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Je croyais qu'ils ne se reproduiraient jamais, mais assu rément je m'attendais encore moins à revoir le siècle d'Alexandre.

Ma vieillesse m'a attiré les bienfaits de tous les souverains qui ont été ici, et je réclame ceux du grand Napoléon, étant à mon âge plus que séculaire, hors d'état de travailler.

Vivez, sire, aussi long-temps que moi; votre gloire n'en a pas besoin, mais le bonheur du genre humain le demande.

Signé NAROCKI.

Varsovie, le 29 janvier 1807.

Cinquante-cinquième bulletin de la grande armée.

Voici les détails du combat de Mohringen :

Le maréchal prince de Ponte-Corvo arriva à Mohringen avec la division Drouet, le 25 de ce mois, à onze heures du matin, au moment où le général de brigade Pactod étoit attaqué par l'ennemi.

Le maréchal prince de Ponte-Corvo fit attaquer sur-lechamp le village de Pfarresfeldehen par un bataillon du neuvième d'infanterie légère. Ce village était défendu par trois bataillons russes, que l'ennemi fit soutenir par trois autres bataillons. Le prince de Ponte-Corvo fit aussi marcher deux autres bataillons pour appuyer celui du neuvième. La mêlée fut très-vive. L'aigle du neuvième régiment d'infanterie légère fut enlevée par l'ennemi; mais à l'aspect de cet affront, dont ce brave régiment allait être couvert pour toujours, et que ni la victoire, ni la gloire acquise dans cent combats n'auraient lavé, les soldats, animés d'une ardeur inconcevable, se précipitent sur l'ennemi, le mettent en déroute et ressaisissent leur aigle.

Cependant la ligne française, composée du huitième de ligne, du vingt-septième d'infanterie légère, et du quatre

vingt-quatorzième, était formée. Elle aborde la ligne russe, qui avait pris position sur un rideau. La fusillade devient vive et à bout portant.

A l'instant même le général Dupont débouchait de la route d'Holland avec les trente-deuxième et quatre-vingt-seizième régimens, il tourna la droite de l'ennemi. Un bataillon du trente deuxième régiment se précipita sur les Russes avec l'impétuosité ordinaire à ce corps; il les mit en désordre et leur tua beaucoup de monde. Il ne fit de prisonniers que les hommes qui étaient dans les maisons. L'ennemi a été poursuivi pendant deux lieues. La nuit a empêché de continuer la poursuite. Les comtes Pahlen et Gallitzin commandaient les Russes. Ils ont perdu trois cents hommes faits prisonniers, mille deux cents hommes laissés sur le champ de bataille, et plusieurs ohusiers. Nous avons eu cent hommes tués et quatre cents blessés.

Le général de brigade Laplanche s'est fait distinguer. Le dix-neuvième de dragons a fait une belle chargé sur l'infanterie russe. Ce qui est à remarquer, ce n'est pas seulement la bonne conduite des soldats et l'habileté des généraux, mais la rapidité avec laquelle les corps ont levé leurs cantonnemens, et fait une marche tres- forte pour toutes autres troupes, sans qu'il manquât un seul homme sur le champ de bataille; voilà ce qui distingue éminemment des soldats qui ne sont mus que par l'honneur.

Un Tartare vient d'arriver de Constantinople, d'où il est parti le 1er janvier. Il est expédié à Londres par la Porte.

Le 30 décembre la guerre contre la Russie avait été solennellement proclamée. La pelisse et l'épée avaient été envoyées au grand-visir. Vingt-huit régimens de janissaires étaient partis de Constantinople. Plusieurs autres passaient d'Asie en Europe.

L'ambassadeur de Russie, toutes les personnes de sa léga

tion, tous les Russes qui se trouvaient dans cette résidence et tous les Grecs attachés à leur parti, au nombre de sept à huit cents, avaient quitté Constantinople le 29.

Le ministre d'Angleterre et les deux vaisseaux anglais restaient spectateurs des événemens, et paraissaient attendre les ordres du gouvernement.

Le Tartare était passé à Widdin le 15 janvier. Il avait trouvé les routes couvertes de troupes qui marchaient avec gaîté contre leur éternel ennemi. Soixante mille hommes étaient déjà à Rodschuk, et vingt-cinq mille hommes d'avant-garde se trouvaient entre cette ville et Bucharest. Les Russes s'étaient arrêtés à Bucharest, qu'ils avaient fait occuper par une avant-garde de quinze mille hommes.

Le prince Suzzo a été déclaré hospodar de Valachie. Le prince Ipsilanti a été proclamé traître, et l'on a mis sa tête à prix.

Le Tartare a rencontré l'ambassadeur persan à moitié chemin de Constantinople à Widdin, et l'ambassadeur extraordinaire de la Porte, au-delà de cette dernière ville.

Les victoires de Pultusk et Golymiu étaient déjà connues dans l'empire ottoman. Le courrier tartare en a entendu le récit de la bouche des Turcs avant d'arriver à Widdin.

Le froid se soutient entre deux et trois degrés au-dessous de zéro. C'est le temps le plus favorable pour l'armée.

De notre camp impérial de Varsovie, le 29 janvier 180g. Message au sénat conservateur.

« Sénateurs,

Nous avons ordonné à notre ministre des relations extérieures de vous communiquer les traités que nous avons faits avec le roi de Saxe et avec les différens princes souverains de cette maison.

« La nation saxonné avait perdu son indépendance le 14 octobre 1755; elle l'a recouvrée le 14 octobre 1806. Après cinquante années, la Saxe, garantie par le traité de Posen, a cessé d'être province prussienne.

« Le duc de Saxe-Weimar, sans déclaration préalable, a embrassé la cause de nos ennemis. Son sort devait servir de règle aux petits princés qui, sans être liés par des lois fondamentales, se mêlent des querelles des grandes nations; mais nous avons cédé au désir de voir notre réconciliation avec la maison de Saxe entière et sans mélange.

<< Le prince de Saxe-Cobourg est mort. Son fils se trouvant dans le camp de nos ennemis, nous avons fait mettre le séquestre sur sa principauté.

« Nous avons aussi ordonné que le rapport de notre ministre des relations extérieures, sur les dangers de la PorteOttomane, fût mis sous vos yeux. Témoin, dès les premiers temps de notre jeunesse, de tous les maux que produit la guerre, notre bonheur, notre gloire, notre ambition, nous les avons placés dans les conquêtes et les travaux de la paix. Mais la force des circonstances dans lesquelles nous nous trouvons mérite notre principale sollicitude. Il a fallu quinze ans de victoires pour donner à la France des équivalens de ce partage de la Pologne, qu'une seule campagne, faite en 1778, aurait empêché.

« Eh! qui pourrait calculer la durée des guerres, le nombre de campagnes qu'il faudrait faire un jour pour réparer des malheurs qui résulteraient de la perte de l'empire de Constantinople, si l'amour d'un lâche repos et des délices de la grande ville l'emportait sur les conseils d'une sage prévoyance? Nous laisserions à nos neveux un long héritage de guerres et de malheurs. La tiare grecque relevée et triomphante, depuis la Baltique jusqu'à la Méditerranée, on verrait de nos jours nos provinces attaquées par une nuée de

fanatiques et de barbares ; et si dans cette lutte trop tardive, l'Europe civilisée venait à périr, notre coupable indifférence exciterait justement les plaintes de la postérité, et serait un titre d'opprobre dans l'histoire.

« L'empereur de Perse, tourmenté dans l'intérieur de ses états comme le fut pendant soixante ans la Pologne, comme l'est depuis vingt ans la Turquie par la politique du cabinet de Pétersbourg, et animé des mêmes sentimens que la Porte, a pris les mêmes résolutions, et marche en personne sur le Caucase pour défendre ses frontières.

« Mais déjà l'ambition de nos ennemis a été confondue, leur armée a été défaite à Pultusk et à Golymin, et leurs bataillons épouvantés fuient au loin à l'aspect de nos aigles.

«Dans de pareilles positions, la paix, pour être sûre pour nous, doit garantir l'indépendance entière de ces deux empires. Et si, par l'injustice et l'ambition démesurée de nos ennemis, la guerre doit se continuer encore, nos peuples se montreront constamment dignes, par leur énergie, par leur amour pour notre personne, des hautes destinées qui couronneront tous nos travaux; et alors seulement une paix stable et longue fera succéder pour nos peuples, à ces jours de gloire, des jours heureux et paisibles. NAPOLÉON.

Arensdorf, le 5 février 1807.

Cinquante-sixième bulletin de la grande armée.

Après le combat de Mohringen, où elle avait été battue et mise en déroute, l'avant-garde de l'armée russe se retira sur Liebstadt. Mais le surlendemain, 27 janvier, plusieurs divisions russes la joignirent, et toutes étaient en marche pour porter le théâtre de la guerre sur le bas de la Vistule.

Le corps du général Essen, accouru du fond de la Moldavie, où il était d'abord destiné à servir contre les Turcs, et

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