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CHAPITRE V.

PREMIER SÉJOUR A DRESDE.

Au premier mot de l'aide de camp Montesquiou, le roi de Saxe a donné une satisfaction entière; tout s'est arrangé, et l'empereur est resté convaincu que ce prince, tourmenté un instant par les prétentions de l'Autriche, n'en est pas moins le plus fidèle de nos alliés 1.

Le 12, le roi de Saxe rentre dans ses états, après avoir erré plus de deux mois de Dresde à Plauen, de Plauen à Ratisbonne, de Ratisbonne à Lintz et de Lintz à Prague. C'est dans ce dernier asile qu'il a reçu le courrier parti des champs de Lutzen, et, dès qu'il a su que Dresde était évacué par l'ennemi, il s'est mis en route pour y revenir.

1 Le général Thielman, gouverneur de Torgau, apprenant que le roi persiste dans l'alliance de la France, se décide à passer au service de la Russie. Cette démarche laisse dans l'armée saxonne des germes de défection que les temps difficiles ne manqueront pas de développer.

L'empereur goûte avec une vive émotion le plaisir de ramener ce digne allié triomphant dans sa capitale, et c'est vraiment en ce jour qu'il cueille le laurier de Lutzen. Il a envoyé audevant du roi de Saxe son aide de camp, le général Flahaut; lui-même se porte à sa rencontre, et toute la garde impériale est en haie, qui présente les armes depuis Pyrna Jusqu'à Dresde. Les Saxons, heureux de revoir leur roi, semblent oublier tous leurs maux, comme nous, nous oublions leurs torts 1.

Le roi de Saxe rapporte de la Bohême des inquiétudes sérieuses sur les dispositions du

I

L'empereur s'étudia à témoigner au roi de Saxe les attentions les plus recherchées qu'il eût jamais montrées à un allié. Les preuves antérieures d'estime qu'il avait données au roi pendant son séjour à Paris, et depuis dans beaucoup de circonstances, ne contribuaient pas peu à imprimer un caractère de franchise à leurs relations amicales.... L'empereur s'empressait de faire savoir au roi tout ce qui pouvait lui être agréable et le consoler. Si l'armée faisait les plus petits progrès, le roi de Saxe en était aussitôt instruit. Napoléon, dans toutes ses allées et venues pendant le cours de la campagne, ne manqua jamais de voir lui-même avant tout, ou de faire saluer le roi de sa part. A cette amabilité que l'empereur savait, quand il le voulait, déployer de la manière la plus séduisante, se joignait, etc. (Voir l'ouvrage du major saxon d'Odeleben, témoin oculaire, tom. 1er., pag. 80.)

cabinet autrichien. C'est le sujet de ses premiers entretiens. Il ne fait que confirmer les nouvelles que l'empereur a reçues de son côté de Paris et de Vienne 1.

A Paris, le prince Schwartzenberg, engagé dans de longues conférences avec le duc de Bassano, s'est laissé pénétrer sur des points trèsdélicats de l'alliance 2.

D'un autre côté, les renseignemens que l'on trouve à Dresde ne devraient plus laisser aucun doute.

La police de l'armée vient d'intercepter des lettres que l'envoyé russe Stakelberg écrit de

Le succès de Lutzen, ramenant le roi de Saxe à Dresde, mit Napoléon en possession des signatures hostiles de l'Autriche. (Mémorial de Sainte-Hélène, par le comte de Las-Cases, tom. v, pag. 309.)

2 Dans une de ces conférences, le duc de Bassano, saisissant le moment où le prince de Schwartzenberg s'échauf fait sur la question politique, lui opposa brusquement les liens de famille, que tous deux, négociateurs du mariage, avaient réussi à former entre les deux états : « Ah! le mariage! (s'écria le prince), le mariage! la politique l'a fait! mais..... L'empereur a ignoré long-temps ce propos; il est probable que s'il en eût été informé, sa confiance, si long-temps inébranlable dans son beau-père, s'en serait vivement ressentie, et dès lors toute négociation ultérieure avec l'Autriche serait devenue impossible.

Vienne à sa cour. On y voit dans quels termes obligeans et empressés le cabinet de Vienne se trouve avec les ministres de nos ennemis 1.

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« L'Autriche se démasque encore dans toutes >> ses relations avec nos alliés. Elle se montre au » Danemarck, à la Saxe, à la Bavière, au Wur»temberg, et même à Naples et à la Westpha>> lie, comme une amie de la France qui ne veut » rien que la paix, qui ne désire rien pour elle» même. Mais elle les engage à ne pas faire d'ar» memens inutiles; à ne pas s'épuiser pour donner » à la France des secours qui ne feraient que >> rendre l'empereur moins traitable, et qui » d'ailleurs seraient sans objet, puisque l'Autri>>> che a cent cinquante mille hommes à mettre » dans la balance contre celui des deux partis qui voudrait continuer la guerre 2. »

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En même temps elle concerte avec les Russes et les Prussiens la retraite de son armée sur la Gallicie, et le renvoi de l'armée polonaise. Par

Avant la victoire de Lutzen, l'empereur d'Autriche avait déjà pris des engagemens secrets avec les alliés et était à la veille de se déclarer. Aussi Napoléon s'empressa-t-il d'envoyer Eugène en Italie pour y réorganiser une armée. Avant la campagne, l'Autriche avait entamé des négociations avec tous les états de la confédération. (Guicciardi, pag. 129 et 131.)

2

1 Rapport de M. le duc de Bassano, du 20 août 1815,

cette double disposition, elle rassure les alliés sur leur flanc gauche et sur leurs derrières, et leur rend cinquante mille hommes disponibles pour soutenir les opérations offensives sur l'Elbe1.

Tels sont les services que l'Autriche est occupée à nous rendre.... Cependant les événemens de Lutzen sont survenus; ils peuvent avoir apporté quelque nouvelle incertitude dans les dispositions du cabinet de Vienne. Des éclaircissemens à cet égard ne se font pas long-temps attendre. A la nouvelle de notre victoire, l'Autriche a éprouvé une surprise extrême; sa première pensée a été de revenir sur ses pas; sa seconde a été la crainte qu'on ne s'arrangeât sans elle sur l'affût d'un canon; et aussitôt le cabinet de Vienne s'est décidé à envoyer M. de Bubna auprès de l'empereur Napoléon, et M. de Stadion auprès des alliés.

Le 16 au soir, M. de Bubna arrive à Dresde, L'audience qu'il obtient aussitôt de l'empereur se prolonge jusqu'à deux heures après minuit, et le lendemain il continue sa conférence avec le duc de Vicence, qui est chargé de l'entretenir en l'absence du duc de Bassano.

La convention secrète de Kalitch est du 29 mars 1813. Voir la convention du 8 avril, qui en est la suite, entre l'Autriche et le roi de Saxe, aux Pièces historiques placées après la deuxième partie.

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