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dit par un décret impérial qui ordonne le démembrement de l'état ecclésiastique, des légations d'Ancône, d'Urbain, de Macerata, de Camerino. A cette nouvelle le légat du pape quitta Paris, et, le 17 mai 1809, Napoléon ordonna la réunion des États romains à l'empire français, et accorda au pape un revenu de deux millions de francs. Le pape, ou plutôt sa cour, s'irrita, et, le 11 juin, lança contre le vainqueur de Wagram ses foudres impuissantes, arme usée, hors de service, et dont l'usage était alors ridicule. Il excommunia bravement Napoléon, et sa bulle portait ces mots qui prouvent que l'opiniâtreté du pape à soutenir ses prétentions chimériques, égalait celle de Napoléon à envahir les États de ses voisins: Que les souverains apprennent encore une fois qu'ils sont soumis, par la loi de Jésus-Christ, à notre trône et à notre commandement, car nous exerçons aussi une souveraineté, mais une souveraineté bien plus noble1. S'il y a tyrannie dans la conduite de Napoléon, celle de Pie VII n'est pas exempte de reproches. Dans la nuit du 5 au 6 juillet 1809, le général Radet, d'après les ordres qu'il reçut, pénétra dans l'appartement du pape, déclara qu'il venait lui proposer, de la part du gouvernement français, de

Ces paroles sont diametralement contraires à l'esprit et à la lettre des évangiles. Jésus-Christ avait un royaume, mais il n'était pas de ce monde; il n'avait ni cour, ni faste, ni trône, comme en a son vicaire.

consentir à l'abdication de sa souveraineté temporelle; qu'à cette condition il pourrait rester tranquille à Rome. Je n'ai agi, lui dit le pape, qu'après avoir consulté le Saint-Esprit; vous me mettrez en pièces plutôt que je rétracte ce que j'ai fait. Dans ce cas, dit le général, j'ai ordre de vous emmener hors de Rome. Le pape alors prit son bréviaire, donna sa bénédiction à la ville de Rome, monta en voiture et fut conduit à Grenoble où il séjourna onze jours; de Grenoble on le reconduisit à Savone, dans le pays génois. Tout le long de son voyage et pendant ses séjours, le saint-père ne cessa de donner des bénédictions; il les répandit partout avec une libéralité remarquable.

Le gouvernement français envoya auprès du pape pour lui offrir un logement plus convenable, des domestiques déjà revêtus de sa livrée, et cent mille francs par mois pour sa dépense : il refusa

tout '.

Une intrigue anglaise, dont le but était d'enlever Pie VII de Savone, détermina Napoléon à le faire ensuite transférer à Fontainebleau.

D'autres événemens diminuèrent un peu la joie qu'avaient pu causer les succès de Napoléon en Allemagne, succès balancés par ceux qu'obtenaient les Anglais sur différentes côtes ; ils s'emparèrent, le 7 juillet, de Santo-Domingo; le 14, des éta

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Correspondance authentique de la cour de Rome avec la France, pages 470 et suivantes.

T. V.

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res;

blissemens français au Sénégal; dans les derniers jours de ce mois, ils débarquèrent sur les rives de l'Escaut dix-sept mille hommes qui prirent Midelbourg, Tervar, le fort de Batz et marchèrent sur la place de Flessingue qui, le 15 août suivant, sc rendit après un bombardement de trente-six heumais ils ne la gardèrent pas long-temps. Pendant son séjour à Schoenbrunn, Napoléon fut en danger de mort. Un de ces hommes atrabilaires, à idée fixe, qui, dans leur exaltation, sacrifient sans crainte leur propre vie, pour arracher celle de la personne objet de leur indignation, hommes très-dangereux pour les souverains, tenta d'assassiner Napoléon.

rangs

Lorsque, le 13 octobre, on passait une revue à Schoenbrunn, un jeune homme parvint à percer les des soldats. Les généraux, croyant qu'il avait une pétition à présenter à l'empereur, lui dirent de s'adresser à l'aide-de-camp de service; il répondit à plusieurs reprises qu'il voulait parler à Napoléon. Il s'avança de nouveau et très-près; le général Rapp lui dit en langue allemande de se retirer et de se présenter après la revue. « Il avait, » dit ce général, la main droite enfoncée dans la poche de côté, sous sa redingote; il tenait un papier dont l'extrémité était en évidence: il me >> regarda avec des yeux qui me frappèrent. » Ce général fit arrêter ce jeune homme: on trouva sur lui un énorme couteau de cuisine. Les généraux Rapp et Duroc se transportèrent dans sa prison.

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»

«Il était assis sur un lit où il avait étalé le portrait » d'une jeune femme, son porte-feuille et une » bourse qui contenait quelques vieux louis d'or. » Je lui demandai son nom'. Je ne puis le dire qu'à Napoléon.- Quel usage vouliez-vous faire » de ce couteau? - Je ne puis le dire qu'à Napo» léon.-Vous vouliez vous en servir pour attenter » à sa vie? - Oui, monsieur. — Pourquoi ? » Je ne puis le dire qu'à lui seul. »

Deux gendarmes le conduisirent, les mains liées derrière le dos, devant Napoléon. Là il subit un nouvel interrogatoire.

« D'où étes-vous? - De Naumbourg.

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votre père ?

Ministre protestant.

»age avez-vous? - Dix-huit ans?

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- Qu'est Quel

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Que vouliez

vous faire de votre couteau? Vous tuer.

» Vous êtes fou, jeune homme; vous êtes illuminé.

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Je ne suis pas fou, je ne sais ce que
Vous êtes donc malade?

» luminé.

c'est qu'il

Je ne

» suis point malade; je me porte bien. - Pourquoi vouliez-vous me tuer? Parce que vous faites le malheur de mon pays.

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fait quelque mal?

Vous ai-je

Comme à tous les Alle» mands. - Par qui étes-vous envoyé, qui vous » pousse à ce crime? Personne; c'est l'intime » conviction, qu'en vous tuant je rendrai le plus

grand service à mon pays et à l'Europe, qui » m'a mis les armes à la main... Je suis venu à

'Le général Rapp indique ainsi son nom: St...

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On lui dit qu'il était malade, il soutint qu'il se portait bien. Le docteur Corvisart appelé lui tâta le pouls, et le jugea en bonne santé. Je vous l'avais bien dit, reprit St... avec une sorte de satisfaction.,

Napoléon lui promit la vie s'il montrait du repentir. Je ne veux pas de pardon, lui répondit-il. Si je vous fais gráce m'en saurez-vous gré? — Je ne vous en tuerai pas moins.

Napoléon fut stupéfait. Ce courage froid et féroce, cette persistance que les approches de la mort ne purent altérer lui inspirèrent de tristes réflexions. Il dit au général Rapp, après plusieurs réflexions sur cette affaire, on ne m'aime ni à Berlin ni à Weimar. Celui-ci lui répondit qu'il ne pouvait prétendre à l'amitié de ces deux cours.

Ce jeune homme n'avait point voulu manger depuis le 24 jusqu'au 27 octobre, jour où il fut exécuté. Il disait avoir assez de force pour marcher à la mort; en s'y rendant, on lui apprit que la paix était faite; cette nouvelle le fit tressaillir de joie; il s'écria: Vive la liberté! vive l'Allemagne ! mort à son tyran'!

Cette affaire fit une vive et pénible impression sur l'esprit de Napoléon; il en parlait souvent.

Mémoires du général Rapp, chapitre XIX, page 141, et Mémorial de Sainte-Hélène, tome III, page 22.

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