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dans ses écrits, d'éviter surtout de pousser des pointes. On y avoit dérogé, par les opérations excentriques de la Marne, après lajournée de Brienne.

Mais les avantages et les ressources des alliés étoient immenses. Chaque forteresse qui tomboit en-deçà ou au-delà du Rhin, augmentoit leur masse d'invasion; l'Oder, l'Elbe et le Rhin, leur servoient, pour ainsi dire, de triple ligne de réserve, d'où ils tiroient continuellement des renforts. Deux ou trois défaites partielles avoient-elles pu suffire à entamer sérieusement des armées recrutées par l'empire russe et par l'Allemagne entière? Les pertes, d'ailleurs, étoient balancées; mais l'esprit militaire avoit repris son ancienne énergie dans les camps de Napoléon: naturellement belliqueux les soldats français ne redoutoient plus de sé mesurer avec des forces supérieures; ils éprouvoient le désir et le besoin de vaincre.'

Ces grandes considérations ne pouvoient échapper aux généraux des deux partis. Il sembloit que la confédération ne pût atteindre le but qu'elle se proposoit, qu'en réunissant, en une seule masse, comme à Léipsic, toutes les armées de la ligue européenne. Le Rhin étoit franchi depuis près de deux mois;

on étoit même parvenu jusqu'au cœur de la France; et cette réunion si essentielle n'avoit pas encore été opérée; car à Brienne elle n'avoit été que partielle. Les souverains alliés n'y songèrent sérieusement qu'après les revers de la Marne et de Montereau. Du 14 au 18 février, on avoit expédié à Châlons l'ordre formel d'opérer le plus promptement possible, aux environs de Troyes, la jonction de l'armée du maréchal Blucher avec la grande armée

austro-russe.

Malgré les rudes combats qu'elle avoit soutenus, l'armée de Silésie, représentée si souvent comme tout-à-fait dispersée, et même anéantie, se trouvoit en quatre jours refaite, réorganisée, équipée et rassemblée. Les corps 'de Sacken, d'York et de Kleist marchoient tranquillement, dès le 18 février, au nombre de cinquante mille hommes, et dans le meilleur état, de Châlons vers Troyes, pour former la droite de la grande armée du prince Schwartzenberg. Dans la nuit du 19 au 20, maréchal Blucher bivouaqua au village de Sommesous; et, le lendemain, il fut renforcé près d'Arcis-sur-Aube, par neuf mille combattans du corps de Langeron, qui arrivoient de Vitry. L'armée continua sa marche vers

le

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Arcis, pour, de là, gagner Méry-sur-Seine, où devoit s'opérer la jonction; ses têtes de colonnes parurent à Arcis le 20 février (1).

En même temps, la grande armée se dirigeoit sur Troyes, par Romilly et la Chapelle; toutes les routes étoient couvertes de nombreuses colonnes d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie; sur tous les points de l'horizon, des feux de bivouacs éclairoient au loin la campagne. Un froid vif favorisoit le mouvement rétrograde des alliés, en leur permettant d'évacuer leur artillerie et leurs bagages. dans toutes les directions. De fortes reconnoissances de cavalerie couvroient la retraite.

L'armée française ne partit de Montereau que le 20, se dirigea sur Bray, traversa celte ville sans s'arrêter, et apprit que l'empereur Alexandre y avoit couché la veille. Sur toute la route, les habitans assuroient qu'une grande mésintelligence régnoit entre les troupes des diverses nations qui formoient la grande armée alliée. Les colonnes françaises longeoient la rive gauche de la Seine; et le même jour, elles firent halte à Nogent, où l'armée passa toute la journée du 21. L'avant-garde seule, com

(1) Voyez Pièces justificatives, No. XXXV.

mandée par le maréchal duc de Reggio, suivit l'ennemi qui, de Romilly, se dirigeoit vers Troyes. Le 22, l'armée partit de Nogent, et continua sa marche jusqu'au bourg de Châtres. Là, Napoléon frappé de la retraite des alliés, et de l'unanimité des rapports qui lui parvenoient, se persuada que la coalition, soit par l'effet des revers, soit par la différence des intérêts,alloitse dissoudre. Egaré par sa propre ignorance sur les vrais intérêts des nations, il crut pouvoir détacher l'Autriche de la ligue européenne, et il écrivit dans ce sens, une lettre tranchante au généralissime prince Schwartzenberg; cette lettre déceloit, dit-on, la folle arrogance que lui inspiroit l'idée de rejeter l'ennemi au-delà du Rhin.

A peine eut-il expédié l'officier qui en étoit porteur, que ses généraux de l'avant-garde lui donnèrent l'avis qu'on remarquoit un rassemblement de forces considérables à Mérysur-Seine. Napoléon prit aussitôt la résolution de s'y porter, soit pour reconnoître, soit pour attaquer les alliés. Le bourg de Méry, situé sur les deux rives de la Seine, mais plus encore sur la rive droite, à six lieues au nordouest de Troyes, venoit d'être occupé par le corps russe du général Wittgenstein, et l'ar

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mée entière du feld-maréchal Blucher y arrivoit par la route de Châlons.

Dès lors fut opérée la jonction des deux armées. Ainsi, malgré les manœuvres de Napoléon, malgré le mauvais état des traverses qui joignent les deux routes, cette réunion se fit dans le plus grand ordre, rien n'ayant pu abattre la constance des soldats alliés.

Le comte Wittgenstein avoit déjà reconnu que des forces considérables lui étoient opposées, entre Mesgrigny et Châtres; c'étoient le 7 et le 9 corps formant l'avant-garde, sous le commandement du maréchal duc de Reggio, indépendamment d'un corps nombreux de cavalerie. A l'arrivée de l'armée de Silésie, le corps du général comte Wittgenstein se dirigea sur Chandrigny. A peine les postes laissés en avant de la ville sont-ils relevés par l'armée prussienne, que Napoléon, arrivant en personne, ordonne au général Boyer de commencer l'attaque. Le bataillon prussien qui, placé sur la rive gauche, défendoit le pont, est culbuté aussitôt et poussé au-delà de la Seine qui passe au milieu de Méry; il n'a pas même le temps de brûler le pont qui sépare la ville en deux, et les Français, qui sont à sa poursuite, parviennent à le passer, Le

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