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Quelque pressante qu'elle fût, cette recommandation ne produisit aucun effet. L'homme du moment, la créature de Pache, Custine ne put, malgré ses instances, triompher des préventions que Lecointre et ses amis avaient répandues dans les bureaux. Ce ne fut que l'année suivante, et sur la réquisition du comité de salut public, que Berthier fut remis en activité. Il fut envoyé à l'armée de l'Ouest, essaya d'introduire quelque ordre, quelque organisation parmi les troupes dont elle se composait, et encourut par ses efforts la disgrâce de Ronsin. Cet homme, qui félicitait son ami Vincent d'avoir fait périr Custine, s'applaudissait d'avoir contribué à la chute de Biron. Il voulait achever sur Beauharnais, sur tous les nobles, une proscription salutaire, et chargeant méchamment Berthier de tous les crimes qui conduisaient alors à l'échafaud, il le rangeait, pour dernier trait, dans cette périlleuse catégorie.

L'armée postée sur les hauteurs de Vihier, n'avait pas attendu le choc de l'ennemi. Elle s'était mise en déroute en menaçant ses chefs; elle avait refusé de prendre position à Doué, avait marché sur Saumur, et s'était portée à tout ce que le pillage, l'indiscipline, ont de plus odieux.

Les représentans, alarmés d'une démoralisation semblable, chargèrent une députation de se rendre auprès du comité de salut public, de lui faire connaître le véritable état des choses, et de demander qu'on leur envoyât, non des désorganisateurs ramassés dans les rues de Paris, mais des soldats rompus à la guerre et à ses fatigues. Berthier, qui en faisait partie, rédigea un mémoire où, exposant sans détour les causes des revers qui signalaient les guerres de l'Ouest, il se plaignit de la composition des troupes, de l'ignorance, de l'insubordination qu'elles présentaient, et ne ménagea pas davantage le système qui présidait à cette lutte d'extermination. Le courage avec lequel il avait abordé la question lui attira des représailles d'autant plus vives. On ne l'accusa pas d'avoir exagéré, d'avoir dit faux, on eut recours à une imputation plus grave. On répandit qu'il était noble, allié de l'intendant de Paris, parent du secrétaire du Roi, qu'il avait, en un mot, pris part à tous les complots que la cour avait ourdis contre le peuple. Cette manœuvre réussit, Berthier perdit ses lettres de service, et fut sur le point de succomber sous les griefs qu'on lui imputait. Il ne se déconcerta pas

néanmoins; il n'est jamais sûr de fléchir, il l'est souvent de faire tête à l'orage. Ce fut le parti auquel il s'arrêta: Il rédigea une espèce de réponse aux principaux chefs d'accusation, où forcé d'emprunter le langage de l'époque: « J'ai été, dit-il, employé à l'armée de la Vendée, en conséquence d'un arrêté du comité de salut public; j'ai fait mon devoir.

<< On m'inculpe sur mon nom; je ne suis l'allié ni le parent de Berthier, intendant de Paris, ni de Berthier secrétaire du Roi.

« On dit que j'étais au château des Tuileries, le 10 août.

« On en a menti; j'étais à Fontoy, près Thionville, et j'ai des certificats de bravoure, de capacité, et d'un civisme de républicain dont je me fais gloire, car je méprise la calomnie; mon cœur est mon garant, et il est pur.

« Les représentans du peuple près l'armée de la Vendée, les commissaires du pouvoir exécutif, ont tous donné des preuves authentiques de la conduite républicaine que j'ai tenue à l'armée.

«Eh bien, citoyens ! c'est au moment où j'ai mérité la confiance de vos représentans, celle de l'armée, des commissaires du conseil exécutif; c'est au moment où j'ai acquis les con

naissances utiles à la guerre de la Vendée que l'on m'empêche de rejoindre l'armée.

« Je demande à être accusé et jugé, ou libre et sous la protection de la loi. Je dois retourner à mon poste ou à tel autre que l'on jugera plus utile. »

moro,

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La réclamation fut inutile et ne put le rendre à des fonctions dont le repoussait Ronsin; mais elle eut du moins cet avantage qu'elle imposa silence à ses ennemis et fit cesser la persécution. Les démagogues disparurent peu à peu. Robespierre succomba; Ronsin, MoVincent, ne tardèrent pas à le suivre; les hommes modérés purent de nouveau prendre part aux affaires dont ils les avaient exclus. Berthier, qu'ils avaient si cruellement persécuté, fut nommé général de division le 13 juin 1795, et chef d'état-major des armées des Alpes et d'Italie. Il fit, en cette qualité, la campagne de l'an III, où Kellermann, aux prises avec tous les besoins, tous les dangers, triompha cependant avec une poignée de braves, et sauva la France d'une invasion. Berthier partagea ses sollicitudes, coopéra à ses travaux, dirigea ses reconnaissances, choisit, discuta ses lignes, prit en un mot, à la plus belle

défense qu'on ait peut-être jamais faite, toute la part qu'un homme d'un coup d'œil aussi rapide et d'un patriotisme aussi sûr pouvait y prendre. Aussi Kellermann se plut-il souvent à payer à son chef d'état-major le tribut d'éloges que méritaient son habileté, sa bravoure. Il aimait surtout à rappeler l'héroïsme dont il avait fait preuve à la prise du Petit-Gibraltar. Mais une carrière plus vaste allait s'ouvrir, des succès plus éclatans devaient couronner nos armes, et entourer Berthier d'un lustre que ne pouvaient donner des rencontres de postes, une une guerre de montagnes.

Chargé près du général Bonaparte des fonctions qu'il remplissait sous Kellermann, il franchit les Alpes avec son nouveau chef, prépara, disposa la victoire, et vit bientôt l'Italie, devant laquelle nous nous consumions depuis quatre ans, céder à ses efforts. Il se distingua par l'activité, la vigilance qu'il déploya à Montenotte, fit preuve d'audace à Mondovi,

et accourant de Fombio à la nouvelle du désordre que la mort du général Laharpe avait répandu parmi ses troupes, il forme, rassure la division, marche aux Autrichiens, les culbute, et entre avec eux dans Casal.

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