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ne cédoient le terrain qu'en frémissant. On vit, pendant cette lutte inégale, plus d'un grenadier, plus d'un de ces braves vétérans que le peuple désigne sous le nom de vieille moustache, se traîner en dedans des barrières, atteint de plusieurs blessures mortelles, et là, expirer le fusil à la main, en s'écriant d'une voix éteinte : Ils sont trop!

Déjà le généralissime prince Schwartzenberg avoit envoyé un parlementaire au général Drouaut, qui tenoit encore quelques positions au-delà des barrières pour exhorter ce général à cesser une résistance inutile qui compromettoit la sûreté de Paris et de ses habitans. Le général Drouaut avoit répondu que, ne commandant point l'armée française, il alloit sur-le-champ faire part de cette ouverture au général en chef: le moment étoit décisif. Vers Charonne, Belleville, Mesnilmontant et la butte Saint-Chaumont, l'ennemi avoit triomphé de tous les obstacles. La capitale de la France alloit être forcée, l'épée à la main, lorsque le duc de Raguse, instruit que Joseph Buonaparte étoit en fuite, et voyant les positions les plus avantageuses au pouvoir des alliés, expédia un parlementaire au général Barclai de Tolly pour demander une trève de

deux heures à cette condition, il promettoit d'abandonner tout le terrain qu'il occupoit encore hors des barrières, et s'engageoit, l'armistice expiré, de souscrire à la reddition de la capitale. Le général Barclai en référa aussitôt à l'empereur Alexandre et au roi de Prusse, qui n'avoient pas quitté un moment le champ de bataille. Ces deux monarques, animés du désir de ménager le sang humain, et voulant préserver de sa ruine une des premières capitales de l'Europe, accordèrent la trève, et ordonnèrent de suspendre le combat.

On étoit en pourparlers, quand les hauteurs de Montmartre furent attaquées par l'armée de Silésie, l'éloignement ne permettant pas qu'elle cût assez tôt connoissance de l'armistice. Quatre cents dragons français, ayant un colonel à leur tête, osèrent charger plus de vingt mille hommes en colonnes d'attaque, infanterie et cavalerie; ils renouvelèrent quelques charges infructueuses; et leur chef, voyant qu'ils alloient être tournés par la plaine de Neuilly, fit sonner la retraite, qui s'opéra en désordre. Montmartre étant alors découvert, le huitième corps russe, sous les ordres du lieutenant général Roudsévitch, et le dixième, commandé par le lieutenant-général Kapze

witch, quoique plusieurs fois repoussés, escaladèrent enfin les hauteurs au pas de charge, après avoir culbuté quelques compagnies de ligne que la garde nationale soutenoit. Vingtneuf bouches à feu et une soixantaine de caissons tombèrent au pouvoir de l'ennemi, dont les obus et les boulets atteignoient déjà le fau→ bourg Montmartre et la Chaussée-d'Antin.

Tous les obstacles alloient être surmontés aussi à la Villette. La cavalerie des alliés, qui s'étoit formée à la ferme du Rouvroy, se déployoit et serpentoit dans la plaine. Les hussards noirs de Brandbourg repoussèrent les charges qu'essayèrent les dragons français, et pénétrèrent, à leur poursuite, dans le village. En vain l'infanterie voulut-elle s'y maintenir. Deux bataillons de chasseurs russes, du corps de Woronzoff, y entrèrent au pas de charge, en même temps que la cavalerie alliée, et s'en emparèrent, ainsi que des batteries posées pour le défendre. Presque en même temps, les corps prussiens des généraux York et Kleist, qui venoient de marcher contre la Chapelle, sur la grande route, emportoient aussi ce village contigu au faubourg Saint-Denis.

· Au moment où ces vives attaques conduisoient l'ennemi jusqu'aux barrières, le premier`

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cri d'alarme et d'épouvante étoit poussé dans Paris. De là, une terreur panique générale, occasionnée, selon les uns, par l'éclat d'un obus; selon d'autres, par le coup de fusil d'un garde national, qui étendit roide mort, près la porte Saint-Denis, un cavalier revenant au galop par le faubourg, en criant, à travers la foule Voilà les ennemis! Le cri, les voilà! les voilà! accrédité par la détonation, se propage, et répand l'effroi dans l'immense concours du peuple, vers les portes Saint-Denis. et Saint-Martin, sur les boulevards Poissonnière et du Temple; la foule se disperse en un clin-d'œil, et gagne, à la course, et dans toutes les directions, les quartiers du centre vers la Seine. Quelques boutiques encore ouvertes sont à l'instant fermées, et les maisons barricadées; les marchés restent solitaires et déserts. Mais, revenu bientôt de cette fausse alarme, le peuple couvre de nouveau les rues, les places, les quais, les boulevards, toujours agité en sens contraire, par cent bruits contradictoires; toujours harcelé, tourmenté par de vils provocateurs sortis des antres de la police. On ne savoit au juste si l'ennemi étoit victorieux, s'il étoit repoussé, si l'on se battoit encore; l'incertitude et l'attente tenoient tous les esprits en suspens.

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Telle étoit la situation de l'intérieur de Paris au moment de l'armistice; cependant, sur le flanc gauche de leur ligne, les troupes du prince royal de Wurtemberg arrivoient à peine sur le terrain, après avoir repoussé les corps qui défendoient les approches de Vincennes; treize pièces de canon venoient d'être enlevées sur ce point. La barrière du Trône étoit confiée aux canonniers de la garde nationale parisienne, qui opposèrent une courageuse résistance. On s'étoit battu pendant deux heures sous les murs de cette barrière, et les alliés avoient été repoussés. Mais l'arrivée de l'avant-garde du prince royal de Wurtemberg donna aussi sur ce point la supériorité à l'ennemi. Quelques cosaques pénétrèrent vers le faubourg Saint-Antoine, et prirent aussi deux pièces de canon qu'un escadron de gendarmerie leur fit abandonner; en même temps deux autres colonnes du prince royal se portoient sur les hauteurs de Rosny et sur Charenton. En vain les élèves de l'école vétérinaire, secondés par quelques troupes de ligne, défendirent le pont sur la Marne ; cent cinquante jeunes gens y furent tués; on tenta aussitôt d'y mettre le feu, mais sans succès, la communication des mèches avec les fou

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