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qu'ils prirent, de stipuler pour sa sûreté et pour ses intérêts personnels. Les maréchaux Ney et Macdonald se chargèrent, conjointement avec M. de Caulaincourt, de porter à Paris la proposition que faisoit Buonaparte, de se soumettre à la décision du sénat et du peuple français, moyennant que le trône passeroit à son fils; ils promirent enfin de traiter franchement, auprès de l'empereur de Russie, du sort de la dynastie de Napoléon.

à l'armée, que

Toutefois, on croyoit si peu, la régence fût une condition nécessaire, qu'en partant pour la capitale, les maréchaux étoient déjà convenus de provoquer eux-mêmes le retour des Bourbons, si la proposition de Napoléon étoit rejetée; mais la grande majorité des soldats, n'écoutant que ses habitudes belliqueuses, et regrettant surtout la perspective des avancemens rapides, sembloit préférer la régence à tout autre parti.

Rien désormais ne pouvoit plus arrêter l'entière démolition de l'édifice monstrueux élevé par le délire et l'ambition humaine. Ce même jour, 4 avril, Napoléon fut frappé comme d'un nouveau coup de foudre, en apprenant que le maréchal duc de Raguse venoit de traiter de la soumission du sixième corps sous ses ordres,

avec le gouvernement provisoire, qui lui offroit le caractère d'une autorité vraiment nationale. Ce corps, qui occupoit une position près d'Essone, montoit encore à douze mille hommes; et, dans la nuit du 3 au 4, il étoit passé, avec armes, bagages et munitions, dans la ligne des alliés, pour aller prendre ses cantonnemens à Versailles. C'étoit au nom de la patrie, et pour éviter la guerre civile, que le duc de Raguse s'étoit rangé sous l'autorité du sénat et du peuple, qui l'avoient délié du serment de fidélité. Le même esprit qui animoit ses illustres compagnons d'armes l'avoit porté à stipuler, par une convention particulière, que si les événemens ultérieurs de la guerre livroient la personne de Napoléon aux alliés, sa vie et sa liberté, dans un lieu convenable, seroient garanties. On crut, à Fontainebleau, que le duc de Raguse, après s'être fortement prononcé pour qu'on ne marchât point contre Paris, avoit saisi avec empressement l'occasion propice de se soustraire au ressentiment de Napoléon.

Quoi qu'il en soit, atterré par cette espèce de défection, il versa encore un torrent de larmes; mais, se reprochant bientôt sa foiblesse, etreprenant plus de fermeté, il parut se repentir

de son abdication. A peine eut-il une connoissance officielle du décret qui contenoit le motif de sa déchéance, qu'il lança contre le sénat une espèce de manifeste qu'il intitula : Ordre du jour, parce qu'il l'adressoit à l'armée; il contenoit les passages suivans :

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L'empereur remercie l'armée, pour l'atta» chement qu'elle lui témoigne, et principa>>lement parce qu'elle reconnoît que la France » est en lui, et non dans le peuple de la >> capitale.

» Le soldat suit la fortune et l'infortune de » son général, son honneur et sa religion,

>> Le sénat s'est permis de disposer du gou» vernement français; il a oublié qu'il doit à l'empereur le pouvoir dont il abuse mainte» nant; que c'est lui qui a sauvé une partie de » ses membres de l'orage de la révolution; » tiré de l'obscurité et protégé l'autre contre » la haine de la nation.

» Le sénat se fonde sur les articles de la cons» titution; il ne rougit pas de faire des re>> proches à l'empereur, sans remarquer que, » comme le premier corps de l'Etat, il a pris » part à tous les événemens ; il est allé si loin, » qu'il a osé accuser l'empereur d'avoir changé » des actes dans la publication (d'être faus

saire). Le monde entier sait qu'il n'avoit pas » besoin de tels artifices: un signe de sa part

» étoit un ordre pour le sénat, qui toujours

>>

faisoit plus qu'on ne lui demandoit (1). »

Le soir même, Napoléon réunit autour de lui la plupart de ses officiers-généraux, pour s'assurer de leurs dispositions dans le cas où l'abdication en faveur de son fils seroit rejetée. Ils se rassemblèrent au nombre de plus de quarante, faisant luire encore autour de leur ancien chef un rayon d'espérance. Napoléon sembloit moins redouter l'abandon de la fortune que la perte de la vie; c'est du moins ce qu'on peut inférer des paroles suivantes, qu'il adressa à ses généraux : « Quand on a eu vingt » ans de gloire, et qu'on a fait trembler l'uni» vers, on ne doit guère s'attendre à avoir long-temps à vivre. »

L'esprit d'incertitude qui le portoit tantôt à négocier, et tantôt à essayer de reprendre les armes, se manifesta surtout dans la journée du 5 avril. A onze heures du matin, il arrêta un plan qui consistoit à se diriger, avec les vingt-cinq mille hommes qui lui restoient, tant de sa garde que de la ligne, vers l'Italie, pour

(1) Voyez Pièces justificatives, N°. LVIII.

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se joindre au prince Eugène. « Si je veux, et » si j'arrive, répétoit Napoléon, je suis sûr d'être reconnu par toute l'Italie. » Informés de ce nouveau projet, plusieurs généraux allèrent presser le secrétaire d'Etat duc de Bassano, qui étoit presque toujours seul avec Napoléon, de l'engager à ne pas se montrer à la parade; mais il voulut y paroître, malgré toutes les représentations, et s'obstina même à passer en revue le corps du maréchal Oudinot: son visage étoit pâle, altéré, et les mouvemens convulsifs, qu'il ne pouvoit plus maîtriser, attestoient les souffrances de son âme. Il se hâta de passer la revue, et put juger, par le morne silence des soldats, combien ils étoient peu disposés à faire de nouveaux sacrifices pour relever son pouvoir.

Il remonte aussitôt au palais, fait appeler le maréchal Qudinot, et lui demande si les troupes le suivront?-« Non, sire, répond >> le maréchal vous avez abdiqué. Il est » vrai; mais c'est à certaines conditions. » Les soldats, reprend le maréchal, ne con» noissent pas ces nuances; ils croient que vous >> ne pouvez plus les commander. Tout est » done dit de ce côté, ajoute Napoléon; atten» dons les nouvelles de Paris.

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