées dans leur hôpital; elles avaient recueilli les blessés! Le dévoûment imperturbable de ces bonnes sœurs leur avait valu l'estime et le respect des généraux ennemis, et nos blessés s'en étaient ressentis. Napoléon veut voir les sœurs et le curé; il les fait appeler, les remercie au nom de la patrie, et leur accorde, sur sa cassette, un premier secours de cent napoléons.

Le 21, on envoie à Paris un nouveau bulletin, pour satisfaire, autant que possible, à l'avidité avec laquelle on attend les résultats des derniers combats. Napoléon passe la journée à faire avancer les troupes qui défilent; et le 22 au matin, il se remet en marche pour suivre l'ennemi vers Troyes. La retraite des alliés se changeait en déroute à mesure que leurs colonnes venaient aboutir sur le grand chemin : l'accroissement de leur masse dans ce défilé, au lieu de réunir plus de forces, donnaient lieu à plus d'encombrement

et de désordre; l'effroi se propage dans toutes les directions. La peur a des ailes, et bientôt les routes des Vosges se couvrent de voitures, de charretiers, de blessés et de fuyards, qui reculent jusqu'au Rhin! Cent mille hommes fuient devant Napoléon, qui n'a pas quarante mille Français pour les poursuivre.

Cependant, sur la gauche, entre la Seine et l'Aube, un corps ennemi se présente, qui ne paraît pas entraîné dans la retraite générale des alliés. L'avant-garde de cette troupe vient se présenter aux portes de la petite ville de Méry, au moment même que les fourriers y entraient pour faire le logement du quartier impérial. Le général Boyer s'y porte aussitôt avec une division de la garde; mais il trouve au pont une résistance à laquelle il était loin de s'attendre. L'ennemi soutient notre attaque pendant le reste du jour et une partie de la nuit. Il ne se décide à abandonner la position qu'après que l'acharnement du combat a réduit cette malheureuse ville en cendres.

Quel est cet ennemi si obstiné? D'abord on s'imagine que c'est Witgenstein; qu'il veut rallier les Russes dans la presqu'île du confluent de l'Aube, et que, dans ce dessein, il attache une grande importance à rester maître du pont de Méry; mais pendant le combat on apprend que c'est aux Prussiens qu'on a affaire, et ce n'est pas

sans quelque surprise qu'on retrouve si promptement les troupes du maréchal Blücher. Les rapports étaient vagues. Ce mouvement de l'armée prussienne semble n'être qu'une forte reconnaissance que Blücher inquiet a fait faire pour savoir ce que devenait Schwartzenberg. Maintetenant que les Prussiens n'ont plus à douter du mauvais état de l'armée autrichienne, on conjecture qu'ils vont s'abandonner à ce mouvement général de retraite que leurs échecs de Montmirail et de Vauchamps ont commencé, et que les combats de Nangis et de Montereau viennent de rendre également nécessaire pour Schwartzenberg. On se garde donc bien de se laisser détourner par cette rencontre, du parti qu'on a pris de poursuivre les Autrichiens à outrance. On se contente de faire observer les troupes de Blücher dans leur retraite : bientôt on est certain qu'elles ont repassé l'Aube à Baudemont et à Anglure. On croit qu'elles ne font ce détour que pour reprendre plus sûrement la route de Châlons, et l'on ne pense plus qu'à arriver promptement à Troyes.

Le quartier impérial, n'ayant pu s'établir à Méry, était revenu sur la grande route, et s'était arrêté au hameau de Châtres. Napoléon y avait passé la nuit du 22 au 23 dans la chaumière d'un charron.

Le 23 au matin, le prince Wentzel-Lichtenstein se présente de la part du prince Schwartzenberg, dont il est aide-de-camp. Napoléon le reçoit entre les quatre murs du charron. Cet envoyé apporte la réponse à la lettre que Napoléon a écrite le 17, de Nangis, à son beau-père. Son langage est pacifique. Il ne dissimule pas combien les plans des alliés viennent d'être dérangés. Il avoue qu'on a reconnu de nouveau Napoléon aux coups qu'il portait, et c'est de la bouche même de cet ennemi que sortent les premiers éloges, peut-être les seuls que cette campagne mémorable ait valus personnellement à son auteur! Napoléon, mettant à profit les formes conciliantes que montre l'aide-de-camp autrichien, engage avec lui une conversation assez longue. Il lui parle des bruits qui se répandent depuis quelque temps sur un nouveau système qu'on prête aux alliés : il lui demande s'il est vrai que la querelle que nous fait l'Europe ait en effet changé de nature; si c'est maintenant à sa personne, à sa dynastie qu'on en veut; et si, conformément au plan favori de l'Angleterre, c'est maintenant de la famille des Bourbons qu'on s'occupe. Le prince Lichtenstein rejette vivement ces bruits, comme n'étant pas fondés: mais Napoléon lui fait sentir qu'ils n'ont que trop de consistance par la présence du duc d'Angoulême au quartier

« ZurückWeiter »