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pection et la crainte; sentir et agir vivement tels sont les traits qui les caractérisent.

A peine ces dernières résolutions eurent-elles été concertées, que le marquis de la Roche→ jaquelein expédia M. J. J. Luetkens au maréchal Béresford, déjà en marche de Mont-de-Marsan vers Langon. Le maréchal détacha aussitôt une avant-garde anglaise de huit cents hommes d'élite, dont il prit lui-même le commandement. Au seul bruit de son approche et de la défaite du maréchal Soult à Orthès, la consternation et l'effroi s'étoient emparés des principaux agens de Napoléon dans la Gironde. Troublé, éperdu, le sénateur Cornudet, commissaire extraordinaire, ne voyant plus de moyens capables de préserver la ville de Bordeaux, donne les ordres les plus précipités pour le déplacement des autorités civiles et ecclésiastiques, exigeant même que le plus petit receveur, le plus chétif employé s'éloigne, sans doute par imitation de sa propre conduite, Non-seulement il fait enlever les caisses publiques, mais encore il emporte de l'hôtel des Monnaies tous les instrumens de la fabrication. On enlève également les poudres et salpêtres avec si peu de soin, qu'une grande quantité, déposée sur les rives de la Garonne, est volée

ou gâtée. Le délégué extraordinaire ordonna même de détruire deux frégates en construction; et comme le peuple menaçoit de s'y opposer, il fit mettre le feu aux chantiers. Le peuple s'agita, et ne fut calmé que par l'extrême prudence de l'adjoint chargé de la police. Les Bordelais signalent le maître des requêtes Portail, comme ayant inspiré ces mesures révolutionnaires, et ils accusent le souspréfet Gals Malvirade d'avoir dressé des listes de proscription.

L'autorité militaire montra plus de modération et de sagesse. Elle étoit dans les mains du général de division Lhuilier; sans doute il eût désiré préserver Bordeaux, qui lui étoit confié; mais à peine pouvoit-il réunir deux millé soldats dans tout le département. Comment avec si peu de force couvrir une ville immense et ouverte, qui, située sur la rive gauche de la Gironde, n'est susceptible d'aucune espèce de défense contre des troupes marchant dans cette direction? Ce général jugea, par la foiblesse de ses moyens, qu'une résistance inconsidérée pourroit exposer Bordeaux aux plus grands malheurs, sans espoir d'aucun succès, et il prit le parti de la retraite, le seul convenable.

Débarrassés des autorités et des troupes, les

royalistes, maîtres du champ de bataille, attendirent avec plus de confiance l'heureux moment qui devoit combler leurs désirs. Fidèle à sa parole, M. Lynch étoit resté à Bordeaux, de même que l'archevêque, prélat si vénérable et si vénéré. Tout fut préparé par le commissaire du roi, et par le maire de la ville, pour recevoir les alliés d'une manière éclatante, digne de la cause sainte qu'ils venoient protéger et défendre, digne enfin des Bordelais, qui vouloient donner une grande preuve de dévouement. Des courriers furent expédiés au-devant du maréchal Béresford, et des députés allèrent porter aux pieds de Mr le duc d'Angoulême les vœux et les hommages anticipés des habitans de Bordeaux.

Le général anglais ne rencontra sur sa route aucune force armée capable de lui disputer le passage; quelques brigades de gendarmerie se montrèrent seulement, et furent bientôt dispersées. De tous les points du Médoc et de la Guienne les royalistes accouroient en foule au-devant de S. A. R., qu'ils bénissoient par leurs acclamations; les villages et les bourgs se déclaroient à son approche, malgré les instances du prince qui, inspiré par sa bonté, recommandoit aux habitans de ne pas se com

promettre. Mais aucune exhortation, aucune crainte ne pouvoit arrêter cet élan général. Les villes de Roquefort et de Bazas n'hésitèrent pas une minute. Elles arborèrent le drapeau blanc, et se déclarèrent avant Bordeaux. Des royalistes de toutes les classes accouroient en foule, et venoient grossir le cortége de S. A. R. Dès que le maréchal Béresford fut arrivé au pont de la Maye, il expédia le colonel Vivian au maire de Bordeaux, pour lui annoncer qu'il croyoit entrer dans une ville alliée et amie; le colonel en reçut, de la part du maire, l'assurance la plus formelle. Aussitôt M. Lynch, accompagné de deux adjoints, monte en voiture avec MM. de Tauzia, Labroue et Montdenard, ancien officier de marine; d'autres voitures, occupées par les membres du conseil municipal, forment son cortége. Le commissaire du roi vient ensuite avec sa troupe sacrée, composée de plus de dix mille personnes de toutes les classes, de tous les rangs, et qui se disséminent le long de la route. MM. de la Rochejaquelein de Gombault, de Saluces, de Lautrec, Roger, Macarty, Gauthier, de Pommiers, de la Nolle, Bontemps-du-Barry, la plupart à cheval, suivoient sans affectation le cortége.

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On avoit prescrit à tous ceux dont le dévoue

ment étoit connu, de ne prendre la cocarde blanche que lorsqu'ils entendroient le maire crier Vive le Roi! L'ordre avoit été donné aussi d'arborer le drapeau blanc sur le clocher le plus élevé de la ville à l'instant où l'on verroit le maire haranguer le maréchal Béresford.

Arrivé à quelque distance de l'avant-garde, M. Lynch monte à cheval, et s'avance audevant du général anglais, qui, entouré de son état-major, marchoit à la tête de ses troupes. « Général, lui dit le maire, la na» tion généreuse qui a donné des preuves si distinguées de sa magnanimité, en secourant » avec une constance inébranlable ses alliés

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opprimés, se présente aujourd'hui aux portes » de Bordeaux. Si vous venez comme vainqueur, » vous pouvez, général, vous emparer des clefs >> sans qu'il soit besoin que je les donne; mais si » vous venez comme allié de notre auguste sou» verain, Louis XVIII, je vous offre les clefs de >> cette ville intéressante, où vous serez bientôt » témoin des preuves d'amour qui se manifes» teront de toute part en faveur de notre roi légitime. A ces témoignages se joindront les >> sentimens de notre vive gratitude pour nos » libérateurs. » Le maréchal Béresford réitéra avec un ton affectueux les promesses de lord

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