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les Bourbons que pour trouver le moyen de remplir ses poches... Il a été une cause active de la mort du Duc d'Enghien.... Il m'a proposé de faire assassiner les Bourbons, et m'a offert de se charger des moyens d'exécution. Il demandait un million pour chacun... Je refusai; je défendis même... »

Et cet homme que Napoléon connaissait si bien, qui pouvait corrompre par son exemple toute la Diplomatie étrangère et tous les fonctionnaires publics, il en fait son Ministre! Il le fait Grand-Electeur, PRINCE de Bénévent, Président du Sénat, membre influent du Conseil de Régence à l'appro. che de l'étranger!!!

« Fouché n'a jamais eu ni ma confiance ni mon estimé. Jamais il ne m'approcha sans se courber jusqu'à terre devant moi. Il avait été Terroriste et l'un des chefs Jacobins. Il trahit, sacrifia ses vieux camarades et ses complices.... C'était un gredin de toutes les couleurs, un Prêtre... Il était très-riche; mais ses richesses étaient mal acquises; il mettait dans sa poche une grande partie de l'impôt sur les maisons de jeu, affecté à un hospice pour les pauvres. »

Et il le fait son Ministre, Sénateur, Duc d'Otrante! Comment peut-il s'étonner que les Bourgeois soient corrompus!

« La masse du Peuple français présente certainement aujourd'hui le Peuple de l'Europe qui a le plus de sentiment national. Il a profité de ses 23 ans de révolution. Malheureusement, la classe qu'elle a élevée, la Bourgeoisie, n'a pas répondu à ses nouvelles destinées : elle n'a montré que CORRUPTION et versatilité; elle n'a déployé, dans les dernières crises, ni talent, ni caractère, ni vertu ; elle a perdu l'honneur du Peuple. »

A lui la faute, puisqu'il s'est fait Providence!

Cependant, ses partisans, ses nobles et sa famille (c'est bien naturel), veulent tout justifier et tout admirer en lui; on en veut faire un Moïse, un Mahomet, le législateur du Monde; le système Napoléonien, l'idée Napoléonienne, est la perfection même, la loi de l'avenir... L'Empire, néanmoins, qu'on avoue avoir été une Dictature, n'était qu'une Dictature temporaire, qui devait établir la liberté et l'égalité. Ecoutons Napoléon lui-même. A Sainte-Hélène, il dira (Mémorial):

«La descente en Angleterre était possible. J'aurais délivré les Anglais de leur Aristocratic; je les aurais laissés maîtres de faire leur

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Constitution; j'aurais proclamé la liberté et l'égalité... Un parti nombreux m'attendait... J'aurais ensuite parcouru l'Europe, du midi au nord, sous les couleurs RÉPUBLICAINES... »

« Je voulais fonder une MONARCHIE EUROPÉENNE, une Sainte-Alliance, un Congrès, un seul Code, un seul Peuple, une seule famille... Alors CESSAIT ma Dictature et COMMENÇAIT le régime constitutionnel... Paris était la capitale de l'Europe... Voilà ce que je voulais....... »

Peut-on le croire?... Pour nous, la chose est impossible, parce que (il est pénible d'être obligé de le dire) nous ne connaissons personne qui ait plus menti et trompé, parce que toute sa conduite démontre qu'il ne voulait que le Despotisme, parce qu'il a formellement déclaré qu'il ne voulait que consolider son organisation Impériale, la plus despotique qui fût jamais; car, à la clôture de la session de 1813, il a dit :

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Appelé par la Providence et la volonté de la Nation à constituer cet Empire, ma marche a été graduelle, uniforme. Dans peu d'années, ce grand œuvre sera terminé, et tout ce qui EXISTE complète

ment CONSOLIDÉ. »

A Sainte-Hélène, il dira encore (O’Méara) :

Ceux qui ont consenti à l'incorporation de la Pologne avec la Russie seront l'exécration de la Postérité, tandis qu'on prononcera mon nom avec respect alors que les belles contrées du sud de l'Europe seront la proie des barbares du nord... Dans quelques années, la Russie aura Constantinople, la Turquie et la Grèce. Cela me paraît aussi certain que si la chose était déjà faite. Toutes les cajoleries d'A· lexandre envers moi avaient pour but de m'y faire consentir. Alors la Russie sera maîtresse de l'Europe. Je l'ai prévu : je voulais rétablir la Pologne pour opposer une barrière à ces barbares... Dans cent ans, quand l'Europe sera envahie, on m'encensera, on dira: Napoléon

avait raison! »

Mais non! on dira: il a pu rétablir la Pologne et il ne l'a pas voulu... Il a ratifié le partage; il a garanti leurs parts à son beau-père et à Alexandre (p. 527)... Et si l'Europe est envahie par les barbares, on dira: c'est sa faute!

« Les Rois pouvaient avoir besoin de moi contre les Peuples, ou les Peuples contre les Rois, ou tous contre les Russes: car, avant 10 ans, toute l'Europe peut être Cosaque ou République. »

Oui, les Rois pouvaient avoir besoin de lui pour opprimer les Peuples, mais les Peuples n'en avaient pas besoin.

S'il était un tyran, dit-on, c'était du moins un tyran de

notre choix!... Mais, s'il a été choisi, ce n'est pas comme tyran ou pour être tyran! Sa tyrannie est une déception qui ne la rend que plus odieuse.

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L'ouvrier, dit-on, avait du travail et un salaire élevé!.. -Oui, mais momentanément, par hasard, parce qu'il n'y avait presque plus d'ouvriers, plus que des vieillards, des invalides, des femmes, surtout des filles (qui ne pouvaient trouver de maris): l'ouvrier jeune et non marié n'était, à ses yeux, comme on disait, que de la chair à canon. Il n'est pas cruel cependant, mais insensible; il fait tuer ses soldats comme il brùle sa poudre, et jonche de plus de 5 millions de cadavres, français et étrangers, les champs de l'Italie, de l'Egypte, de Saint-Domingue, d'Allemagne, de Prusse, de Russie et de France. Au lieu de donner au Peuple les marchandises anglaises, prohibées par le blocus continental et saisies, il les fait brúler ou détruire!

Il a fait des routes, des canaux, des ponts, des greniers d'abondance, des marchés!...Oui mais qu'est-ce que cela lui coûtait, à lùi? N'était-ce pas son devoir, et même son intérêt, pour s'en servir, surveiller, imposer? Est-ce que tous les Rois, de France, d'Angleterre, etc., n'en font pas autant, surtout les Présidents en Amérique ?

Il a enrichi nos musées et consacré la gloire française par de superbes monuments!.. - Louis XIV représentait aussi les Nations enchaînées à ses pieds: mais l'Assemblée Constituante (t. 1, p. 446), a brisé les monuments qui outrageaient les Peuples pour chatouiller l'orgueil des Rois. La gloire n'est pas dans la force, dans la victoire, dans la conquête, dans l'usurpation, dans le pillage et le vol, mais dans la justice, dans le respect des droits des autres, dans le courage à défendre les siens. Rien de plus beau, rien de plus admirable, rien de plus digne de la reconnaissance d'un Peuple que le Général et le soldat qui dévouent leur vie pour défendre le sol de la Patrie. Que des monuments éternisent leur dévouement à la défense nationale! Mais quand il s'agit d'une guerre de

conquête, le courage, le talent, la victoire, ne sont pas la gloire, et les monuments qui les consacrent ne peuvent être glorieux. Autrement, les féroces Aristocrates de l'ancienne Rome seraient donc les plus glorieux des humains! Les Attila, les Tamerlan, les Gengiskan, les Omar, les Barbares, seraient donc les plus glorieux des guerriers! Il n'y a pas de Peuple, pas de Roi, qui ne serait brillant de gloire, comme il n'y a pas de pays qui n'ait des monuments pour immortaliser ses victoires. Mais ces monuments, qui flattent la vanité des vainqueurs, ne sont-ils pas, pour les vaincus, une humiliation, un outrage, un aliment éternel de haine et de guerre entre les Nations, quand tout devrait faciliter la fraternité des Peuples?

Napoléon n'a jamais attaqué que pour prévenir une attaque préparée !... —Si le fait était vrai, il n'aurait fait que se défendre, et le seul reproche qu'il pourrait mériter pourrait 'être de n'avoir pas daigné faire connaître à la Nation la vérité : mais, depuis la paix d'Amiens, on n'a préparé contre lui l'attaque que parce que son ambition, ses usurpations, ses agrandissements, rompaient l'équilibre Européen et menaçaient l'indépendance de tous les Rois et de tous les Peuples; c'est lui qui a nécessité toutes les guerres, celles d'Autriche, de Prusse et de Russie, comme celle d'Espagne. Et il les a nécessitées seul, sans consulter le Sénat, sans rendre compte à la Nation. Rentrant à Grenoble, le 8 mars 1815, c'est lui-même qui dira: « J'ai trop AIMÉ la guerre ; je ne la ferai plus; je laisserai mes « voisins en repos ! » C'est lui qui prononce sa condamnation.

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On l'a appelé grand, héros, invincible!...—Oui, la flatterie, comme elle appellera Louis XVIII le Désiré, comme elle donne à tous les Rois toutes les vertus, avec l'amour du Peuple mais elle s'est trop hâtée de l'appeler invincible, puisqu'il finit par être vaincu, souvent vaincu (par une raison ou par une autre, qu'importe?) Il échoue en Syrie, à SaintDomingue, en Espagne, en Russie, en Allemagne, en France; il gagne les batailles, mais il perd les campagnes. Quelles effroyables déroutes ! quels revers inouïs! Et si de brillantes victoires suffisaient pour le rendre grand, glorieux, honoré,

d'éclatantes défaites auraient donc suffi pour le désagrandir, le déglorifier, le déshonorer!

Et de son im

Ses revers sont l'effet de la trahison!.. prévoyance, etc. Néanmoins, honte éternelle aux traitres, quoiqu'on trouve le stigmate de la trahison sur beaucoup de ces fronts couronnés par la gloire! Mais pourquoi ses camarades, ses favoris, ses amis, son Augereau, son Marmont, même son Berthier, même son Murat, se résignent-ils à le trahir? Pourquoi sa sœur, son frère Lucien, son frère Louis, sa femme même, sont-ils entraînés à l'abandonner? Tant d'ingratitudes, d'abandons, de trahisons, qui devaient répugner à tous, ne sont-ils pas la démonstration que son despotisme était devenu le plus intolérable des supplices?

Il a sauvé la France!... -Non, pas même au 18 brumaire (p. 514). Au contraire, il l'a perdue; et c'est en vain que, pour repousser l'accusation d'attentat, il s'écrie fièrement comme Scipion: J'ai sauvé la Patrie! Dans la vie de l'humanité, 14 ans sont un jour, comme l'histoire de Napoléon ne sera qu'une page pour l'une des générations à venir; et d'ailleurs ce n'est rien d'être vainqueur, le matin, au commencement de la bataille, si, à la fin, le soir, on est vaincu. Il a donc commis un attentat, un crime, sous prétexte de sauver la République et la France; et si, le matin, il a fait des conquêtes qui ont élevé le nombre des départements jusqu'à 130, il les a perdues le soir; il a perdu même la Belgique et la frontière du Rhin, acquises avant lui; il a livré le territoire et la Capitale à la Coalition, à la Restauration, après avoir arraché 2,100,000 soldats à la France depuis septembre 1805 à novembre 1813, après les avoir fait tuer presque tous.

Ila sauvé la Révolution!..-Non; il a pu la servir, en promenant ses soldats révolutionnaires dans toute l'Europe, et surtout en obligeant les Rois à parler de liberté pour soulever leurs Peuples contre son despotisme: mais c'est malgré lui; mais la République aurait bien autrement propagé la Révolution en Europe! Acharné contre elle, il lui a porté mille coups de poignards; et, s'il ne l'a pas tuée, c'est qu'elle

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