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tans qui remplissoient le parvis, la nef et les ailes de cette immense basilique. Dans le sanctuaire étoient rassemblés les cardinaux, archevêques et évêques, le clergé de la métropole et des environs. Dans le choeur et dans le haut de la nef figuroient les principaux corps de l'Etat et un grand nombre d'officiers généraux, tant français qu'alliés; tous attendoient avec la plus vive impatience l'apparition du prince. Les chanoines le reçureut sous un dais au grand portail de l'église. Son entrée fut signalée par des acclamations prolongées et unanimes. Au discours que lui adressa le clergé le prince répondit : « C'est la miséricorde de >> Dieu qui a mis un terme aux malheurs des Français; allons lui en rendre grâce. Le roi » ne peut être heureux qu'autant que son » peuple le sera. » Lorsqu'il traversa la nef et le choeur, les cris de Vive le Roi! Vive Monsieur! redoublèrent avec une ardeur dont la sainteté du lieu ne put arrêter l'explosion. Le premier mouvement du prince fut de se jeter

genoux pour rendre grâce à Dieu. L'expres sion angélique peinte sur ses traits augustes annonçoit les sentimens de générosité et d'affection dont sa grande âme étoit remplie. L'enthousiasme qui animoit tous les Français

se communiqua rapidement aux officiers russes, autrichiens, anglais, prussiens, espagnols et portugais, placés dans le choeur de la cathédrale. Il sembloit que toute l'Europe, représentée par l'élite des guerriers français et étrangers, jurât la concorde et la paix, dont les bienfaits alloient guérir les plaies profondes de la France.

Le Te Deum ayant été chanté à grand orchestre, fut suivi du Domine, salvum fac Regem! que tous les assistans en choeur répétèrent. La cérémonie achevée, S. A. R. fuț reconduite sous le dais au milieu des cris de joie qui retentirent au dedans et au dehors avec plus de force encore. Tous les rangs, tous les états se confondirent: les ecclésiastiques de la métropole, les militaires, les magistrats, les enfans, les femmes, tous sembloient n'être plus qu'une seule famille; on se félicitoit mutuellement, on s'embrassoit en s'écriant ; Quel beau jour!

Les acclamations, l'ivresse du peuple accompagnèrent le prince jusqu'au palais des Tuileries. A peine MONSIEUR y fut-il entré que le drapeau blanc apparut et flotta au-dessus du pavillon principal, au milieu des transports d'une foule immense qui remplissoit le jardin, les cours et les avenues.

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Le prince étoit rentré dans son appartement, et l'on vouloit en écarter la foule : « Monsei>> gneur doit être bien fatigué, dit un >> officier de sa suite. - Comment serois-je fatigué, répondit MONSIEUR, dans un jour tel » que celui-ci, le premier jour heureux que » j'aie eu depuis vingt-cinq ans. » Lorsqu'on lui demanda le soir quelles mesures il jugeoit nécessaires pour la sûreté de sa personne : Aucune, répondit-il, n'ai-je pas été reçu >> partout comme l'enfant de la maison? >>

«

Mots heureux, sortis de l'âme d'un vrai descendantde ce roi chéri, qui a rendu la dynastie des Bourbons populaire. En effet, jamais le peuple de la capitale n'avoit montré une telle ivresse; jamais un prince n'avoit été l'objet de tant d'amour.

Le soir, la plupart des édifices publics et des maisons particulières furent illuminés spontanément, et décorés d'emblèmes ingénieux.

à son

Ains la nation française, après avoir vu rompre les liens qui l'attachoient depuis tant de siècles à ses habitudes, à ses mœurs, gouvernement; la nation à qui on étoit parvenu, à force de diffamations et de violences, à faire méconnoître ses princes légitimes, et, ce qui est pis encore, à les lui faire oublier,

descendoit tout à coup dans sa conscience, et y retrouvoit ce besoin d'amour et de fidélité pour ses rois, source la plus pure du bonheur public. La journée du 12 avril le lui avoit révélé ; elle avoit signalé en quelque sorte la résurrection du caractère français, dénaturé et étouffé par vingt-cinq ans de délire. Revenue à elle-même, la nation, par un vœu librement émis, par un vœu universel, vouloit déposer, dans les mains de son monarque légitime, la puissance limitée par les lois. L'approche et le nom seul de Louis XVIII, le retour précurseur de son auguste frère, avoient fait éclater, dans une génération toute nouvelle, des sentimens, des transports, des émotions, que, par une sorte d'instinct, les enfans avoient reçus de leurs pères.

Mais aussi étoit-il de la famille, ce prince qui, en y entrant après une si longue absence, avoit dit : « Il y a un Français de plus dans » Paris. » C'étoit un enfant de la maison ce prince dont la douce affabilité parut contraster si heureusement avec le regard farouche de l'insensé qui s'étoit érigé en tyran de la France. Dès lors la cause de Napoléon fut entièrement perdue. Les sentimens qu'il avoit étouffés se manifestèrent de plus en plus, et

avec une sorte de sympathie : l'explosion étoit générale. On auroit pu se passer de son insolente abdication : il avoit cessé de régner. Son armée étoit désorganisée par les adhésions; tous les corps se décomposoient. Napoléon vit même sa propre garde se dissoudre en partie, Du 7 au 9 avril plus de quatre mille grenadiers et chasseurs, dispersés vers Orléans, avoient réclamé, à la mairie de Montargis, des feuilles de route pour rentrer dans leurs foyers. Abandonné par la moitié de son armée, Napoléon voyoit le reste se fondre, et il en témoigna son ressentiment avec toute l'amertume de l'ambition évanouie.

>>

« L'armée, osa dire ce chef ingrat, l'armée » s'est déshonorée; je ne veux plus d'elle; » elle n'est pas digne que je la commande. → Sire, répondit le général Dulauloy, avec fermeté, cette armée a combattu pour » vous jusqu'à son dernier soupir, et quand elle perd tout, ah! du moins laissez-lui » l'honneur. Tant de généraux, ici présens, » vous le demandent avec moi. Officiers et sol» dats, tous et partout n'ont-ils pas rivalisé de dévouement pour vous? tous ne sont-ils pas » tombés pour votre cause avec la même obéis»sance? » Mais il n'étoit pas capable de reve

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