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élevé au milieu du jardin des Tuileries, entouré de groupes d'enfants couronnés de violettes, d'adolescents couronnés de myrthes, d'hommes couronnés de chêne, de vieillards couronnés de pampres et d'olivier, et de femmes tenant leurs filles par la main et portant des corbeilles de fleurs. Après une musique religieuse, Robespierre prend la parole:

Français républicains, dit-il, il est enfin arrivé le jour à jamais fortuné que le Peuple français consacre à l'Etre-Suprême! Jamais le monde qu'il a créé ne lui offrit un spectacle aussi digne de ses regards. Il a vu régner sur la terre la tyrannie, le crime et l'imposture: il voit dans ce moment une Nation entière, aux prises avec tous les oppresseurs du Genre humain, suspendre ses travaux héroïques pour élever sa pensée et ses vœux vers le grand Etre qui lui donna la mission de les entreprendre et le courage de les exécuter! »

Puis, Robespierre saisit une torche et va mettre le feu à trois énormes figures représentant trois monstres, l'Athéisme, la Discorde et L'ÉGOÏSME, du milieu des cendres desquels paraît la statue de la Sagesse.-Alors, Robespierre prononce un second discours, sur l'extirpation des vices ligués contre la République; et l'on se rend au Champ-de-Mars.

« Son orgueil, dit M. Thiers, semble redoubler, et il affecte de marcher très en avant de ses collègues. Mais quelques-uns, indignés, se rapprochent et lui prodiguent les sarcasmes les plus amers. Les uns se moquent du nouveau Pontife; d'autres font entendre le mot de Tyran, et s'écrient qu'il est encore des Brutus. Bourdon de l'Oise lui dit que la roche Tarpéienne est près du Capitole. »

Qu'il y ait eu quelques attaques indirectes et timides, nous le concevons, puisqu'il y a des ennemis mais que ces ennemis, si compromis et si tremblants, aient osé faire ce que raconte son détracteur habituel, n'est-ce pas inconcevable? Qu'il l'ait souffert, dans sa position, entouré de tant d'amis dévoués, n'est-ce pas incroyable?-Voici la vérité (car nous la tenons d'une source qui nous paraît certaine ) : les ennemis de Robespierre murmurent quelques menaces contre lui, mais entre eux et loin de lui; c'est par hasard qu'un de ses amis les entend; et c'est par Lebas qu'il l'apprendra, au retour de la fête.

Au milieu du Champ-de-Mars se trouve une vaste montagne couronnée d'un arbre immense, sous les rameaux duquel se place la Convention, entourée de groupes d'enfants et de vieillards, d'hommes et de femmes. Là commencent les symphonies et les chants; les groupes se répondent en chantant. Puis, les jeunes gens tirent leurs épées et jurent dans les mains des vieillards de défendre la Patrie, tandis que les mères lèvent leurs enfants dans leurs bras et que toutes les mains sont tendues vers le ciel pour répéter le serment. - Le cortége rentre enfin dans le Jardin national aux Tuileries, et la fête se termine par des jeux de toute espèce.

Parlant lui-même de cette fête, à la tribune, le 9 thermidor, Robespierre affirmera qu'elle laisse sur la France une impression profonde de calme, d'allégresse, de bonheur, de sagesse et de bonté.

Cependant M. Thiers prétend que l'orgueil de Robespierre a blessé tout le monde; et, si le fait est vrai, c'est de sa part une faute immense et un grand malheur: mais où est la preuve de cet orgueil? le tout le monde de M. Thiers ne se réduit-il pas à quelques Députés corrompus et voleurs que blesse la vue de la vertu? N'est-ce pas encore une calomnie?

Les Cours étrangères (dit au contraire l'Histoire parlementaire), sont alors disposées à faire la paix avec Robespierre, parce qu'elles le regardent comme un futur Dictateur et qu'il se montre disposé lui-même à mettre un terme au système de la Terreur. C'est donc Robespierre qui peut donner à la France le bienfait de la paix, en consolidant la Révolution, en fondant la République sur l'égalité, la justice, la vertu, le bonheur du Peuple et la fraternité du Genre humain. Mais il veut abattre auparavant les principaux prévaricateurs, dont les cruautés et les rapines déshonorent et compromettent la République ; et de nouvelles luttes l'attendent encore avec les plus redoutables ennemis.

CHAPITRE XII.

RÉVOLUTIONNAIRE D'ORANGE.

DIVISIONS CROISSANTES. LOI DU 22 PRAIRIAL.- EFFROI DES DÉPUTÉS MENACES. OPPOSITION DÉCLARÉE DANS LE COMITÉ. ROBESPIERRE INDIRECTEMENT ATTAQUE. QUE DEVAIT-IL FAIRE? SA RETRAITE. — DEVOUEMENT CONSTANT DES JACOBINS. REDOUBLEMENT DE TERREUR. CARRIER A NANTES. TRIBUNAL - LEBON A ARRAS.- L'OPINION DEMANDE-T-ELLE LA FIN DE LA TERREUR? ROBESPIERRE COMMENCE A ATTAQUER LES COMITÉS ; TOUTES LES CHANCES SONT EN SA FAVEUR; MANOEUVRES DE SES ADVERSAIRES ; IL ATTAQUE FOUCHÉ; TENTATIVE DE RÉCONCILIATION ; VICTOIRE DE FLEURUS; PLAN DE ROBESPIERRE; INCIDENTS FACHEUX POUR LUI; FAUTE GRAVE; POUR QUI FAUT-IL FAIRE DES VOEUX? PREMIÈRE ATTAQUE: PÉTITION DES JACOBINS ; DEUXIÈME ATTAQUE: DISCOURS DU 8 THERMIDOR COMPLOT NOCTURNE CONTRE ROBESPIERRE; DISCOURS DE SAINT-JUST; 9 THERMIDOR: chute de ROBESPIERRE; A-T-IL ÉTÉ JUGE OU ASSASSINÉ? QUELS HOMMES ILS SONT. EST-CE POUR VENGER DANTON? EST-CE PAR HUMANITÉ? ÉTAIT-IL TYRAN? CRUEL? ORGUEILLEUX ? CONTRADICTIONS ET MENSONGES DES THERMIDORIENS. IL EST LA PRINCIPALE CAUSE DE TOUT LE BIEN QU'A FAIT LA CONVENTION. LA FRANCE AURAIT JUGÉ EN SA FAVEUR. LE PEUPLE A-T-IL ÉTÉ COUPABLE D'INCONSTANCE OU D'INGRATITUDE? LE PEUPLE SEUL PEUT LUI FAIRE UN REPROCHE. SA MEMOIRE DOIT ÊTRE CALOMNIEE.- CALOMNIES DIVERSES. TARDIF HOMMAGE RENDU A SA MÉMOIRE. - OPINIONS DE GARAT ET DE LAHARPE; DE DEMAISTRE; - DE NAPOLEON ; - DE M. THIERS. LA CHUTE DE ROBESPIERRE EST-ELLE HEUREUSE OU MALHEUREUSE? ON A PRIS LE CONTRE-PIED DE LA VÉRITE. -PENSEES DE

SAINT-JUST.

S1.

-

Divisions croissantes.

Le lendemain de la fête à l'Etre-Suprême, Robespierre demande au Comité (suivant M. Thiers) le sacrifice de quelques Députés qu'il appelle les restes impurs du parti indul

gent ou corrompu : mais Billaud et Collot refusent, sans défendre ces Députés, en alléguant que la fête d'hier a indisposé beaucoup d'esprits qui voient dans ces idées et ces pompes religieuses un retour à la superstition et une tendance à faire rétrograder la Révolution. Mais ces objections ne sont qu'un prétexte, parce que Billaud, Collot, le Comité, la Convention tout entière, les Jacobins, Paris et la France ont été unanimes pour applaudir et décréter tout ce qu'a proposé Robespierre au sujet de l'Être-Suprême (p. 14). Tous ont librement et volontairement approuvé; personne n'a été contraint, forcé... Et d'ailleurs, remarquons bien que Billaud et Collot accusent Robespierre de vouloir faire rétrograder la Révolution, d'être plus modéré qu'eux ! Remarquons-le bien, parce que nous verrons plus tard ces mêmes Billaud, Collot, et tous ses ennemis, l'attaquer sous le prétexte qu'il serait plus révolutionnaire qu'eux tous!

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Pour leur prouver qu'il ne veut pas faire rétrograder la Révolution, Robespierre leur communique un projet de décret, rédigé par le Président du Tribunal révolutionnaire, (Dumas), approuvé par lui et Couthon, et préparé depuis deux mois, pour accélérer les jugements, en abrégeant la procédure, en simplifiant les preuves et surtout en supprimant les défenseurs et les plaidoiries. Ni l'un ni l'autre Comité ne font d'objections contre la violence de ce projet, puisqu'ils se disent plus révolutionnaires que Robespierre: ils se plaignent seulement de n'avoir pas été prévenus et consultés plus longtemps d'avance, ce qui n'est encore qu'un prétexte, puisqu'il les consulte maintenant et qu'ils agissent tous ordinairement ainsi. Tout ce qu'ils pourraient raisonnablement faire, ce serait de demander un délai pour l'examiner. Mais on est d'accord que le projet sera présenté à la Convention le lendemain, 10 juin (22 prairial), par Couthon. — Billaud-Varennes osera cependant affirmer à la tribune, le 9 thermidor, que

Robespierre leur a imposé cette loi, comme s'il pouvait leur imposer quelque chose, comme s'ils ne rejetaient pas ses propositions toutes les fois qu'ils le veulent, comme si ce n'était pas le plus impudent et le plus infâme mensonge!

Il paraît que le principal but de Robespierre dans ce projet est de donner au Comité le droit de faire juger les Députés sans l'autorisation de la Convention : aussi son projet, qui conserve expressément au Comité le droit de poursuite, ne parle-t-il ni des Députés ni de l'autorisation : mais les Députés qui se sentent compromis aperçoivent le danger; et, la peur leur donnant du courage, deux d'entre eux demandent l'ajournement, dans leur intérêt personnel.

< Depuis deux mois, leur répond Robespierre, le Tribunal se plaint des entraves qui embarrassent sa marche; il se plaint de manquer de jurés il faut donc une loi. Au milieu des victoires de la République, les conspirateurs sont plus actifs et plus ardents que jamais il faut les frapper... Cette opposition inattendue qui se manifeste n'est pas naturelle; on veut DIVISER la Convention, on veut l'épouvanter. »

Néanmoins Bourdon demande encore l'ajournement: mais Robespierre insiste; des applaudissements l'accueillent; et la loi est décrétée. Les pouvoirs du Comité sont continués. Le lendemain (11 juin), profitant de l'absence du Comité, Bourdon propose de déclarer que la Convention n'a pas entendu que ses membres pourraient être arrêtés et jugés sans son autorisation formelle: mais Merlin de Douai s'oppose à cette déclaration comme inutile, attendu que la Convention n'a pas pu se dessaisir du droit de décréter, elle-même et seule, ses propres membres.

Le jour suivant (12 juin ou 24 prairial), Mallarmé et Bourdon proposant de nouveaux amendements, Couthon se plaint qu'on a déloyalement profité la veille de son absence pour calomnier le Comité en prétendant qu'il voulait avoir le droit d'arrêter les Députés. Robespierre loue la Montagne, menace indirectement les Députés intrigants et attaque spécialement Tallien, qui tente vainement de se justifier, et auquel Robespierre et Billaud crient qu'il ment impudemment.

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