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Astorga, 2 janvier 1809.

Vingt-quatrième bulletin de l'armée d'Espagne.

L'empereur est arrivé à Astorga le 1er janvier.

La route de Bénavente à Astorga est couverte de chevaux anglais morts, de voitures d'équipages, de caissons d'artillerie et de munitions de guerre. On a trouvé à Astorga des magasins de draps, de couvertures, et d'outils de pionniers.

Dans la route d'Astorga à Villa-Franca, le général Colbert commandant l'avant-garde de cavalerie du duc d'Istrie, a fait deux mille prisonniers, pris des convois de fusils, et délivré une quarantaine d'hommes isolés qui étaient tombés entre les mains des Anglais,

Quant à l'armée de la Romana, elle est réduite presqu'à rien. Ce petit nombre de soldats, sans habits, sans souliers, sans solde, sans nourriture, ne peut plus être compté pour quelque chose.

L'empereur a chargé le duc de Dalmatie de la mission glorieuse de poursuivre les Anglais jusqu'au lieu de leur embarquement, et de les jeter dans la mer l'épée dans les reins.

Les Anglais sauront ce qu'il en coûte pour faire un mouvement inconsidéré devant l'armée française. La manière dont ils sont chassés du royaume de Léon et de la Galice, et la destruction d'une partie de leur armée leur apprendra sans doute à être plus circonspects dans leurs opérations sur le continent.

La neige a tombé à gros flocons pendant toute la journée du 1er janvier. Ce temps, très-mauvais pour l'armée française, est encore plus mauvais pour une armée qui bat en retraite.

En Catalogne, le général Gouvion-Saint-Cyr est entré à Barcelonne.

A Sarragosse, les ducs de Conegliano et de Trévise se sont emparés, avec peu de perte, du Monte-Torrero; ils ont fait

un millier de prisonniers, et ont entièrement cerné la ville. Les mineurs ont commencé leurs travaux.

Dans l'Estramadure, la division du général Sébastiani ayant passé le Tage, le 24, au pont de l'Arzobispo, a attaqué les débris de l'armée d'Estramadure. Une seule charge du vingt-huitième régiment d'infanterie de ligne a suffi pour les mettre en déroute. Le duc de Dantzick avait en même temps fait passer le Tage à la division du général Valence sur le pont d'Almaraz. Quatre pièces de canon, douze caissons, et quatre ou cinq cents prisonniers ont été le fruit de cette journée. On s'est emparé de divers magasins, et notamment d'un immense magasin de tentes.

Tout ce qui reste de troupes espagnoles insurgées est sans solde depuis plusieurs mois.

Benavente, 5 janvier 1809.

Vingt-cinquième bulletin de l'armée d'Espagne.

La tête de la division Merle, faisant partie du corps du duc de Dalmatie, a gagné l'avant-garde dans la journée du 3 de ce mois.

A quatre heures après-midi, elle s'est trouvée en présence de l'arrière-garde anglaise qui était en position sur les hauteurs de Prieros, à une lieue devant Villa-Franca, et qui était composée de cinq mille hommes d'infanterie et six cents chevaux. Cette position était fort belle et difficile à aborder. Le général Merle fit ses dispositions. L'infanterie s'approcha, on battit la charge, et les Anglais furent mis dans une entière déroute. La difficulté du terrain ne permit pas à la cavalerie de charger, et l'on ne put faire que deux cents prisonniers. Nous avons eu une cinquantaine d'hommes tués ou blessés.

Le général de brigade Colbert, commandant la cavalerie de l'avant-garde, s'était avancé avec les tirailleurs de l'infanterie, pour voir si le terrain s'élargissait, et s'il pouvait former sa cavalerie. Son heure était arrivée; une balle le frappa

au front, le renversa, et il ne vécut qu'un quart d'heure ; revenu un moment à lui, il s'était fait placer sur son séant, et voyant alors la déroute complète des Anglais, il dit: Je suis bien jeune encore pour mourir, mais du moins ma mort est digne d'un soldat de la grande armée, puisqu'en mourant je vois fuir les derniers et les éternels ennemis de ma patrie. Le général Colbert était un officier d'un grand mérite.

Il y a deux routes d'Astorga à Villa-Franca. Les Anglais passaient par celle de droite, les Espagnols suivaient celle de gauche; ils marchaient sans ordre; ils ont été coupés et cernés par les chasseurs hanovriens. Un général de brigade et une division entière, officiers et soldats, ont mis bas les armes. On lui a pris ses équipages, dix drapeaux et six pièces de canon.

Depuis le 27, nous avons déjà fait à l'ennemi plus de dix mille prisonniers parmi lesquels sont quinze cents Anglais. Nous lui avons pris plus de quatre cents voitures de bagages et de munitions, quinze voitures de fusils, ses magasins et ses hôpitaux de Bénavente, Astorga et Bembibre. Dans.ce dernier endroit, le magasin à poudre qu'il avait établi dans une église, a sauté.

Les Anglais se retirent en désordre, laissant ainsi leurs magasins, leurs blessés, leurs malades, et abandonnant leurs équipages sur les chemins. Ils éprouveront une plus grande perte encore; et s'ils parviennent à s'embarquer, il est probable que ce ne sera qu'après avoir perdu la moitié de leur

armée.

Sa Majesté, informée que cette armée était réduite au-dessous de vingt mille hommes, a pris le parti de porter son quartiergénéral d'Astorga à Bénavente, où elle restera quelques jours,' et d'où elle ira occuper une position centrale à Valladolid, laissant au duc de Dalmatie le soin de détruire l'armée anglaise. On a trouvé dans les granges beaucoup d'Anglais qui avaient été pendus par les Espagnols. Sa Majesté a été indignée ; elle

a fait brûler les granges. Les paysans, quel que soit le ressentiment dont ils sont animés, n'ont pas le droit d'attenter à la vie des traînards de l'une ou de l'autre armée. Sa Majesté a ordonné de traiter les prisonniers anglais avec les égards dus à des soldats qui, dans toutes les circonstances, ont manifesté des idées libérales et des sentimens d'honneur. In

formée que dans les lieux où les prisonniers sont rassemblés, et où se trouvent dix Espagnols contre un Anglais, les Espagnols maltraitent les Anglais et les dépouillent, elle a ordonné de séparer les uns des autres, et elle a prescrit, pour les Anglais, un traitement tout particulier.

L'arrière-garde anglaise, en acceptant le combat de Prieros, avait espéré donner le temps à la colonne de gauche, composée pour la plus grande partie d'Espagnols, de faire sa jonction à Villa-Franca. Elle comptait aussi gagner une nuit pour rendre plus complète l'évacuation de Villa-Franca.

Nous avons trouvé à l'hôpital de Villa-Franca trois cents Anglais malades ou blessés. Les Anglais avaient brûlé dans cette ville un grand magasin de farine et de blé ; ils y avaient détruit beaucoup d'équipages d'artillerie, et tué cinq cents de leurs chevaux. On en a déjà compté seize cents laissés morts sur les routes.

Le nombre des prisonniers est assez considérable et s'accroît de moment en moment. On trouve dans toutes les caves de la ville des soldats anglais morts ivres.

Le quartier-général du duc de Dalmatie était, le 4 au soir, à dix lieues de Lugo.

Le 2, Sa Majesté a passé en revue, à Astorga, les divisions Laborde et Loison, qui formaient l'armée de Portugal. Ces troupes voient fuir les Anglais et brûlent du désir de les joindre.

Sa Majesté a laissé en réserve à Astorga le corps du duc d'Elchingen, qui a son avant-garde sur les débouchés de la

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Galice, et qui est à portée d'appuyer, en cas d'événement le corps du duc de Dalmatie.

On a reçu la confirmation de la nouvelle de l'arrivée du général Gouvion-Saint-Cyr avec le septième corps à Barcelonne. Il y est entré le 17; le 15, il avait rencontré a Linas les troupes commandées par les généraux Reding et Vivès et les avait mises dans une entière déroute. Il leur a pris six pièces de canon, trente caissons et trois mille hommes. Moyennant la jonction du septième corps avec les troupes du général Duhesme, nous avons une grosse armée à Barcelonne.

Lorsque Sa Majesté était à Tordesillas, elle avait son quartier-général dans les bâtimens extérieurs du couvent royal de Sainte-Claire. C'est dans ces bâtimens que s'était retirée et qu'est morte la mère de Charles-Quint, surnommée Jeanne la folle. Le couvent de Sainte-Claire a été construit sur un ancien palais des Maures, dont il reste un bain et deux salles d'une belle conservation. L'abbesse a été présentée à l'empereur; elle est âgée de soixante-quinze ans, et il y avait soixante-cinq ans qu'elle n'était sortie de sa clôture. Cette religieuse parut fort émue lorsqu'elle franchit le seuil ; mais elle entretint l'empereur avec beaucoup de présence d'esprit, et elle obtint un grand nombre de grâces pour tout ce qui l'intéressait.

Valladolid, 7 janvier 1809.

Vingt-sixième bulletin de l'armée d'Espagne.

Le général Gouvion Saint-Cyr, aussitôt après son entrée. à Barcelonne, s'est porté sur Lobregat, a forcé l'ennemi dans son camp retranché, lui a pris vingt-cinq pièces de canon, et

a marché sur Tarragone dont il s'est emparé. La prise de cette ville est d'une grande importance.

Les rapports du général Duhesme et du général Saint-Cyr contiennent le détail des événemens militaires qui ont eu lieu

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