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royaliste saisie chez Lemaître, le Comte d'Entraigues a dit au nom de Louis XVIII que :

«La mort de Louis XVI peut être rachetée par de grands services rendus à ses héritiers. »

Et nous verrons en effet le régicide et le sanguinaire Fouche devenir Ministre de Louis XVIII.

Quoi qu'il en soit, la permanence est refusée, et Tallien obligé de présenter le projet de la Commission.

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Depuis six années, dit-il (2 brumaire), les Prètres, les Nobles, les privilégiés, se sont ligués contre la Révolution française... C'est dans le cabinet de Saint-James que l'on forma cette longue chaîne de conspirations que nous avons vues éclater parmi nous... Après le 9 thermidor, les vrais patriotes respirent un moment (faux); Robespierre et ses complices ne sont plus; le règne de la justice succéda à celui de l'arbitraire (faux); mais bientôt les ennemis constants du bonheur des Français vont se saisir de ce 9 thermidor et le faire tourner à leur avantage. Alors ils exagèrent tout; ils persécutent de nouveau tous les patriotes et les font incarcérer et égorger; les Emigrés, les Prêtres réfractaires, rentrent en foule, et la contre-révolution se prépare ainsi par les soins de ceux qui travaillent avec tant d'activité depuis cinq années. »

Mais tout cela n'est-il pas votre ouvrage, votre trahison, votre crime, à vous, Tallien?...

Il attribue les insurrections populaires de germinal et de prairial à une disette organisée par Pitt et les Royalistes pour pousser le Peuple au désespoir, comme si lui, Tallien, n'avait pas été le premier coupable et le plus féroce proscripteur de ce malheureux Peuple!

« Vous le savez, ajoute-t-il, on ne vit aucun patriote connu, aucun véritable ami de la liberté dans ces mouvements : quelques hommes imprudents voulurent en tirer parti et furent sacrifiés; mais nos ennemis naturels en profitèrent seuls; le Peuple fut désarmé, baillonné et réduit à une nullité morale sous les rapports politiques; le sang français coula; et Pitt fut satisfait. »

Mais n'est-ce pas vous, Tallien, qui fùtes l'abominable complice de Pitt et le bourreau du Peuple?

« Ce n'était point assez pour eux ; il leur fallait un coup décisif qui pût renverser la République et préparer la perte de tous les Républi

cains... L'époque des Assemblées primaires devait nécessairement devenir celle des plus grandes agitations... Après avoir comprimé l'énergie des patriotes, il fallait pervertir l'esprit public. Les Journalistes, presque tous dévoués au ministère Anglais, travaillèrent à dissoudre la Convention... Les Manifestes de Louis XVIII, les proclamations de Charrette, les bulles du Pape, remplissaient leurs colonnes, tandis que les décrets étaient dénaturés ou supprimés. »

Mais n'est-ce pas vous qui avez traîtreusement demandé la liberté illimitée de la Presse pour favoriser l'Aristocratie?

Tallien dénonce aussi le Comité de Bale, composé d'anciens Feuillants, d'anciens Ministres, invoquant encore la Constitution de 91 pour mieux réussir, correspondant avec un Comité directorial à Paris, trompant et poussant les Sections, se coalisant avec cent Girondins qui devaient seuls former le noyau d'une Assemblée, et marchant à la contre-révolution soit par l'insurrection soit par les élections. Mais tout cela n'est-il pas l'ouvrage du 9 thermidor et de Tallien surtout?

Il déclare enfin que les dernières élections ont été viciées par la conspiration royaliste; que la République est en danger; et que la Commission avait arrêté un plan pour la sauver et détruire les dernières espérances des Royalistes (en annulant les élections); mais qu'elle laisse au nouveau Corps législatif à statuer sur la validité des élections; et qu'elle se borne à proposer les dispositions suivantes:

« 1o Exclure, jusqu'à la paix, de toutes fonctions législatives, municipales, judiciaires, les Emigrés, les parents d'Emigrés, les Aristocrates qui, dans les Assemblées primaires ou électorales, auront provoqué ou signé des mesures illégales ou séditieuses; - 20 maintenir les lois révolutionnaires contre les Emigrés et les Prêtres réfractaires; 3o autoriser les Royalistes à se bannir volontairement dans les trois mois en emportant leurs biens; 4o destituer les officiers nommés par Aubry.

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Toutes ces propositions sont décrétées; et par conséquent les Emigrés, les parents d'Emigrés et les meneurs royalistes, élus aux dernières élections, devront être repoussés de la Législature; c'est-à-dire que la Convention termine par une mesure révolutionnaire.

<< Puissent mes pressentiments sinistres ne pas se réaliser! dit Tal lien en finissant; car ce serait en vain que nous voudrions nous dis simuler les dangers de la Patrie. »

Et voilà donc, en définitive, que les Thermidoriens, en assassinant Robespierre, en détruisant la Commune et les Jacobins, ont amené la France au bord de l'abîme!

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Dans sa dernière séance, la Convention abolit la peine de mort à la paix générale, comme Robespierre le demandait. Quoique laissant la France dans la discorde et l'anarchie, elle transforme en place de la Concorde la place de la Révolution, et proclame une amnistie générale, excepté pour l'insurrection du 13 vendémiaire, c'est-à-dire pour Lemaitre, qui se trouve seul gravement inculpé, et qui sera exécuté; on excepte aussi Billaud-Varenne, Collot-d' Herbois, Barrère et Vadier, qui ne seront pas jugés, mais déportés (1).

Toutes les prisons sont donc ouvertes aux Montagnards, ce qui est un immense événement pour les patriotes.

Et le 4 brumaire an IV (26 octobre 1795), à 2 heures et demie, la clôture de la Convention est proclamée au milieu des cris de vive la République!

Jetons maintenant un dernier coup-d'œil sur les Conventionnels et leur conduite depuis le 9 thermidor.

$ 42.

Coup-d'œil sur les Conventionnels.

Qu'ont fait Billaud, Collot, Barrère, après avoir renversé Robespierre?— Ils ont livré la République, la Révolution, le Peuple, aux brigands Thermidoriens, aux Girondins,

-

(1) Billaud et Collot ont été transportés dans la Guyanne.-Collot y mourra en 1796. Billaud y restera 20 ans, s'enfuira, en 1816, à New-Yorck, puis à Saint-Domingue, où il mourra en 1819. Barrère s'évadera de Rochefort et sera amnistié après le 18 brumaire. Vadier, qui s'est évadé et caché à Paris, sera arrêté avec Babeuf, enfermé 4 ans à Cherbourg, puis amnistié.

aux Royalistes! Inhabiles à se défendre quand Legendre les accuse de n'avoir attaqué Robespierre que par jalousie, ils ne savent pas même diriger le Peuple pour le sauver, et le précipitent dans l'esclavage, tandis qu'ils vont eux-mêmes mourir ou languir en exil.

Qu'ont fait encore Carnot, Lindet, Prieur de la Côted'Or?-Impuissants à se défendre, ils n'osent pas même élever la voix contre les massacres du midi, tandis que Robespierre bravait tous les périls pour invoquer l'humanité !

Qu'ont fait Cambon, Vadier, Amar, Vouland, Jagot, pour protéger le Peuple? —Vadier ne pourra qu'exprimer ses regrets dans l'exil (p. 133), et Cambon proscrit une pourra qu'essayer d'expier sa faute en disant souvent: « Je sais que << Robespierre devait me faire guillotiner: néanmoins, je me << reprocherai toute ma vie d'avoir contribué à sa chûte. »

Que dire de Tallien, jacobin, cordelier, aidé par une souscription des Jacobins dans la création de son premier journal (t. 2, p. 480), secrétaire de la Commune du 10 août, un moment Procureur-Syndic, l'un des principaux acteurs dans les journées de Septembre, ultrà-révolutionnaire en 93, proclamateur de la loi agraire, qui trahit le Peuple et la Révolution au 9 thermidor; qui les vend aux Girondins et aux Royalistes; qui a l'impudeur de quitter la Montagne pour aller s'asseoir au milieu de la Plaine; qui organise et pousse la Jeunesse dorée contre son ancien parti; qui se fait exclure des nouveaux Jacobins ; qui profite de son expérience révolutionnaire pour faire aux patriotes plus de mal qu'aucun Aristocrate; qui donne le douloureux spectacle de l'apostasie, de la trahison, de l'immoralité, de l'impudence et de la férocité, réunies dans sa personne ; et qui devient un tel objet d'exécration que le Peuple demande sa tête et celle de Fréron pendant les insurrections de germinal et de prairial?

Que dire des autres Thermidoriens; de Fréron, qui voulait qu'on rasát l'Hôtel-de-Ville, après avoir exterminé la Commune, et qui provoqua publiquement la Jeunesse dorée à exterminer les Jacobins en les chassant de leur local, trans

formé en un marché (marché des Jacobins ou marché SaintHonoré); de Merlin de Thionville, publiquement accusé d'avoir vendu Mayence, et d'avoir impudemment trompé la Convention en affirmant que la garnison était réduite à manger des rats, tandis qu'elle avait encore des vivres pour huit jours; de Barras, de Bourdon de l'Oise, de Legendre, de Fouché, tous anciens Hébertistes ou Dantonistes, tous imitateurs et complices de Tallien (1)?

« Ce furent eux, dit l'Histoire parlementaire, qui, les premiers, affichèrent ces mœurs abominables qui souillèrent la fin de la Convention et le Directoire, et qui montrèrent, dans la classe gouvernementale d'alors, plus d'infamie et plus de corruption qu'il n'y en avait eu dans la Noblesse et le Clergé sous les derniers monarques. »

On les voit même s'accuser réciproquement avec fureur.

« Je méprise (dit Fouché à Tallien, etc., qui l'accusent d'avoir inondé de sang le midi) une poignée de factieux qui, après s'être agités dans des jouissances coupables, veulent agiter la Convention pour acquérir l'impunité. »

Que dire des Girondins qui, après avoir tant parlé d'humanité et tant crié contre l'anarchie, se montrent vindicatifs et sanguinaires, déchaînent l'anarchie, protégent les assassins et les chauffeurs, accueillent par des bravos, par des acclamations, par des applaudissements frénétiques, les propo

(1) En sortant du Conseil des 500, Tallien ne sera plus réélu. Il accompagnera Bonaparte en Egypte ; il rédigera le journal la Décade Egyptienne; sera nommé Administrateur des biens nationaux ; sera renvoyé en France comme dilapidateur; sera pris par les Anglais; rentrera en France, où tout le monde le repoussera, même sa femme qui demandera le divorce; et mourra à Paris en 1820, accusé d'avoir été agent de police de l'Empire et de la Restauration.-Fréron n'est pas élu au Conseil des 500; il accéptera une place dans l'administration des hospices, puis une sous-préfecture à Saint-Domingue, où il mourra presque aussitôt son arrivée. - Merlin de Thionville, sortant du Corps législatif en 1798, ne sera plus réélu. Il entrera dans l'administration des postes, d'où il sortira bientôt accusé de dilapidation; il acquerra l'ancien couvent du Calvaire, près Paris, ce qui le fera appeler Merlin-Calvaire. L'accroissemeut rapide de sa fortune le laissera sous le poids de l'accusation d'avoir vendu Mayence.—Bourdon de l'Oise, qui s'est enrichi en agiotant sur les assignats et les biens nationaux, sera déporté le 18 fructidor comme conspirateur royaliste, et mourra à Sinnamary.

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