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la junte militaire, et don Bernardo Yriarte, envoyé de la ville, se rendirent dans la tente de S. A. S. le major-général. Ils firent connaître que tous les hommes bien pensans ne doutaient pas que la ville ne fût sans ressources, et que la continuation de la défense était un véritable délire; mais que les dernières classes du peuple et la foule des hommes étrangers à Madrid voulaient se défendre et croyaient le pouvoir. Ils demandaient la journée du 4 pour faire entendre raison au peuple. Le prince major-général les présenta à S. M. l'empereur et roi, qui leur dit : « Vous employez en vain le nom du peuple; si vous ne pouvez parvenir à le calmer, c'est parce que vous-mêmes vous l'avez excité, vous l'avez égaré par des mensonges, Rassemblez les curés, les chefs des couvens, les alcades, les principaux propriétaires, et que d'ici à six heures du matin la ville se rende, ou elle aura cessé d'exister. Je ne veux ni ne dois retirer mes troupes. Vous avez massacré les malheureux prisonniers français qui étaient tombés entre vos mains. Vous avez, il y a peu de jours, laissé traîner et mettre à mort dans les rues deux domestiques de l'ambassadeur de Russie parce qu'ils étaient nés Français. L'inhabileté et la lâcheté d'un général avaient mis en vos mains des troupes qui avaient capitulé sur le champ de bataille, et la capitulation a été violée. Vous, monsieur Morla, quelle lettre avez-vous écrite à ce général? Il vous convenait bien de parler de pillage, vous qui étant entré en Roussillon avez enlevé toutes les femmes et les avez partagées comme un butin entre vos soldats. Quel droit aviez-vous, d'ailleurs, de tenir un pareil langage? La capitulation vous l'interdisait, Voyez quelle a été la conduite des Anglais, qui sont bien loin de se piquer d'être rigides observateurs du droit des nations: ils se sont plaints de la convention du Portugal, mais ils l'ont exécutée. Violer les traités militaires, c'est renoncer à toute civilisation, c'est se mettre sur la même ligne que les Bédouins du désert.

Comment donc osez-vous demander une capitulation, vous qui avez violé celle de Baylen? Voilà comme l'injustice et la mauvaise foi tournent toujours au préjudice de ceux qui s'en s'en sont rendus coupables. J'avais une flotte à Cadix; elle était l'alliée de l'Espagne, et vous avez dirigé contre elle les mortiers de la ville où vous commandiez. J'avais une armée espagnole dans mes rangs : j'ai mieux aimé la voir passer sur les vaisseaux anglais, et être obligé de la précipiter du haut des rochers d'Espinosa, que de la désarmer; j'ai préféré avoir sept mille ennemis de plus à combattre, que de manquer à la bonne foi et à l'honneur. Retournez à Madrid. Je vous donne jusqu'à demain à six heures du matin. Revenez alors, si vous n'avez à me parler du peuple que pour m'apprendre qu'il s'est soumis. Sinon vous et vos troupes, vous serez tous passés par les armes. »

Le 4 à six heures du matin, le général Morla et le général don Fernando de la Vera, gouverneur de la ville, se présentèrent à la tente du prince major-général. Les discours de l'empereur, répétés au milieu des notables, la certitude qu'il commandait en personne; les pertes éprouvées pendant la journée précédente avaient porté le repentir et la douleur dans tous les esprits; pendant la nuit, les plus mutins s'étaient soustraits au danger par la fuite, et une partie des troupes s'était débandée.

A dix heures, le général Belliard prit le commandement de Madrid, tous les postes furent remis aux Français, et un pardon général fut proclamé.

A dater de ce moment, les hommes, les femmes, les enfans se répandirent dans les rues avec sécurité. Jusqu'à onze heures du soir les boutiques furent ouvertes. Tous les citoyens se mirent à détruire les barricades et à repaver les rues ; les moines rentrèrent dans leurs couvens, et en peu d'heures Madrid présenta le contraste le plus extraordinaire; contraste

inexplicable pour qui ne connaît pas les mœurs des grandes villes. Tant d'hommes qui ne pouvaient se dissimuler à euxmèmes ce qu'ils auraient fait dans pareille circonstance, s'étonnent de la générosité des Français. Cinquante mille armes ont été rendues, et cent pièces de canon sont remises au Retiro. Au reste les angoisses dans lesquelles les habitans de cette malheureuse ville ont vécu depuis quatre mois, ne peuvent se dépeindre. La junte était sans puissance; les hommes les plus ignorans et les plus forcénés exerçaient le pouvoir, et le peuple, à chaque instant, massacrait ou menaçait de la potence ses magistrats et ses généraux. Le général de brigade Maison a été blessé. Le général Bruyère, qui s'était avancé imprudemment dans le moment où l'on avait cessé le feu, a été tué. Douze soldats ont été tués, cinquante ont été blessés. Cette perte faible pour un événement aussi mémorable, est due au peu de troupes qu'on a engagées; on la doit aussi, il faut le dire, à l'extrême lâcheté de tout ce qui avait les armes à la main.

L'artillerie a,

vices.

à son ordinaire, rendu les plus grands ser

Dix mille fuyards échappés de Burgos et de Somo-Sierra, et la deuxième division de l'armée de réserve se trouvaient, le 3, à trois lieues de Madrid; mais chargés par un piquet de dragons, ils se sont sauvés en abandonnant quarante pièces de canon et soixante caissons.

Un trait mérite d'être cité :

Un vieux général retiré du service et âgé de quatre-vingts ans, était dans sa maison à Madrid, près de la rue d'Alcala. Un officier français s'y loge avec sa troupe. Ce respectable vieillard paraît devant cet officier, tenant une jeune fille par la main et dit: Je suis un vieux soldat, voilà ma fille : je lui donne neuf cent mille livres de dot; sauvez lui-l'honneur et soyez son époux. Le jeune officier prend le vieillard, sa fa

mille et sa maison sous sa protection. Qu'ils sont coupables ceux qui exposent tant de citoyens paisibles, tant d'infortų – nés habitans d'une grande capitale à tant de malheurs!

Le duc de Dantzick est arrivé le 3 à Ségovie. Le duc d'Istrie, avec quatre mille hommes de cavalerie, s'est mis à la poursuite de la division Pennas, qui s'étant échappée de la bataillė de Tudela, s'était dirigée sur Guadalaxara.

Florida Blanca et la junte s'étaient enfuis d'Aranjuez et s'étaient sauvés à Tolède; ils ne se sont pas crus en sûreté dans cette ville, et se sont réfugiés auprès des Anglais.

La conduite des Anglais est honteuse. Dès le 20, ils étaient à l'Escurial au nombre de six mille, ils y ont passé quelques jours. Ils ne prétendaient pas moins que franchir les Pyrénées et venir sur la Garonne. Leurs troupes sont superbes et bien disciplinées. La confiance qu'elles avaient inspirée aux Espagnols est inconcevable; les uns espéraient que cette division irait à Somo-Sierra, les autres qu'elle viendrait défendre la capitale d'un allié si cher; mais tous connaissaient mal les Anglais. A peine eut-on avis que l'empereur était à Somo-Sierra, que les troupes anglaises battirent en retraite sur l'Escurial, De là, combinant leur marche avec la division de Salamanque, elles se dirigèrent sur la mer. Des armes, de la poudre, des habits, ils nous en ont donné, disait un Espagnol; mais leurs soldats ne sont venus que pour nous exciter, nous égarer et nous abandonner au milien de la crise.

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- Mais, répondit un officier français, ignorez-vous donc les faits les plus récens de notre histoire? Qu'ont-ils donc fait pour le stathouder, pour la Sardaigne, pour l'Autriche ? Qu'ont-ils fait plus récemment encore pour la Suède? Ils fomentent partout la guerre, ils distribuent des armes comme du poison, mais ils ne versent leur sang que pour leurs intérêts directs et personnels. N'attendez pas autre chose de leur égoïsme. Cependant, répliqua l'Espagnol, leur cause

était la nôtre. Quarante mille Anglais ajoutés à nos forces à Tudela et à Espinosa pouvaient balancer les destins et sauver le Portugal. Mais à présent que notre armée de Blake à la gauche, que celle du centre, que celle d'Aragon à la droite sont détruites, que les Espagnes sont presque conquises, et que la raison va achever de les soumettre, que deviendra le Portugal? Ce n'est pas à Lisbonne que les Anglais devaient le défendre, c'est à Espinosa, à Burgos, à Tudela, à SomoSierra et devant Madrid.

er

Devant Madrid, le 3 décembre 1808.

· ́No. 1o. A Monsieur le commandant de la ville de Madrid.

Les circonstances de la guerre ayant conduit l'armée française aux portes de Madrid, et toutes les dispositions étant faites pour s'emparer de la ville de vive force, je crois convenable et conforme à l'usage de toutes les nations de vous sommer, monsieur le général, de ne pas exposer une ville aussi importante à toutes les horreurs d'un assaut, et rendre tant d'habitans paisibles victimes des maux de la guerre. Voulant ne rien épargner pour vous éclairer sur votre véritable situation, je vous envoie la présente sommation par l'un de vos officiers fait prisonnier et qui a été à portée de voir les moyens qu'a l'armée pour réduire la ville.

Recevez, monsieur le général, etc.

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ALEXANDRE.

No. 2. A S. A. S. le prince de Neufchâtel.

Monseigneur,

Avant de répondre catégoriquement à V. A., je ne puis me dispenser de consulter les autorités constituées de cette ville et de connaître les dispositions du peuple en lui donnant avis des circonstances présentes.

A ces fins, je supplie V. A. de m'accorder cette journée

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