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pompeux éloges de cet empereur romain. On trouva scandaleuse, dans une république, la représentation d'une pièce de ce genre, surtout an moment où cette république était en guerre avec un empereur, présumé coupable de l'attentat de Rastadt. Cette dénonciation fut la matière d'un message adressé au directoire qui donna des explications, desquelles il résultait que la pièce avait éprouvé des changemens qui l'appropriaient aux convenances républicaines. Adrien n'y figurait plus comme empereur, mais comme général romain. Ce fait prouve l'inquiétude des députés et leur penchant à dénoncer le directoire.

La question de la liberté de la presse occupait le conseil des Cinq-cents. Une commission avait proposé à ce sujet un projet de résolution qui fit naître une très-longue discussion où se montra, avec une évidence nouvelle, la limite qui séparait les ennemis du directoire de ceux qui étaient ses partisans. La question fut agitée de bonne foi par plusieurs orateurs de l'un et de l'autre parti; il n'en était pas de même de quelques autres qui demandaient la liberté illimitée de la presse pour s'en faire une arme contre les directeurs. La majorité du conseil, conformément au projet de la commission, en consentant au rapport de la loi du fructidor qui avait supprimé tant de journaux ',

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1 Voyez les titres et le nombre de ces journaux proscrits, t. IV, p. 432, 433.

réservait une peine aux délits que les journalistes pourraient se permettre; c'est ce qui ne convenait pas aux factieux qui auraient désiré que la liberté des journaux offrît un débordement de li

cence.

Dans la séance du 28 prairial, un membre, au nom des commissions réunies, se plaignit de ce que le message, adressé au directoire pour lui demander des renseignemens sur la situation de la république, était resté sans réponse : il proposa d'envoyer au directoire un second message sur le même objet, et de rester en permanence jusqu'à la réception de la réponse demandée.

A six heures du soir, le directoire envoya un message ainsi conçu :

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« Citoyens représentans, le directoire s'occupait de la réponse à votre message du 17: il >> espérait pouvoir vous la transmettre primidi pro>> chain; mais d'après votre nouveau message, le >> directoire se constitue lui-même en permanence, » et vous recevrez demain les renseignemens que » vous désirez. >>

Le conseil des Cinq-cents transmit ce message au conseil des Anciens, en lui annonçant en même temps qu'il venait de se déclarer en perma

nence.

On demanda que la permanence fût levée, puisque l'objet qui l'avait fait déclarer était rempli; d'autres voulaient que l'on reprît la discussion sur la liberté de la presse; quelques-uns que la

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séance fût suspendue jusqu'au lendemain, à dix
heures du matin. Un député dit : « C'est parce
» qu'il faudra des mesures autres que celles de la
» liberté de la presse, qu'il est nécessaire de
>> terminer ce qui la concerne..... Dans les dan-
» gers
de la patrie, tous les citoyens doivent
» être à leur poste. Or, la patrie est en danger,
> nous pouvons le proclamer. >>

er

« Je suis étonné que l'on vous parle de lever >> votre permanence dans les circonstances ac»tuelles,' dit un autre député. Je ne le suis pas » moins que le directoire vous annonce dans » son message qu'il devait vous répondre le 1" » messidor : le 1er messidor!.... et c'est aussi à ce jour qu'est fixé un grand événement, suivant » les nouvelles, les avis, les correspondances que » nous recevons.... Oui, la république est en danger; les commissions peuvent avoir des me» sures à proposer; il faut que vous soyez à » même de les entendre. »

Un secrétaire convoqua les commissions réunies, et le député Crochon, qui n'était pas dans le secret, s'écria : « Je ne sais quelles sont ces com>> missions qu'on veut convoquer; nous n'avons » ni commission diplomatique, ni comité de sû» reté générale, ni comité de salut public. Je » demande, au nom de la constitution, où est » l'arrêté qui charge les commissions créées » pour des objets particuliers, de s'occuper d'objets extraordinaires. » On répondit à Cro

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chon que quelques commissions étaient autorisées, par un arrêté, à se réunir lorsqu'elles avaient besoin de leurs lumières réciproques, et lorsqu'il existait entre elles des points de contact à éclaircir. Cette explication ne justifiait pas cette réunion; mais on passa à l'ordre du jour, et on reprit la discussion sur la liberté de la presse.

Il est certain que ces commissions réunies s'étaient alors approprié le rôle et l'autorité du ci-devant comité de salut public. On va voir comment elles débutèrent.

Un des membres de ces commissions réunies vint, à onze heures du soir, faire, en leur nom, un rapport où se trouvait la proposition suivante: « La mesure que je viens vous présenter » est puisée dans une considération bien simple, dans une violation manifeste de la cons>>titution, que vous devez vous empresser de réparer. L'article 136 de la constitution est >> ainsi conçu :

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» A compter du premier jour de l'an de la ré» publique, les membres du corps législatif ne » pourront être élus membres du directoire ni » ministres, soit pendant la durée de leurs fonc

tions législatives, soit pendant la première an» née après l'expiration de ces mêmes fonctions. »

Il est évident, d'après cet article, qu'il fallait le laps d'une année entière entre les deux fonctions: le rapporteur dit ensuite que les fonctions

législatives de Treilhard ont cessé le 30 floréal an V, et qu'il a été nommé au directoire le 26 floréal an VI; c'est-à-dire qu'il manquait quatre jours pour que l'année fût entièrement révolue ; remarquons que l'article de la constitution ne dit pas strictement entièrement révolue, mais qu'il porte pendant la première année : remarquons aussi que cette erreur, si c'en est une, ne fut pas aperçue ni relevée pendant l'espace des treize mois que Treilhard remplit les fonctions de directeur; lorsque le corps législatif porta ce citoyen au directoire, il devait savoir s'il était constitutionnellement éligible; s'il ne l'était pas, c'est le corps législatif qui a fait la faute, et l'on propose d'en punir Treilhard, fort innocent; car c'est une punition que de se voir déchu de ses fonctions '.

La nomination de Treilhard fut déclarée inconstitutionnelle et nulle.

Rewbell venait d'être exclu du directoire par le sort, Treilhard le fut par une chicane misérable.

Treilhard reçut assez gaiement la nouvelle de sa déchéance. Il dit à ses collègues du directoire :

Il manquait quatre jours entre l'époque de la cessation des fonctions législatives de Treilhard et celle de sa nomination au directoire. C'est une chicane évidente; c'est s'attacher à la lettre plutôt qu'à l'esprit de la constitution. Treilhard était à Rastadt en qualité de ministre plénipotentiaire de la France, lorsqu'il fut nommé directeur; il n'a pu intriguer pour être nommé.

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