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portoit ses pas, on le croyoit vainqueur et poursuivant les vaincus. Aussi fut-il accueilli avec des acclamations de joie par les habitans d'Epernay, qui se crurent délivrés pour toujours de la présence de l'ennemi.

L'armée française, ayant passé la Marne, se dirigea sur Fère-Champenoise. Là, M. de Rumigny, secrétaire du cabinet, apporta dé Châtillon la nouvelle de la rupture du congrès. Ainsi s'évanouirent, au sein même d'une armée de braves, les apparences d'une paix jugéé indispensable par les meilleurs esprits et par les officiers les plus éclairés. Cette rupture causa une vive sensation, et presque tous les généraux furent persuadés que Napoléon, rejetant la paix, se précipitoit en aveugle dans une guerre désastreuse.

Cependant, le généralissime prince Schwartzenberg, instruit, le 14 mars, de la défaite du corps d'armée du général Saint - Priest, et de l'occupation de Reims par Napoléon, avoit suspendu son mouvement offensif; le lendemain, il reporta son quartier - général à Arcis-sur-Aube, dans l'intention d'y rassembler les différens corps de son armée. Ceux qui avoient passé la Seine commencèrent leur retraite le 17. Le jour suivant, le généralissime

reçut du général Kaisaroff, qui éclairoit l'armée avec les cosaques, l'avis certain que Napoléon marchoit d'Epernay sur Fère-Champenoise. Il prit aussitôt la résolution de se lier, par Châlons, à l'armée du feld-maréchal Blucher; mais il n'étoit plus temps, Châlons se trouvoit occupé par le prince de la Moscowa. Un nouveau rapport du général Kaisaroff annonça que la cavalerie de Napoléon, commandée par le général Sébastiani, avoit culbuté les cosaques près de Fère-Champenoise, et que Napoléon s'avançoit en force vers Arcis-sur-Aube par Plancy. D'autres rapports firent connoître également que des corps français marchoient dans la même direction, par la route de Châlons, à Sommesous. Le danger étoit pressant; en une marche ou deux, la masse de l'armée française, tombant sur des corps isolés, pouvoit renouveler sur l'Aube les revers de Montmirail et de Montereau. Dans un premier conseil de guerre, les généraux et les souverains alliés avoient résolu de rétrograder jusqu'à Bar, et là de prendre. position derrière l'Aube. Déjà même le quar¬ tier-général s'étoit replié sur Troyes, qu'on se proposoit d'évacuer le lendemain, quand, dans la nuit, l'empereur Alexandre changea lui

même ce plan, qui eût entraîné les alliés hors de la ligne des opérations offensives. Ce monarque prit le parti ferme et courageux d'opérer la concentration des forces à Arcis même, et là, de livrer bataille à Napoléon. Mais, sous plus d'un rapport, ce mouvement paroissoit inquiétant; il présentoit dans l'exécution des difficultés capables de rebuter une âme moins élevée et moins forte; on suppose même qu'il contrarioit le système du cabinet autrichien, dont la maxime a toujours été de n'entreprendre aucune opération décisive pour ne rien hasarder. Mais, se voyant soutenu par la cordiale et l'imperturbable confiance du roi de Prusse, l'empereur Alexandre ne put être détourné par aucune considération particulière. Le czar toutefois eut besoin de toute son autorité pour rallier, avec la célérité convenable, des troupes de nations différentes, disséminées sur une ligne étendue. Toute une nuit fut employée par ce puissant monarque, soit pour ramener à son opinion toutes les voix du conseil, soit pour faire expédier les ordres les plus formels et les plus pressans aux généraux secondaires. On assure que l'anxiété qu'éprouva Alexandre dans cette occasion décisive fut si cruelle, qu'il y fit allusion

le lendemain, en disant à ses généraux et à ses ministres : « J'ai bien cru que la moitié » de ma tête grisonneroit cette nuit. »

La disposition que venoit de prescrire le czar avoit pour objet de rallier tous les corps de la grande armée dans une position concentrée devant la ville d'Arcis. Mais les Bavarois, les Wurtembergeois, et le corps russe de Wittgenstein, n'effectuèrent leur jonction qu'au moyen de marches forcées. Le 19 mars seulement, la plupart de ces divisions, repassant la Seine, se mirent en retraite vers l'Aube. Le même jour, la cavalerie de Napoléon culbuta partout les cosaques, et trouva le pont de l'Aube détruit par les Russes, mais presque aussitôt rétabli par les habitans. Au-delà de Plancy, l'avant-garde donna de nouveau dans quelques partis de troupes légères, qui se replièrent aussitôt sur Méry et sur Arcis.

Arrivé au gué de Charny, Napoléon fit passer l'Aube à un bataillon de la vieille garde, qui s'empara du village pour s'assurer du gué. Il envoya immédiatement après une partie de sa cavalerie sur la route d'Arcis, tandis qu'avec plusieurs escadrons de sa garde, il se dirigea en personne sur Méry. Pendant cette marche, il dit tout haut : « Cette nuit, j'irai prendre

» mon beau-père à Troyes. » Ces paroles, et le but de ses manoeuvres, font supposer qu'il étoit instruit de la première résolution des alliés, d'après laquelle ils devoient se replier vers Troyes et vers Bar-sur-Aube. Le corps autrichien du général Giulay étoit en retraite dans cette direction par Nogent; et, en le culbutant, Napoléon se flattoit de couper la ligne de la grande armée. Le général Giulay mit le feu au pont en quittant Méry, ét continua toutefois d'occuper la partie de la ville qui est sur la rive ganche de laSeineNapoléon ordonna aussitôt au général Letort de passer la rivière au-dessous de Méry, avec les chasseurs de la garde, et de tomber sur les Autrichiens pour leur couper la retraité. Mais les chasseurs, malgré leur diligence, ne purent arriver à Châtres qu'à sep theures du soir. L'ennemi venoit de traverser le village', et le général Letort ne put atteindre qu'un parc de pontons, le même qui avoit servi à passer la rivière à Pont-sur-Seine. Privé de ses pontons, et contrarié dans sa marche, le corps autrichien, déjà fatigué, se vit contraint de faire un circuit de douze lieues pour joindre l'armée entre Arcis et Troyes.

Le même jour, Napoléon revint coucher

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