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ciés. Leur feu bien dirigé jonchoit de cadavres ennemis les approches des positions. Transformés en cánonniers, ces disciples de la guerre servoient les batteries avec l'enthousiasme de la valeur: on en vit un grand nombre mourir sur leurs pièces. Enflammés aussi de la plus vive ardeur, les soldats de la ligne ne cessoient de renouveler leurs attaques, et descendoient des hauteurs la baïonnette en avant, pour repousser les alliés. Le champ de bataille étoit couvert de morts, et le carnage présentoit un spectacle affreux. Le général Barclai de Tolly, voyant les collines entre Romain ville et Pantin, occupées par les colonnes de la grande armée, ordonna aux régimens qui la plupart étoient dissous en tirailleurs, de réunir leurs forces et de quitter l'offensive, dans la conviction qu'à l'arrivée de l'armée de Silésie et de l'avant-garde du prince royal de Wurtemberg sur le terrain, on s'empareroit de Belleville et de Saint-Chaumont avec moins de sacrifice.

La plupart des généraux français ne se dissimuloient plus que Paris étoit sur le point de succomber, si les alliés pouvoient montrer de plus fortes masses; mais le sentiment de l'honneur national portoit officiers et

soldats à redoubler d'ardeur et de courage. Joseph Buonaparte manifestoit lui-même une sorte d'émulation, et se flattoit de conserver intact le siége de la puissance de sa famille. Des hauteurs de Montmartre, où il s'étoit transporté avec son état-major de Vittoria, il expédioit ses aides-de-camp à tous les postes, et faisoit répéter aux gardes nationales et aux troupes de ligne cette phrase si rassurante de sa proclamation : « Je suis avec vous! défendez-vous ! » Telle étoit encore sa confiance, quatre heures après les premiers coups de canon, qu'il supposoit toujours l'ennemi n'ayant que vingt-cinq à trente mille hommes pour former ses attaques. Il ne fut détrompé que par l'arrivée subite d'un officier tombé la veille dans un parti de cosaques, et conduit au quartier-général des souverains alliés. C'étoit le capitaine-ingénieur Peyre, attaché à l'étatmajor-général de Paris.

Cet officier avoit reçu du gouverneur Hulin la commission délicate d'aller reconnoître audelà de Pautin la force et la position des alliés, ou, selon une autre version, de s'informer seulement des motifs qui avoient fait refuser les parlementaires. A peine débouchoit-il de Pantin, que, tombant dans une avant-garde

de cosaques, il fut fait prisonnier ainsi que son gendarme d'ordonnance. Il soutint d'abord qu'il étoit retenu contre toute espèce de droit, sa mission ayant pour objet l'envoi des parlementaires, et il demanda à être reconduit sur-le-champ aux avant-postes. On lui objecte qu'il n'est point en règle, n'étant pas précédé d'un trompette, et n'ayant aucun ordre par écrit. Forcé de rester sous la garde des cosaques, ce n'est que le lendemain, au point du jour, qu'il est transféré à Bondy. Dans son trajet, le capitaine Peyre commence à reconnoître la force des alliés, qu'il avoit cru, ainsi que tout Paris, de vingt-cinq à trente mille hommes. Quelle est sa surprise, lorsqu'étant arrivé au quartier-général, on lui annonce qu'on va prendre à son égard les ordres de l'empereur Alexandre. Il étoit sept heures du matin, et la canonnade se faisoit entendre distinctement sur Paris, au moment où le prince Schwartzenberg prévint cet officier qu'il auroit audience de l'empereur de Russie à l'issue du conseil qui venoit de s'assembler; bientôt, en effet, il est introduit 'devant le czar.

«Monsieur, lui dit Alexandre, sur le refus » qu'on a fait hier de recevoir les parlemen»taires des alliés, j'étois décidé à attendre

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qu'on vînt me faire des propositions au nom » de la ville de Paris. Ce n'est point à la na» tion française que nous faisons la guerre, » mais à Napoléon qui, par la plus injuste

agression, lorsque j'avois traité loyalement » et franchement avec lui, a porté la guerre » dans mes Etats: n'a-t-il pas occasionné la » dévastation de mon pays, et l'incendie de » ma capitale? Je pourrois user de repré»sailles; mais, je vous le répète, ce n'est point à la nation française, ce n'est point » à la ville de Paris que je fais la guerre : » croyez-vous que Paris se défende ? → Qui, Sire, répond le capitaine Peyre. — Tant pis

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» reprend Alexandre; vous avez pu juger de » la force de notre armée; ce n'est point une » seule division comme on vous l'a dit fausse» ment, mais l'armée de l'Europe entière qui » est devant votre capitale. Toute résistance » seroit donc vaine, et feroit répandre le sang >> inutilement : combien est forte l'armée sous >> Paris? Votre Majesté me permettra de » ne pas répondre à cette question. - C'est

juste; mais, Monsieur, puisqu'on veut se » défendre, dites bien à celui qui vous a envoyé, que d'après la démarche que vous venez » de faire, les hautes puissances ont chargé

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» le général Barclai de Tolly d'attendre à portée des avant - postes le parlementaire » qu'on jugera convenable d'envoyer pour en>> trer en conférence. Voilà des proclamations; >> remettez-les à qui bon vous semblera. Sur>> tout n'oubliez pas de dire, puisqu'on veut se » défendre, que je serai toujours disposé à > traiter lors même qu'on se battroit dans >> les faubourgs; mais que si l'enceinte de la >> ville étoit forcée l'épée à la main, nous ne » serions plus les maîtres d'arrêter nos troupes » et de préserver Paris du pillage. Partez, » Monsieur, le salut de Paris est en vos mains. >>

Prenant aussitôt congé du czar, le capitaine Peyre se dirige, avec l'état-major russe, vers le village de Pantin, et y pénètre accompagné de deux trompettes et d'un officier-général. Neuf heures du matin venoient de sonner, et une vive fusillade s'étoit engagée entre les tirailleurs des deux partis. Les officiers russes font cesser immédiatement le feu de leurs soldats; mais il n'est aucun moyen de faire suspendre celui des Français. Pénétré de l'importance de sa mission, le capitaire Peyre s'élance, avec son gendarme, à travers une grêle de balles dont plusieurs percent ses habits; et, rentré dans la ligne de défense, il court

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