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la cocarde noire aux couleurs de la restauration.

Ces scènes d'allégresse publique n'étoient troublées, ni par la réflexion, ni par la crainte. Les calculs d'une lâche prudence furent étouffés par l'élan des cœurs et par la conscience du devoir. La bonne ville de Toulouse alloit en recevoir bientôt la récompense: les félicitations réciproques sur les heureux événemens d'une si généreuse entreprise étoient générales; les âmes étoient sans trouble, les visages étoient radieux, quand le même jour, vers cinq heures après midi, arrivent le colonel Cooke et le colonel Saint-Simon, que la préfecture de Montauban venoit de remettre enfin en liberté. Ils apportoient les dépêches de Paris, et bientôt les Toulousains entendent sortir de la bouche de Wellington ces paroles inattendues « Le sénat conservateur a pro» noncé la déchéance de Napoléon Buonaparte; les conseils suprêmes de Paris ap

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pellent au trône Louis XVIII; la capitale » et l'armée rejettent l'usurpateur et sa fa» mille. ».

L'enthousiasme se manifesta alors dans toute son énergie la joie et le ravissement terminèrent un si beau jour. Honneur à la ville de

Toulouse! libre dans ses vœux, elle a donné à ses souverains légitimes le glorieux et hardi témoignage de son dévouement à leur cause, avant même d'avoir le moindre indice que Dieu et les hommes s'étoient déclarés en leur faveur.

Les Toulousains acquirent aussi d'autres titres à la reconnoissance publique rien de plus louable et de plus touchant que l'humanité de la garde urbaine et des femmes de cette ville, en faveur des blessés des deux armées, qui furent recueillis et soignés avec une sollicitude empressée et presque religieuse.

On se consoloit en songeant que les bienfaits de la paix alloient succéder enfin à tant de scènes de carnage. Le colonel Saint-Simon, expédié par le gouvernement provisoire, partit immédiatement de Toulouse, afin de porter au maréchal Soult et au maréchal Suchet les décrets du sénat, et l'adhésion des puissances alliées. Le maréchal Soult ne regarda pas bord ces informations comme assez authen

d'a

et à

tiques pour le décider à poser les armes envoyer sa soumission; il fit proposer à lord Wellington d'accéder à une suspension d'hostilités, afin d'avoir le temps de vérifier les

faits par lui-même. Le noble lord ne jugea pas à propos d'acquiescer à cette demande et il fit partir deux divisions de son armée pour marcher à la poursuite du maréchal Soult, vers Castelnaudary, dans le Bas-Languedoc.

Au même moment le maréchal Suchet avec son corps d'armée, rentroit sur le sol de la France, laissant des souvenirs pleins de gloire dans la péninsule dont il venoit de cicatriser les plaies, en remettant lui-même à la nation espagnole son roi légitime; mission honorable et accomplie avec autant de fidélité que de noblesse, prélude heureux du rétablissement des trois branches de l'auguste famille des Bourbons sur le trône de leurs ancêtres. Ainsi furent couronnées les brillantes campagnes du vainqueur de Maria, de Belchite et de Sagonte; du conquérant de Lerida, de Mequinenza, de Tortose, de Tarragone et de Valence, de celui que les Espagnols euxmêmes appellent le plus vaillant et le plus heureux de tous les maréchaux de sa nation; de celui enfin qui, délaissé avec une poignée de braves, s'étoit maintenu, entouré d'armées nombreuses, lorsque déjà tout étoit perdu, et la France envahie. Mais ce

guerrier, homme d'Etat, avoit honoré le caractère espagnol, il avoit relevé la discipline, et administré avec sagesse. Adoré de ses soldats dont il étoit le père, estimé, respecté des peuples même qu'il avoit assujétis par ses armes, il ramenoit au secours de sa patrie une armée d'élite dont aucun revers, dans cette guerre fatale, n'avoit obscurci les hauts faits. Devenue presque le seul espoir du midi de la France, cette armée avoit fourni un détachement de vingt-deux mille hommes à celle du Rhône et de l'Isère; elle avoit laissé dans les places conquises dix-huit mille hommes de bonnes troupes, bien disciplinées et animées d'un excellent esprit (1). Réduite à quatorze mille braves, l'armée du maréchal Suchet repassa les Pyrénées avec son illustre chef, le 12 avril, deux jours après la bataille de Toulouse. Depuis trois mois tous les regards s'étoient portés vers cette armée valeureuse, comme pouvant seule, par l'habileté de son

(1) A Sagonte, près de Valence; à Peníscola qui a soutenu un bombardement dont la moitié de la garnison a été la victime; à Tortose qui a été bloqué pendant onze mois ; à Barcelonne également bloqué par un corps anglo-espagnol; à Hostalrick, et au grand fort Saint-Ferdinand à Figuières. Toutes ces garnisons sont rentrées en France avec armes et bagages.

général, arrêter les progrès de Wellington. A chaque revers on annonçoit que l'armée du maréchal Suchet venoit enfin d'opérer sa jonction avec l'armée du maréchal Soult. Mais ces bruits si long-temps accrédités par un sentiment d'estime universelle, n'avoient aucun fondement réel. Le système de défense du Midi commandoit la séparation des deux armées celle du maréchal Soult devoit couvrir les routes de l'Océan et tout le Haut-Languedoc; celle du maréchal Suchet alloit défendre les routes de la Méditerranée, qui couvrent le Bas-Languedoc et la Provence. S'il eût abandonné, après une marche plus rapide, les positions de Perpignan et de Narbonne, pour voler à la défense de Toulouse, une seconde armée de quarante mille AngloEspagnols eût percé à travers les Pyrénées, dans cet espace qui sépare Toulouse de Narbonne, et le canal du Languedoc ainsi que la ville de Montpellier eussent été livrés aux invasions de l'ennemi.

Au premier avis des heureux événemens qui venoient de mettre un terme aux maux de la France, le maréchal Suchet envoya le colonel Richard de son état-major au quartiergénéral de lord Wellington, afin de traiter

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