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croyons même que Robespierre est le seul homme qui, par la confiance qu'il inspire, puisse calmer la fureur du Peuple.

Mais M. Thiers prétend que c'est l'humanité, la confiance, la pitié, l'influence de l'opinion publique et le désir de faire cesser le Gouvernement révolutionnaire, qui dirigent les ennemis de Robespierre: or, c'est là une erreur capitale, contre laquelle nous ne pouvons ne pas protester au nom de l'Histoire; M. Thiers a lui-même raconté tout le contraire, et le contraire est manifeste; ce sont uniquement l'orgueil, l'ambition et la crainte d'un juste châtiment qui les feront agir dans leur intérét personnel; la plupart de ses adversaires, nous le verrons, sont des lâches, des voleurs, de féroces brigands. C'est si peu l'humanité qui détermine la chute de Robespierre que ceux qui vont l'attaquer sont précisément ceux qui, dans les 20 derniers jours, profitent de sa retraite pour multiplier les exécutions et faire tomber, 2 décades, 1285 têtes sur l'échafaud. C'est au contraire parce qu'il veut faire cesser la Terreur que les plus cruels Terroristes vont le renverser. Et jamais un historien n'a plus complètement pris le contre-pied de la vérité.

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Robespierre commence à attaquer les Comités.

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Mais Robespierre, tous les jours plus adoré des Jacobins, dit M. Thiers, commence à révéler les dissensions des Comités.

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Autrefois, dit-il le 1er juillet, la Faction sourde qui s'est formée des restes de Danton attaquait les Comités en masse: aujourd'hui, elle aime mieux attaquer quelques membres en particulier pour parvenir à briser le faisceau; elle attribue ce qui appartient à tout le Gouvernement à un seul individu; elle ose dire que le Tribunal ré volutionnaire a été réorganisé pour égorger la Convention; et malheureusement elle n'a obtenu que trop de confiance; on a cru à ses calomnies, on les a répandues avec affectation ; on a parlé de Dictateur, on l'a nommé ; c'est MOI qu'on a désigné; et vous frémiriez si je vous disais en QUEL LIEU! La vérité est mon seul asile contre le crime. Ces calomnies ne me décourageront pas sans doute; mais elles me laissent indécis sur la conduite que j'ai à tenir. En attendant que je puisse en dire davantage, j'invoque, pour le salut de la République,

les vertus de la Convention, les vertus des Comités, les vertus des bons citoyens, et les vôtres, qui ont été si souvent utiles à la Patrie.

M. Thiers, qui ne flétrit pas les intrigues, les manoeuvres, les calomnies et les perfidies des Comités, appelle insinuations perfides ces précautions si naturelles pour se défendre contre un grand danger!

15. Toutes les chances sont en faveur de Robespierre.

M. Thiers dit que les Jacobins le paient de sa confiance en eux par une adulation sans bornes.... Il reconnaît que les Jacobins, la Commune, les Sections, l'ancien Maire Pache (que le Comité vient de faire arrêter pour le lui enlever), le nouveau Maire Fleuriot, l'Agent national Payan, le Commandant de la Garde nationale Henriot, les Juges et les Jurés du Tribunal révolutionnaire, lui sont tous dévoués.

« Avec de la résolution et de l'énergie, dit-il, Robespierre peut devenir très-redoutable.... Si les Comités et la Convention ne lui obéissent pas, il n'a qu'à se plaindre aux Jacobins, y exciter un mouvement, communiquer ce mouvement à la Commune, lui faire déclarer l'insurrection, mettre les Sections sur pied, envoyer Henriot demander à la Convention 40 ou 60 Députés : il les OBTIENDRA CERTAINEMENT, et tout le Tribunal est à ses ordres pour les égorger. Tous les moyens enfin d'un 31 mai, plus prompt, PLUS SUR que le premier, sont dans ses mains. »

Quelle puissance! quelle preuve en sa faveur! que d'actions de grâces lui doivent ses ennemis si c'est sa modération qui les sauve !

Ses partisans lui demandent le signal; Henriot promet d'être plus énergique encore qu'au 2 juin (t. 3, p. 417): mais Robespierre, qui aime mieux tout faire par la PAROLE et qui croit encore pouvoir beaucoup par elle, veut attendre un moment favorable pour les attaquer ouvertement à la Convention. En attendant, il exerce une police active au moyen du Bureau qu'il a organisé dans le Comité, surveille ses adversaires, et s'instruit de toutes leurs démarches. Il se donne maintenant un peu plus de distractions qu'auparavant; mais

il n'est pas vrai qu'il aille à la campagne, à Maison-Alfort, près Paris, encore moins qu'il y fasse aucune orgie. - Néanmoins cette inaction, cette temporisation, ne sont-elles pas une faute immense, inconcevable, inexcusable dans un homme qui croit tenir dans ses mains le salut de la République?

S 16. - Manœuvres des adversaires de Robespierre.

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En l'absence de Robespierre et de Saint-Just, et quoique gênés par Couthon, les trois adversaires de Robespierre (Billaud, Collot, Barrère), se préparent à l'attaque; s'emparent davantage de Carnot, Prieur et Lindet; se liguent plus étroitement avec le Comité de Sûreté générale et avec les Députés menacés; font arrêter le Maire Pache dévoué à leur rival; font partir pour la frontière 15 des 48 compagnies de canonniers, toujours disposées à l'insurrection; s'emparent le plus qu'ils peuvent de toutes les affaires; et répandent mille calomnies contre leur rival. Voici comment, le 9 thermidor, il dénoncera lui-même leurs manoeuvres :

« Je frémis quand je pense que des ennemis de la Révolution, que d'anciens professeurs de royalisme, que des ex-nobles, des émigrés peut-être, se sont tout-à-coup faits révolutionnaires et se sont transformés en Commis du Comité de Sûreté générale, pour se venger sur les amis de la Patrie de la puissance et des succès de la Révolution. Il serait assez étrange que nous eussions la bonté de payer les espions de Londres ou de Vienne pour nous aider à faire la police de la République! >

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C'est bien possible, puisque nous avons vu le Baron d'Imbert (t. 3, p. 445) et le Chevalier M..... (t. 3, p. 562) jouer ce rôle infernal... Que le Comité de Sûreté générale est coupable alors! Mais que d'ennemis le malheureux Robespierre doit avoir parmi les Commis qu'il dénonce ainsi!

« Nous sommes instruits qu'ils sont payés par les ennemis de la Révolution pour déshonorer le Gouvernement révolutionnaire en luimême et pour calomnier les Représentants du Peuple dont les Tyrans ont ordonné la perte. Par exemple, quand les victimes de leur perversité se plaignent, ils s'excusent en leur disant : C'est Robespierre qui le veut; nous ne pouvons pas nous en dispenser.—Mais le trait que

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je viens de citer n'est qu'une branche du système de persécution plus vaste dont je suis l'objet. En développant cette accusation de Dictature, mise à l'ordre du jour par les Tyrans, on s'est attaché à me charger de toutes les iniquités, de tous les torts de la Fortune, ou de toutes les rigueurs commandées par le salut de la Patrie. - On disait aux Nobles: C'est lui seul qui vous a proscrits. On disait en même temps aux patriotes: Il veut sauver les Nobles. On disait aux Prêtres: C'est lui seul qui vous poursuit; sans lui vous seriez paisibles et triomphants. On disait aux fanatiques : C'est lui qui a détruit la Religion.-On disait aux patriotes persécutés : C'est lui qui l'a ordonné ou qui ne veut pas l'empêcher. On me renvoyait toutes les plaintes dont je ne pouvais faire cesser les causes, en disant : Votre sort dépend de lui seul.- Des hommes apostés dans les lieux publics propageaient chaque jour ce système; il y en avait dans le lieu des séances du Tribunal révolutionnaire, qui disaient: Voilà des malheureux condamnés, qui est-ce qui en est la cause? ROBESPIerre. On s'est particulièrement attaché à prouver que le Tribunal révolutionnaire était un tribunal de sang créé par moi seul et que je maîtrisais absolument pour faire égorger tous les gens de bien, et même tous les fripons, car on voulait me susciter des ennemis de tous les genres. Ce cri retentissait dans toutes les prisons; ce plan de calomnies était exécuté à-la-fois dans tous les départements par les émissaires de la tyrannie.-Ce n'est pas tout; on a proposé dans ces derniers temps des projets de finances qui m'ont paru calculés pour désoler les citoyens peu fortunés et pour multiplier les mécontents. J'avais souvent appelé inutilement l'attention du Comité de Salut public sur cet objet eh bien ! croirait-on qu'on a répandu le bruit qu'ils étaient encore mon ouvrage et que, pour l'accréditer, on a imaginé de dire qu'il existait au Comité de Salut public une Commission de finances et que j'en étais le Président? · Mais comme on voulait me perdre, surtout dans l'opinion de la Convention nationale, on a prétendu que moi seul avais osé croire qu'elle pouvait renfermer dans son sein quelques hommes indignes d'elle.—On a dit à chaque Député revenu d'une mission dans les départements que moi seul avais provoqué son rappel. Je fus accusé par des hommes très-officieux et très-insinuants de tout le bien et de tout le mal qui avait été fait.-On rapportait fidèle ment à mes collègues et tout ce que j'avais dit et surtout ce que je n'avais pas dit.—On écartait avec soin le soupçon qu'on eût contribué à un acte qui pût déplaire à quelqu'un : j'avais tout fait, tout exigé, tout commandé; car il ne faut pas oublier mon titre de Dictateur...Quand on eût formé cet orage de haines, de vengeances, de terreurs, d'amours-propres intéressés, on crut qu'il était temps d'éclater. Ceux qui croient avoir des raisons de me redouter se flattaient hautement

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que ma perte certaine allait assurer leur salut et leur triomphe; tandis que les papiers anglais et allemands annonçaient mon arrestation, des colporteurs de journaux la criaient à Paris. Mes collègues, devant qui je parle, savent le reste beaucoup mieux que moi ; ils connaissent toutes les tentatives qu'on a faites auprès d'eux pour prépa rer le succès d'un roman qui paraissait une nouvelle édition de celui de Louvet; plusieurs pourraient rendre compte des visites imprévues qui leur ont été rendues pour les disposer à me proscrire.— Enfin, on assure que l'on était prévenu généralement dans la Convention nationale qu'un acte d'accusation allait être porté contre moi: on a sondé les esprits à ce sujet, et tout prouve que la probité de la Convention nationale a forcé les calomniateurs à abandonner ou du moins à ajourner leur crime. »

« Le but de mes ennemis est atroce... mais que leurs moyens sont méprisables! Jugez-en par un seul trait ! J'ai été chargé momentanément, en l'absence de Saint-Just, de surveiller un Bureau de police générale récemment et faiblement organisé dans le Comité de Salut public; ma courte gestion s'est bornée à provoquer une trentaine d'arrêtés, soit pour faire mettre en liberté des patriotes persécutés, soit pour s'assurer de quelques ennemis de la Révolution : eh bien, croirat-on que ce seul mot de police générale a ser vi de prétexte pour mettre sur ma tête la responsabilité de toutes les opérations du Comité de Sureté générale, des erreurs de toutes les Autorités constituées, des crimes de tous mes ennemis? Il n'y a peut-être pas un individu arrêté, pas un citoyen vexé, à qui l'on n'ait dit de moi: Voilà l'auteur de les maux; tu serais heureux et libre S'IL N'EXISTAIT PLUS.-Comment pourrais-je ou raconter ou deviner toutes les espèces d'impostures qui ont été clandestinement insinuées, soit dans la Convention nationale, soit ailleurs, pour me rendre odieux ou redoutable? Je me bornerai à dire que, depuis plus de six semaines, la nature et la force de la calomnie, l'impuissance de faire le bien et d'arrêter le mal, m'ont forcé à abandonner absolument mes fonctions de membre du Comité de Salut public; et je jure qu'en cela même je n'ai consulté que ma raison et la Patrie. »

Toutes ces manœuvres ne sont-elles pas bien détestables?

Mais quelle faute de la part de Robespierre de laisser prendre ces avantages à ses redoutables ennemis !

Cependant, le spirituel et voluptueux Barrère (dit M. Thiers) se rend souvent à sa maison, à Clichy, avec Vadier, Amar et Vouland, et Dupin, l'accusateur de Lavoisier et des 32 Feriniers-généraux (p. 23). Là, ils conspirent et dressent leurs listes pour le Tribunal

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