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du mont de la Ruhle et du camp de la Bayonnette. Son entrée sur le sol de la France fut marquée par l'occupation de Saint-Jeande-Luz. Lord Wellington avoit résolu de passer la Nive immédiatement après le passage de la Nivelle; mais le mauvais état des routes et la crue des eaux, occasionnée par les pluies abondantes des premiers jours de décembre, ne lui permirent pas d'exécuter son mouvement offensif dans toute son étendue.

Cependant les ouvrages de Bayonne s'étoient perfectionnés, et l'armée française y avoit élevé, sous les yeux du maréchal Soult, retranchemens sur retranchemens. Elle occupoit, en avant de Bayonne, une position fortifiée avec beaucoup d'art, sous le feu de la place; la droite appuyée sur l'Adour, le front couvert par un marais, et la gauche protégée par la rivière de Nive. Les avant-postes de l'aile droite étoient poussés vers Biarits, et l'aile gauche communiquoit avec la division de Catalogne, établic à Saint-Jean-Pied-de-Port, et commandée par le général Paris. Deux forts détachemens étoient cantonnés à Villefranque et à Mouguère, couvrant ainsi, vers la gauche du camp retranché, sa partie la plus accessible. Cin

quante mille hommes étoient réunis dans cette position formidable, qu'il sembloit impossible d'attaquer avec avantage, tant que l'armée française y demeureroit en force. Mais les lignes de Bayonne, ne couvrant pas toutes les approches de l'Adour, pouvoient être tournées par une armée supérieure en nombre. Livrer bataille étoit donc le seul moyen de s'opposer à l'invasion. Qu'espérer toutefois d'une armée si souvent découragée par les revers? Le maréchal Soult n'avoit rien négligé, il est vrai, pour inspirer aux troupes le sentiment de leur ancienne valeur; et le moral du soldat s'étoit relevé.

Napoléon frémit en apprenant que l'armée anglaise venoit de s'établir sur le territoire français. Pour la première fois peut-être son orgueil fléchit, et ce fut alors qu'il résolut de faire à la nécessité le sacrifice de l'abandon politique de l'Espagne, pour sauver, s'il étoit possible, ses provinces méridionales. Jamais ennemi plus redoutable n'avoit humilié ses armes; mais il falloit sortir d'embarras et séparer à tout prix l'Espagne de la cause des alliés, afin de porter toutes les forces vers le Rhin, sauf à revenir dans la péninsule pour l'opprimer, en y semant la discorde. Napoléon

met aussitôt en jeu sa politique tortueuse. Sûr d'avance que Ferdinand VII, dans sa captivité, souscrira à toute espèce de conditions qui lui assurera sa liberté et son rétablissement, il mande à Paris le duc de San Carlos, ex-ministre de Ferdinand; il lui déclare qu'à certaines conditions qui feront l'objet d'une négociation et d'un traité, il consent à rétablir son maître.

Le duc se rend aussitôt à Valençay avec le comte Laforêt, plénipotentiaire de Buonaparte, et le malheureux Ferdinand, disposé par son ministre, ratifie bientôt le traité qui le reconnoît roi légitime des Espagnes ; il s'engage à payer au roi démissionnaire, Charles IV, une pension de quatre millions de réaux; à échanger immédiatement les Français prisonniers en Espagne, contre pareil nombre d'Espagnols prisonniers en France et en Angleterre ; à restituer les propriétés, revenus, dignités, emplois, pensions à tout Espagnol qui s'est déclaré contre son pays en faveur de la France, et enfin à faire évacuer l'Espagne par les troupes britanniques. Ce traité, dicté à l'opprimé par l'oppresseur, fut signé à Valençay le 11 décembre.

Ce n'étoit pas seulement

pour sa sûreté

que

Napoléon faisoit ce grand pas rétrograde; toutà-coup arrêté dans son plan infernal de subjuguer l'Espagne, il vouloit la désunir d'un allié et d'un protecteur; la couvrir d'infamie, en la détachant de la cause commune de l'Europe. Ainsi celui qui en 1808 avoit envahi la péninsule par la fraude, forcé de renoncer, après six années de guerre, à la subjuguer militairement, cherchoit encore à l'asservir par des moyens perfides. Il se berce de l'idée, qu'entraînée par ses insidieuses propositions, cette nation fière et généreuse abjurera les sentimens de mépris et de vengeance qu'ont fait naître dans le cœur de tout Espagnol ses trahisons, ses parjures, ses massacres ; il ose croire qu'il lui présentera son roi comme un otage contre son propre ressentiment. Si le succès ne répond pas à son attente, au moins est-il sûr de jeter en Espagne les brandons de la discorde.

Cependant le traité de Valençay étoit inutile tant qu'il ne seroit pas approuvé par les cortès. Il n'étoit pas facile d'abuser cette assemblée, ni même la régence: comment arracher leur approbation? Un décret du 1er janvier 1811 déclaroit nuls et sans valeur tous les actes et conventions souscrits par le roi durant sa captivité, soit en Espagne, soit ailleurs. Par un traité

antérieur avec l'Angleterre, la nation espagnole s'étoit engagée à ne conclure aucune paix séparée. Mais Napoléon s'imaginoit que l'influence royale aplaniroit tout; des lettres rédigées d'avance,et que Ferdinand n'eut qu'à signer, furent adressées à la régence et aux cortès: on y vantoit la bonté, la magnanimité de Napoléon, la liberté, les agrémens dont il avoit daigné faire jouir le roi, son frère et son oncle à Valençay, et on y recommandoit surtout la prompte ratification du traité. Muni de ces dépêches, le duc de San Carlos se met en route pour Madrid, et parvient, avec une escorte française, aux avant-postes de l'armée espagnole, près de Vich en Catalogne. Là, après quelques difficultés, il lui est permis de continuer son voyage, et il arrive le 6 janvier à Madrid,

L'objet de sa mission y étoit déjà connu, et avoit excité la sollicitude des chefs du gouvernement, ainsi que l'intérêt de la nation entière.

Cependant les cortès avoient décrété de ne jamais reconnoître les opérations du roi, tant que ce prince agiroit sous l'influence d'une puissance étrangère. D'ailleurs cette assemblée ne devoit ouvrir sa session que le 15, et la commission intermédiaire,exerçant ses fonc

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