Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

mais que nous pouvons hardiment traduire par Marhatte 1. Peut-être celles de ces inscriptions qui n'ont pas encore été relevées contiennent-elles le nom de Hâla, et nous aideront-elles un jour à déterminer s'il était ou non le même que Çalivahana; cette question nous est heureusement indifférente pour le moment, puisque le seul point que nous avons voulu établir, c'est que le roi, quel qu'il soit, auquel est attribué le recueil du Saptaçataka, appartenait au Mâhârâshtra, c'està-dire au pays même où et dans la langue duquel ces vers ont été composés.

Le måhârâshtri était jusqu'ici plus connu par la grammaire de Vararuci que par des textes; quelques stances éparses dans les drames, quelques autres citées dans les traités de rhétorique, surtout dans le Kavyaprakâça de Mammața, tels étaient les seuls spécimens que nous en possédions. Les trois cent cinquante-six vers du Saptaçataka édités par M. Weber en ont plus que triplé le nombre. Nous sommes mieux à même maintenant d'apprécier le caractère de ce dialecte célèbre, placé par les Indiens au-dessus de tous les autres. Si par l'orthographe il est très-semblable, souvent tout à fait identique au çaurasenî, il en diffère assez notablement par la grammaire et le dictionnaire, et chose remarquable, dans la plupart des cas, il s'éloigne en même temps du sanskrit. Beaucoup de formes et de mots qui, en çaurasenî, sont pour ainsi dire calqués sur le sanskrit, sont remplacés en mâhârâsh!rî par des flexions et des termes inconnus au sanskrit, ou bien dont on ne trouve les analogues que dans l'usage védique. Ces traces d'archaïsme, soigneusement relevées par M. Weber, attestent l'époque reculée à laquelle le mâbârâshtrî a acquis une existence indépendante parmi les dialectes âryens; mais elles ont, pour le point de vue auquel nous nous plaçons, un autre intérêt, elles mettent

L'orthographe marhatte, usitée dans les ouvrages européens, est trèslégitime; elle vient de la forme çauraseni marahaṭṭa (Colebrooke, Misc. Essays, II, 90; Bálarâmáyaṇa, p. 72), par l'intermédiaire de l'hindûstânî, où elle se prononce régulièrement marhaṭṭ.

hors de doute le type local de la langue du Saptaçataka. Beaucoup de ces idiotismes, en effet, ont subsisté jusqu'à nos jours, malgré les profonds changements que le temps a apportés dans la structure grammaticale et dans le vocabulaire du mahârâshtri, et ils n'ont pas cessé de contribuer à donner au marathi moderne sa physionomie particulière, qui le distingue des langues voisines'.

en

î

Ainsi le gérondif en ûna s'est maintenu dans le marâthi; les langues voisines, au contraire, le gujarati et l'hindûstânî, se servent encore de l'ancien gérondif çaurasenî en ia2. Ainsi encore le mâhârâshtrî possédait un thème féminin pour les démonstratifs et relatifs. C'est un des pronoms traits les plus saillants du marathi, puisque cela lui a permis de conserver la distinction des genres dans les pronoms, distinction qui n'est plus possible dans les langues voisines, la nuance de quantité à l'aide de laquelle elles l'exprimaient autrefois, à l'exemple du sanskrit, s'étant effacée avec le temps.

Voici maintenant des exemples de mots spéciaux au mâhârâshțrì, avec leurs dérivés marathi, et leurs correspondants dans les deux langues limitrophes, le gujarâlî et l'hindûstânî.

Ghep «prendre, saisir,» ; le gérondif à, seul usité aujourd'hui, est déjà cité par Bhâmaha (Var. Iv, 23). Ce verbe, un des plus indispensables aux langues modernes, tant par sa signification que par les locutions où il entre, est exprimé en gujarâtî et en hindûstânì par le-vum, le-nâ, qui viennent du sanskrit labh.

1 Non-sculement marâțhí est la forme moderne et indigène du sanskrit mâhârâshṭrî, mais l'idiome littéraire et poétique des Marhattes s'appelle encore aujourd'hui le prâkrit marâțhî.

2 Mutatis mutandis; ia est devenu régulièrement i, lequel, en hindûstânî, s'abrége et disparaît même complétement dans la prononciation, excepté en poésie. De même ûņa, en marâhî, est prononcé ûn, excepté en poésic. Il est à peine nécessaire de faire remarquer que cette forme en ûná est proprement pour dûṇa, tûṇa, tlûṇa, tvânam, et que c'est son emploi exclusif (et non la forme elle-même) qui est spécial au pays.

[ocr errors]

Dap « montrer, aшi; ne se retrouve pas ailleurs qu'en marathi. On voit par là que M. Weber a été ma! inspiré d'écrire deux fois dîp, contre l'autorité du manuscrit du Saptaçataka et des éditions du Kâvyaprakâça. On rencontre encore ce verbe dans trois vers mâhârâshtri de la Ratnávalî (édit. Calcutta, p. 88, 89, 90); le premier de ces exemples y est, il est vrai, méconnaissable, et doit être sans doute restitué ainsi :

धरणीए मीत्रंको श्राश्रासे महिश्ररो तले जलणो ।

मम्मि पोसो दाविज्जर देहि श्राणतिं ॥

[ocr errors]

« Ordonne, et l'on te montrera la lune sur la terre, la montagne en l'air, le feu dans l'eau, le soir en plein jour. Le texte porte, sans parler des autres fautes, ¿ā faз et le commentaire. La comparaison avec les deux autres vers, où l'on lit ¿âfî, expliqué par ¿, ne peut laisser aucun doute sur la légitimité de cette correction..

Dhú « laver,» yaûi, yûi; guj. dho-vum, hind. dho-nâ, du sansk, dhav.

पुसणें,

Puch, pus « balayer, effacer, » qui, hind. pûnch-nâ et ponch-ná, qui correspondent à púmch et paumch du sanskrit. buddhique 1. Le changement de ch en s est devenu de règle en marâțhî. Ainsi le même verbe ga signifie aussi «demander, >> comme venant du mâlârâshtrî pucch; ¤¤Â¡ «être, rester, » vient de acch qui a le même sens, et qui est cité par Vararuci comme spécial au çaurasenî, bien qu'il soit également usité en mâhârâshtrî. Il est devenu verbe auxiliaire en gujarâtî, en bengali, en oriya, etc. et n'est par conséquent

Le scholiaste du Saptaçataka donne de ce mot une étymologie sanskrite (pra uñch) très-vraisemblable; de même celle qu'a proposée M. Weber pour ghep (grah). Il est aussi plus que probable que dap vient d'un causal populaire de darç, qui se confondrait au moins pour la forme avec darp, «être fier» (se montrer), et auquel il faudrait rattacher darpana «miroir »> (ce qui montre). Mais nous n'avons pas à nous occuper ici d'étymologie.

pas une forme locale. L'exemple suivant présente aussi le changement de ch en s.

Chip « toucher,» aaùi. Guj. chu-vum, hind. chû-nâ, viennent du sanskrit chup.

[ocr errors]

Vud plonger, зui. Le guj. et l'hind. se servent de ḍub-vum̃, dûb-nâ, qui se trouve déjà dans la Mṛcchakațikâ (éd. Stenzler, p. 162), ḍubbantam (cândâlî).

Bhan « parler, »ui. M. Weber remarque justement que ce verbe est rare en sanskrit; il ne se trouve dans ce sens ni en gujarâti, ni en hindûstânì; il y est remplacé par bol-vum, bol-na, qui appartient, du reste, à toutes les langues modernes'; mais en marathi, qui est de beaucoup l'expression la plus usitée. Le gérondif correspond au sanskrit iti, et bhaniûna, abrégé bhanium, a plusieurs fois ce sens dans le Saptaçataka.

Sáh « dire,». Aux exemples fournis par le Saptaçataka, on peut ajouter celui qui est donné par Bhâmaha (Var. IX, 2): hum sâhasu (et non sâhusu) sabbhâvam « allons! dis la vérité. Ce verbe est tout à fait spécial au marâțhî. L'orthographe moderne rend le h par g, comme dans singh (sim̃ha « lion »), singala, n. pr. d'où nous avons fait cingalais. C'est ainsi que зû¡ « brûler » vient de dah mâhârâshțrî, dah

sanskrit.

ci

Il est moins aisé de citer des noms que des verbes, parce qu'ils sont par leur nature plus susceptibles de se communiquer d'un pays à l'autre. Ainsi, des substantifs tels que khilla «boue,» sippi « coquille, » baïlla « taureau, » heṭṭha «le dessous, » et une foule d'autres qui se retrouvent dans presque toutes les langues modernes, ne sauraient nous servir d'exemples; ce sont, comme les verbes acch «rester,» khuḍ « briser, » surusur « gronder, » tharahar « trembler, » des formes vulgaires, mais non locales. Poṭṭha « ventre » a bien donné

D

1 On trouve déjà bollâmo dans la Mṛcchakaṭiká (p 105), et bahubollaka, «grand parleur, » en sanskrit buddhique.

a, mais on trouve déjà poța en mâgadhî (Mṛcch. 112), et il n'est inconnu ni au gujarâlî, ni à l'hindûstânì, bien qu'il n'y soit pas aussi fréquent que peț. Pîlaa « petit d'un oiseau ou d'un animal1» est devenu ~; mais c'est un mot dràvidien 2. Runda « large» (M. Weber lit tudda) est probablement le maráthi रुंद.

Citons enfin la particule cia ou cea, écrite aussi ccia ou ccea, qui correspond au sanskrit eva, et est, par suite, d'un usage très-fréquent. M. Weber l'a partout corrigée en via, vea, vvia, vvea. Cependant le manuscrit porte presque constamment un et non un ; cette leçon est aussi celle de la plupart des manuscrits de Vararuci (1x, 3) et de ceux de la Prakṛtasanjivani et de Hemacandra, consultés par M. Cowell. Ce qui est tout à fait décisif, c'est que cette particule subsiste en marathi, sous la forme (prononcé et s'appuyant sur la voyelle précédente). Le sens est exactement le même que celui du mâhârâshtrî (c)cia, (c)cea, ce qui ne permet pas de la confondre avec le sanskrit ca, qui a d'ailleurs complétement disparu. En poésie, où les voyelles finales ne sont jamais muettes, on l'écrit généralement fout. Elle se retrouve également en gujarâtî, sous la forme j (1), qui vient de cia, comme de ccia. Mais elle est inconnue à l'hindûstânî, où elle est remplacée par bhî, hî, î, qui viennent de pi hi, pour api hi. Un vers mâhârâshṭrî de la Mṛcchakațika (p. 104) présente à la fois, dans le premier hémistiche, bi hi, et, dans le second, cia, donné par les manuscrits, et que M. Stenzler s'est bien gardé de changer en via. Quant a via, c'est, d'après Vararuci, un des synonymes du sanskrit iva; on en trouve au moins un exemple tout à fait certain au premier vers du Saptaçataka, et plusieurs dans l'ap

1

Comme l'explique fort bien le commentateur, et non pas Häuflein comme le propose M. Weber. Le á long provient du mot suivant árakkhaṇa. 2 Les changements phonétiques non autorisés par la grammaire prâkrite, que nous avons constatés plus haut, la substitution de s à ch, l'expression de h par g, la chute de l'aspiration, appartiennent également aux langues drâvidiennes.

« ZurückWeiter »