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Que les armes soient égales: la liberté des journaux et des écrits facilitera la circulation des lumières, et surtout la publication de la vérité.

Quand je parle d'armes égales, je me trompe; les ministres n'auront-ils pas toujours plus de moyens de s'adresser à l'opinion publique? n'auront-ils pas leurs journaux, leurs écrivains? Ils trouveront des Addison et des Steele pour venger le gouvernement, s'il est injustement attaqué. Ils trouveront encore des écrivains pour défendre et préconiser même leurs erreurs.

A la faveur du journal officiel, ne peuvent-ils pas attaquer publiquement les opinions qui leur déplaisent ou qui les contrarient?

Laissons-leur cette liberté, augmentons-la, s'il le faut, pourvu qu'ils reconnaissent le principe que la Charte assure aux Français comme un droit constitutionnel, l'usage de la liberté de la

presse.

Et c'est ce que les ministres et les agents de l'autorité ne veulent pas reconnaître.

Ah! si vous permettiez qu'on vous entretînt des concessions qu'auraient faites quelques-uns de nos collègues les plus zélés à maintenir le privilége de la liberté de la presse, vous seriez étonnés qu'elles n'aient pas été sur-le-champ acceptées.

1 On demandait au ministre de reconnaître le principe que la liberté de la presse, sans censure préalable, est un droit devenu national, un droit établi par la Charte

2o On offrait de faire, dans le cours de cette session, les lois pénales répressives pour arrêter promptement et punir les abus de cette liberté, et organiser cette partie de notre législation.

3o Les droits publics étant ainsi reconnus, on vous aurait proposé une loi qui aurait permis au gouvernement, dans des circonstances graves et des périls imminents, de suspendre l'exercice de la liberté de la pressé durant l'intervalle de vos sessions, sauf à vous de juger, à l'entrée de la session nouvelle, les motifs de cette suspension. Mais de telles concessions n'ont point paru suffisantes au ministre de Sa Majesté.

La première fois que la Chambre des députés fut admise aux pieds du trône, le président de la Chambre, en parlant en votre nom à Sa Majesté lui dit : « La Charte ouvre aux accents de la vérité toutes les voies pour arriver jusqu'au trône, puisqu'elle consacre la liberté de la presse. »

Et le Roi répondit avec bonté : « Dans tout ce « que vous me dites de la Charte constitutionnelle, je vois le gage de ce concours de volontés entre la Chambre et le Roi, qui doit assurer le bonheur de la France. »>

Ces paroles augustes et paternelles de Sa Majesté sont encore gravées dans nos cœurs; elles nous assurent à la fois le bienfait et le privilége de la liberté de la presse, nous ne pouvons y renoncer. Je persiste dans la conclusion du rapport, et je demande que la Chambre rejette le projet de loi. L'impression du discours est ordonnée.

M. l'abbé de Montesquiou prend de nouveau la parole, et, s'adressant aux députés des départements, non, dit-il, comme à des philosophes s'occupant de vaines abstractions, mais comme à de véritables hommes d'Etat, il les exhorte à ne pas s'intéresser à la seule nation des auteurs, mais bien à cette autre nation occupée de ses travaux et du soin de sa famille, qui n'a qu'eux pour les défendre et qui leur a confié ses plus chers intérêts.

Le ministre rappelle ensuite avec chaleur le fameux arrêt du conseil de l'archevêque de Sens

(qu'il compare à Médée évoquant les esprits infernaux), arrêt où ce prélat, dit-il, appelle la totalité des écrivains de la France à écrire sur les Etats généraux. Alors la porte fut ouverte à toute discussion sur les abus la nation se vil agitée de toutes les fureurs de la presse; ce fut le véritable signal de la discorde qui nous précipita dans toutes les horreurs de l'anarchie, et la tyrannie enfin est venue s'emparer de nous comme d'une proie qui lui était vouée.

Rappelez-vous, Messieurs, ces feuilles impures des Marat, des Père-Duchêne, leurs menaces, leurs provocations répandues dans toutes les provinces. Trois ans, ils ont travaillé à détruire l'édifice social; ils sont venus à bout de le faire tomber. Voilà les effets de la liberté illimitée de la presse! Mœurs, beaux-arts, constitution, tout ce que nos pères avaient respecté, tout ce qu'il nous importait de conserver, c'est elle, oui, elle, qui en a précipité la ruine!

Quel bien pouvez-vous attendre, Messieurs, de ces agitateurs, de ces fauteurs de désordre qui ne sauraient vous fournir ni moyens ni nouvelvelles idées. Vous seuls êtes la garantie de la Constitution. La France ne demande que vous, rien que vous? Donnez-lui le repos dont elle a tant besoin, et dont le gouvernement a tant à cœur de la faire jouir.

Aux voix! aux voix ! s'écrie-t-on de toutes les parties de la salle.

M. le Président. Je dois exposer à la Chambre la marche qu'elle a à suivre pour la délibération qui va l'occuper. Plusieurs amendements ont été proposés dans le cours de la discussion. Quelques-uns ont été adoptés par le ministre et consentis par le Roi. Ceux-là sont comme fondus dans la loi et en font partie. Si vous êtes dans l'intention de voter sur l'ensemble de la loi ainsi rectifiée, vous aurez auparavant à vous occuper des amendements qui n'ont pas été consentis; car votre règlement m'impose l'obligation de les mettre d'abord aux voix, et pour cela, je vais vous en rappeler la série.

Il s'établit une assez longue discussion sur la manière de procéder à la délibération. La Chambre la termine en se conformant à la marche constitutionnelle et réglementaire rappelée par M. le président.

La Chambre est en conséquence d'abord consultée sur la question de savoir s'il y a lieu à délibérer sur les divers amendements proposés dans le cours de la discussion, et qui n'ont pas été consentis.

Cette première question'est résolue négativement. M. le Président. Il reste à voter maintenant sur la loi rectifiée. La Chambre est-elle d'avis que ce soit sur l'ensemble ou article par article. Toute l'assemblée manifeste le vœu qu'il soit voté sur l'ensemble de la loi rectifiée.

On passe de suite à la délibération par scrutin secret.

M. Dufougerais, l'un des secrétaires, procède à l'appel nominal.

Chaque membre appelé répond de sa place et vient déposer dans l'urne des votes une des deux boules, blanche et noire, qu'il a reçues d'un des secrétaires, et place ensuite dans une autre urne, de simple contrôle, la boule qui lui reste.

Cette opération terminée, deux secrétaires, après avoir vidé l'urne des votes, séparent ostensiblement les boules blanches des boules noires, et font le compte des unes et des autres. Le nombre des boules mises dans l'autre urne est ensuite vérifié.

Il est constaté que, sur 217 votants, la loi proposée a obtenu 137 boules blanches contre 80 noires.

Ce résultat est communiqué par les secrétaires à M. le Président, qui prononce, au nom de la Chambre, la déclaration suivante :

«La Chambre adopte la loi. »

Après l'énoncé de l'ordre du jour de demain, la séance est levée.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.

Séance du 12 août 1814.

M. Desaux fait lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

Après une très-légère rectification demandée par un membre, la rédaction en est approuvée.

M. Desaux communique ensuite à la Chambre l'énoncé d'une pétition de plusieurs propriétaires qui demandent la prohibition des fers et aciers venant de l'étranger.

Un membre inscrit pour une proposition est invité à monter à la tribune.

M. Lalouette (député du Calvados). Je demande à la Chambre la permission de lui proposer un projet de loi sur le Code rural, et la prie de vouloir bien m'accorder la parole dans sa séance de mardi pour lui exposer les motifs de ma proposition.

M. Lalouette sera entendu mardi.

Plusieurs membres obtiennent la parole au nom de la commission des pétitions.

M. Faure. Messieurs, le sieur Cointereau, professeur d'architecture rurale à Paris, expose que depuis 1784 il n'a cessé de s'occuper des moyens de prévenir les incendies; qu'une société savante lui a décerné un prix, et que les gouvernements qui se sont succédé lui ont fourni les moyens d'établir ses modèles de constructions incombustibles. En dernier lieu, ses modèles étaient exposés dans l'avenue de Vincennes, et il paraît qu'aujourd'hui on veut les détruire. Il réclame contre la rigueur avec laquelle on le poursuit. Le terrain sur lequel ses modèles sont construits lui à coûté 4,800 francs; il y a fait pour 24,000 francs de constructions.

La commission a pensé que si le sieur Cointereau occupait un terrain sans titre, il peut être déposséde, et que si, au contraire, il a un titre, les lois sont là pour le protéger. C'est aux tribunaux qu'il doit demander justice.

Un sieur Parent, officier de santé à Sceaux, département du Loiret, se plaint de ce qu'on lui fait payer le droit de patentes, qu'il qualifie à 'égard des officiers anté d'impôt indirect sur Vmaladies.

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[12 août 1814.]

tine et de littérature française, soient données au concours, et que le décès arrivant d'un professeur au Collège de France, il soit dans les vingtquatre heures annoncé par la voie des journaux.

Cet objet a paru à la commission devoir être renvoyé au moment où il pourra être question de reviser les lois existantes sur cette matière.

Le sieur Marignier, secrétaire particulier du sous-préfet de Mantes, département de Seine-etOise, indique des mesures à adopter pour assurer les réparations des chemins vicinaux. La commission qu'elle juge pouvoir être utilisées lorsqu'on s'ocsans rejeter ces mesures, cupera d'un travail général sur cette matière, pense qu'il n'y a pas lieu d'en faire dès aujourd'hui un projet de loi particulier.

Les conclusions du rapporteur sur ces diverses pétitions sont de demander que l'assemblée passe à l'ordre du jour.

La proposition de M. Faure est adoptée.

M. Bedoch, organe de la même commission. Le sieur Brady, habitant de l'île de Corse, a présenté à la Chambre une pétition dans laquelle il expose que, par une fatalité incompréhensible, la Corse n'a pas encore assemblé ses colléges électoraux, et qu'elle n'est conséquemment point représentée par des députés qui puissent soutenir ses intérêts.

Qu'il semble que depuis trop longtemps elle ne fait partie de la France que pour en partager les charges et les malheurs toujours inséparables d'une longue guerre, pendant laquelle ses légions ont versé leur sang avec cette intrépidité que leur inspirent toujours la gloire et l'amour de la France.

Le sieur Brady, en son nom et en celui d'un grand nombre de ses compatriotes, demande que les habitants de la Corse soient représentés dans la Chambre des députés, et que les colléges électoraux de ce département, assemblés incessam ment, soient autorisés à envoyer leurs députés prendre une place qui est due à leur fidélité et leur attachement à la France et à ses lois.

La commission pense que la réclamation du sieur Brady est fondée, et que la demande des habitants de l'ile de Corse devrait être accueillie. Elle ignore quels sont les motifs qui ont pu empêcher ou retarder jusqu'à présent la convocation des colléges électoraux du département de la Corse mais il est certain que ce département fait partie intégrante de la France, et qu'il doit autant participer aux bienfaits des lois de l'État que tous les autres départements du royaume.

En reconnaissant là légitimité de la demande du sieur Brady, la commission est cependant convaincue que la Corse ne peut être autorisée à à la nomination de ses députés avant organisation des nouveaux colléges électoraux. L'article 35 de la Charte constitutionnelle dispose que la Chambre des députés sera composée des députés élus par les colléges électoraux dont l'organisation sera déterminée par les lois.

Suivant l'article 40, « les électeurs qui concourent à la nomination des députés ne peuvent avoir droit de suffrage s'ils ne payent une contri— bution directe de 300 francs, et s'ils ont moins de

trente ans. »

Il n'existe point dans ce moment de colléges
électoraux, puisque les anciens sont nécessaire-
ment supprimés, et que les nouveaux ne sont
point encore organisés.

La convocation des nouveaux colléges électo-
ne pouvant avoir lieu qu'après que leur or-
Fulgation aura été déterminée par une loi, il

faut que la Corse attende cette organisation et cette convocation pour pouvoir procéder à la nomination de ses députés.

Ce département n'est pas le seul qui n'ait point dans ce moment de députés à la Chambre. L'Ardèche et les Basses-Alpes sont dans le même cas.

Mais aucun de ces trois départements ne doit craindre que ses intérêts soient négligés ou compromis. La Chambre voit du même il tous les départements du royaume, tous lui sont également chers, tous ont le même droit à son zèle, à ses soins et à sa sollicitude.

La commission a été d'avis de proposer à la Chambre de renvoyer la pétition du sieur Brady au gouvernement, pour qu'il veuille bien la prendre en considération à l'époque de la convocation des colléges électoraux, qui seront organisés en conformité de la Charte constitutionnelle.

Cette conclusion du rapporteur est adoptée par la Chambre.

M. Bédoch propose ensuite à la Chambre de passer à l'ordre du jour sur la pétition de seize individus de la commune de Lauderfang, arrondissement de Metz, dans laquelle ils réclament contre un jugement du tribunal de première instance de Metz, du 2 juillet dernier, qui les a condamnés à une amende et des dommages et intérêts, pour avoir, disent-ils, par suite des réquisitions qui les avaient réduits à un état de misère déplorable, pris quelque peu de bois dans une forêt appartenant au gouvernement. Ils supplient la Chambre d'intercéder pour eux auprès de Sa Majesté pour leur faire obtenir leur grâce.

La commission a pensé que la Chambre ne pouvait intervenir dans une affaire qui est tout entière dans les attributions du Roi, et ne doute pas que le tribunal n'ait pris connaissance des circonstances atténuantes qui peuvent être favorables aux condamnés. Ils ont le droit d'appeler de cette sentence; s'ils ne l'ont pas fait, et qu'ils espèrent obtenir leur grâce de Sa Majesté, c'est à elle qu'ils doivent s'adresser.

La Chambre passe à l'ordre du jour sur la demande de ces pétitionnaires.

M. Barrot propose, au nom de la même commission, de passer à l'ordre du jour sur plusieurs autres pétitions dont voici les plus importantes :

M. Charlet, maire de Rouilly, demande que les maires des petites communes participent, comme ceux des grandes villes, à la faveur de porter la fleur de lys.

Cette demande a paru juste à la commission; le dévouement gratuit dont les maires et adjoints ont fait preuve dans les circonstances malheureuses où nous nous sommes trouvés, lui paraît mériter cette honorable récompense; mais le Roi seul en est le dispensateur.

M. Buffaud, rentier à Paris, demande que les pensions et rentes soient rétablies à la moitié de leur valeur primitive, et qu'il soit accordé une indemnité pour les années V et VI, qu'il dit n'avoir jamais été payées.

Cette pétition étant contraire aux lois, la commission a pensé qu'il n'y avait pas lieu à délibérer.

Les conclusions du rapporteur sur les diffé rentes pétitions ont été adoptées par la Chambre. M. Boirot, au nom de la même commission, rappelle à la Chambre qu'elle a ordonné le renvoi de la réclamation de M. Pétersen, ancien député de Mont-Tonnerre, tendante à ce qu'il fût continué dans ses fonctions; la commission n'avait pu exprimer son avis sur le mérite de cette réclamation, parce qu'il manquait une pièce im

portante qui lui a été adressée depuis. Par cette pièce, M. Pétersen prouve qu'il est né à Bergzabern, arrondissement de Weissembourg, partie du Mont-Tonnerre conservée à la France par le traité du 30 mai, et qu'il n'a cessé d'y avoir son domicile de droit. La Chambre ayant pris à l'égard de MM. Ruphi et Chevillard, députés du Mont-Blanc, qui étaient dans le même cas, une décision favorable, M. Boirot la réclame également en faveur de M. Pétersen.

La conclusion du rapporteur est appuyée.

M. le Président la met aux voix, et la Chambre décide à l'unanimité que M. Pétersen pourra continuer de siéger dans son sein.

L'ordre du jour appelle le développement de la proposition faite par M. Laur (de l'Hérault), le 30 juillet, et conçue en ces termes :

"

Qu'il soit fait une adresse au Roi pour le supplier de faire présenter dans le projet de loi concernant le budget de 1816:

« 1° Une nouvelle répartition de la contribution personnelle d'après le tableau gradué de la population de chaque commune;

« 2° Que dans cette même loi la contribution des propriétés bâties soit, dans chaque commune, égale au montant de la contribution personnelle;

« 3° Que la matière imposable de chaque département soit provisoirement déterminée d'après la dernière perception des cantons cadastrés, et que le montant de la somme à répartir en 1816 sur les propriétés non bâties, se fasse au marc le franc de la matière imposable découverte. »

M. Laur (de l'Hérault). Messieurs, j'ai eu l'honneur de vous proposer, le 29 juin dernier, de supplier le Roi de proposer une nouvelle répartition de l'impôt direct; j'espérais que la France l'obtiendrait pour l'exercice de 1815; il peut se faire que de grands motifs l'aient fait encore ajourner, mais lorsque je considère son importance, j'ai pensé qu'il était de mon devoir de l'obtenir pour l'année 1816.

Je crois que rien n'est plus facile; pour vous le démontrer, je serai dans l'obligation d'expliquer par quel moyen la France peut enfin conquérir la répartition de l'impôt le plus égal et par conséquent le plus juste. Je vous présenterai, pour cela, quelques calculs qui pourront vous paraître abstraits au premier aperçu honorezmoi de quelques moments d'attention, vous verrez, je l'espère au moins, qu'ils sont pris dans les éléments de la matière que je vais traiter, que leur application est facile à faire, et qu'ils sont dignes de vos méditations, puisqu'ils ont pour objet la réparation des torts que la législation actuelle cause à une grande partie du royaume et à un très-grand nombre de contribuables.

Le système que je vais proposer aujourd'hui à cette tribune, je l'ai soutenu en l'an X, à la section du conseil général du département de l'Hérault, dont je suis membre, avec cette différence que, le cadastre n'existant pas, j'indiquais d'autres moyens pour connaître la force des contributions de chaque propriété.

Il est universellement reconnu, Messieurs, que les contributions directes sont mal réparties. Cette assertion n'étant ni contestée ni contestable, il doit être accordé que quelques départements sont surchargés et d'autres ménagés; car sans cela elle serait fausse. Mais si je venais vous dire, en commençant à développer l'application du fait que je cite, que le département A doit obtenir une diminution de 100,000 francs, et que ces 100,000 francs doivent être rejetés sur le dé

partement B, à l'instant nous nous verrions tous divisés d'opinions. La situation respective des deux départements serait contestée, et nous entendrions soutenir ces deux propositions contraires, que le premier ne doit point être dégrevé, ni le second augmenté.

Ce résultat fut prévu par l'Assemblée constituante, lorsqu'elle s'occupa de la répartition des contributions directes. Voici ce qu'elle fit pour le prévenir elle additionna les contributions de toute nature qui pesaient sur la France, elle s'appliqua à calculer ce que chaque nouvelle circonscríption départementale payait dans cette somme totale, et puis, par l'opération du marc le franc, elle partagea entre les départements les 500 millions de ces nouvelles contributions directes.

Le comité des finances fit valoir ce raisonnement-ci; je vous prie de le saisir :

« L'ancien gouvernement de la France ne s'est << point appliqué à régulariser la répartition des « contributions sur les différentes provinces; mais « en exigeant de chacune d'elles, tantôt sous une « forme, tantôt sous une autre, tout ce qu'il était possible d'en retirer, il les a mises au même << niveau en épuisant tous leurs moyens de payer.»

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Mais en adoptant cette règle unique de réparti tion, que les circonstances d'alors rendaient plus séduisantes que satisfaisantes, l'assemblée y dérogea elle-même et au même instant, en retranchant de la somme totale des anciens impôts 60 ou 80 millions qui avaient été demandés à quelques provinces, sous la dénomination d'accessoires au principal, sans déduire, à l'égard des autres, le montant des dépenses mises à leur charge pour balancer leur contingent.

Il me serait facile de démontrer que cette première violation du principe posé a influé d'une manière sensible sur le vice de la répartition actuelle, j'aime mieux suivre l'analyse des faits antérieurs à notre situation présente.

Le comité des contributions de l'Assemblée constituante força, en quelque manière, les députés à recevoir de confiance la répartition proposée. Un seul membre eut le courage de se lever pour proposer un amendement; voici en quoi il consistait :

Il prévoyait que la répartition nouvelle écraserait quelques départements et allégerait le sort peut-être des plus fortunés: il demanda qu'il fût décidé que tout contribuable qui se trouverait taxé à une proportion plus forte que le sixième de son revenu territorial à l'égard de la contribution foncière, ou plus forte que le quarantième de sa fortune mobilière présumée à l'égard de la contribution personnelle, fùt autorisé à demander un dégrèvement.

La proposition fut admise. Ce recours ouvert contre la surtaxe offrait bien une ancre de miséricorde aux malheureux, mais elle n'empêchait pas que, tandis que ces malheureux pouvaient ètre astreints à payer 16 ou 17 francs sur 100 francs de revenu territorial, il n'existât d'autres particuliers qui se trouvaient libérés, en payant 9 ou 10 francset quelquefois moins; car vous savez, Messieurs, que le cadastre v dé démontrer que quelques-uns ne payent que 6 francs sur 100. dant l'Assemblée con ante fit sa réparles quatre-vint départements 240 millious pour Intribution 60 millions pour la noutribution de vous sait combine e Aleux jermes ét gryvonne amman.

mes; elles se renouvelèrent dans les séances de la Convention. La victoire vint au secours de celle-ci, lorsqu'elle réunit à notre territoire les neuf départements de la ci-devant Belgique; elle leur assigna environ 18 millions qu'elle fii tourner au soulagement des anciens départements. Ce système fut suivi pendant quelque temps; son insuffisance fut reconnue, et il fallut forcément en venir à la diminution du principal des contribution directes. Les mesures employées ont fait descendre la contribution personnelle, somptuaire et mobilière, à 28 millions environ, tandis qu'elle était de 60 dans le principe, et la contribution foncière à 172 millions environ, tandis qu'elle avait été portée à 240 mlllions. Mais cette diminution, Messieurs, faite quelquefois par l'opération du marc le franc, et dans d'autres circonstances sur l'apparence d'une surcharge reconnue pour quelques départements, n'a pas fait disparaître le vice de la première répartition.

J'ai déjà dit qu'elle eut pour première cause le retranchement, à l'égard de quelques départements, des accessoires aux anciennes contributions. Ici, j'ajoute que l'Assemblée constituante crut avec trop de facilité que l'ancien gouvernement avait tout nivelé, en portant toutes les perceptions à l'extrême; et actuellement je vous prie de considérer combien notre position, comparée à la sienne, est différente. Depuis plus de vingt ans nous sommes régis par des lois uniformes. Nos contributions indirectes sont perçues partout sur les mêmes tarifs; notre population est constatée; la science de la statistique des peuples a été étudiée et posée sur ses véritables bases. Vous saisissez ma pensée, Messieurs, sans que je l'explique plus longuement. S'il est vrai que l'ensemble des perceptions soit une chose utile à connaître et à méditer, nous en avons actuellement les éléments certains, et vous voyez les motifs qui m'ont fait demander, le 29 juin, la publication de tableaux qui puissent nous faire connaître ce que paye ou ce qu'a payé pendant les trois dernières années chacun des départements du royaume.

Je suis autorisé à penser que quelques membres de la Chambre ont pu croire que cette communication était difficile à effectuer, et qu'un laps de temps considérable se passerait avant de pouvoir l'obtenir.

Ce travail, Messieurs, a été communiqué au public en l'an VII; le compte des finances de l'an VI (il est vrai que c'est le seul qui ait été donné en cette forme), contient le tableau des départements, avec la désignation de leur surface, de leur population et de ce que chacun d'eux a payé pour chaque branche de perception ou de contribution, calculée séparément. Ce qui a été fait alors pour le public a été continué depuis lors pour le gouvernement. J'affirme qu'il a des tableaux semblables pour chaque exercice, et que, si ma proposition était jugée avantageuse, il pourrait, dans le jour, les mettre sous presse, et les publier le lendemain.

Je reprends le développement de mes pensées sur la nouvelle répartition des contributions directes. Partant de ce fait nouveau, que nos contributions directes sont mal réparties, je calcule, d'après le budget proposé pour 1815, que la contribution foncière, celle des portes et fenêtres, et la contribution personnelle s'élèvent en principal et 60 centimes additionnels, à la somme totale de 333,255,897 francs. Je ne m'occupe point de la contribution des patentes, parce qu'elle est soumise à un autre régime.

Cette donnée étant posée, j'ai pensé qu'il fallait d'abord s'occuper de la contribution personnelle.

S'il existe, Messieurs, quelque branche de perception dont l'appréciation puisse être faite par son rapprochement avec le nombre des têtes qui doivent la supporter, j'espère qu'on m'accordera que c'est sans doute la contribution personnelle; mais en même temps j'ai considéré que ce serait commettre une injustice que de la répartir sur chaque habitant, à raison seulement de son existence; de manière que le pauvre payât autant que le riche, et sans consulter leur faculté respective. Cette puissante considération m'a fait entrer dans l'examen de cette question-ci : Existet-il quelques données qui puissent guider l'observateur dans la recherche de la fortune d'une population désignée et comparée à une autre?

Je crois, Messieurs, en avoir trouvé quelques

unes.

L'auteur immortel de l'Esprit des lois m'en a fourni la première. « Là, dit-il, avec son énergique concision, où deux personnes peuvent vivre, il se fait un mariage. De là j'ai conclu que là où il se trouve une population, par lieue carrée, plus forte qu'ailleurs, il doit y avoir plus de richesses ou territoriales, ou mobilières. »

Cette règle peut souffrir quelque exception; ainsi je ne peux point dire que le sol de l'enceinte de Paris qui ne produit rien, doit être plus fertile que celui de la Limagne, par cela seul qu'il contient une plus forte population; mais aussi pourrai-je répondre, les quatre lieues carrées de Paris contiennent une plus grande fortune mobilière qu'une pareille surface de la Limagne.

Cette première donnée admise, j'en ai trouvé une autre dans le calcul de ce que chaque département produit dans la masse des contributions indirectes. Là, ai-je dit, où le droit perçu sur les successions donne plus à raison de tant par tête qu'ailleurs, il doit y avoir plus de richesses; là où le timbre produit davantage, il se fait plus d'affaires; là où la poste aux lettres reçoit plus de dépêches, il doit y avoir plus de relations.

J'en ai trouvé une autre dans la comparaison de ce qui se passe dans les villes populeuses, appréciées sous leur rapport avec les campagnes. C'est dans les villes que se fixent les gens riches qui cherchent à se procurer les aisances et les jouissances de la vie; c'est là que sont les grands fonctionnaires rétribués par l'Etat ; c'est dans les grandes villes que se réunissent les hommes qui augmentent leur fortune par leur industrie ou par leur talent. Les campagnes deviennent tôt ou tard leurs tributaires; c'est dans les villes que les salaires sont les plus forts, c'est là que l'Etat rend à la société ce qu'il en retire par les contributions; c'est dans les villes que les pères envoient leurs enfants pour les y faire élever; c'est là que l'on vient demander justice aux tribunaux, et, par-dessus toutes ces considérations, j'ai vu que les véritables maximes de l'ordre social nous commandaient d'alléger le sort des campagnes en matière d'impôts, afin d'y attirer les citadins et de les rapprocher davantage de la nature, cette institutrice des mœurs qui a sans cesse à réparer les atteintes que leur porte la trop grande civilisation des grandes cités.

Ces principes posés, j'ai calculé que la contribution personnelle actuellement demandée s'élevait à une somme de 27 millions environ, et que cette somme répartie sur notre population actuelle de 27 millions d'habitants, revenait au taux moyen de 1 franc par tête.

Je vais, Messieurs, comparer les forces contributives de deux départements; ma première pensée m'avait inspiré de faire figurer le département de l'Hérault, dont je suis député, dans cette comparaison, mais j'ai réfléchi que toutes mes propriétés étant situées dans ce département, la malveillance aurait pu calomnier mes intentions, et le public croire que je m'occupais de mon intérêt particulier, tandis que mes fonctions m'imposent le devoir de ne penser qu'à l'intérêt général.

Abandonnant cette idée, j'ai cherché sur la liste de nos départements celui qui se rapprochait le plus de ce taux moyen, et j'ai trouvé que c'était celui de l'Aude, qui, avec une population de 241,993 habitants, supporte une contribution personnelle de 242,300 francs.

Prenez-y bien garde, Messieurs, je n'examine pas ici si le département de l'Aude est surchargé, comme on pourrait le croire, en considérant que le taux moyen d'un département ordinaire ne peut pas être de 1 franc par tête, lorsque la contribution de la seule ville de Paris diminue cette proportion. Je n'examine pas non plus si le département de l'Aude est ménagé, eu égard à l'industrie de ses habitants. Non, Messieurs, je suis seulement parti de ce fait le département de l'Aude à 242,000 habitants on lui demande pour le principal de sa contribution personnelle 242,000 francs, et alors je me suis fait cette question: comment doit-il les répartir? J'ai fait alors l'application des principes ci-dessus posés, et j'ai vu que le département de l'Aude obtiendrait la somme demandée, en admettant les règles de répartition suivantes :

Prenons, pour fixer le contingent de chaque commune de 1,000 habitants et au-dessous, la proportion de 80 centimes par tête; portons cette proportion à 1 franc pour chaque téte qui excède le nombre de 1,000 jusqu'à 2,000; à 1 fr. 20 c. pour ce qui excède 2,000 et va jusqu'à 3,000, etc. Je joindrai à mon opinion cette échelle graduée de répartition, et l'application en étant faite au département de l'Aude, j'ai trouvé qu'il rendrait à l'impôt 241,092 fr. 40 c., résultat qui est presque le même que le contingent actuellement demandé. J'ai ensuite réfléchi sur le résultat de mon opération; j'ai vu qu'elle allégeait la quote-part du ci-devant district de la Grâce, le plus infertile de tout le royaume, et qu'elle atteignait l'aisance des rives fertiles du canal et de la vallée traversée par la ligne de poste. Ceci a commencé à me donner quelque confiance.

J'ai cherché à faire l'application du même mode de répartition sur un autre département; et pour ne pas m'exposer au reproche de le choisir à dessein, j'ai pris l'autre extrémité du méridien de Paris, c'est-à-dire le département du Nord.

Ce dernier département, vous le savez, Messieurs, a une population de 859,833 habitants : le principal de sa contribution personnelle est fixé à 719,700 francs; vous voyez qu'il est au-dessous de la proportion de 1 franc par tête. J'ai appliqué à sa population mon tableau gradué de répartition; là j'ai trouvé une commune de 60,000 habitants; la plus forte du département de l'Aude n'en a pas 15,000: là j'ai trouvé cinq communes de 10 à 25,000 âmes; le département de l'Aude n'en a aucune, autre que son chef-lieu. Additionnant ensuite le résultat de mon opération, j'ai vu que le département du Nord, taxé sur la proportion de celui de l'Aude, devait payer 1,063,351 fr. 80 c., ce qui présente une augmentation de 300,000 francs environ.

Prenez bien, Messieurs, je vous prie, en consi

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