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volé à la Commune quand il en était secrétaire (T. 3, p. 129); d'avoir pillé à Bordeaux quand il y faisait journellement tomber des têtes sur la guillotine dressée sous ses fenétres; d'avoir épargné tous les riches Aristocrates, auxquels il vendait très-cher leur liberté; d'y avoir fait sortir de prison madame d'Épinay (femme d'un Président au Parlement, fille du banquier Espagnol Cabarus) parce qu'elle était jeune et jolie; et d'y avoir étalé un luxe insolent avec cette femme, devenue sa maîtresse, maintenant dans les prisons de Paris, arrêtée comme Suspecte par ordre du Comité de Salut public.

Voici ce que Sénart, agent du Comité de Sûreté générale, dit de Tallien et de la Cabarus (dans ses Mémoires publiés en 1823, après sa mort, et rédigés sur les pièces des Comités):

« Tallien affectait à Bordeaux la somptuosité d'un Potentat. Tandis que le Peuple souffrait la famine, on fabriquait pour lui un pain blanc comme neige, qu'on appelait le pain des Représentants. C'était à côté des morts et même sur leurs cadavres, ainsi que sur les corps des hommes expirant de besoin, que roulait le char de Tallien, dans lequel la Cabarus ou la Fontenay, qu'on appelait aussi Dona Theresia, se faisait traîner, avec son amant, dans un pompeux étalage, courrier devant courrier derrière. La Cabarus était affublée d'un bonnet rouge. Souvent ils allaient en voiture découverte ; et la Cabarus, connue pour une prostituée, était promenée en Déesse, tenant une pique à la main et mettant l'autre sur l'épaule du Représentant... Le Despote avait levé une Armée révolutionnaire de 15,000 hommes, qui formaient sa Garde prétorienue..... On ignore l'emploi des millions de taxe sur les détenus, de deux millions en numéraire reçus de Toulon, et d'autres sommes énormes, car Tallien écrivait aux Comités que la guillotine produirait en peu de temps 40 millions........ En annonçant le supplice du Girondin Biroteau (t. 3, p. 451 ) il écrivait : « Je ne regrette que de ne pouvoir les tuer (les Girondins) de ma << propre main; je trouverais du plaisir à frapper un Girondin moi« même.... » La Cabarus tenait chez elle un Bureau dans lequel on vendait les grâces pour 100,000 livres, 50,000, etc.... Pendant le règne de Tallien à Bordeaux, par les ordres de ce Souverain, les malheureux détenus qui ne pouvaient se racheter éprouvaient les plus grandes cruautés dans le donjon de Blaye : ils étaient entassés dans des lieux mal-sains, sur de la paille ou du fumier, sur la terre ou dans la boue, presque sans pain.... Il afficha la loi agraire à Bordeaux (comme il l'avait d'abord affichée à Paris.) ›

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Voilà comment le fils d'un maître d'hôtel, l'ancien garçon imprimeur Tallien (qui n'en serait que plus estimable s'il était fidèle au Peuple), devenu Proconsul, abuse insolemment de son mandat, tandis que ce Peuple souffre la faim et la misère et donne sa vie pour défendre la Révolution!... Si la Cabarus était un Contre révolutionnaire déguisé, comme le Baron Imbert et tant d'autres (t. 3, p. 444 ), et si Tallien voulait déshonorer et perdre la Révolution, feraient-ils autre chose?

Et malheureusement, il faut en dire autant de son ami Fréron et de Barras à Toulon, de Fouché à Lyon, même de Collot-d'Herbois (ancien comédien, jadis sifflé par les Lyonnais, et qu'on accuse de s'en être vengé en les exterminant).

Et Robespierre n'avait-il pas mille fois raison de rappeler, et même de faire juger tous ces sanguinaires Proconsuls, tous ces cupides et cruels Verrès, plus nuisibles à la Révolution, plus perfides, plus odieux et plus coupables que des Aristocrates contre-révolutionnaires déclarés? N'avait-il pas raison de dire à Fouché, lors de son rappel, qu'il lui serait demandé compte du sang dont il était couvert?

Mais c'est en vain que Robespierre demandera le jugement de Tallien, Fouché, comme nous l'avons vu demander vainement celui de Merlin de Thionville, Bourdon de l'Oise, Dubois-Crancé (t. 3, p. 564); les Comités de Salut public et de Sûreté générale s'obstineront décidément à les protéger; et, dans sa défense après le 9 thermidor, Vadier dira :

« Le Comité de Sûreté générale a tout fait en faveur de Tallien, Fouché et autres, pour détourner l'effet des dénonciations portées contre eux, et cela parce qu'ils étaient poursuivis par Robespierre. »

Il entre d'ailleurs dans la politique du Comité de Sûreté générale (composé des ultrà-révolutionnaires les plus violents) de tolérer tous ces excès.

« Ce Comité, dit Sénart, ne voulait pas punir les vols et prétendait que ce serait faire rétrograder la Révolution... Dans le procès de Danton et Lacroix, il ne voulut pas faire usage de pièces (notamment la révélation du Général Miaczenski) qui prouvaient leur complicité dans deux fabriques de faux assignats, parce qu'il aurait fallu

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poursuivre d'autres complices (que Robespierre dénonçait en effet). > Sénart ajoute que Moïse Bayle, du Comité de Sûreté générale, lui dit un jour :

« Tallien a commis tant de crimes que de 500,000 têtes il n'en conserverait pas une ses vols, ses conspirations, sont en si grand nombre, et si bien prouvés, que Tallien, accusé autant de fois qu'une de ses têtes renaîtrait, n'en conserverait aucune. Mais il suffit qu'il ait été attaqué par Robespierre pour que nous ayons gardé le silence... Les circonstances exigent que, quels que soient les crimes de ceux qui paraissent Montagnards, il n'en soit pas poursuivi un : c'est un mur dont nous ne voulons pas arracher un moëllon, quelque SALPETRÉ qu'il soit; car, à la moindre brêche, le mur tomberait... »

On se rappelle d'ailleurs que Bourdon de l'Oise et Thuriot ont été exclus des Jacobins, et que Legendre a commis toutes les bassesses (t. 3, p. 569) dans la crainte qu'on ne lui pardonnât pas ses relations intimes avec Danton. - Tous ces Députés sont ennemis de Robespierre par remords ou plutôt par peur des châtiments qu'ils méritent. Aucun d'eux n'a le courage de l'attaquer; tous, au contraire, l'applaudissent continuellement; mais tous se trouvent naturellement disposés à se liguer contre lui avec ses adversaires dans les deux Comités. Cependant voyez la puissance de Robespierre!

§ 21.— Fête à l'Être-Suprême.

D'immenses préparatifs annoncent que la féte à l'ÉtreSupréme, fixée au 8 juin, sera magnifique; et, dès le 4, la Convention, à l'unanimité, élit Robespierre pour son Président mensuel, afin qu'il remplisse le premier rôle dans ce grand événement, dont il est la première cause.

Robes

Le 8, le soleil est superbe et la foule immense. pierre part à la tête de la Convention. Soigneusement paré, vêtu d'un habit bleu, une écharpe tricolore et des plumes sur la tête comme tous les Représentants, tenant, comme eux, un bouquet de fleurs et de fruits, la joie sur le visage. — La Convention va d'abord s'asseoir sur un vaste amphithéâtre

élevé au milieu du jardin des Tuileries, entouré de groupes d'enfants couronnés de violettes, d'adolescents couronnés de myrthes, d'hommes couronnés de chêne, de vieillards couronnés de pampres et d'olivier, et de femmes tenant leurs filles par la main et portant des corbeilles de fleurs. — Après une musique religieuse, Robespierre prend la parole:

Français républicains, dit-il, il est enfin arrivé le jour à jamais fortuné que le Peuple français consacre à l'Etre-Supreme! Jamais le monde qu'il a créé ne lui offrit un spectacle aussi digne de ses regards. Il a vu régner sur la terre la tyranne, le crime et l'imposture: il voit dans ce moment une Nation entière, aux prises avec tous les oppresseurs du Genre humain, suspendre ses travaux héroïques pour élever sa pensée et ses vœux vers le grand Etre qui lui donna la mission de les entreprendre et le courage de les exécuter! »

Puis, Robespierre saisit une torche et va mettre le feu à trois énormes figures représentant trois monstres, l'Atheisme, la Discorde et L'ÉGOÏSME, du milieu des cendres desquels paraît la statue de la Sagesse.-Alors, Robespierre prononce un second discours, sur l'extirpation des vices ligués contre la République; et l'on se rend au Champ-de-Mars.

« Son orgueil, dit M. Thiers, semble redoubler, et il affecte de marcher très en avant de ses collègues. Mais quelques-uns, indignés, se rapprochent et lui prodiguent les sarcasmes les plus amers. Les uns se moquent du nouveau Pontife; d'autres font entendre le mot de Tyran, et s'écrient qu'il est encore des Brutus. Bourdon de l'Oise lui dit la roche Tarpéienne est près du Capitole. » que

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Qu'il y ait eu quelques attaques indirectes et timides, nous le concevons, puisqu'il y a des ennemis mais que ces ennemis, si compromis et si tremblants, aient osé faire ce que raconte son détracteur habituel, n'est-ce pas inconcevable? Qu'il l'ait souffert, dans sa position, entouré de tant d'amis dévoués, n'est-ce pas incroyable?—Voici la vérité (car nous la tenons d'une source qui nous paraît certaine ) : les ennemis de Robespierre murmurent quelques menaces contre lui, mais entre eux et loin de lui; c'est par hasard qu'un de ses amis les entend; et c'est par Lebas qu'il l'apprendra, au retour de la fête.

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poursuivre d'autres complices (que Robespierre dénonçait en effet). Sénart ajoute que Moïse Bayle, du Comité de Sûreté générale, lui dit un jour :

« Tallien a commis tant de crimes que de 500,000 têtes il n'en conserverait pas une ses vols, ses conspirations, sont en si grand nombre, et si bien prouvés, que Tallien, accusé autant de fois qu'une de ses têtes renaîtrait, n'en conserverait aucune. Mais il suffit qu'il ait été attaqué par Robespierre pour que nous ayons gardé le silence..... Les circonstances exigent que, quels que soient les crimes de ceux qui paraissent Montagnards, il n'en soit pas poursuivi un : c'est un mur dont nous ne voulons pas arracher un moëllon, quelque SALPETRÉ qu'il soit; car, à la moindre brèche, le mur tomberait... »

On se rappelle d'ailleurs que Bourdon de l'Oise et Thuriot ont été exclus des Jacobins, et que Legendre a commis toutes les bassesses (t. 3, p. 569) dans la crainte qu'on ne lui pardonnât pas ses relations intimes avec Danton. - Tous ces Députés sont ennemis de Robespierre par remords ou plutôt par peur des châtiments qu'ils méritent. Aucun d'eux n'a le courage de l'attaquer; tous, au contraire, l'applaudissent continuellement; mais tous se trouvent naturellement disposés à se liguer contre lui avec ses adversaires dans les deux Comités. Cependant voyez la puissance de Robes

pierre!

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§ 21.— Fête à l'Être-Suprême.

D'immenses préparatifs annoncent que la fête à l'ÉtreSuprême, fixée au 8 juin, sera magnifique; et, dès le 4, la Convention, à l'unanimité, élit Robespierre pour son Président mensuel, afin qu'il remplisse le premier rôle dans ce grand événement, dont il est la première cause.

Le 8, le soleil est superbe et la foule immense. — Robespierre part à la tête de la Convention. Soigneusement paré, vêtu d'un habit bleu, une écharpe tricolore et des plumes sur la tête comme tous les Représentants, tenant, comme eux, un bouquet de fleurs et de fruits, la joie sur le visage. — La Convention va d'abord s'asseoir sur un vaste amphithéâtre

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