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66 respectés eux-mêmes, et l'eussent été de tous. "Ils n'auraient pas eu le pouvoir de la seigneurie "féodale; mais ils en auraient eu, sans danger, "toute l'influence. Un curé eût été le juge de

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paix naturel, le vrai chef moral qui eût dirigé, "conduit la population sans danger, parce qu'il " était lui-même dépendant du Gouvernement qui "le nommait et le salariait. Si l'on joint à tout "cela les épreuves et le noviciat nécessaires pour "le devenir, qui garantissent en quelque sorte la "vocation, et supposent de belles dispositions de "cœur et d'esprit, on est porté à prononcer qu'une "telle composition de pasteurs, au milieu des "peuples, eût dû amener une révolution morale "tout à l'avantage de la civilisation."

Ceci me rappelle avoir entendu l'Empereur, au Conseil d'État, déclamer contre le casuel des ministres du culte, et faire ressortir l'indécence de les mettre dans le cas de marchander, disait-il, des objets sacrés, et pourtant indispensables. Il proposait donc de le détruire, "En rendant les actes "de la religion gratuits," observait-il, "nous relevons sa dignité, sa bienfaisance, sa charité; "nous faisons beaucoup pour le petit peuple, et "rien de plus naturel et de plus simple que de

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remplacer ce casuel par une imposition légale ; "car tout le monde naît, beaucoup se marient, et "tous meurent; et voilà pourtant trois grands objets d'agiotage religieux qui me répugnent et

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que je voudrais faire disparaître. Puisqu'ils

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s'appliquent également à tous, pourquoi ne pas "les soumettre à une imposition spéciale, ou bien encore les noyer dans la masse des impositions générales, etc. etc." Cette proposition n'eut pas de suite.

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Il me revient aussi en ce moment l'avoir encore entendu exprimer la proposition que tous les fonctionnaires et employés publics, même les militaires, formassent d'eux-mêmes le fond de leurs pensions à venir, par une légère retenue de leur salaire annuel : il y attachait beaucoup de prix. "De la "sorte," disait-il, "l'avenir de chacun ne sera "plus un objet de sollicitation, une faveur; ce "sera un droit, une vraie propriété; ce qui lui aura été retenu sera versé à la caisse d'amor"tissement chargée de le faire valoir: ce sera son

propre bien qu'il suivra des yeux, et qu'il re"tirera, sans contestation, lors de sa retraite." On lui objectait qu'il était des traitemens, ceux des militaires surtout, qui ne pourraient admettre de retenue. "Eh bien! j'y suppléerai," répliquait l'Empereur, "je les accroîtrai de toute la rete"nue. Mais à quoi bon alors, objectait-on en

core, si l'on doit faire la même dépense, il n'y "aurait point d'économie; où seraient donc les "avantages?—Les avantages," répliquait l'Empereur," seraient dans la différence entre le certain "et l'incertain, entre le repos du trésor, qui n'au"rait plus à se mêler de ces accidens, et la tran

quillité des citoyens qui posséderaient leur ga"rantie, etc. etc."

L'Empereur défendit cette idée avec beaucoup de chaleur. Il y revint plus d'une fois; elle demeura néanmoins sans résultat. J'ai déjà dit l'avoir vu improviser souvent de la sorte, ou faire discuter, après impression, une foule d'autres projets qui ont éprouvé le même sort. Voici qui peut en fort peu de mots donner une idée des travaux et de l'activité de son administration. "On a cal"culé que le Gouvernement de Napoléon, dans "un espace de 14 ans et 5 mois, présente 61 "mille 139 délibérations du Conseil d'Etat, sur "des objets différens *!..."

Enfin, j'ai entendu maintes fois Napoléon, et en diverses circonstances, répéter qu'il eût voulu un institut Européen, des prix Européens pour animer, diriger et co-ordonner toutes les associations savantes en Europe.

Il eût voulu, pour toute l'Europe, l'uniformité des monnaies, des poids, des mesures; l'uniformité de législation. "Pourquoi," disait-il, "mon Code

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Napoléon n'eût-il pas servi de base à un Code 66 Européen, et mon Université impériale à une "Université Européenne? De la sorte, nous n'eus"sions réellement, en Europe, composé qu'une "seule et même famille. Chacun, en voyageant, "n'eût pas cessé de se trouver chez lui, etc."

* Histoire Critique et Raisonnée, etc. de Montvérant.

Il est encore une foule d'autres idées pareilles, mais comme je n'oserais hasarder aucun ressouvenir des détails, je m'abstiens.

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L'Empereur change de manière à nous affecter. Le Gouverneur nous environne de fortifications.-Terreurs de Sir Hudson Lowe.-Général Lamarque.-Madame Recamier et un Prince de Prusse.

15.-Sur les trois heures, l'Empereur, avec qui j'avais déjà déjeûné le matin, m'a fait appeler; voulant prendre l'air, il a essayé de marcher dans le bois; mais l'air lui a paru trop vif. Il s'est dirigé alors vers le Grand-Maréchal, chez qui il est entré, et est demeuré assez long-temps assis dans un fauteuil, où il semblait comme absorbé. Sa maigreur, la teinte de son visage, un affaiblissement visible nous ont frappés; nous en avions tous le cœur navré...

En traversant le bois il avait jeté les yeux sur les fortifications dont on nous entoure; il avait ri de pitié de tous ces travaux. On avait déshonoré nos alentours, disait-il, en enlevant l'espèce de gazon qui s'y trouvait, pour en faire de misérables revêtemens inutiles et ridicules. En effet, depuis près de deux mois, le Gouverneur ne cesse de remuer le terrain autour de nous: il creuse des fossés, élève des parapets, plante des palissades ; il nous a tout-à-fait cernés dans Longwood; il fait en ce moment de l'écurie une véritable redoute, sans qu'on puisse y deviner aucun avantage en TOME IV. Septième Partie.

équivalent des sommes et des soins qu'elle aura coûtés; aussi ces travaux excitent-ils tour-à-tour la mauvaise humeur et le rire des soldats et des Chinois qui y sont employés: ils n'appellent plus Longwood et son écurie que le fort Hudson et le fort Lowe; et l'Empereur est revenu sur les frayeurs ridicules de Sir Hudson Lowe, qu'on nous a assuré se réveiller, parfois en sursaut pour rêver à de nouveaux moyens de sûreté. "Assurément," disait l'Empereur, "cela tient de la folie; et que "ne dort-il à son aise? Que ne nous laisse-t-il tranquilles? Comment n'a-t-il pas l'esprit de 'juger que la force des localités ici, est bien supé"rieure encore à toutes ses terreurs paniques ?"— "Sire," a repris quelqu'un, "c'est qu'il se souvient "de Capri, où, avec deux mille hommes, trente

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pièces de canon et perché dans les nues, il fut "enlevé par douze cents Français que conduisait "le brave Lamarque, lequel ne put pénétrer jus"qu'à lui qu'à l'aide d'une triple escalade."-" Eh bien," a observé l'Empereur," Sir Lowe se montre "meilleur geolier que bon général."

La santé de mon fils, depuis quelque temps, me donnait les plus vives inquiétudes. Ses souffrances étaient tournées en palpitations violentes qui amenaient des évanouissemens; elles le forçaient de se relever la nuit pour marcher ou prendre quelque position particulière.

Le docteur O'Méara craignait d'entrevoir tous les symptômes d'un anévrisme et un péril immi

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