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de Danton, et qu'on appellera les Thermidoriens ; —4o des 5 Députés demandés par Robespierre et refusés par les deux Comités; -5° des autres Montagnards, inquiets ou timides; -6o de la Plaine, aux tendances girondines ou royalistes.

Toutes ces fractions peuvent se réduire à 4: 1o les Montagnards, -2° les Thermidoriens, ou Montagnards corrompus et renégats, menacés par Robespierre, et qui entraînent les autres à l'attaquer; -3° les Girondins; -4° les Royalistes ou Monarchiens.

Hé bien, parmi tous ces hommes, qu'on en cite un seul qui vaille Robespierre! Qu'on en cite un qui ait autant travaillé ; qui ait fait autant de discours; qui ait plus de lumières et de talent; qui soit aussi capable comme homme d'État; qui ait autant que lui un système social et politique; qui ait plus de patriotisme et autant de zèle ou de dévouement aux intérêts du Peuple et de l'Humanité en général; qui ait autant d'indépendance vis-à-vis son parti lui-même; qui veuille autant que lui un régime d'ordre, de justice, de probité, de moralité, de vertu ; qui ait rendu plus de services à la Révolution, à la liberté et à l'Egalité; enfin, qui ait obtenu autant d'estime, de confiance, d'admiration, d'applaudissements, de renommée et d'influence! qu'on cite un autre Robespierre, dont un autre David, un autre Lebas, un autre Saint-Just, un autre Couthon, auraient voulu partager la mort !

Si Robespierre est coupable, tous les Montagnards sont ses complices ou des láches; s'il est innocent, tous sont criminels pour l'avoir immolé, et tous sont responsables du mal qu'ils vont causer en s'associant aux Thermidoriens, aux Girondins et aux Royalistes.

Quant aux Thermidoriens, ce sont des lâches qui pliaient sous Robespierre, des débauchés et des concussionnaires, des traîtres et des cruels, qui vont proscrire et tuer les patriotes... Tallien, par exemple, le héros Thermidorien, est un pillard, un Septembriseur, que Cambon traitera publiquement de voleur, d'assassin, de canaille...

Nous ne parlerons ni des Girondins ni des Royalistes.

Et ces 4 fractions vont s'accuser réciproquement, s'injurier, se condamner, se proscrire, et prouver ainsi que Robe pierre, avait raison contre tous ses ennemis.

Les Thermidoriens surtout vont prouver qu'il avait bien raison de vouloir les punir et les immoler; car ils vont massacrer les Montagnards et les Jacobins, désarmer le Peuple, verser des torrents de sang patriote, favoriser la démoralisation, ranimer l'agiotage, et faire rétrogader bien loin la révolution politique et la réforme morale.

Et cependant, nous le déclarons, c'est avec une profonde douleur que nous trouvons tant de vertus dans Robespierre, puisqu'elles signalent tant de vices dans la Convention qui l'assassine: comme Français, comme homme, nous voudrions pouvoir donner raison à 740 Représentants du Peuple contre un seul, et sacrifier Robespierre à cette Convention que le parti populaire se plait à vanter et à exalter; c'est donc, nous le répétons, avec une patriotique affliction que nous voyons dans l'Assemblée des Législateurs tant de vices et tant de torts envers Robespierre: mais ce n'est pas nous, c'est l'Histoire qui crie que Robespierre vaut mieux que chacun des Conventionnels pris séparément et même que tous ensemble; et puisque la corruption de l'ancien régime a produit tant de Tallien, tant de Fouché, tant de Barras, tant d'êtres corrompus, la France se réjouira peut-être un jour d'avoir eu les deux Robespierre, Saint-Just, Lebas, Couthon (et, nous aimons à le croire, beaucoup d'autres moins connus), à la tête d'un Peuple laborieux qui admirait leurs vertus.

Qu'il nous est pénible aussi de trouver sous notre plume, en enregistrant les faits, les noms d'hommes que nous avons connus dans leur vieillesse ! Mais c'est en vain que notre main veut souvent se refuser à tracer ces noms qui nous rappellent de bienveillants souvenirs; l'impitoyable Histoire est là qui les burine elle-même sur ses tables d'airain.

S33.-Est-ce pour venger Danton qu'on renverse Robespierre.

Evidemment non: c'est lui qui a montré le moins d'hosti

T. IV.

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lité contre Danton; c'est lui que Danton aurait conservé seul dans le Comité de Salut public; ce sont les Comités qui ont exigé et décidé le sacrifice de Danton; il ne pouvait l'empêcher qu'en donnant sa démission; Billaud-Varennes vient de l'accuser précisément d'avoir défendu Danton; ce sont les trois chefs du Comité de Sûreté générale, Vadier, Amar et Vouland, qui ont poursuivi Danton jusque dans la salle du Tribunal révolutionnaire; ce sont les membres des Comités que Danton accusait d'avoir obsédé et perdu Robespierre; ce sont eux qu'il sommait de paraître comme témoins devant le tribunal pour qu'il pût les confondre et les pulvériser; c'est la Convention qui a condamné unaniment Danton à mort en décrétant son accusation et en autorisant le Tribunal à le mettre hors des débats; les Comités voulaient sacrifier avec Danton beaucoup d'autres de ses amis, les mêmes qui renversent Robespierre aujourd'hui, et c'est lui qui a sauvé alors ses assassins; nous avons vu Legendre déclarer Danton coupable et le condamner; enfin, les Comités sont encore tellement acharnés contre Danton qu'ils consentaient tout-àl'heure à sacrifier toute la Séquelle Dantoniste.

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Est-ce par humanité qu'on renverse Robespierre?

Evidemment non: c'est depuis sa retraite, pendant ses 47 jours d'absence, que les Comités décuplent les exécutions, sans que la Convention qui les voit ne fasse rien pour les arrêter; c'est lui seul qui s'en plaint, qui fait élargir beaucoup de prisonniers arrêtés par le Comité de Sûreté générale, et qui fait créer une Commission pour examiner les détenus; c'est principalement parce qu'il veut punir les Représentants les plus cruels (les Tallien, les Fouché, les Carrier, les Fréron, les Barras), et parce qu'il veut réprimer la cruauté des Vadier, des Amar, des Vouland et du Comité de Sûreté générale, que tous ces hommes sanguinaires se liguent pour le perdre!

Ce ne peut pas être l'humanité qui les guide, puisqu'en

trois jours ils vont faire tomber sur l'échafaud, sans jugement, en vertu de leur mise hors la loi contre la Commune, 103 têtes de chefs de famille parisiens (21 le 10, 70 le 11, 12 le 12), lorsque l'humanité leur conseille de se borner à quelquesuns des principaux !

C'est uniquement dans son intérêt personnel que la Coalition intérieure a attaqué Robespierre, comme des voleurs qui se battent contre des gendarmes; et s'ils ont montré de la résolution pour attaquer, c'est qu'on voit souvent des brigands montrer le plus grand courage pour défendre leur vie.

Aussi, nous verrons qu'on ne fera que changer de Terreur, que les prisons ne se videront de Royalistes que pour se remplir de Républicains, et que la Terreur révolutionnaire ne cessera au profit des Aristocrates que pour faire place à la Terreur contre-révolutionnaire au préjudice des patriotes.

§ 35. Robespierre était-il un Tyran?

Il paraît (l'Histoire parlementaire assure que Barrère l'a répété) que Saint-Just regardait une Dictature et particulièrement la Dictature de Robespierre comme nécessaire pour sauver la République au milieu des divisions qui menaçaient de la perdre; il paraît même que, à son retour d'un de ses derniers voyages, il indique cette opinion dans le Comité; et cette circonstance explique comment Billaud et les autres ont pu faire croire à beaucoup de Montagnards que Robespierre aspirait à la Dictature: mais il nous semble manifeste et incontestable que Saint-Just parlait ainsi à l'insu et contre l'opinion de Robespierre. Quelque nécessaire qu'il ait cru de punir les Députés concussionnaires et prévaricateurs, ce n'est que par un décret qu'il voulait le faire, avec le consentement et la délibération de la Représentation nationale, comme pour les Girondins, pour Chabot, etc., pour Clootz, etc., pour Danton, etc. Il disait, aux Jacobins (et tout démontre qu'il a toujours été sincère et sans intrigue), « que son plus << beau titre était celui de membre de la Représentation na<«<tionale; qu'il se retirerait sans regret du Comité de Salut

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public; et que, simple Député, il n'en poursuivrait pas moins « vivement les fripons et les traîtres... » Jamais il n'a pu avoir la pensée que lui ont prêtée ses ennemis, de dissoudre la Convention pour usurper le pouvoir et pour gouverner seul en Dictateur; et sa résolution de mourir plutôt que de marcher sur l'Assemblée nous paraît ne laisser aucune espèce de doute à cet égard.

Ses collègues disent qu'il était le tyran des Comités. Mais comment pourrait-il mériter ce titre? Il n'a ni autorité exclusive, ni trésor, ni gardes; il n'a que sa voix dans le Comité de Salut public et dans la Convention; il n'a d'autre arme que sa parole, d'autre puissance que celle du patriotisme, de la philosophie, de la vérité, de la persuasion.

Dans la distribution des pouvoirs entre les Comités divers et entre les membres de chaque Comité, il n'est pas plus dictateur et maître que les autres, que Cambon, par exemple, qui dirige souverainement les finances, que Carnot, qui dirige souverainement la guerre.

Que les Aristocrates, les Contre-révolutionnaires, les Suspects, l'appellent un Tyran, comme ils peuvent appeler ainsi le Comité de Salut public ou la Convention tout entière et le parti révolutionnaire tout entier, à la bonne heure : mais ni les Comités, ni la Convention, ni le parti populaire, ne peuvent l'accuser de tyrannie sans s'accuser eux-mêmes de complicité ou de la plus honteuse lácheté. — N'est-il pas vrai d'ailleurs que la Convention, c'est-à-dire la ligue de ses ennemis, est elle-même usurpatrice de la Dictature et par conséquent accusable de Despotisme et de Tyrannie? N'est-il pas vrai que les Thermidoriens, qui l'appellent un Tyran, vont encore usurper pendant un an cette Dictature, ce Despotisme, cette Tyrannie?

Ce sont donc ses ennemis et ses assassins qui sont des tyrans. Il ne périt, lui, que parce qu'il ne veut pas imiter la tyraunie et pas même avoir l'apparence d'un Tyran.

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