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Aux Cinq-Cents, l'un des conspirateurs, Gaudin, demande la parole et s'efforce d'effrayer en parlant des démagogues, des haches de la Terreur suspendues sur toutes les têtes et qui ne tiennent qu'à un fil .. Il propose : 1o de remercier les Anciens d'avoir sauvé la République par le décret d'hier; 2° de nommer une Commission de 7 membres pour faire un rapport (tout prêt) sur les dangers publics, et pour présenter des moyens de salut (tout prêts aussi, l'ajournement et le Consulat provisoire)... Et si cette proposition est adoptée, la révolution est faite.- Mais Delbrel dénonce les vrais conspirateurs et demande la Constitution ou la mort. Et à l'instant éclate le plus violent orage: Point de Dictature, s'écrient une foule de voix ! A bas les Dictateurs!... Vive la Constitution!... Les baïonnettes ne nous effraient pas!... le serment à la Constitution!... Et c'est en vain que Lucien veut rappeler à l'ordre, se couvre; toute l'Assemblée, entraînée par l'énergie de la Majorité, prête UNANIMEMENT le serment par acclamations. On décide même que le serment sera prêté par appel nominal à la tribune (faute énorme qui va faire perdre deux ou trois heures et refroidir l'enthousiasme); et Lucien, ainsi que les autres conspirateurs, n'osent pas refuser de le prêter eux-mêmes, et consentent à se parjurer; Augereau, cependant, fait pour ainsi dire défection, et reste dans la cour avec Gareau, Porte, et quelques autres. On assure même qu'il a la lâcheté de trahir ses collègues en offrant ses services à Bonaparte, qui n'en veut pas. On décide alors un message aux Anciens pour connaître les motifs de la translation. - Recevant la démission de Barras (Sieyes n'ose' pas notifier la sienne), on veut procéder au remplacement.-Cependant, cette résistance des Cinq-Cents achève d'ébranler les Anciens. - Et alors, poussé par Sieyes, Bonaparte se décide à se présenter devant eux à la tête de son État-major.

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Citoyens Représentants, dit-il d'une voix émue et entrecoupée, vous êtes sur un volcan... Permettez-moi de vous parler avec la franchise d'un soldat (Quel blasphème!). Vous avez transféré le Corps

législatif à Saint-Cloud. Vous m'avez appelé pour assurer l'exécution de votre décret. J'étais tranquille à Paris (mensonge) quand je l'ai reçu. A l'instant (mensonge) j'ai appelé mes frères d'armes. Je suis sorti de ma demeure pour vous obéir (Mensonge); nos intentions sont pures (Non), désintéressées (Non); et pour prix du dévouement (Non) que nous avons montré hier, aujourd'hui déjà on nous abreuve de calomnies (de vérités), moi et mes compagnons d'armes; on parle d'un nouveau Cromwell, d'un nouveau César (On a bien raison!); on dit que je veux établir un gouvernement militaire (Oui)..... Citoyens, si j'avais voulu opprimer la liberté de mon pays et usurper l'autorité suprême, ce rôle m'eût été facile au retour d'Italie, au moment du plus beau triomphe, lorsque la Nation, l'armée et les partis m'invitaient (Non) à m'en emparer... Je ne l'ai pas voulu alors, et je ne le veux pas aujourd'hui (Mensonge)... »

Que de mensonges déjà ! Quelle ignoble comédie!

« Je vous le jure (Parjure), Représentants du Peuple, la Patrie n'a pas de plus zélé défenseur que moi; je me dévoue (Non) tout entier pour faire exécuter vos ordres. Mais c'est sur vous seuls que repose son salut ;... car il n'y a plus de Directoire (il faut en nommer un autre); quatre Directeurs ont donné leur Démission (par suite d'un complot avec lui), et le cinquième a été mis en surveillance (crime!) pour sa sûreté (non!). Les dangers sont pressants (non); le Ministre de la police vient de m'avertir (rouerie) que, dans la Vendée, plusieurs places étaient tombées entre les mains des Chouans... Représentants, ne consultez que votre sagesse (farce) et l'imminence des dangers. Evitons de perdre ces deux choses pour lesquelles nous avons fait tant de sacrifices, la liberté et l'égalité. (Ruse! on va les détruire!) »

D

Le Député Linglet lui criant: Et la Constitution! » il répond :

« La Constitution! Vous n'en avez plus ! (Voilà le masque jeté !) Vous sied-il de l'invoquer? C'est vous qui l'avez détruite, le 18 fructidor, le 22 floréal et le 30 prairial. »

Mais c'est lui, Bonaparte, qui a envoyé Augereau pour faire le 18 fruetidor; c'est Sieyes qui l'a dirigé; ce sont Sieyes et Lucien qui ont organisé et exécuté le 30 prairial; et, depuis, Bonaparte et Lucien n'ont jamais cessé d'invoquer et de jurer la Constitution. C'était donc une ignoble hypocrisie, une détestable perfidie!

« La Constitution! Elle est méprisée par tous les partis (Non). 28

T. IV.

Tous les partis veulent la détruire (Non). La Constitution, n'est-ce pas en son nom que vous avez exercé toutes les tyrannies? »

Voici les Anciens, dont il vantait tout-à-l'heure la sagesse, transformés par lui en tyrans! C'est flatteur et rassurant pour eux!

Représentants, ne voyez pas en moi un misérable intrigant (Quelle idée!) qui se couvre d'un masque hypocrite (Comment peutil supposer qu'on peut le voir ainsi! J'ai fait mes preuves (comme Dumouriez et Pichegru avant leur trahison) de dévouement à la République ; et toute dissimulation m'est inutile (Elle lui est nécessaire)... Sauvons l'égalité, la liberté! (Quelle dissimulation!) Je vous déclare qu'aussitôt que les dangers qui m'ont fait confier des pouvoirs extraordinaires seront passés, j'abdiquerai ces pouvoirs. (Mensonge). Je ne veux être, à l'égard de la magistrature que vous aurez nommée, que le bras qui la soutiendra et fera exécuter ses ordres. »

Et il ne conspire que pour être, ce soir même, Consul, Dictateur, et plus tard Empereur et Roi!!!-Puis, il affirme qu'on lui a fait des propositions, et fait entendre que ce sont les Démocrates, ce qui est manifestement faux.

Alors Cornudet, l'un des conspirateurs, s'écrie:

«Qui douterait maintenant qu'il y eût une conspiration jacobine? Celui devant qui l'Europe et l'Univers se taisent d'admiration est là; c'est lui qui vous atteste l'existence de la conspiration; sera-t-il regardé comme un vil imposteur? (Quelle supposition!) Je vous le déclare, j'ai participé à la mesure de translation qui vous a été proposée. Où est le crime d'avoir prévenu cette conspiration jacobine par une conspiration plus sainte? (Il avoue la conspiration de Bonaparte, tandis que l'autre est supposée.) ›

La Minorité criant à Bonaparte de nommer les conspirateurs qu'il dit lui avoir fait des propositions, il ajoute :

Les Directeurs Barras et Moulins m'ont proposé de me mettre à la tête d'un parti tendant à renverser tous les hommes qui ont des idées libérales (c'est-à-dire Sieyes et les ennemis de la Constitution, pour conserver la Constitution.) »

« Si le Conseil des 500, reprend le conspirateur Cornudet, se refusait à sauver la Patrie, ce serait à nous à la sauver seuls. (C'est de l'anarchie, de la révolte ! ) Songeons que si la liberté est perdue pour elle est perdue pour l'univers entier ! (Hypocrite!)

nous,

Puis, Bonaparte s'efforce encore de rassurer les Anciens.

:

« Je le répète, reprend-il, qu'on ne croie point que je veuille m'emparer du pouvoir. (On le croit donc !) On me l'a offert depuis mon retour à Paris. Les différentes factions sont venues sonner à ma porte; je ne les ai point écoutées, parce que je ne suis d'aucune coterie, parce que je ne suis que du grand parti du Peuple français... (Il faut alors respecter ses Représentants!) Je n'ai accepté l'autorité que vous m'avez confiée que pour soutenir la cause de la République. ( Mensonge). Je ne vous le cache pas, je n'ai compté que sur le Conseil des Anciens je n'ai point compté sur le Conseil des 500, qui est divisé ; sur le Conseil des 500, où se trouvent des hommes qui voudraient nous rendre la Convention, les Comités révolutionnaires, les échafauds et l'horrible régime de la Terreur (calomnie pour effrayer); sur le Conseil des 500, où les chefs de ce parti viennent de prendre séance en ce moment; sur le Conseil des 500, d'où viennent de partir des émissaires chargés d'aller organiser un mouvement à Paris. (Mensonge adroit, mais horrible, pour effrayer les Anciens). Que ces projets criminels ne vous effraient point; environné de mes frères d'armes, je saurai vous en préserver. J'en atteste votre courage, vous, mes braves camarades! vous, grenadiers, dont j'aperçois les bonnets! vous, braves soldats, dont j'aperçois les baïonnettes!... Si je suis un perfide (quelle idée !) soyez tous des Brutus ! (Il justifie d'avance un Brutus.) Et vous, mes camarades, vous, braves grenadiers, que ces baïonnettes se tournent contre mon cœur. (Comment ne pas croire à sa sincérité ? ) Mais si quelque orateur payé par l'étranger (horrible calomnie!) parlait de me mettre hors la loi, qu'il prenne garde de porter cet arrêt contre lui-même! (Langage de Cromwel.) Que la foudre de la guerre l'écrase à l'instant! (Criminelle menace. .) J'en appellerais à vous, mes braves compagnons d'armes! à vous, braves soldats, que j'ai tant de fois menés à la victoire! à vous, braves défenseurs de la République, avec lesquels j'ai partagé tant de périls pour affermir la liberté et l'égalité! Songez que je marche accompagné du Dieu de la fortune et du Dieu de la guerre ! Délibérez, nous exécuterons. »

Ainsi, ce sont les compagnons d'armes, les Généraux, la Fortune et la Guerre, qui sont les maîtres de la Représenta tion nationale, d'une Assemblée de Législateurs qui représentent mieux peut-être qu'à aucune autre époque la volonté de la Nation (p. 386). Et que sont ces Généraux? Ecoutons M. Thiers!

Toutes les dilapidations, dit-il, ce sont les Généraux et les Etatsmajors qui les ont commises et qui en ont profité. Ils ont pillé les pays conquis, fait le profit sur la solde (des absents), et partagé (jusqu'à 40 pour 100) le profit des compagnies de fournisseurs... »

Voilà les camarades de Bonaparte! Voilà les patriotes qui jugent la Représentation! Voilà les braves qui, les armes à la main, vont attaquer des Législateurs désarmés!

Le Conseil, considérant comme insignifiant ce que Bonaparte a dit de Barras et de Moulins, délibère et décide qu'il dévoilera dans toute son étendue le complot qui menace la République. Mais il ne dévoile rien, et se borne à affirmer la Constitution ne peut sauver la Patrie, et qu'il faut se hâter de la remplacer par une autre, comme si c'était à lui à décider ces questions!

que

« Si vous hésitez, ajoute-t-il, si la liberté périt, vous en serez comptables envers l'Univers, la Postérité, la France et vos familles. »

Si la Constitution est imparfaite, il faut que son imperfection soit reconnue légalement et que la révision soit faite constitutionnellement. Mais c'est Bonaparte qui, seul, décide tout. Et les Anciens, partie complices, partie effrayés, ont la lâcheté de consentir. Et, pour les épouvanter davantage, le conspirateur Courtois vient mentir en affirmant qu'on organise un mouvement à Paris.

C'est alors que Bonaparte sort.-Delphonse le réfute avec une raison manifeste qui ne permet pas de réplique :

« Le Général dit qu'on a abusé de la Constitution: hé bien! c'est dans la Constitution qu'il faut en trouver le remède. (Oui.) On peut donner à la France un Directoire plus digne d'elle et propre à sauver la liberté (oui); mais toutes les mesures doivent être prises par le Corps-Législatif entier et conformément à la Constitution. (Oui.) Tout ce qui s'écartera de cette base, loin de sauver la République, rétablira la Royauté... (Oui.) Jurons donc fidélité à la Constitution ! »

Le conspirateur Cornudet veut répondre que dira-t-il?

Je vous conjure, dit-il, de ne plus vous laisser enchaîner par de prétendus principes, par des abstractions funestes. Qu'entend-on par la Constitution? Est-ce la souveraineté du Peuple, la liberté, l'égalité, la division et l'indépendance des pouvoirs? J'y jure obéissance. Mais, au nom de ces bases sacrées, gardons-nous de rétablir un Directoire tyrannique qui les tue... (Mais c'est votre Sieyes! D'ailleurs, hommez d'autres Directeurs, révisez constitutionnellement !) Plus d'abstractions! revenons au bon sens ! (Mais vous l'outragez!)

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