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que son véritable dessein est de livrer bataille. Les forces que l'ennemi venoit de rallier paroissoient plus considérables que celles qu'il avoit montrées la veille, et sa position étoit plus imposante. Il occupoit toutes les hauteurs dites de la Comtesse, sur la route d'Arcis à Troyes, et sembloit attendre que l'armée française vînt l'attaquer. Le besoin de sortir de la crise en faisoit une loi à Napoléon; car il étoit à craindre que les foibles corps qu'il avoit laissés sur l'Aisne et sur la Marne ne fussent bientôt écrasés, et que Blucher, avec la masse de ses forces, ne vînt manœuvrer sur ses flancs ou sur ses derrières. Napoléon avoit réuni d'ailleurs à son armée, les corps des maréchaux ducs de Reggio et de Tarente, et une assez nombreuse cavalerie venant de l'armée d'Espagne. Ces renforts étoient postés sur la rive droite de l'Aube, à la hauteur d'Arcis. Les deux armées restèrent en présence jusqu'à une heure et demie, prêtes à combattre. Pendant cet intervalle, Napoléon, incertain, changea plusieurs fois d'avis, envoya ordre et contre-ordre, paroissant déterminé néanmoins à livrer une bataille générale, malgré l'inconvénient du terrain et du défilé. Toutes les troupes reçurent l'ordre

de traverser la ville d'Arcis, et de se déployer devant l'armée alliée; mais à peine furent-elles en ligne, que Napoléon, poussé par cette puissance invisible qui présidoit au salut de la France, se décida brusquement à effectuer sa retraite sur Vitry et sur Saint-Dizier, dans l'espoir d'attirer l'ennemi loin de sa capitale, et sur un terrain plus favorable.

Les généraux, étonnés, pensoient toutefois qn'il n'effectueroit son mouvement qu'à la faveur de la nuit; mais il le commença à l'instant même, en plein jour, et à la vuc de l'ennemi, passant un long défilé qui devoit retarder nécessairement la marche des troupes. On fit d'abord filer l'artillerie et les bagages, puis, avec le reste de l'armée, Napoléon prit à l'est la route de Vitry, espèce de traverse, laissant l'ordre au général Sébastiani et au maréchal duc de Reggio de défendre les ponts d'Arcis, et de former l'arrière-garde. Cette honorable mission fut dignement remplie.

Cependant, il falloit soutenir les assauts répétés des Austro-Russes. Tous les efforts du prince royal de Wurtemberg échouèrent devant la constance et l'intrépidité de l'arrière-garde. Exposée aux attaques combinées de trois corps différens, elle résista et sauva

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l'armée. A une heure du matin, les sapeurs du génie commencèrent à couper le pont; plusieurs d'entre eux furent tués par les tirailleurs ennemis; mais, à la fin, le pont tomba sous la hache. La retraite du maréchal duc de Reggio étoit déjà prononcée au-delà des ponts, quand la cavalerie du cinquième corps. allié passa l'Aube au gué de Ramera, et harcela vivement l'arrière-garde, qui filoit en hâte, mais sans désordre, sur Vitry-le-Français, soutenant de près toute l'armée qui marchoit dans la même direction par d'affreux chemins aussi n'arriva-t-elle que bien avant dans la nuit à Sommepuis, six lieues au-delà d'Arcis-sur-Aube. Le maréchal duc de Reggio essuya quelques pertes; mais il en fit éprouver aussi à l'ennemi qui le poursuivoit avec acharnement, et dont l'avant-garde s'avança jusqu'à Taux et à Corte. Le cinquième corps et les grenadiers russes et prussiens prirent position à Corbeil-sur-Aube, les quatrième et sixième corps sur les hauteurs de Dampierre (1).

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Le lendemain, 22, toute la grande armée alliée continua sa marche, pour se placer

(1) Voyez Pièces justificatives, No. LIV.

entre l'armée française et Paris, et effectuer sa jonction aux environs de Châlonssur-Marne, avec l'armée du feld-maréchal Blucher.

Déjà ses troupes légères et celles du prince de Saxe-Weymar inondoient le pays en Flandres, en Picardie et en Artois; elles s'étoient emparées successivement de Doullens, de Montdidier, de Compiègne, de Noyon de Breteuil et de Senlis. Tout le nord étoit envahi, à l'exception des places fortes. La masse de l'armée de Silésie n'étant plus contenue que par le corps du maréchal Mortier, rien ne pouvoit s'opposer à ce qu'elle repassât l'Aisne, pour manœuvrer de nouveau sur la Marne. Dès le 18 mars, le feld-maréchal Blucher avoit mis toutes ses forces en mouvement dans la direction de Béry-au-Bac. La cavalerie qui défendoit le passage, ayant été cůlbutée, les Français dans leur retraite firent sauter un pont superbe qui n'étoit achevé que depuis 1813. Le feld-maréchal trouva le pont détruit; mais dans la nuit même il établit des pontons, et l'armée entière passa l'Aisne sur deux points différens, dans la matinée du 19, les Prussiens prenant la route de Fismes, et les Russes la grande route de Reims. La cavalerie alliée

sous les ordres de Czernicheff et de Benkendorff, cerna cette ville. Vers six heures du soir, l'infanterie du général comte Woronzow étant arrivée, on fit aussitôt des dispositions pour s'emparer de Reims par escalade. Deux bataillons de troupes légères russes marchèrent, avec du canon et des échelles : ils firent sauter les portes de la ville sans rencontrer de résistance, l'arrière-garde du maréchal Mortier étant déjà en retraite sur la route d'Epernay. Sa cavalerie quitta Reims presque en même temps que les alliés y rentrèrent pour la troisième fois; ils y établirent le plus grand ordre. Le maréchal Blucher prit immédiatement la route de Châlons, sans avoir toutefois aucune connoissance de ce qui se passoit entre l'Aube et la Marne. Par sa marche en avant, il mit bientôt la grande armée en mesure d'effectuer l'opération hardie qui alloit décider du sort de la campagne et des destinées de l'Europe.

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Napoléon n'ayant pu déboucher de Plancy et d'Arcis au-delà de l'Aube, et renonçant à l'idée d'attaquer la grande armée austro-russe, dans sa position de Mesnil-la-Comtesse, ne devoit plus avoir d'autre but que de prévenir la jonction des deux armées du prince Schwart

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