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Habitans de Paris,

Les armées alliées se trouvent devant Paris; le but de leur marche vers la capitale de la France est fondé sur l'espoir d'une réconciliation sincère et durable avec elle. Depuis vingt ans, l'Europe est inondée de sang et de larmes ; les tentatives faites pour mettre un terme à tous les malheurs ont été inutiles, parce qu'il existe dans le pouvoir même du gouvernement qui vous opprime, un obstacle insurmontable à la paix. Quel Français ne seroit convaincu de cette vérité! Les souverains alliés cherchent de bonne foi une autorité salutaire en France, qui puisse cimenter l'union de toutes les nations et de tous les gouvernemens avec elle.

» C'est à la ville de Paris qu'il appartient, dans les circonstances actuelles, d'accélérer la paix du Monde; son vou est attendu avec l'intérêt que doit inspirer un si immense résultat : qu'elle se prononce, et dès ce moment l'armée qui est devant ses murs devient le soutien de ses décisions.

» Parisiens, vous connoissez la situation de votre patrie, la conduite de Bordeaux, l'occupation amicale de Lyon, les maux attirés sur la France, et les dispositions véritables de vos concitoyens.

» Vous trouverez dans ces exemples le terme de la guerre étrangère, et celui de la discorde civile ; vous ne sauriez plus le chercher ailleurs. La conservation et la tranquillité de votre ville seront l'objet des soins et des mesures que les alliés s'offrent de prendre avec les autorités et les notables qui jouissent le plus de l'estime publique.

» Aucun logement militaire ne pèsera sur la capitale.

» C'est dans ces sentimens que l'Europe en armes devant vos murs s'adresse à vous. Hâtezvous de répondre à la confiance qu'elle met dans votre amour pour la patrie et dans votre sagesse.

» Le commandant en chef des armées alliés, Prince DE SCHWARTZENBERG. »

A peine M. de Vauvineux a-t-il lu cette noble proclamation, qu'arborant la cocarde blanche il fait entendre au sein de Paris le premier cri de Vive le Roi ! et ce cri est répété au même moment par le comte Leo de Lévis, dans la rue du Bac; par M. Charles de Crisnoy, sur la place Vendôme; par MM. Charles et Guillaume de Nieuwerkerke, sur le boulevard des Italiens; par M. le comte de Laurice

et M. de Maistre à la porte Saint-Denis. Tous ces gentilshommes sont à cheval, haranguant le peuple, distribuant des cocardes et répétant avec enthousiasme le cri de Vive le Roi! et ce cri, selon la belle pensée du plus illustre comme du plus éloquent de nos écrivains, ouvre les yeux des Français, change le cœur des princes et sauve le Monde. Personne toutefois n'ose encore le répéter, ce cri de res

tauration.

Arrivent presque aussitôt, sur la place Louis XV M. le comte Thibaut de Montmorency, M. Charles de Crisnoy, le comte Gustave d'Hautefort, le chevalier Barrey du Theil et le comte César de Choiseul, formant le premier groupe des cent royalistes qui avoient promis de se déclarer ensemble. Etonnés de leur petit nombre, ils se croient abandonnés, et pourtant ils n'hésitent pas une minute, ils arborent cette cocarde, signe du bonheur public, s'élancent tour-à-tour dans les bras les uns des autres, et font entendre avec tout l'enthousiasme du courage, les cris de Vive le Roi! Vivent les Bourbons! Déplorant tout haut les malheurs de la famille royale, l'un d'eux s'écrie: «< Vengeons aujourd'hui par notre dé» vouement, la mort du duc d'Enghien, si

» lâchement immolé! » Des hommes du peuple attroupés, répondent à l'instant : « Au diable son assassin. » Le comte de Montmorency attache aussitôt un mouchoir blanc au bout de sa canne, et agitant ce drapeau improvisé, il invite le peuple à venir se ranger sous la bannière de la fidélité et de l'honneur. Mais frappé de cette audace, le peuple reste immobile.

Tel fut le premier groupe royaliste; il se dirigea immédiatement, par la rue Royale, vers les boulevards, et ne fut d'abord grossi dans sa marche que par le duc de Mouchy, le comte de La Ferté-Meun, le duc de FitzJames, qui fit aussi de son mouchoir un drapeau blanc, le comte de Lascases, le vicomte de Chateaubriand et le comte Auguste de Poret. A l'aspect du drapeau blanc, le peuple s'attroupe, et commence à s'attendrir. Frappé du cri Vivent les Bourbons! un charretier en blouse s'écrie, près la rue de la Madelaine, en versant des larmes : « Oh! les bons princes, Pourquoi ne sont-ils pas arrivés plutôt?J'avois » trois fils, le dernier vient de m'être enlevé ; >> au moins celui-ci me resteroit encore. >>

>>

Cependant beaucoup de royalistes hésitoient à se déclarer; d'autres s'efforçoient sur

pro

d'autres points de communiquer le mouvement au peuple. Déjà le marquis de Pons, le baron Armand de Maistre, M. Le Pelletier de Mortfontaine, MM. Charles et Guillaume de Nieuwerkerke et le baron de Finguerlin, parcouroient à cheval les boulevards, arborant tous les signes de la restauration, cherchant à pager le mouvement royaliste, et à préparer aux monarques alliés, la réception que méri toient ces augustes libérateurs. S'attachant surtout à remuer le peuple, ils lui expliquent les avantages de la restauration, en les lui rendant sensibles : « C'est la paix, lui disent-ils, » que nous vous donnons; c'est la cessation de » la conscription et des impôts vexatoires. » Le peuple se presse alors autour d'eux, et répète leurs cris avec plus d'enthousiasme encore. Les uns baisent leurs bottes, d'autres se roulent aux pieds de leurs chevaux, les femmes surtout les serrent, les embrassent, et font éclater une sorte d'ivresse ; c'est ainsi que de proche en proche le mouvement se propage et se communique à la multitude. La majorité de la garde nationale le partage également. Un poste de la rue du faubourg Saint-Honoré, composé de plus de cent hommes, sort spontanément, et fait entendre aussi le cri de Vive le

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