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L'empereur passa la journée du 11 sur le champ de bataille; il y plaça les corps d'armée et les divisions pour donner une bataille qui fût décisive, et telle qu'elle pût mettre fin à la guerre. Toute l'armée russe était réunie; elle avait à Heilsberg tous ses magasins; elle occupait une superbe position que la nature avait rendue très-forte, et que l'ennemi avait encore fortifiée par un travail de quatre mois.

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A quatre heures après-midi, l'empereur ordonna au maréchal Davoust de faire un changement de front par son extrémité de droite, la gauche en avant; ce mouvement le porta sur la basse Alle, et intercepta complétement le chemin d'Eylau. Chaque corps d'armée avait ses postes assignés; ils étaient tous réunis, hormis le premier corps, qui continuait à manœuvrer sur la basse Passarge. Ainsi les Russes, qui avaient les premiers recommencé les hostilités, se trouvaient comme bloqués dans leur camp retranché; on venait leur présenter la bataille dans la position qu'ils avaient eux-mêmes choisie.

On crut long-temps qu'ils attaqueraient dans la journée

du II.

Au moment où l'armée française faisait ses dispositions, ils se laissaient voir rangés en colonnes au milieu de leurs retranchemens, farcis de canons.

Mais soit que ces retranchemens ne leur parussent pas assez formidables, à l'aspect des préparatifs qu'ils voyaient faire devant eux, soit que cette impétuosité qu'avait montrée l'armée française dans la journée du ro leur en imposât, ils commencèrent, à dix heures du soir, à passer sur la rive droite de l'Alle, en abandonnant tous les pays de la gauche, et laissant à la disposition du vainqueur leurs blessés, leurs magasins et ces retranchemens, fruit d'un travail si long et si pénible.

Le 12, à la pointe du jour, tous les corps d'armée s'ébranlèrent, et prirent différentes directions.

Les maisons d'Heilsberg et celles des villages voisins sont remplies de blessés russes.

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Le résultat de ces différentes journées, depuis le 5 jusqu'au 12 a été de priver l'armée russe d'environ trente mille combattans; elle a laissé dans nos mains trois ou quatre mille hommes, sept ou huit drapeaux et neuf pièces de canon. Au dire des paysans et des prisonniers, plusieurs des généraux russes les plus marquans ont été tués ou blessés.

Notre perte monte à six ou sept cents hommes tués, deux mille ou deux mille deux cents blessés, deux ou trois cents prisonniers. Le général de division Espagne a été blessé ; le général Roussel, chef de l'état-major de la garde, qui se trouvait au milieu des fusiliers, a eu la tête emportée par un boulet de canon; c'était un officier très-distingué.

Le grand-duc de Berg a eu deux chevaux tués sous lui. M. de Ségur, un de ses aides-de-camp, a eu un bras emporté. M. Lameth, aide-de-camp du maréchal Soult, a été blessé. M. Lagrange, colonel du septième régiment de chasseurs à cheval, a été atteint par une balle.

Dans les rapports détaillés que rédigera l'état-major, on fera connaître les traits de bravoure par lesquels se sont signalés un grand nombre d'officiers et de soldats, et les noms de ceux qui ont été blessés dans la mémorable journée du 10 juin.

On a trouvé dans les magasins d'Heilsberg plusieurs milliers de quintaux de farine et beaucoup de denrées de diverses sortes. I'impuissance de l'armée russe, démontrée par la prise de Dantzick, vient de l'être encore par l'évacuation du camp de Heilsberg; elle l'est par sa retraite; elle le sera d'une manière plus éclatante encore si les Russes attendent l'armée française; mais dans de si grandes armées, qui exi

gent vingt-quatre heures pour mettre tous les corps en position, on ne peut avoir que des affaires partielles, lorsque l'une d'elles n'est pas disposée à finir bravement la querelle dans une affaire générale.

Il paraît que l'empereur Alexandre avait quitté son armée quelques jours avant la reprise des hostilités. Plusieurs personnes prétendent que le parti anglais l'a éloigné, pour qu'il ne fût pas témoin des malheurs qu'entraîne la guerre et des désastres de son armée, prévus par ceux mêmes qui l'ont excité a rentrer en campagne. On a craint qu'un si déplorable spectacle ne lui rappelât les véritables intérêts de son pays, ne le fit revenir aux conseils des hommes sages et désintéressés, et ne le ramenât enfin, par les sentimens les plus propres à toucher un souverain, à repouseer la funeste influence que la corruption anglaise exerce autour de lùi.

De notre camp impérial de Friedland, le 15 juin 1807.

Lettre de S. M. l'empereur et roi à MM. les archevêques et évéques.

Monsieur l'évêque de...... La victoire éclatante qui vient d'être remportée par nos armes sur le champ de bataille de Friedland, qui a confondu les ennemis de notre peuple, et qui a mis en notre pouvoir la ville importante de Koenigsberg et les magasins considérables qu'elle contenait, doit être pour nos sujets un nouveau motif d'actions de grâce envers le dieu des armées. Cette victoire mémorable a signalé l'anniversaire de la bataille de Marengo, de ce jour, où tout couvert de poussière du champ de bataille, notre première pensée, notre premier soin fut pour le rétablissement de l'ordre et de la paix dans l'église de France. Notre intention est qu'au reçu de la présente vous vous concertiez avec qui de droit, et vous réunissiez nos sujets de votre diocèse dans vos églises

cathédrales et paroissiales, pour y chanter un Te Deum, et adresser au ciel les autres prières que vous jugerez convenable d'ordonner dans de pareilles circonstances. Cette lettre n'étant à d'autre fin, monsieur l'évêque de......., je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte garde. NAPOLÉON.

Weblau, le 17 juin 1807.

Soixante-dix-neuvième bulletin de la grande armée.

Les combats de Spanden, de Lomitten, les journées de Guttstadt et de Heilsberg n'étaient que le prélude de plus grands événemens.

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Le 12, à quatre heures du matin, l'armée française entra à Heilsberg. Le général Latour-Maubourg avec sa division de dragons et les brigades de cavalerie légère des généraux Durosnel et Wattier, poursuivirent l'ennemi sur la rive droite de l'Alle dans la direction de Bartenstein, pendant que les corps d'armée se mettaient en marche dans différentes directions pour déborder l'ennemi et lui couper sa retraite sur Koenigsberg, en arrivant avant lui sur ses magasins. La fortune a souri à ce projet.

Le 12, à cinq heures après-midi, l'empereur porta son quartier-général à Eylau. Ce n'étaient plus ces champs couverts de glaces et de neige, c'étaît le plus beau pays de la nature, coupé de beaux bois, de beaux lacs, et peuplé de jolis villages.

Le grand-duc de Berg se porta le 13 sur Koenigsberg avec sa cavalerie; le maréchal Davoust marcha derrière pour le soutenir; le maréchal Soult se porta sur Creutzbourg; le maréchal Lannes sur Domnau; les maréchaux Ney et Mortier sur Lampasch.

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Cependant le général Latour-Maubourg écrivait qu'il avait poursuivi l'arrière-garde ennemie; que les Russes abandon

naient beaucoup de blessés; qu'ils avaient évacué Barstenstein, et continuaient leur retraite sur Schippenbeil, par la rive droite de l'Alle. L'empereur se mit sur-le-champ en marche sur Friedland; il donna ordre au duc de Berg, aux maréchaux Soult et Davoust de manœuvrer sur Konigsberg, et avec les corps des maréchaux Ney, Lannes, Mortier, avec la garde impériale et le premier corps commandé par le général Victor, il marcha en personne sur Friedland.

Le 13, le neuvième de hussards entra à Friedland ; mais il en fut chassé par trois mille hommes de cavalerie.

Le 14, l'ennemi déboucha sur le pont de Friedland. A trois heures du matin, des coups de canon se firent entendre, « C'est un jour de bonheur, dit l'empereur, c'est l'anniversaire de Marengo. »>

Les maréchaux Lannes et Mortier furent les premiers engagés; ils étaient soutenus par la division de dragons du général Grouchy et par les cuirassiers du général Nansouty. Différens mouvemens, différentes actions eurent lieu. L'ennemi fut contenu, et ne put pas dépasser le village de Posthenem. Croyant qu'il n'avait devant lui qu'un corps de quinze mille hommes, l'ennemi continua son mouvement pour filer sur Koenigsberg. Dans cette occasion, les dragons et les cuirassiers français et saxons firent les plus belles charges, et prirent quatre pièces de canon à l'ennemi.

A cinq heures du soir, les différens corps d'armée étaient à leur place. A la droite, le maréchal Ney; au centre, le maréchal Lannes ; à la gauche, le maréchal Mortier; à la réserve, le corps du général Victor et la garde.

La cavalerie, sous les ordres du général Grouchy, soutenait la gauche. La division de dragons du général LatourMaubourg était en réserve derrière la droite, la division de dragons du général Lahoussaye et les cuirassiers saxons étaient en réserve derrière le centre.

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