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Ici se termine, nous le disons à regret, la carrière vraiment utile de M. Kосн. La révolution y mit fin, en le jetant dans une mer ora¬ geuse dont il eut peine à se sauver. Sans doute il porta, dans les fonctions auxquelles la confiance de ses concitoyens l'appela, ce même esprit de justice et de droiture qui l'avoit distingué comme particulier; mais la pureté de son cœur qui le rendoit confiant, ne lui permit pas toujours de distinguer l'intrigue de la bonne foi. Plus d'une fois il fut égaré par un penchant dont il ne sut pas se rendre maître. Cet homme de bien avoit le sentiment inné du beau, qui, cultivé avec soin, en auroit fait un artiste ou un connoisseur, et qui le rendoit extrêmement sensible à tout ce qui flattoit le sens de la vue. L'aspect d'une belle physionomie lui causoit un vif plaisir; il supposoit toutes les vertus à ceux que la nature a doués de cet avantage. De là cette affection qu'il portoit à la jeunesse, et surtout à l'enfance, dont les jeux innocens étoient pour lui l'amusement le plus agréable. L'impression que produisoit sur lui l'extérieur des personnes qu'il voyoit pour la première fois, guidoit son jugement sur leur mérite. Quoique souvent trompé, l'expérience ne le corrigea pas d'un défaut, qui avoit la source dans une belle âme.

M. KOCH vit d'abord avec chagrin la révolution françoise; il se réconcilia ensuite avec elle, lorsque l'acceptation de la constitution par Louis XVI lui fit entrevoir un moyen de la terminer; il détesta franchement les factieux qui renversèrent le trône pour l'amour d'une chimère; il eut en horreur les régicides et toute cette assemblée conventionnelle dont les mem

bres les plus criminels ne sont peut-être pas les plus méprisables ; il ne fut pas un instant trompé par Buonaparte; et si dans le tribunat il vota pour l'Empire, c'est que, désespérant du retour du prince légitime, il crut que le rétablissement d'une monarchie seroit un pas vers l'amélioration.Combien ne souffrit-il pas lorsqu'il s'aperçut que le nouveau titre de l'usurpateur, loin de satisfaire son ambition, l'excitoit à de nouveaux attentats! Les malheurs dont la France fut accablée empoisonnèrent les dernières années de sa vie, et contribuèrent à ruiner une santé que, malgré la foiblesse de sa constitution, une vie très frugale et une grande régularité de mœurs avoient long-temps soutenue.

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Nommé, en 1789, député extraordinaire des protestans d'Alsace et de la ville de Strasbourg, pour obtenir de l'assemblée constituante la conservation des biens que les traités assuroient aux protestans, et que les princes possessionnés

en Alsace et les villes ci-devant libres faisoient

administrer par leurs consistoires, il obtint le décret du 17 août 1790, qui fut revêtu peu après de la sanction royale. Cette mission prépara sa nomination à la première assemblée législative qui eut lieu le 29 août 1791, malgré l'opposition du baron de DIETRICH, premier maire de Strasbourg. Ce magistrat, homme éclairé et savant, juste et ami sincère de sa patrie, n'avoit pas su résister à cet enthousiasme qui s'étoit emparé des meilleures esprits; il voyoit avec plaisir la révolution, mais il espéroit, par son influence et par celle des hommes de bien dont il s'entoura, préserver la ville de Strasbourg des excès dont fut souillée ailleurs ce qu'il appeloit la bonne cause. Il y réussit, et son administration mérite d'être citée pour sa sagesse, sa fermeté et sa douceur; c'étoit celle d'un père entouré d'une nombreuse famille. Si elle ne put pas faire généralement chérir la révolution à Strasbourg, tous les partis rendirent justice à la pureté des intentions de cet homme estimable, à son zèle ardent, et à des talens qui auroient été dignes de briller sur un plus grand théâtre. M. de DIETRICH, protestant lui-même, désapprouvoit la démarche qu'avoient faite les protestans pour séparer leurs intérêts de ceux des catholiques : il craignoit qu'elle ne

contribuât à nourrir l'antipathie religieuse qu'il s'efforçoit d'éteindre. Il travailloit à faire rapporter le décret du 17 août; il ne prévoyoit pas qu'il viendroit un temps où l'on se féliciteroit d'avoir sauvé quelques débris de la fortune publique du gouffre où bientôt tout alla s'engloutir.

M. DIETRICH Vit avec regret que M. Koch fût membre de la députation du Bas-Rhin ; il insista de la manière la plus pressante auprès des membres les plus influens de l'assemblée électorale, pour les faire renoncer à ce choix. Lorsqu'il vit ses efforts infructueux, il adressa les plus vifs reproches aux président et secrétaire du corps électoral qui lui avoient résisté en face. Cependant il recommanda aux députés partant pour Paris les intérêts de sa commune chérie, qui étoit dans le cas de former un grand nombre de réclamations à la charge du gouvernement. Tous les députés promirent de s'en occuper; mais M. KocH seul tint parole. Il s'établit une correspondance active entre ce député et le maire de Strasbourg; elle leur inspira mutuellement une amitié d'autant plus vraie, qu'elle étoit fondée sur l'estime. De temps en temps DIETRICH me parloit de son correspondant; ce n'étoit plus votre M. Koch, comme il l'avoit précédeniment nommé dans ses momens d'humeur; maintenant il révéroit en lui

l'homme de bien, n'envisageant que son devoir, se sacrifiant pour le bien public, et dédaignant toute intrigue; et pourquoi cacherois-je un fait qui honore ces deux hommes? Unjour DIETRICH me serra contre son cœur pour m'exprimer sa reconnoissance de ce que j'avois combattu son aveugle prévention. Je crois que ce mouvement généreux est un des plus beaux hommages qui aient été rendus à la vertu.

Le malheur des circonstances fournit bientôt à DIETRICH une triste occasion de marquer son estime pour M. KоCH. Accusé M. KOCH. Accusé par suite d'un décret rendu sur les motifs les plus absurdes, il fut enlevé, sous un autre prétexte, à ses juges naturels dont on redoutoit la droiture, pour être traduit devant le tribunal d'une ville dont on souleva contre lui les habitans. On employa, pour les travailler, le plus misérable de tous les jacobins, un individu dont on ne peut prononcer le nom sans manquer de respect à l'auguste maison à laquelle il appartient. Cet étranger, sans esprit et sans moyens, avoit appris, dans le repaire de ses consorts, la tactique de la sédition: il vouloit faire massacrer DIETRICH à son arrivée à Besançon. Son projet échoua: mais il fit naître des préventions populaires contre l'accusé. Pour les dissiper, celui-ci n'avoit d'autre moyen que d'opposer aux voci

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