Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Napoléon, qui précipitoit sa marche pour la déborder, mais qui fut trompé dans son attente. Les généraux Bulow et Winizingerode s'étant rencontrés devant Soissons, le 2 mars, firent des dispositions menaçantes, décidés à emporter la ville d'assaut ; elle étoit cernée par vingt-cinq à trente mille hommes. Ne pouvant apprécier l'état général ' de la guerre, le commandant ne considéra que la situation particulière d'une ville sans fortifications, et attaquée de nouveau par une armée qui en avoit déjà fait la conquête, après avoir franchi toutes les barrières du Nord. Entraîné par ces considérations, il entame une négociation avec le général Bulow, et consent à rendre Soissons, moyennant une capitulation honorable qui laissoit la garnison libre de se retirer sur Villers-Cotterets, avec son artillerie et ses bagages.

Une convention si heureuse pour les alliés, eut, dans ces graves circonstances, les résultats les plus décisifs. Napoléon alloit marcher de Fismes sur Méry, pour tourner l'armée de Blucher, quand il apprit que Soissons venoit d'ouvrir ses portes. La fureur qui le transporta ne put même s'apaiser, après une victoire, et il l'exhala

>>

dans son bulletin officiel. « L'armée ennemie, » dit-il, se croyoit perdue quand elle apprit » que le pont de Soissons lui appartenoit, » et n'avoit même pas été coupé. Par une » lâcheté qu'on ne sauroit définir, le général qui commandoit à Soissons a abandonné la » place en vertu d'une capitulation soi» disant honorable; il est traduit, ainsi » que les membres du conseil de défense, » à une commission d'enquête. » Selon Napoléon, les officiers paroissoient d'autant plus coupables, que, pendant toute la journée du 2 et du 3, on avoit entendu de la ville, la canonnade de l'armée française, qui se rapprochoit de Soissons.

Mais, déjà, dans la soirée du 3 mars, l'armée de Silésie avoit effectué, à Soissons même, sa jonction avec les corps de Bulow et de Wintzingerode; et, traversant librement le pont intact, elle avoit pris position sur un vaste plateau, derrière la ville, sa droite appuyée près du village de Laffraux, et sa gauche près de Craonne.

Cependant, après avoir suivi et harcelé l'armée combinée dans sa marche de la Marne à l'Aisne, les corps des maréchaux Marmont et Mortier, renforcés par une nombreuse ca

valerie, tentèrent, le 5 mars, de reprendre Soissons. La ville, située du côté de l'Aisne opposé à celui où l'armée combinée avoit pris position, étoit défendue par cinq à six mille hommes d'infanterie russe du corps de Langeron, sous les ordres du général Rudzwich, force suffisante sans doute, quoique Soissons ne fût entourée que d'un mur rompu et d'un fossé accessible sur plusieurs points.

A six heures du matin, les troupes françaises forment leur attaque, et s'emparent d'abord de la plus grande partie des faubourgs; ensuite, de fortes colonnes marchent sur la ville même, des deux côtés opposés ; elles sont repoussées dans deux attaques successives; mais, restés en possession de la plus grande partie des faubourgs, les Français enlèvent les toits des maisons; et, de là, font un feu continuel sur les troupes russes qui garnissent les remparts. La nuit seule mit un terme à ce combat meurtrier, qui coûta aux Russes plus de mille hommes tués ou blessés, et aux assaillans, une perte égale. Quelques maisons seulement séparoient les deux partis. Les Russes s'attendoient pour le lendemain, à de nouvelles attaques. Mais, Soissons n'étoit pas l'objet de l'expédition et des

efforts de Buonaparte. Quoique la reddition de cette ville eût fait avorter la partie la plus essentielle de son plan, il n'en persista pas moins dans la résolution de manoeuvrer sur le flanc de l'armée ennemie, après l'avoir tournée, à plusieurs lieues sur la droite de Soissons. Il rallie en conséquence les corps séparés des ducs de Raguse et de Trévise, qui, le 6 mars au matin, abandonnent l'attaque de la ville pour remonter l'Aisne sur leur droite. L'armée alliée néglige aussitôt la route directe de Laon, et appuie sur sa gauche pour s'opposer aux progrès des Français, et couvrir Laon dans cette direction.

La veille, Napoléon s'étoit porté de Fismes sur Béry-au-Bac; là, après avoir fait emporter le pont de vive force par la cavalerie du général Nansouty, avant que l'ennemi eût pu le détruire, il avoit effectué le passage de l'Aisne avec son armée. La division de cavalerie ennemie destinée à couvrir le pont, fut poussée pendant plusieurs lieues sur la route de Laon, avec une extrême vivacité; elle perdit deux canons, et plusieurs cavaliers furent faits prisonniers, parmi lesquels se trouvoit le colonel prince Gagarin. En même temps, de fortes

colonnes filoient sur la route de Reims, vers Corbeny et Laon.

Tout annonçoit une bataille générale, entre cette ville et l'Aisne, dans le triangle dont la route de Soissons à Reims forme la base, et Laon le sommet.

Ce fut alors que le feld-maréchal Blucher conçut une manœuvre qui, sans compromettre la totalité de ses forces, devoit avoir le résultat le plus décisif. Il établit son armée en échelons, depuis le plateau de Craonne jusqu'aux approches de Laon; puis, formant avec presque toute sa cavalerie un détachement, de dix mille chevaux, sous les ordres du général Wintzingerode, il le dirige, par les routes de Chevrigny et Presle, au débouché de la plaine, derrière Bouconville, vers la route de Corbeny à Laon, pour de là se jeter sur la ligne de communication de l'armée française. Cette manoeuvre hardie tendoit à tourner Napoléon au moment même où il auroit commencé l'attaque de la position de Craonne. Les corps prussiens des généraux Kleist et York étoient destinés à protéger et à suivre le mouvement de la cavalerie, et celui du général Sacken devoit soutenir l'infanterie du général Wintzingerode. Le général Bulow, avec vingt mille

« ZurückWeiter »