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Voilà un bel éloge de la Convention! Elle aurait eu la lâcheté ou l'imbécillité de se laisser opprimer par le Peuple de Paris, puis la lâcheté et l'imbécillité de se laisser tyranniser par Robespierre, et la criminelle injustice d'être son instrument et son complice pour opprimer le Peuple! Et lui, Sieyes, avec tout son génie, n'a rien empêché et s'est laissé opprimer et tyranniser pour être oppresseur! Et il appelle tyrans ceux qui ont sauvé le pays contre la Coalition! Il approuve et défend ceux qui ont commis le crime d'insurrection et de guerre civile! Oh, que le génie est peu de chose en révolution quand il n'est pas soutenu par le caractère!

« Dês ce jour, ajoute-t-il, vous prouverez que vous êtes libres en rappellant vos collègues (révoltés, insurgés); une pareille mesure ne peut pas même être discutée; elle est de plein droit. »

Voilà de la tyrannie, comme messieurs les Girondins en auraient fait s'ils avaient été les plus forts! Voilà ce que diraient les Bourbons s'ils triomphaient !

Les 5 condamnés (Louvet, Isnard (1), Henry Larivière, Doulcet de Pontécoulant, et Laréveillère-Lépeaux) sont réintégrés, et reprennent leurs places au milieu des applaudissements de la Plaine et des Girondins... C'est tout naturel! - Mais les Montagnards sont indignés... Les imbécilles ! il est bien temps !

Plusieurs Thermidoriens, notamment Thuriot (qui n'a pas laissé parler Robespierre le 9 thermidor, p. 94), Lecointre (qui demandait l'accusation de Billaud, etc., p. 151), et Lesage-Senault, repassent à la Montagne, effrayés de l'excès de la Réaction... Les aveugles! il est bien temps!

« Distinguez du moins, s'écrie Thuriot, ceux qui ont pris et ceux qui n'ont pas pris les armes contre la Convention! Ne réintégrez que les derniers! »

« Nous avons tous pris les armes, répond audacieusement Louvet déjà réintégré; et non-seulement il faut nous réintégrer tous, mais

(1) Un passage de la page 451, tome 3, semble indiquer qu'Isnard a été exécuté. C'était une erreur.

je propose de déclarer que les Départements insurgés par nous et pour nous, en juin 1793, ont bien mérité de la Patrie. »

Il a raison dans son sens ! C'est une conséquence forcée du renversement de Robespierre! Et si la Restauration s'opère, les Emigrés, les Vendéens, les Chouans, les conspirateurs contre-révolutionnaires, les assassins Pâris, Charlotte Corday, Ladmiral, etc.. ne manqueront pas de se transformer ou d'être transformés en héros qui auront bien mérité de la France! Et les assassins de Robespierre n'ont rien prévu de tout cela!!!

Tallien lui-même commence à s'épouvanter, et s'oppose à ce que l'insurrection Girondine soit glorifiée..... Il a peur pour lui maintenant! Mais si la Réaction le fait condamner pour ses vols et ses assassinats, ce n'est pas nous qui le plaindrons!

Ce n'est pas encore lui qu'on menace, mais c'est l'exMaire Pache, l'ex-Ministre de la guerre Bouchotte, même l'ex-Ministre de la justice et de l'intérieur, Garat, le modéré Garat, dont la Réaction ordonne le procès.

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La disette devient si grande que Boissy-d'Anglas, Président de la nouvelle Commission d'approvisionnement, demande (16 mars) que les Parisiens soient réduits à la ration d'une livre de pain par tête. Le Montagnard Romme demande un supplément d'une demi-livre pour les ouvriers, qui ne peuvent acheter que du pain. Mais ces décrets excitent une grande fermentation dans les faubourgs, où le Peuple appelle Boissy-d'Anglas Boissy-Famine. — Le lendemain, la Section de l'Observatoire et celle du Finistère se soulèvent séparément, puis se réunissent et se rendent à la Convention pour lui présenter une pétition.

« Le pain nous manque, dit l'orateur des pétitionnaires; nous sommes prêts à regretter les sacrifices que nous avons faits. »

Vous devinez que la Plaine, les Girondins et les Thermidoriens, s'indignent de ce langage menaçant.

T. IV.

13

« Du pain, du pain! s'écrient de nouveau les pétitionnaires en frappant sur la table. »

La Convention s'indigne encore; le Président Thibaudeau blâme leur discours séditieux, et le Comité de Sûreté générale les fait disperser par la Garde nationale.

Il est évident que cette démonstration populaire est beaucoup trop pour ne pas compromettre le Peuple, ou beaucoup trop peu pour atteindre son but mais nous craignons toujours que le Peuple ne fasse désormais que des fautes!

$ 21. Loi martiale de Sieyes.

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Ce rassemblement populaire, les propos menaçants des Jacobins dans les Sections et les cafés, quelques placards annonçant une prompte insurrection si le Peuple n'obtient du pain et la Constitution de 93, ne servent qu'à avertir la Convention qu'elle doit prendre des mesures de défense... Aussi, voyez! Sieyes, maintenant membre du Comité de Salut blic, propose une loi martiale pour défendre la Convention contre le Peuple. Et voyez la bonne foi de Sieyes, qui ne rêve que l'abolition de la Constitution de 93 et qui déclare criminel tout rassemblement où l'on proposerait de rétablir la Royauté, de renverser la Constitution de 93, et de se rendre au Temple ou à la Convention! - Il propose :

«De dissiper tout rassemblement de ce genre par la force après trois sommations; de punir de mort tout outrage avec violence contre un Député ; de ne conserver qu'une seule cloche dans Paris, au pavillon de l'Unité, pour sonner le tocsin en cas d'insurrection contre la Convention; - de punir les Sections qui ne viendraient pas alors au secours de la Convention; - d'autoriser ou d'obliger, en cas d'insurrection, tous les Députés et leurs suppléants à se réunir en assemblée à Châlons-sur-Marne ; — d'obliger alors les Généraux à envoyer des troupes à la Convention pour la ramener à Paris et punir les insurgés.

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-

Voilà les poltrons qui vont déployer contre le Peuple autant d'énergie que la Révolution contre l'Aristocratie.

Nous n'avons pas besoin de dire que ce projet est adopté par les Comités, et qu'il le sera bientôt par la Convention.

$ 22.

Mauvais préparatifs d'insurrection.

Effrayés de plus en plus par les progrès de la Réaction, et désirant prévenir le procès de Billaud et autres, les révolutionnaires veulent une insurrection. Mais où se réunir pour se concerter? Ils n'ont plus de ressources que dans des réunions secrètes. Quels sont leurs chefs? Tous ceux qui ont dirigé les précédentes insurrections ont péri; et aujourd'hui qu'une insurrection est infiniment plus difficile, aujourd'hui qu'il faudrait un Chef encore plus habile, un secret plus profond, une union plus intime, une discipline plus parfaite, tout manque au Peuple plus d'homme capable et connu qu'on puisse choisir ou reconnaître pour chef; beaucoup de Colonels rivaux, mais point de Général; aucun concert, aucune intelligence avec la Montagne, aucun plan.

Les Montagnards, suspects aux yeux de la Majorité dans la Convention, toujours accusés de conspirer, obligés de se défendre en protestant qu'ils ne conspirent pas, désirent bien une insurrection, mais craignent trop de se compromettre pour correspondre avec les conspirateurs populaires. Duhem, Maribon-Montaud, Léonard-Bourdon (qui a assiégé l Hôtelde-Ville et pris Robespierre le 9 thermidor), se bornent à tenir des propos excitateurs; Billaud, Collot, Barrère et Vadier. qui vont être jugés et qui désirent le plus vivement une insurrection qui les délivre, sont ceux qui craignent le plus d'y prendre part.

Ainsi, pas un homme dans cette Montagne à qui Robespierre a fait faire tant de grandes choses, et qui a renversé Robespierre! Pas le moindre courage dans ces Billaud, ces Collot, ces Barrère, ces Vadier, ces Léonard-Bourdon, et tous ces imbéciles qui ont montré tant de fureur pour assassiner Robespierre!

Cependant, quelques meneurs inconnus décident que l'on commencera par une pétition, qu'elle sera rédigée par les

Sections de Montreuil et des Quinze-Vingts au faubourg Saint-Antoine, et qu'elle sera présentée le 21 mars (1er germinal). Le jour fixé, une nombreuse Députation apporte cette pétition, tandis que grand nombre de patriotes se réunissent dans le jardin des Tuileries, et que la Jeunesse dorée s'y réunit aussi pour les contenir, encouragée par les Comités.

Les pétitionnaires se plaignent des souffrances du Peuple et de la persécution des patriotes, mais en termes très-modérés.

« Organisez dès aujourd'hui, disent-ils en terminant, la Constitu tion de 93, que le Peuple français a acceptée et juré de défendre. Elle conciliera tous les intérêts, calmera tous les esprits, et vous conduira au terme de vos travaux. >>

Le Président Thibaudeau répond que cette pétition insidieuse n'est pas l'œuvre des ouvriers.

« Nous voulons tous la Constitution, s'écrie hypocritement Tallien, et il ne faut pas qu'on fasse croire au Peuple qu'il est dans cette Assemblée des membres qui ne veulent pas la Constitution. Mais il faut des lois organiques pour en assurer l'exécution... »

Et vous devinez que ces lois organiques sont un prétexte, une rouerie pour ajourner et même réviser et révoquer cette Constitution jacobine dont les Girondins ne peuvent vouloir à aucun prix... Aussi, quand le Montagnard Miaulle demande que cette Constitution soit gravée sur des tables de marbre et exposée dans les lieux publics en attendant les lois organiques, Thibaudeau quitte la Présidence pour la tribune, et s'oppose à toute publicité de cette Constitution, qu'il attaque en elle-même il demande au contraire qu'une grande vigueur soit imprimée au Gouvernement, et que de nouvelles attributions soient données à cet effet au Comité de Salut public. Et tous ces hommes accusent Robespierre, les anciens Comités, la Convention avant le 9 thermidor, d'usurpation, de dictature et de tyrannie!

Legendre propose une Commission de 11 membres pour préparer les lois organiques, c'est-à-dire pour détruire la Constitution; et les Girondins, la Plaine, les Thermidoriens, décrètent tout en applaudissant et en triomphant, tandis que

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