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au dehors du royaume le débouché le plus avantageux de leurs laines et de leurs animaux.

Ne craignez pas d'appauvrir votre souche; si le mouvement rendu à cette industrie est profitable, les indigènes se hâteront de s'emparer des bénéices; ils seront les premiers acheteurs, et vous verrez vos pépinières d'amélioration se multiplier et s'accroître si, au contraire, il était possible que la liberté donnée à l'amélioration fùt sans résultat, vous aurez fait du moins tout ce qu'il était en votre pouvoir de faire, et vous ne courrez pas la chance de tomber dans une situation plus critique que celle où vous vous trouvez.

Il y a plus à délibérer le mal est à son comble, et il est urgent d'y appliquer le remède. Yous tenez en vos mains le sort d'une des plus Lelles entreprises tentées par l'amour de la propriété et par l'industrie rurale.

En écoutant les clameurs du monopole, bientôt il n'y aura plus en France de mérinos, ni de laiues fines pour les monopoleurs eux-mêmes ni pour la France. L'irrésistible nécessité achèvera de détruire ce qu'il sera inutile ou ruineux de

conserver.

En accueillant les justes réclamations des propriétaires et sanctionnant l'exportation proposée, Vous raviverez une industrie prête à s'éteindre, vous donnerez à l'émulation une impulsion nouvelle; vous créerez comme par enchantement d'immenses capitaux au profit de votre agriculture et au profit de l'Etat.

Mais pour que cette détermination à la fois politique et tutélaire remplisse le but désirable, et qu'elle porte le caractère de prévoyance et de sagesse que vous imprimez à tous les actes qui émauent de vos décisions, il importera que le gouvernement, ainsi qu'il a été énoncé dans l'article 2 du projet de la commission, soit investi de la plus entière latitude pour suivre l'exportation dans ses effets, et pour en modifier les résultats, selon que les intérêts de votre agriculture et de vos rapports commerciaux peuvent l'exiger.

D'après l'exposé des motifs que je viens de soumettre à la Chambre, je vote pour que la discussion soit fermée, et pour l'adoption du projet de la commission avec une légère addition l'article premier.

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Cet article porte :

Art. 1er. « Les béliers et brebis mérinos, ainsi ⚫ que les laines fines et métisses pourront être exportés et vendus à l'étranger, sans être assujettis à d'autres droits que celui de balance qui sera établi par tête d'animal, pour les béliers << et brebis.

D

Il parait indispensable d'ajouter ; et par quintal décimal pour les laines.

RÉSOLUTION DE LA CHAMBRE.

Le Roi sera supplié de présenter à la Chambre un projet de loi qui contienne les dispositions sui

vantes :

1° Que les béliers mérinos, ainsi que les laines fines et métisses, pourront être exportés et vendusà l'étranger, sans être assujettis à d'autres droits qu'à celui de la balance, lequel sera établi par tête d'animal pour les béliers, et par quintal décimal pour les laines;

20 Que, dans l'intervalle d'une session à l'autre, si les circonstances l'exigent, le gouvernement pourra suspendre ou modifier les effets de la préSente loi, en présentant à la session suivante les motifs qui auraient déterminé cette mesure;

3° Qué toutes les lois et règlements antérieurs,

relatifs à l'exportation des laines de béliers provenant de troupeaux mérinos français, denieurent abrogés.

La Chambre arrête que la présente résolution sera envoyée à la Chambre des pairs, après un délai de dix jours.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Comité secret du 21 septembre 1814.

RESOLUTION DE LA CHAMBRE.

Le Roi sera suppliée de présenter le projet de loi suivant :

Art 1er. Lorsque, après la cassation d'un premier arrêt ou jugement en dernier ressort, le deuxième arrêt ou jugement rendu dans la même affaire, entre les mêmes parties, est attaqué par les mêmes moyens que le premier, la cour de cassation prononce sur la question de droit, sections réunies, sous la présidence du chancelier de France.

Art. 2. Lorsque l'arrêt ou jugement des cours et tribunaux aura été cassé deux fois, si un troisième tribunal juge de la même manière que les deux précédents, et qu'il y ait par les mêmes moyens un pourvoi en cassation, il y a lieu à interprétation de la loi, et il doit en être référé au pouvoir législatif par la cour de

cassation.

Art. 3. La déclaration interprétative des lois est donnée par le pouvoir législatif dans la forme ordinaire des lois.

Art. 4. La loi interprétative ne change rien aux jugement qui auraient acquis l'autorité de la chose jugée, et aux transactions arrêtés avant sa publication.

Art. 5. Toute loi contraire aux dispositions ci-dessus est abrogée.

La Chambre arrête que la présente résolution sera envoyée à la Chambre des pairs, après un délai de dix jours.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.

Séance du 22 septembre 1814.

Après l'adoption du procès-verbal, M. Goulard fait l'énoncé de deux nouvelles pétitions adressées à la Chambre.

Les cultivateurs du département du Bas-Rhin sollicitent la libre culture du tabac.

Plusieurs négociants de la ville de Paris réclament des mesures pour empêcher que des sucres raffinés puissent être introduits en France.

Ces demandes sont renvoyées à la commission des pétitions.

Le même secrétaire présente ensuite à la Chambre divers hommages dont la mention au procèsverbal et le dépôt à la bibliothèque sont ordonnés.

En voici les titres et les noms des auteurs : Mémoire imprimé sur le répartiment d'un impôt foncier entre les différentes communes de l'Etat, par M. Gallais, membre de la Société d'agriculture d'Evreux;

Autre imprimé ayant pour titre Langue et littérature des anciens Francs, par M. Gley;

Précis de la comptabilité, où Introductions à l'analyse des écritures et des opérations des financiers, des administrateurs comptables, des receveurs, payeurs, caissiers, négociants, etc., par M. Challier, ancien receveur des contributions et vérificateur au trésor public;

Mémoire sur les moyens de détruire la mendicité, par M. le vicomte de Prunelé, membre de la Chambre des députés ;

Aperçu des Etats-Unis au commencement du dix-neuvième siècle, depuis 1800 jusqu'en 1810, des tables statistiques, par M. le chevalier Félix Beaujour, ancien membre du Tribunat;

Des colonies, et particulièrement celle de SaintDomingue, mémoire historique et politique, par M. le colonel Malenfant.

L'ordre du jour appelle le développement d'une proposition faite dans la dernière séance, relativement aux Espagnols refugiés en France.

M le Baron de Mortarieux. Messieurs, à l'époque où l'armée française qui était en Espagne l'a quittée, une quantité considérable de fonctionnaires espagnols, des propriétaires de toutes les classes, des femmes, des enfants ont suivi nos soldats et sont entrés en France avec eux; ils ont demandé asile dans les départemenis frontières; le plus grand nombre étaient sans aucun moyen d'existence. Le gouvernement leur accorda quelques secours que l'état du Trésor fit bientôt cesser. Les Français chez lesquels les autorités ont logé ces infortunés, n'ont écouté que l'humanité, et loin de s'occuper des opinions politiques des réfugiés, ils ont rempli les devoirs de l'hospitalité avec les soins les plus religieux ; ils espéraient, comme les réfugiés eux-mêmes, qu'incessamment le Roi Ferdinand, de retour à Madrid, leur permettrait de revenir dans leur patrie; mais depuis nous avons vu dans les journaux, des ordonnances du roi, qui veulent qu'ils restent hors de son royaume. Il y a eu même d'autres fonctionnaires d'Espagne qui en sont sortis et sont venus en France, où ils augmentent l'embarras que causait déjà le séjour trop prolongé des premiers réfugiés espagnols aux habitants des départements frontières.

Le nombre de ces réfugiés espagnols est trop considérable pour les laisser plus longtemps à la charge de trois ou quatre départements, et s'il est de la dignité de la nation de venir à leur secours, il est en même temps de la justice que cette charge soit supportée proportionnellement par tous les Français, et qu'il y soit pourvu sans retard par une loi.

Il faut faire cesser surtout l'embarras des maires des villes qui sont obligés de désigner, de forcer des citoyens à supporter ce fardeau, et qui pourtant, en le supportant, ne se plaignent que de ce qu'il n'est pas également réparti : des actes d'une justice proportionnelle, dans des cas pareils, sont de la première urgence; s'ils sont une sorte d'impôt, il n'est permis à aucune autorité administrative de rien déterminer à cet égard, que d'après une loi qui est à faire, et je crois de la générosité française de proposer qu'on donnera à chaque individu réfugié les mêmes secours qu'on donne aux militaires espagnols restés en France, en raison de leurs emplois et du traitement qu'ils avaient déjà obtenu du gouvernement; car il est urgent de décharger au plus tôt de ce fardeau la partie française qui en est surchargée, pour le répartir sur toute la France. C'est ce que les habitants des départements du Midi demandent, et dans le nombre desquels se trouve celui que j'ai l'honneur de représenter. Je prie la Chambre de prendre en considération la demande que j'ai l'honneur de lui faire, que le Roi soit humblement supplié de proposer une loi qui assure aux réfugiés espagnols civils les mêmes traitements accordés aux militaires de la même nation, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur sort.

prendre

La proposition de M. de Mortarieux étant appuyée, M. le président consulte la Chambre, qui décide qu'elle la prend en considération.

La proposition et les développements à l'appui seront imprimés et distribués dans les bureaux. M. Emeric David, au nom de la commissio des pétitions, fait un rapport sur plusieurs demandes relatives à la fabrication des étoffes de coton (1).

Messieurs, six pétitions vous ont été présentées sur un sujet d'un haut intérêt.

Ce sont les commerçants et les manufacturiers réunis de la ville de Lille; les commerçants et les manufacturiers de Saint-Quentin; c'est la chambre du commerce de Rouen; c'est un nombre considérable de négociants de Paris, des plus recommandables de cette capitale, qui sollicitent de votre équité la réparation d'un grand tort qu'ils ont souffert, et de votre sagesse une garantie contre un tort plus grand encore qu'ils appréhendent.

Frappés dans leurs capitaux, ils demandent, premièrement, la restitution d'une somme de 30 millions de francs environ, montant du droit d'entrée établi sur les cotons en laine, par les décrets des 5 août et 12 décembre 1810, qu'ils ont payée dans le courant de l'année 1813, et dont l'ordonnance du 23 avril dernier leur a interdit tout remboursement.

Alarmés par des bruits vagues et sans doute peu fondés, d'un traité de commerce, par lequel Timportation des étoffes de coton de manufacture anglaise sera permise, ils réclament contre cette mesure qui ruinerait leurs établissements et compromettrait, avec leur propre fortune, l'existence de deux cent cinquante mille ouvriers que leurs ateliers alimentent.

Au milieu des désordres de notre révolution, c'est un beau spectacle, et bien digne de l'attention des gouvernements, que de voir les progrès des hautes sciences, des beaux-arts, de l'industrie manufacturière, et l'heureux concours de toutes les puissances du génie, soit pour réprimer les efforts de l'Europe levée tout entière contre nous seuls, soit pour immortaliser le souvenir de nos victoires, soit pour nous affranchir des tributs que le commerce étranger s'était flatte de nous imposer à la faveur de nos troubles. Car, sans parler de tant de découvertes et de creations dues aux veilles de nos savants, de tant de chefs-d'œuvre embellis par la théorie et le goût de nos peintres et de nos statuaires, combien d'inventions et de perfectionnements qui, utiles à nos manufactures, ont accru la richesse de l'Etat !

Des fabriques où se forgent des damas aussi beaux et aussi fins que ceux de Syrie, des armes à feu de tout genre, égalant par leur solidité, surpassant par leur élégance tout ce que l'Europe produit de plus achevé, et exécutées avec une rapidité dont jusqu'à nos jours on n'aurait pu concevoir l'idée des limes qui polissent les limes anglaises les plus dures; des instruments de mathématiques, aussi purement terminés et moin chers que ceux dont se vantaient les ouvriers de Londres; des ornements en bronze qui, par la noblesse des formes et la délicatesse de l'èxecution, rappellent les savants ateliers de sculpture où s'instruisirent les modeleurs ; des ouvrages de serrurerie, exécutés non-seulement à Paris, mais jusque dans nos départements, où l'on voit a liées à une exquise précision, tantôt les combinaisons les plus ingénieuses, tantôt la plus rare magnificence; des cristaux qui ne laissent plus

(1) Ce rapport est incomplet au Moniteur: nous in publions in extenso,

regretter le flint-glass; des velours, qui, par l'adroite combinaison de leurs fils, reproduisent et le coloris et l'expression même des tableaux les plus achevés; la tannerie profitant des découvertes de la chimie; le stéréotypage inventé; l'art des émaux perfectionné dans toutes ses branches; la peinture sur verre rétablie plus vraie et plus savante encore dans son coloris, qu'aux temps de François ler et de Henri II: tels ont été les produits de l'industrie française pendant une guerre qui, en interrompant la plupart de nos communications extérieures, nous a forcés de trouver en nous-mêmes toutes nos ressources

Au premier rang, parmi ces conquêtes, vous placerez, sans doute, Messieurs, quant à son utilité, la filature du coton et le tissage de ces toiles que nous achetâmes pendant longtemps des Grecs, des Vénitiens, ensuite des Portugais, des Anglais et des Suisses.

Depuis trente ou quarante ans, le goût de ces toiles, blanches ou peintes, a fait de tels progrès dans toutes les classes de la société, que quelques personnes estiment qu'au moment où notre révolution a commencé, la consommation de la France s'élevait déjà à 60 millions. Notre fabrication, dans tous les genres d'étoffes où s'emploie le coton, parvenait tout au plus à la moitié de ce total elle employait soixante-dix mille ouvriers (1). Dans les toiles blanches, elle était presque nulle. Nous fournissions à des peuples voisins une partie des cotons bruts que nous procuraient nos échanges avec le Levant, et ils nous les revendaient tissés, recouverts d'impressions ou de broderies.

Les arrêts du conseil des 10 et 17 juillet 1785, qui prohiberent toutes les toiles de coton venant de l'étranger, appelèrent une nouvelle attention vers ce genre de fabrication. Non-seulement ils encouragèrent l'art d'imprimer les toiles en couleurs, avec des moules de bois, art antique, et qui ne fut jamais inconnu à l'Europe, même dans les ténèbres du moyen àge, mais ils donnèrent lieu à l'établissement de quelques manufactures où l'on exécuta des tissus à l'imitation de ceux de l'Inde.

Le fameux traité de commerce de 1786, qui, dans l'espoir de favoriser notre agriculture, permit, moyennant quelques droits faciles à éluder, l'importation des tissus anglais, ralentit les progrès de nos manufactures naissantes.

L'Assemblée constituante, assez sage pour se tenir en garde contre l'idée séduisante, mais impraticable, d'une liberté illimitée entre tous les peuples commerçants, l'Assemblée constituante, par son tarif des douanes du 15 mars 1791, établit des droits d'entrée si élevés qu'ils équivalaient presque à une prohibition.

La Convention rendit une loi plus utile: ce fut celle du 18 vendémiaire an II, confirmée ensuite par celle du 10 brumaire an V, qui prohiba toutes les productions de l'industrie anglaise quincailleries de cuivre, aciers fins, verrerie, poterie, horlogerie, tabletterie, ébénisterie, cotons filés, draps et velours de coton, toiles de coton de tout genre, blanches et peintes, rien ne fut excepté.

Il n'est pas difficile de voir ce qu'on pourrait objecter contre un pareil système; mais dans la réalité, c'est de cette époque que datent nos principaux établissements de filature et de tissus de

(1) Exposé de la situation de l'empire, présenté au Corps legislatif par M. le ministre de l'intérieur, le 25 février 1813.

coton, ainsi que la plupart des perfectionnements de nos diverses fabriques.

Une des plus belles institutions que le génie de l'administration ait jamais conçues, contribua puissamment à éclairer et à aiguillonner notre industrie je veux parler du Musée des arts mécaniques, vaste établissement où tous les modèles utiles ont été conservés, toutes les inventions propres à diriger les ouvriers placées sous leurs yeux, et livrées à leur étude.

Le décret du 13 fructidor an IX, celui du 22 février 1806, et la loi du 30 avril de la même année, renouvelèrent les prohibitions.

Le célèbre décret du 21 novembre 1806, appelé le décret de Berlin, en déclarant les îles britanni ques en état de blocus, ajouta de nouvelles richesses à celles qui accompagnaient la prohibition, depuis l'an II, dans le régime des douanes. Les décrets des 23 novembre et 17 décembre 1807, appelés les décrets de Milan, consolidèrent encore ce système de prohibition absolue.

Quelque gigantesque que fùt l'idée du blocus des Iles Britanniques, quelque impossibles que fussent les mesures nécessaires pour la mettre complétement à exécution, cette entreprise audacieuse, en paraissant donner à nos manufactures de nouvelles garanties, redoubla leuractivité : des capitaux importants y furent versés. Le nombre des métiers s'augmenta considérablement. Le gout toujours croissant de ces toiles légères et moelleuses, qui, en effet, conviennent si bien et à une élégante simplicité, et à la parure la plus recherchée; ce goût longtemps ruineux pour l'Etat, mais au fond économique pour les familles, contribuait de plus en plus à favoriser la fabrication. Le perfectionnement des tissus marchait d'un pas aussi rapide que celui de la filature. Les édifices et les machines s'étaient multipliés à tel point qu'on évaluait ce capital à plus de 200 millions. Nos manufactures entretenaient deux cent cinquante mille ouvriers, et livraient à la consommation d'une seule année, pour 170 millions au moins de calicots, de percales et d'autres objets de ce genre.

Courte prospérité !

Un acte de tyrannie des plus meurtriers dans ses conséquences, dont l'histoire ait offert l'exemple, ébranla subitement ces établissements, et fut sur le point de détruire nos justes espé

rances.

Vous vous rappelez ici, Messieurs, le décret du 5 août 1810. Puissent les peuples en garder à jamais le souvenir, pour redoubler de vigilance aux barrières que franchit si facilement le despotisme!

Abusant du droit mal déterminé que la loi du 19 floréal an X confie au prince, de hausser ou de baisser provisoirement, dans des cas urgents, le tarif des douanes, le gouvernement établit sur l'entrée des denrées coloniales un impôt qui en surpassait de trois ou quatre fois la valeur réelle. Les cotons, quoique traités avec plus de ménagements que d'autres marchandises, n'échappèrent point à cette taxe monstrueuse ceux du Levant, dont le prix moyen devait être de 3 à 4 francs le kilogramme, furent imposés à 4 fr. 40 c. ceux de Naples et quelques autres, à 6 fr. 60 c.; ceux de l'Amérique méridionale, qui valaient au plus 6 francs, à 8 fr. 80 c.

Les effets ne furent pas moins désastreux qu'on ne devait l'attendre. Tandis qu'à l'aide d'un impôt si illégalement établi se préparait la campagne où devait s'anéantir notre puissance militaire, le commerce éprouva des pertes inouïes.

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La Camargue et la Crau, cette immense pépinière de bêtes à laine, où naguère on comptait plus de quarante mille croisements, n'en offrent pas aujourd'hui deux mille.

Dans les départements du Gard et de l'Hérault on ne rencontre plus qu'un petit nombre d'améliorateurs.

Le Larzac, l'Aveyron, ces contrées si éminemment pastorales, ne s'occupent presque plus du perfectionnement de leurs troupeaux. Quelques propriétaires dévoués luttent encore, mais ils ne dissimulent pas que ces efforts sont les derniers. Le Roussillon, qui avait donné un si bel élan aux départements du Midi, s'est refroidi pour l'amélioration.

Le département de l'Aude est resté stationnaire; il est redevable de cette circonstance à ses fabriques de Carcassonne et de Limoux, où les propriétaires de troupeaux ont des intérêts, et où ils se procurent le débouché de leurs laines.

L'Ariége, les Hautes-Pyrénées, la Haute-Garonne, le Tarn, sont en décadence. Le nombre des propriétaires améliorateurs y diminue chaque jour.

Dans le Tarn-et-Garonne, dans le Lot-et-Garonne, les Basses-Pyrénées, les Landes et la Gironde, l'émulation est presque éteinte, on n'y voit plus qué quelques établissements épars, et la masse des propriétaires s'est décidée à revenir aux races indigènes.

Les deux Charentes, la Corrèze, présentent à l'observateur le même résultat.

J'en atteste le témoignage de mes collègues qui appartiennent à ces différentes contrées, le tableau que je viens de tracer, n'est-il pas aussi véridique qu'il est affligeant pour les amis de l'agriculture et de la prospérité nationale?

Si, du midi de la France, on remonte au centre et au nord, la perspective n'est pas plus consolante.

Quelles heureuses révélations ne trouvons-nous pas, sur l'état de l'amélioration des troupeaux de ces parties du royaume, dans les écrits de MM. Gabion, Yvart, Tessier, de Polignac et Barbançois?

L'engorgement des denrées et le défaut de vente des laines fines et des animaux ne sont-ils pas signalés comme la principale cause du découragement des propriétaires et de la ruine de l'amélioration?

Inconcevable délire du monopole! Le propriétaire du mérinos lui demande d'acheter ses laines; le monopole s'y refuse. Les laines s'accumulent, se détériorent. Le propriétaire sollicite la concurrence pour la vente, le monopole s'y refuse encore. Ainsi, il ne veut ni achèter ni permettre de vendre!

Peut-on être surpris que, dans une telle extrémité, le désespoir détache les hommes de ce qui leur a coûté le plus de sacrifices, de ce qu'ils ont le plus affectionné? Aussi un grand nombre de propriétaires et de fermiers ont renoncé à leurs roupeaux. D'autres les ont envoyés en partie à la ucherie, d'autres enfin ne font plus d'élèves pour la consommation.

Qui le croirait? Lorsque les propriétaires, pressés par l'invincible nécessité, demandent qu'on leur ouvre enfin les barrières et qu'on leur permette de trouver des acheteurs, le monopole s'écrie qu'ils vont appauvrir nos fabriques et priver le peuple d'un immense travail !

Mais où donc est le coupable, de celui qui ne cesse d'offrir sa denrée à la vente, ou de celui qui, se disant le moteur du travail, refuse avec dédain la denrée sur laquelle le travail s'exerce?

Une telle ironie serait outrageante, si elle n'était encore plus absurde et mensongère.

La faculté d'exporter les laines fines et améliorées, ne préjudiciera pas à nos fabriques ni au travail, puisque, jusqu'ici, ces matières n'y ont trouvé que peu ou point d'emploi. Mais si les fabricants, éprouvant des besoins, viennent rechercher nos laines, ne seront ils pas toujours certains d'obtenir la préférence, puisqu'ils auront toujours pour eux la première offre, et qu'ils profiteront des chances et des bénéfices des transports?

On ne saurait trop répéter cette vérité : le débouché des denrées est le plus grand secret de la reproduction. Ainsi, procurez aux propriétaires la faculté de vendre ses laines, et son industrie créera des toisons; ouvrez-lui des débouchés pou le débit des animaux, et il multipliera le nombre de ses bêtes à laine.

On a si victorieusement répondu aux objections élevées contre l'exportation des béliers et des brebis mérinos, que je croirais superflu de revenir sur cet objet, s'il n'était quelquefois utile de reproduire des considérations qui ont pu échapper à la pensée.

Il est incontestable que, dans le plus grand nombre de départements de la France, le produit des laines fines, au prix moyen de 45 sous la livre, ne couvrirait pas les frais d'entretien d'un troupeau mérinos.

Il est donc nécessaire de faire entrer la vente des animaux pour une part des dépenses exigées pour cet entretien. Plus cette vente sera productive, plus elle stimulera l'intérêt du propriétaire, et préparera de proche en proche le goût de l'amélioration. C'est ainsi qu'agissant tour à tour comme cause et effet, elle propagera rapidement l'émulation créatrice et l'activité de la reproduction.

Serait-il besoin, devant une assemblée que réunit tant de lumières, devant des propriétaires qui sont familiers avec tous les intérêts de notre agriculture, de démontrer qu'un instinct de necessité, une raison dominante, déterminent sans cesse les cultivateurs vers les branches de culture les plus utiles! Qu'on ne dise pas qu'ils sont arrêtés par la routine, et qu'ils ne se déciden: qu'avec répugnance pour les pratiques nouvelles. Lorsque ces innovations offrent un intérêt réel. un profit certain et constant, les cultivateurs n'hésitent pas à s'y soumettre et à se les approprier.

N'en a-t-il pas été ainsi de la culture de la vigne, de l'olivier, du mûrier, et de tous les végétaux exotiques si utilement acclimatés parmi nous ? Et dans le siècle dernier, le maïs, relégué sur la lisière des Pyrénées où il avait été porte d'Espagne, ne s'est-il pas étendu au centre, à l'est et presque au nord de la France?

Voulez-vous obtenir les mêmes résultats pour votre amélioration pastorale? Laissez agir en liberté le puissant mobile de l'intérêt individuel. qu'il soit permis aux propriétaires de mêrinos d'acheter, de vendre, de se procurer au dedans et

au dehors du royaume le débouché le plus avantageux de leurs laines et de leurs animaux.

Ne craignez pas d'appauvrir votre souche; si le mouvement rendu à cette industrie est profitable, les indigènes se hâteront de s'emparer des bénétices; ils seront les premiers acheteurs, et vous verrez vos pépinières d'amélioration se multiplier et s'accroître si, au contraire, il était possible que la liberté donnée à l'amélioration fùt sans résultat, vous aurez fait du moins tout ce qu'il était en votre pouvoir de faire, et vous ne courrez pas la chance de tomber dans une situation plus critique que celle où vous vous trouvez.

Il n'y a plus à délibérer le mal est à son comble, et il est urgent d'y appliquer le remède. Vous tenez en vos mains le sort d'une des plus Lelles entreprises tentées par l'amour de la propriété et par l'industrie rurale.

En écoutant les clameurs du monopole, bientôt il n'y aura plus en France de mérinos, ni de laines fines pour les monopoleurs eux-mêmes ni pour la France. L'irrésistible nécessité achèvera de détruire ce qu'il sera inutile ou ruineux de

conserver.

En accueillant les justes réclamations des propriétaires et sanctionnant l'exportation proposée, Vous raviverez une industrie prête à s'éteindre, vous donnerez à l'émulation une impulsion nouvelle; vous créerez comme par enchantement d'immenses capitaux au profit de votre agriculture et au profit de l'Etat.

Mais pour que cette détermination à la fois politique et tutélaire remplisse le but désirable, et qu'elle porte le caractère de prévoyance et de sagesse que vous imprimez à tous les actes qui émanent de vos décisions, il importera que le gouvernement, ainsi qu'il a été énoncé dans l'article 2 du projet de la commission, soit investi de la plus entière latitude pour suivre l'exportation dans ses effets, et pour en modifier les résultats, selon que les intérêts de votre agriculture et de vos rapports commerciaux peuvent l'exiger.

D'après l'exposé des motifs que je viens de soumettre à la Chambre, je vote pour que la discussion soit fermée, et pour l'adoption du projet de la commission avec une légère addition à l'article premier.

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1° Que les béliers mérinos, ainsi que les laines lines et métisses, pourront être exportés et vendus à l'étranger, sans être assujettis à d'autres droits qu'à celui de la balance, lequel sera établi par téte d'animal pour les béliers, et par quintal décimal pour les laines;

20 Que, dans l'intervalle d'une session à l'autre, si les circonstances l'exigent, le gouvernement pourra suspendre ou modifier les effets de la présente loi, en présentant à la session suivante les motifs qui auraient déterminé cette mesure;

3° Qué toutes les lois et règlements antérieurs,

relatifs à l'exportation des laines de béliers provenant de troupeaux mérinos français, demeurent abrogés.

La Chambre arrête que la présente résolution sera envoyée à la Chambre des pairs, après un délai de dix jours.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Comité secret du 21 septembre 1814.

RESOLUTION DE LA CHAMBRE.

Le Roi sera suppliée de présenter le projet de loi suivant :

Art 1er. Lorsque, après la cassation d'un premier arrêt ou jugement en dernier ressort, le deuxième arrêt ou jugement rendu dans la même affaire, entre les mêmes parties, est attaqué par les mêmes moyens que le premier, la cour de cassation prononce sur la question de droit, sections réunies, sous la présidence du chancelier de France.

Art. 2. Lorsque l'arrêt ou jugement des cours et tribunaux aura été cassé deux fois, si un troisième tribunal juge de la même manière que les deux précédents, et qu'il y ait par les mêmes moyens un pourvoi en cassation, il y a lieu à interprétation de la loi, et il doit en être référé au pouvoir législatif par la cour de

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CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.

Séance du 22 septembre 1814.

Après l'adoption du procès-verbal, M. Goulard fait l'énoncé de deux nouvelles pétitions adressées à la Chambre.

Les cultivateurs du département du Bas-Rhin sollicitent la libre culture du tabac.>

Plusieurs négociants de la ville de Paris réclament des mesures pour empêcher que des sucres raffinés puissent être introduits en France.

Ces demandes sont renvoyées à la commission des pétitions.

Le même secrétaire présente ensuite à la Chambre divers hommages dont la mention au procèsverbal et le dépôt à la bibliothèque sont ordonnés. En voici les titres et les noms des auteurs: Mémoire imprimé sur le répartiment d'un imôt foncier entre les différentes communes de

P'Etat, par M. Gallais, membre de la Société d'a griculture d'Evreux;

Autre imprimé ayant pour titre Langue et littérature des anciens Francs, par M. Gley;

Précis de la comptabilité, ou Introductions à l'analyse des écritures et des opérations des financiers, des administrateurs comptables, des receveurs, payeurs, caissiers, négociants, etc., par M. Challier, ancien receveur des contributions et vérificateur au trésor public;

Mémoire sur les moyens de détruire la mendicité, par M. le vicomte de Prunelé, membre de la Chambre des députés;

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