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décida l'affaire ; charge brillante s'il en fut, où ce régiment s'est couvert de gloire et a montré qu'il était digne de faire partie de la garde impériale. Canons, drapeaux, fusils, soldats, tout fut enlevé, coupé ou pris. Huit chevau-légers polonais ont été tués sur les pièces, et seize ont été blessés. Parmi ces derniers, le capitaine Dzievanoski à été si grièvement blessé qu'il est presque sans espérance. Le major Ségur, 'maréchal-des-logis de la maison de l'empereur, chargeant parmi les Polonais, a reçu plusieurs blessures dont une assez grave. Les seize pièces de canon, dix drapeaux, une trentaine de caissons, deux cents charriots de toute espèce de bagage, les caisses des régimens, sont les fruits de cette brillante affaire. Parmi les prisonniers qui sont très-nombreux, se trouvent tous les colonels et les lieutenans-colonels des corps de la division espagnole. Tous les soldats auraient été pris, s'ils n'avaient pas jeté leurs armes et ne s'étaient éparpillés dans les montagnes.

Le premier décembre, le quartier-général de l'empereur était à Saint-Augustin, et le 2, le duc d'Istrie, avec la cavalerie, est venu couronner les hauteurs de Madrid. L'infan

terie ne pourra arriver que le 3. Les renseignemens qu'on a pris jusqu'à cette heure, portent à penser que la ville est livrée à toute espèce de désordre, et que les portes sont barricadées.

Le temps est très-beau.

Madrid, 5 décembre 1808.

Quatorzième bulletin de l'armée d'Espagne.

Le 3, à midi, S. M. arriva de sa personne sur les hauteurs qui couronnent Madrid, et où étaient placées les divisions de dragons des généraux Latour-Maubourg et Lahoussaie, et la garde impériale à cheval. L'anniversaire du couronnement,

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cette époque qui a signalé tant de jours à jamais heureux la France, réveilla dans tous les cœurs les plus doux souvenirs et inspira à toutes les troupes un enthousiasme qui se manifesta par mille acclamations. Le temps était superbe et semblable à celui dont on jouit en France dans les belles journées du mois de mai.

Le maréchal duc d'Istrie envoya sommer la ville, où s'était formé une junte militaire, sous la présidence du général Castellar, qui avait sous ses ordres le général Morla, capitainegénéral de l'Andalousie et inspecteur-général de l'artillerie. La ville renfermait un grand nombre de paysans armés qui s'y étaient rendus de tous côtés, six mille hommes de troupes de ligne et cent pièces de canon. Depuis huit jours on barricadait les rues et les portes de la ville; soixante mille hommes étaient en armes; des cris se faisaient entendre de toutes parts; les cloches de deux cents églises sonnaient à la fois et tout présentait l'image du désorde et du délire.

Un général de troupes de ligne parut aux avant-postes pour répondre à la sommation du duc d'Istrie; il était accompagné et surveillé par trente hommes du peuple dont le costume, les regards et le farouche langage, rappelaient les assassins de septembre. Lorsqu'on demandait au général espagnol s'il voulait exposer des femmes, des enfans, des vieillards aux horreurs d'un assaut, il manifestait à la dérobée la douleur dont il était pénétré; il faisait connaître par des signes qu'il gémissait sous l'oppression ainsi que tous les honnêtes gens de Madrid, et lorsqu'il élevait la voix, ses paroles étaient dictées par les misérables qui le surveillaient. On ne put avoir aucun doute de l'excès auquel était portée la tyrannie de là multitude, lorsqu'on le vit dresser procèsverbal de ses propres discours, et les faire attester par la signature des spadassins qui l'environnaient.

L'aide-de-camp du duc d'Istrie, qui avait été envoyé dans

la ville, saisi par des hommes de la dernière classe du peuple, allait être massacré, lorsque les troupes de ligne indignées le prirent sous leur sauve-garde et le firent remettre à son général,

Ungarçon boucher de l'Estramadure, qui commandait une des portes, osa demander que le duc d'Istrie vint lui-même dans la ville les yeux bandés ; le général Montbrun repoussa cette audace avec indignation; il fut aussitôt entouré, et il n'échappa qu'en tirant son sabre. Il faillit être victime de l'imprudence avec laquelle il avait oublié qu'il n'avait point affaire avec des ennemis civilisés.

Peu de temps après des déserteurs des gardes wallonnes se rendirent au camp. Leurs dépositions donnèrent la conviction que les propriétaires, les honnêtes gens étaient sans influence, et l'ou dut croire que toute conciliation était impossible.

La veille, le marquis de Perales, homme respectable qui avait paru jouir jusqu'alors de la confiance du peuple, fut accusé d'avoir fait mettre du sable dans les cartouches. Il fut aussitôt étranglé, et ses membres déchirés furent envoyés comme des trophées dans les quartiers de la ville. On arrêta que toutes les cartouches seraient refaites, et trois ou quatre mille moines furent conduits au Retiro et employés à ce travail. Il avait été ordonné que tous les palais, toutes les maisons seraient constamment ouvertes aux paysans des environs, qui devaient y trouver de la soupe et des alimens à discrétion.

L'infanterie française était encore à trois lieues de Madrid. L'empereur employa la soirée à reconnaître la ville et à arrêter un plan d'attaque qui se conciliait avec les ménagemens que méritent le grand nombre d'hommes honnêtes qui se trouvent toujours dans une grande capitale.

Prendre Madrid d'assaut pouvait être une opération militaire de peu de difficulté ; mais amener cette grande ville se soumettre en employant tour à tour la force et la persua

sión et en arrachant les propriétaires et les véritables hommes de bien à l'oppression sous laquelle ils gémissaient, c'est là ce qui était difficile. Tous les efforts de l'empereur dans ces deux journées n'eurent pas d'autre but; ils ont été couronnés du plus grand succès.

A sept heures, la division Lapisse, du corps du maréchal duc de Bellune, arriva. La lune donnait une clarté qui semblait prolonger celle du jour. L'empereur ordonna au général de brigade Maison de s'emparer des faubourgs, et chargea le général de division Lauriston de protéger cette occupation par le feu de quatre pièces d'artillerie de la garde. Les voltigeurs du seizième s'emparèrent des maisons et notamment d'un grand cimetière. Au premier feu l'ennemi montra autant de lâcheté qu'il avait montré d'arrogance pendant toute la journée. Le duc de Bellune employa toute la nuit à placer son artillerie dans les lieux désignés pour l'attaque.

A minuit, le prince de Neufchâtel envoya à Madrid un lieutenant-colonel d'artillerie espagnole qui avait été pris à Somo-Sierra et qui voyait avec effroi la folle obstination de ses concitoyens. Il se chargea de la lettre ci-jointe (no. r ),

Le 3, à neuf heures du matin, le même parlementaire re-, vint au quartier-général avec la lettre ci-jointe ( no. 2 ).

Mais déjà le général de brigade d'artillerie Sénarmont, officier d'un grand mérite, avait placé ses trente pièces d'artillerie et avait commencé un feu très-vif qui avait fait brèche aux murs du Retiro. Des voltigeurs de la division Villatte ayant passé la brèche, leur bataillon les suivit, et en moins d'une heure, quatre mille hommes qui défendaient le Retiro furent culbutés. Le palais du Retiro, les postes importans de l'observatoire, de la manufacture de porcelaine, de la grande caserne et de l'hôtel de Medina-Celi et tous les débouchés qui avaient été mis en défense furent emportés par nos troupes. D'un autre côté, vingt pièces de canon de la garde jetaient

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des obus et attiraient l'attention de l'ennemi sur une fausse

attaque.

On se serait peint difficilement le désordre qui réguait dans Madrid, si un grand nombre de prisonniers arrivant successivement n'avaient rendu compte des scènes épouvantables et de tout genre dont cette capitale offrait le spectacle. On avait coupé les rues, crénelé les maisons ; des barricades de balles de coton et de laine avaient été formées; les fenêtres étaient matelassées; ceux des habitans qui désespéraient du succès d'une aveugle résistance, fuyaient dans les campagnes ; d'autres qui avaient conservé quelque raison, et qui aimaient mieux se montrer au sein de leurs propriétés devant un ennemi généreux, que de les abandonner au pillage de leurs propres concitoyens, demandaient qu'on ne s'exposât point à un assau. Ceux qui étaient étrangers à la ville ou qui n'avaient rien à perdre, voulaient qu'on se défendît à toute outrance, accusaient les troupes de ligne de trahison et les obligeaient à continuer le feu.

L'ennemi avait plus de cent pièces de canon en batterie; un nombre plus considérable de pièces de 2 et de 3 avaient été déterrées, tirées des caves et ficelées sur des charrettes; équipage grotesque qui seul aurait prouvé le délire d'un peuple abandonné à lui-même. Mais tous moyens de défense étaient devenus inutiles étant maître du Retiro, on l'est de Madrid. L'empereur mit tous ses soins à empêcher qu'on entrât de maison en maison. C'en était fait de la ville si beaucoup de troupes avaient été employées. On ne laissa avancer que quelques compagnies de voltigeurs que l'empereur se refusa toujours à faire soutenir.

A onze heures, le prince de Neufchâtel écrivit la lettre cijointe no. 3; S. M. ordonna aussitôt que le feu cessât sur tous les points.

A cinq heures, le maréchal Morla, l'un des membres de

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