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révolutionnaire. Là, ils se livrent à tous les plaisirs avec de belles femmes; Barrère exerce son esprit contre le Pontife et le Prophète Robespierre; et après s'être ainsi égayés, ils sortent des bras de leurs courtisanes pour revenir au milieu du sang à Paris. »

Voilà des hommes bien dignes de supplanter Robespierre!

De leur côté, Tallien, Lecointre, Barras, et les autres, conspirent la maîtresse de Tallien, la Cabarus (arrêtée comme fille d'un banquier agioteur, comme femme d'un émigré, comme Suspecte) le presse de frapper Robespierre et de la délivrer. Fouché surtout, parvenu à se faire élire Président des Jacobins, se rend dangereux par ses intrigues.

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Bientôt, une pétition des Jacobins de Lyon aux Jacobins de Paris amène une vive discussion. Couthon accuse DuboisCrancé d'avoir laissé échapper Précy (t. 3, p.445 ) et le fait exclure de la Société. Robespierre accuse Fouché d'être cause du suicide du patriote Gaillard (t. 3, p. 549) et le fait sommer de venir se justifier. - Mais Fouché écrit qu'il a soumis toutes ses pièces au Comité, et prie les Jacobins de suspendre tout jugement jusqu'à ce que le Comité ait prononcé.

« Fouché craint-il les yeux et les oreilles du Peuple, dit alors Robespierre? Craint-il que sa triste figure ne révèle le crime? Craint-il que 6000 regards fixés sur lui ne découvrent son âme dans ses yeux, et qu'en dépit de la Nature qui les a cachés, on n'y lise ses pensées? La conduite de Fouché est celle d'un coupable: Je le regarde comme le Chef de la conspiration que nous avons à dénouer : il faut l'exclure. »

Et Fouché, quoique Président des Jacobins, est exclu! Mais c'est avertir Fouché, Tallien, et les autres, qu'ils sont perdus; c'est les pousser au désespoir; c'est une faute immense, que nous verrons renouvelée par Napoléon!

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Cependant, les Comités surtout redoutent la lutte et demandent une réunion. - Les deux Comités s'assemblent : on se plaint réciproquement; Elie Lacoste, membre du Comité

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de Sûreté générale, va jusqu'à dire que Robespierre, SaintJust et Couthon, forment un Triumvirat. - Néanmoins Saint-Just, rappelé de l'armée, insiste pour un arrangement, et assure qu'un officier fait prisonnier à Maubeuge a dit que la Coalition attendait qu'un parti plus modéré abattît le Gouvernement révolutionnaire et fit prévaloir un autre système. On se fait quelques concessions; on convient que SaintJust fera un rapport dans lequel, sans parler des divisions, il parlera de l'unité des Comités et de tous leurs membres; et Barrère, qui craint beaucoup le combat, répète chaque jour que le Gouvernement est parfaitement uni. Mais n'est-ce pas une faute immense de la part de Robespierre de faire ou de laisser croire que tous les membres des Comités sont parfaitement unis, par conséquent qu'il approuve tout, qu'il dirige tout, qu'il est réellement Dictateur, comme on le dit partout, et qu'il est conséquemment responsable de tout? N'est-il pas ici victime de sa modération, de sa modestie, de son amour de la paix? Car le mal subsiste toujours; la réconciliation est impossible; la paix n'est qu'une trève; et les hostilités vont infailliblement recommencer.

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Néanmoins, quelque utile que soit la présence de SaintJust à Robespierre, tous deux sacrifient l'intérêt de leur sûreté personnelle à l'intérêt public; et Saint-Just retourne de suite à l'armée du Nord où se préparent de grands événements militaires... Ainsi, Robespierre et Saint-Just se sacrifient à la Patrie, tandis que leurs ennemis sacrifient tout à leur intérêt particulier! Cette différence de conduite ne suffit-elle pas encore pour prononcer entre eux tous?

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Après une bataille gagnée, le 13 juin, sur 30,000 Autrichiens, par une partie de l'armée du Nord, commandée par Pichegru, Macdonald et Moreau, la ville d'Ypres, assiégée par ces derniers, est tombée en leur pouvoir, le 17, avec une garnison de 7,000 hommes. Pendant ce temps, Jour

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dan, à la tête de 66,000 hommes, a commencé le siége de Charleroy sur la Sambre. - Après un premier engagement indécis, le 16, avec le Prince d'Orange, commandant les Coalisés, Charleroy est pris, le 25, en présence et sous la direction de Saint-Just ; et, le lendemain 26, Jourdan, Marceau, Kléber, Championnet, Lefebvre, gagnent, contre 80,000 Autrichiens, la fameuse bataille de Fleurus, qui force la Coalition à une retraite générale pour se concentrer à Bruxelles. -Jourdan se dirige alors sur Bruxelles, tandis que Pichegru s'y dirige aussi, après avoir pris Bruges, Ostende, Nieuport et Gand; et, le 10 juillet, l'armée française rentre dans la capitale de la Belgique, où bientôt 150,000 hommes se trouvent réunis. Bientôt aussi Liége est au pouvoir des Français. Jugez de la terreur en Europe et de la joie en France!

Les places de Condé, Landrecies, Valenciennes, le Quesnoy, sont aussitôt investies; et la Convention, espérant que la terreur les ferait rendre sans combat et sans effusion de sang, décrète que les garnisons seront sommées de se rendre à l'instant, sous peine d'être passées au fil de l'épée. Landrecies se rend de suite; les trois autres, sommées plus tard, se rendront également lors de la sommation.

Ces succès militaires valent beaucoup d'éloges à Carnot. « Auquel, il faut le dire ( dit M. Thiers, son admirateur), on attribue beaucoup trop les avantages de la campagne. ›

Il a même fait une faute immense qui pouvait tout perdre, en ordonnant à Pichegru, dès le commencement, de longer les côtes de l'Océan pour entrer en Hollande au lieu de marcher sur Bruxelles, et à Jourdan de lui envoyer 16,000 hommes au lieu de les garder pour prendre Charleroy.

« C'était une fort sotte idée, dit M. Thiers, un ordre mal conçu et des plus dangereux. Les Généraux en démontrèrent l'absurdité à SAINT-JUST, qui prit sur lui de ne pas l'exécuter ( et qui assura tous les succès de la campagne, en prévenant les désastres que pouvaient entraîner le plan et les ordres de Carnot).

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Et cependant, quand, le 9 thermidor, Robespierre se per.

mettra de critiquer Carnot et de lui faire le même reproche, M. Thiers s'indignera jusqu'à le traiter de misérable!

« La Victoire sur les ennemis (dit Robespierre, aux Jacobins, le 9 juillet) n'est pas celle à laquelle on doit le plus aspirer : la véritable victoire est celle que les amis de la liberté remportent sur les Factions; c'est cette victoire qui rappelle chez les Peuples la paix, la justice et le bonheur. Une Nation n'est pas illustrée pour avoir abattu des Tyrans ou enchaîné des Peuples. Ce fut le sort des Romains et de quelques autres Nations: notre destinée, plus sublime, est de fonder sur la Terre l'empire de la sagesse, de la justice et de la vertu.»

Conclure de là (comme le fait M. Thiers) qu'il s'afflige de nos victoires en Belgique parce qu'elles augmentent l'influence de ses adversaires (ce qui n'est pas vrai, puisque leurs divisions intestines et la retraite de Robespierre sont inconnues) est pour le moins bien téméraire et bien peu vraisemblable, puisque M. Thiers reconnaît qu'il a tous les moyens d'écraser ses ennemis... N'est-il pas plus vrai de reconnaître qu'il a raison de ne jamais perdre de vue le but principal d'un véritable homme d'Etat, qui est de vaincre l'anarchie pour fonder l'ordre, l'union, la paix, la justice et le bonheur du Peuple? Mais il a tort peut-être de temporiser si longtemps; car le mal est immense, le danger pressant, le remède urgent; depuis la rupture au 9 juin, sa puissance est telle qu'il ne peut que la diminuer en ajournant; et cependant il ajourne depuis plus d'un mois ! - Quoi qu'il en soit, voici son plan.

$ 20. - Plan de Robespierre contre ses adversaires.

Nous avons dit que les Jacobins et la Commune le pressent de faire un 31 mai :

« Mais il n'a pas, dit M. Thiers, le même goût qu'eux pour les moyens violents, et ne partage pas leur impatience brutale. Habitué à tout faire par la parole, et respectant davantage les lois, il aime mieux essayer d'un DiSCOURS dans lequel il dénoncera les Comités et demandera leur renouvellement. S'il réussit par cette voie de douceur, il est maître absolu, sans danger et sans soulèvement: s'il ne réussit pas, ce moyen pacifique n'exclut pas les moyens violents; il doit, au contraire, les devancer, comme au 31 mai. Il prend donc la résolution de faire d'abord présenter une pétition par les Jacobins, de pro5

T. IV.

noncer lui-même un grand discours, puis de faire paraître SaintJust avec un rapport. Si tous ces moyens ne suffisent pas, il a les Jacobins, la Commune et la force armée, pour une insurrection. Mais il espère n'être pas réduit à renouveler le 2 juin ; il n'a pas assez d'audace, et a encore trop de respect pour la Convention pour le désirer.»

Quoi! on semble lui reprocher de ne pas avoir assez d'audace pour désirer la violence! Ce n'est pas assez qu'il ait l'audace d'accepter l'insurrection quand elle sera démontrée nécessaire et indispensable! S'il avait l'audace de la désirer et de l'exécuter sans autre essai, on l'accuserait de cruauté, de férocité, de soif de sang, d'atroce tyrannie; mais l'habitude de noircir est telle qu'on lui reproche sa modération, son humanité, son respect pour les lois et pour la Convention, et sa préférence des moyens de douceur aux moyens violents! En vérité, cette partialité, cette injustice, cette fureur de calomnie, ne sont-elles pas révoltantes ? L'inconséquence n'est-elle pas manifeste? Ne semble-t-il pas qu'on ait juré de tout blâmer en lui?

En admettant qu'il n'ait pas commis une faute grave par sa temporisation, son plan d'une pétition, d'un discours, d'un rapport, et d'une insurrection en cas de nécessité, nous paraît le plus humain, le plus raisonnable et le meilleur, s'il est bien exécuté, si le discours est convenable, si l'insurrection est bien préparée, si toutes les mesures sont bien prises pour ne se laisser ni surprendre ni prévenir, pour bien éclairer l'opinion publique, et pour être bien prêt à frapper si le discours est insuffisant.

En attendant, il continue à s'expliquer, aux Jacobins, et à y faire expliquer ses amis. Là, le 11 juillet, Robespierre jeune se plaint de ce qu'on emploie les plus basses flatteries pour jeter la division entre les patriotes: on a été jusqu'à lui dire qu'il valait mieux que son frère!

« Mais en vain, s'écrie-t-il, voudrait-on me séparer de lui: tant qu'il sera le proclamateur de la morale et la terreur des scélérats, je n'ambitionne d'autre gloire que d'avoir le même tombeau que lui. »

« Tous les patriotes sont frères et amis, s'écrie aussi Couthon; pour moi, je veux partager les poignards dirigés contre Robespierre.

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